Un mois après
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/04/2021
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Voilà donc un mois que nous sommes arrivés dans notre nouvelle maison.
4300 mètres carrés de terrain avec un puits, une maison principale, une deuxième petite maison à finir de rénover, une grange de cent mètres carrés avec dalle en béton, un immense abri pour le bois de chauffage. Un ancien potager, une serre à rénover, des arbres fruitiers matures.
On commence les journées à 9 h et on arrête à 17 h. Et c'est que du bonheur. On a entamé un "cahier du jour" où on écrit tout ce qu'on fait, avec les dates. C'est important pour le suivi des travaux au jardin. En un mois, on a écrit quelque chose tous les jours :)
On est la dernière propriété d'un hameau avec dix-sept habitants à l'année. Il y a deux ans, ils n'étaient que sept. Juste pour montrer l'importance du mouvement des citadins vers les campagnes.
Nous sommes à 600 mètres d'altitude, la première ville est à dix minutes, (1400 habitants) la première grande ville qui est également la préfecture est à 30 minutes (13 000 habitants).
Une de nos voisines travaille dans l'immobilier et confirme ce que nous avons connu lorsque nous cherchions cette maison : le boom de l'immobilier vers les campagnes est phénoménal. Il n'y a d'ailleurs quasiment plus aucune maison à vendre sur le secteur. Les prix ne cessent de grimper et les artisans du secteur sont débordés de travail. Toutes les anciennes maisons qui ont été rachetées ont besoin d'eêtre rénovées et il n'y a pas assez de professionnels du bâtiment pour répondre aux demandes. Bien évidemment que l'éducation nationale porte une grande part de responsabilité dans cette pénurie de travailleurs. Déjà, lorsque j'étais lycéen, les filières professionnelles étaient considérées comme des voies de garage, des filières de misère, juste bonnes à récupérer les élèves qui ne pouvaient pas suivre la voie royale du BAC général. Pitoyable désastre. Mais de toute façon, qu'est-ce qu'on pourrait trouver de positif dans l'historique de l'éducation nationale depuis quarante ans ?...
Une particularité ici, c'est le silence. Et on réalise à quel point le bruit humain est un phénomène que nous ne supportions plus. On entend parfois une tronçonneuse, une tondeuse, une voiture qui passe sur la petite route (dix voitures par jour, c'est un grand maximum). Le chant des oiseaux est un fond sonore constant. Ils sont chez eux dans le jardin et notre présence ne les gêne aucunement. Ils sont près de nous et chantent.
La nature n'est pas silencieuse. C'est le bruit humain qui vient couvrir la vie qui s'y trouve. Combien d'humains dans leur environnement n'entendent plus les oiseaux, ne connaissent plus le silence, c'est à dire en fait, le bruissement de la vie naturelle ? L'accoutumance à ce bruit humain est une abomination mais bien pire encore, c'est le fait d'accepter de ne plus entendre vivre la nature. C'est une caractéristique de l'humain d'ailleurs d'être capable de s'adapter au pire en croyant que c'est raisonnable. Ce mouvement d'un nombre de plus en plus important de gens vers une autre vie est un mouvement qui ne s'arrêtera plus. On a eu une discussion avec le maire de la commune et il nous disait qu'ils sont prêts à accueillir davantage de monde et à faire évoluer les services inhérents mais pas au détriment de cette qualité de vie que tous ici sont venus chercher depuis bien logtemps et ne veulent surtout pas perdre.
Les nuits étoilées sont dignes de celles qu'on trouve en altitude. Aucune poluution lumineuse. Le ciel est un joyau.
Une chouette, "l'aboiement" d'un chevreuil en vadrouille, les cris des renards (ils ont un répertoire étonnant), le vent dans les feuillages. Et parfois, rien du tout. Rien, absolument rien. Il semble qu'ici, les lignes aériennes sont aussi vides que les routes départementales. Même en l'air, personne ne passe :)
On a rencontré nos voisins et certains d'entre eux sont là pour les mêmes raisons que nous : l'autonomie. Une vision identique de nos sociétés consuméristes. Tous sont là pour la même chose, un élément incontournable : la paix, la tranquillité, le silence, une vie simple d'où les attirances de la ville sont exclues. Tout le monde récupère, farfouille, stocke, répare, recycle, bricole. Il existe une réelle solidarité, le sens de la communauté, le partage. On nous a donné des oeufs, des graines et on a donné nos confitures et un peu de tout ce qu'on a récupéré dans cette maison. La propriété était meublée, la grange était remplie d'outils et de tas de matériaux. Tout ne nous servira pas. Alors, on partage. Et tout le monde en fait autant.
Cette vie rythmée par nos travaux nous a considérablement "coupés" du monde. On ne savait même pas qu'il y avait un nouveau confinement :) On réalise en vivant ici avec cette activité quotidienne tournée vers le terrain et les divers travaux dans la maison à quel point la vie sociale entretient un envahissement intérieur, une sorte de contamination, une dérive de pensées. C'est ça aussi la vie de retraités. Une retraite sociale, un éloignement, une distanciation, un choix volontaire d'activités et c'est un immense bonheur, un profond soulagement.
Lorsque j'ai appris qu'il y avait un nouveau confinement, je suis allé fouiller sur internet et de tout ce que j'ai lu ou écouté, il y a une vidéo que j'ai trouvé intéressante. Je me demande effectivement si l'espérance de sortir un jour de cette crise sanitaire n'est pas une illusion. Ce qui est certain, en tout cas, c'est que l'impact économique sera gigantesque et il serait risible de prétendre pouvoir aujourd'hui en évaluer avec certitude les dégâts et les changements considérables que cela va engendrer.
Pour notre part, les vidéos qui nous occupent sont celles de Damien Dekarz ou de Rémi, du "jardin d'Emerveille".
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