Articles de la-haut
-
- Thierry LEDRU
- Presle
-
Jung : sur la souffrance
- Par Thierry LEDRU
- Le 23/04/2025
- 0 commentaire
Mon existence intérieure depuis mes seize ans.
LES ÉGARÉS
La deuxième hernie discale. Un sursis annulé.
Il avait trente-neuf ans. Une sciatique foudroyante, une plaie ardente courant sur sa jambe, il aurait voulu écarter les chairs et arracher le cordon brûlant, un couteau édenté planté dans le dos, des crampes comme des décharges électriques, les orteils tordus, recroquevillés, il ne contrôlait plus rien, il ne pouvait plus se lever, il rampait jusqu’aux toilettes, des jours et des nuits de pleurs, les regards impuissants de Leslie et des enfants ruisselaient en lui comme du plomb fondu, leur détresse, cette panique contenue, il se retenait de hurler, en surdose de morphine, des armées de scorpions couraient sur son ventre, déchiraient la plaie fermée de son nombril et s’enfonçaient dans les chairs, il cuisait dans des bouillons de magma où flottaient des résidus de corps, des entrailles blanchies, des femmes éventrées, des crânes brisés de bébés morts flottaient autour de lui, les yeux exorbités le fixaient horriblement, les veinules éclatées comme des réseaux de barbelés, des glaires sanguinolentes coulaient dans ses poumons, il voulait cracher mais n’en avait pas la force, il suffoquait, des scarabées voraces dévoraient son anus, dévastaient ses intestins, rejoignaient les armées de blattes qui grouillaient dans son dos et rongeaient les fibres, des tentacules de méduses enserraient son visage, il sentait parfaitement les ventouses urticantes, il étouffait, il étouffait, sans pouvoir s’enfuir, tout était dans son crâne, dans son corps violenté, la folie, la folie le gagnait, il le savait.
Il n’a rien oublié.
Il allait mourir. Aucun répit. Plus de sommeil, juste quelques plongées cauchemardesques et des réveils paniqués, le souffle haletant, les yeux écarquillés devant l’horreur qui le rongeait de l’intérieur, le membre torturé se rigidifiait inexorablement, une courbure répugnante s’installait, une arabesque figée comme une malformation dégénérative. Il ne contrôlait plus rien. Il fallait le piquer à la morphine pour que sa vessie se libère. Les reins étaient menacés.
Les dégâts de la première opération, le nerf sciatique englobé dans la fibrose, on lui parlait de paralysie définitive.
Il ne voulait pas d'une nouvelle opération, il la refusait de toutes ses forces. Son seuil de résistance était déjà loin derrière lui. Il avançait en terrain inconnu comme un soldat abandonné qui sent venir la fin. Mais veut y croire encore.
Quand Leslie partait au travail et les enfants à l’école, qu’il se retrouvait seul dans la maison silencieuse, il songeait au suicide.
La mort n’avait aucune importance au regard de la délivrance. Avaler toute les boîtes de morphine, sombrer dans le coma et partir, libérer les êtres aimés. La douleur du cimetière s’atténuerait. Ils continueraient à vivre sans lui.
Finir dans un fauteuil roulant condamnait Leslie et les enfants à un calvaire.
Il ne sait pas ce qui a retenu son geste.
Il devinait parfois des regards attendris, des mots susurrés dans le caveau morbide de sa détresse, une voix apaisante qui lui parlait de patience, de confiance, d’un cheminement obligatoire.
Ces ressentis étranges validaient en lui l’avancée insatiable de la folie, il n’en parlait à personne. Parfois pourtant, lorsque le fil ténu de sa résistance cédait, il s’y abandonnait, acceptait l’offrande et puisait quelques instants de paix, juste assez pour tenir, quitter quelques secondes le champ de ruines où il agonisait.
Il imaginait des bénédictions d’anges gardiens, des êtres éveillés qui le guidaient dans les méandres de son calvaire.
Comment aurait-il pu en parler ?
Il s’arrête. Les larmes coulent, comme un trop plein qui jaillit, un barrage qui s’écroule.
Tant de douleurs.
La détresse de Leslie. Elle avait dû tenir, tout gérer, ne pas sombrer, elle s’était montrée indestructible, sans faille, d’une solidité granitique, elle n’avait jamais pleuré devant lui, elle avait pourtant dû le faire, ça n’était pas possible de résister aussi longtemps sans s’accorder une pause.
Tout ce qu’il lui doit. Et tout ce qu’elle porte. Il sait que ce fardeau est toujours en elle, que la peur ne la quitte pas, que ce cauchemar ne s'éteint pas les yeux ouverts, il est toujours là, dans une mémoire tenace.
