L'Autre...

« Si une démocratie se met en tête d’éliminer des pensées jugées déviantes en se donnant les moyens de dissoudre les groupes ou les mouvements qui les représentent, si elle se lance dans la diabolisation de l’autre, voire dans une véritable tentative de criminalisation, c’est contre ses propres fondements qu’elle agit alors, insidieusement.
 L’Etat s’en retourne du côté du dogme sous la forme apparemment feutrée de la norme. On en arrive à toute une série de contradictions, jusqu’à restreindre la liberté de conscience au nom de la défense des libertés ! Et cela, parce qu’on n’a pas su préserver la distinction radicale entre d’une part les délits et les crimes et d’autre part le champ immense de l’expérience humaine. Il ne saurait y avoir de délit d’appartenance. L’originalité de la pensée n’est pas une déviance et l’Etat n’a pas à imposer une doctrine philosophique dominante aux citoyens. Une croyance, si excentrique soit-elle, a droit de cité du moment que ses partisans respectent les lois de leur pays. Toute pensée doit pouvoir s’exercer librement, même si elle est minoritaire et même si elle est nouvelle ... 
... Sous couvert de dresser un constat, elle ne fait rien d’autre que sonner le tocsin. Elle crie au loup. Elle suit en cela malheureusement les voies les plus traditionnelles, et son procédé nous est connu comme le loup blanc : désigner un autre et projeter sur lui tout le mal possible, afin de le stigmatiser aux yeux de tous puis de le chasser au loin. Les notions de pullulement, de grouillement, d’invasion, d’infiltration sont les piliers du racisme ordinaire. Et c’est en cela que nous dirions que les parlementaires, tout en se posant une bonne question, se sont engagés sur des voies périlleuses en essayant d’y répondre. Ils n’ont pas vu qu’ils maniaient alors un discours tristement chargé – un discours à haute teneur explosive. Fabriquer un autre et le désigner en tant qu’autre aux yeux du peuple, c’est ouvrir la boite de Pandore de toutes les haines en attente. C’est, en quelque sorte – et nous verrons ici l’ironie du vocabulaire – en appeler aux vieux démons de l’intolérance. » 

Bernard Lempert Philosophe et Thérapeute

« Si une démocratie se met en tête d’éliminer des pensées jugées déviantes en se donnant les moyens de dissoudre les groupes ou les mouvements qui les représentent, si elle se lance dans la diabolisation de l’autre, voire dans une véritable tentative de criminalisation, c’est contre ses propres fondements qu’elle agit alors, insidieusement.
L’Etat s’en retourne du côté du dogme sous la forme apparemment feutrée de la norme. On en arrive à toute une série de contradictions, jusqu’à restreindre la liberté de conscience au nom de la défense des libertés ! Et cela, parce qu’on n’a pas su préserver la distinction radicale entre d’une part les délits et les crimes et d’autre part le champ immense de l’expérience humaine. Il ne saurait y avoir de délit d’appartenance. L’originalité de la pensée n’est pas une déviance et l’Etat n’a pas à imposer une doctrine philosophique dominante aux citoyens. Une croyance, si excentrique soit-elle, a droit de cité du moment que ses partisans respectent les lois de leur pays. Toute pensée doit pouvoir s’exercer librement, même si elle est minoritaire et même si elle est nouvelle ... 
... Sous couvert de dresser un constat, elle ne fait rien d’autre que sonner le tocsin. Elle crie au loup. Elle suit en cela malheureusement les voies les plus traditionnelles, et son procédé nous est connu comme le loup blanc : désigner un autre et projeter sur lui tout le mal possible, afin de le stigmatiser aux yeux de tous puis de le chasser au loin. Les notions de pullulement, de grouillement, d’invasion, d’infiltration sont les piliers du racisme ordinaire. Et c’est en cela que nous dirions que les parlementaires, tout en se posant une bonne question, se sont engagés sur des voies périlleuses en essayant d’y répondre. Ils n’ont pas vu qu’ils maniaient alors un discours tristement chargé – un discours à haute teneur explosive. Fabriquer un autre et le désigner en tant qu’autre aux yeux du peuple, c’est ouvrir la boite de Pandore de toutes les haines en attente. C’est, en quelque sorte – et nous verrons ici l’ironie du vocabulaire – en appeler aux vieux démons de l’intolérance. »

Bernard Lempert Philosophe et Thérapeute

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