Cette dégradation avilissante, cet envasement dans la boue brûlante des souffrances, ce temps perdu, anéanti, sali, il imagine la tumeur vivace qui entretient les souvenirs comme des ferments toxiques. La peur, la souffrance, la déchéance physique, la dépression, les larmes, les cris, la tentation de la mort.
Il sait aujourd'hui à quel point les marques sur son visage ne sont pas les empreintes de ses rires mais bien au contraire les sillons de ses douleurs.
Un matin, après une nuit entière de combats, il s'était aperçu qu'il ne parvenait plus à détendre son visage. Il n'était plus qu'un masque de cire durcie. Il avait demandé un miroir à Leslie.
C'est son reflet qui l'avait convaincu.
Il était comme un mort aux yeux atterrés.
Un chirurgien l’avait reçu, le spécialiste de la région, des colonnes vertébrales à la chaîne.
Il était allongé sur une civière, les ambulanciers étaient passés le prendre, Leslie l’accompagnait, elle avait parlé à sa place, il pleurait, incapable de prononcer autre chose qu’un gémissement épuisé, les sanglots étranglés de ses suppliques.
Qu’on en finisse. Il voulait qu’on l’opère.
S’il se réveillait paralysé, il sauterait par la fenêtre, il y arriverait, les gestes étaient en lui, il en aurait la force, ça serait fini, rien d’autre à faire, il ne voulait pas condamner Leslie, elle apprendrait à vivre sans lui et son amour de la vie la sauverait, il en était persuadé.
Il voulait qu’on l’opère.
Il avait fini par le crier, par implorer l’homme en blanc, ça n’était plus possible, il allait imploser.
Il n’était que douleur.
La deuxième hernie discale. Un sursis annulé.
Il avait trente-neuf ans. Une sciatique foudroyante, une plaie ardente courant sur sa jambe, il aurait voulu écarter les chairs et arracher le cordon brûlant, un couteau édenté planté dans le dos, des crampes comme des décharges électriques, les orteils tordus, recroquevillés, il ne contrôlait plus rien, il ne pouvait plus se lever, il rampait jusqu’aux toilettes, des jours et des nuits de pleurs, les regards impuissants de Leslie et des enfants ruisselaient en lui comme du plomb fondu, leur détresse, cette panique contenue, il se retenait de hurler, en surdose de morphine, des armées de scorpions couraient sur son ventre, déchiraient la plaie fermée de son nombril et s’enfonçaient dans les chairs, il cuisait dans des bouillons de magma où flottaient des résidus de corps, des entrailles blanchies, des femmes éventrées, des crânes brisés de bébés morts flottaient autour de lui, les yeux exorbités le fixaient horriblement, les veinules éclatées comme des réseaux de barbelés, des glaires sanguinolentes coulaient dans ses poumons, il voulait cracher mais n’en avait pas la force, il suffoquait, des scarabées voraces dévoraient son anus, dévastaient ses intestins, rejoignaient les armées de blattes qui grouillaient dans son dos et rongeaient les fibres, des tentacules de méduses enserraient son visage, il sentait parfaitement les ventouses urticantes, il étouffait, il étouffait, sans pouvoir s’enfuir, tout était dans son crâne, dans son corps violenté, la folie, la folie le gagnait, il le savait.
Il n’a rien oublié.
Il allait mourir. Aucun répit. Plus de sommeil, juste quelques plongées cauchemardesques et des réveils paniqués, le souffle haletant, les yeux écarquillés devant l’horreur qui le rongeait de l’intérieur, le membre torturé se rigidifiait inexorablement, une courbure répugnante s’installait, une arabesque figée comme une malformation dégénérative. Il ne contrôlait plus rien. Il fallait le piquer à la morphine pour que sa vessie se libère. Les reins étaient menacés.
Les dégâts de la première opération, le nerf sciatique englobé dans la fibrose, on lui parlait de paralysie définitive.
Il ne voulait pas d'une nouvelle opération, il la refusait de toutes ses forces. Son seuil de résistance était déjà loin derrière lui. Il avançait en terrain inconnu comme un soldat abandonné qui sent venir la fin. Mais veut y croire encore.
Quand Leslie partait au travail et les enfants à l’école, qu’il se retrouvait seul dans la maison silencieuse, il songeait au suicide.
La mort n’avait aucune importance au regard de la délivrance. Avaler toute les boîtes de morphine, sombrer dans le coma et partir, libérer les êtres aimés. La douleur du cimetière s’atténuerait. Ils continueraient à vivre sans lui.
Finir dans un fauteuil roulant condamnait Leslie et les enfants à un calvaire.
Il ne sait pas ce qui a retenu son geste.
Il devinait parfois des regards attendris, des mots susurrés dans le caveau morbide de sa détresse, une voix apaisante qui lui parlait de patience, de confiance, d’un cheminement obligatoire.
Ces ressentis étranges validaient en lui l’avancée insatiable de la folie, il n’en parlait à personne. Parfois pourtant, lorsque le fil ténu de sa résistance cédait, il s’y abandonnait, acceptait l’offrande et puisait quelques instants de paix, juste assez pour tenir, quitter quelques secondes le champ de ruines où il agonisait.
Il imaginait des bénédictions d’anges gardiens, des êtres éveillés qui le guidaient dans les méandres de son calvaire.
Comment aurait-il pu en parler ?
Il s’arrête. Les larmes coulent, comme un trop plein qui jaillit, un barrage qui s’écroule.
Tant de douleurs.
La détresse de Leslie. Elle avait dû tenir, tout gérer, ne pas sombrer, elle s’était montrée indestructible, sans faille, d’une solidité granitique, elle n’avait jamais pleuré devant lui, elle avait pourtant dû le faire, ça n’était pas possible de résister aussi longtemps sans s’accorder une pause.
Tout ce qu’il lui doit. Et tout ce qu’elle porte. Il sait que ce fardeau est toujours en elle, que la peur ne la quitte pas, que ce cauchemar ne s'éteint pas les yeux ouverts, il est toujours là, dans une mémoire tenace.
Cette dégradation avilissante, cet envasement dans la boue brûlante des souffrances, ce temps perdu, anéanti, sali, il imagine la tumeur vivace qui entretient les souvenirs comme des ferments toxiques. La peur, la souffrance, la déchéance physique, la dépression, les larmes, les cris, la tentation de la mort.
Il sait aujourd'hui à quel point les marques sur son visage ne sont pas les empreintes de ses rires mais bien au contraire les sillons de ses douleurs.
Un matin, après une nuit entière de combats, il s'était aperçu qu'il ne parvenait plus à détendre son visage. Il n'était plus qu'un masque de cire durcie. Il avait demandé un miroir à Leslie.
C'est son reflet qui l'avait convaincu.
Il était comme un mort aux yeux atterrés.
Un chirurgien l’avait reçu, le spécialiste de la région, des colonnes vertébrales à la chaîne.
Il était allongé sur une civière, les ambulanciers étaient passés le prendre, Leslie l’accompagnait, elle avait parlé à sa place, il pleurait, incapable de prononcer autre chose qu’un gémissement épuisé, les sanglots étranglés de ses suppliques.
Qu’on en finisse. Il voulait qu’on l’opère.
S’il se réveillait paralysé, il sauterait par la fenêtre, il y arriverait, les gestes étaient en lui, il en aurait la force, ça serait fini, rien d’autre à faire, il ne voulait pas condamner Leslie, elle apprendrait à vivre sans lui et son amour de la vie la sauverait, il en était persuadé.
Il voulait qu’on l’opère.
Il avait fini par le crier, par implorer l’homme en blanc, ça n’était plus possible, il allait imploser.
Il n’était que douleur.
-
Explorer la conscience
- Par Thierry LEDRU
- Le 19/04/2025
- 0 commentaire
Des recherches qui me passionnent depuis bien longtemps. Mon frère, annoncé par les médecins comme "cliniquement mort", m'a raconté des souvenirs qui relèvent de l'inexplicable.
Quant à moi, j'ai connu un état de conscience modifiée pendant lequel des entités mouvantes sont venues me parler, des propos si complexes et en même temps si raisonnés qu'ils ne pouvaient pas être issus d'une hallucination.
J'ai souvent parlé des états de conscience modifiée dans mes romans. "Là-Haut", "A coeur ouvert", "Vertiges", "Jusqu'au bout", "Noirceur des cimes", "Kundalini" puis maintenant dans la suite de "Les héros sont tous morts".
J'espère vivre assez vieux pour qu'enfin, la science reconnaisse que la conscience n'est pas une entité finie, dépendante de l'individu. Elle est bien plus.
Des liens vers d'autres articles :
NDE, expérience de mort approchée. (spiritualité/mort)
"Des témoignages troublants qui bousculent" : des expériences de mort imminente relancent les débats scientifiques
Écrit par Mélanie Philips
Publié le 30/03/2025 à 06h05
Depuis plus de 20 ans, Sonia Barkallah enquête sur les expériences de mort imminente. Son docu-fiction Témoins explore ces récits troublants, interrogeant scientifiques et témoins pour relancer le débat.
Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
votre adresse e-mail
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité
Un homme dans le coma qui décrit une pièce secrète d’un hôpital, un aveugle qui décrit physiquement le personnel qui s’occupe de lui, une personne qui décrit ce qui se dit dans la pièce à côté… Tous ces témoignages d’expérience de mort imminente (EMI) sont à retrouver dans le docu-fiction Témoins, de Sonia Barkallah, réalisatrice de Berre l’étang (13).
"Je me suis retrouvée à flotter dans ma chambre"
Depuis plus de vingt ans, Sonia Barkallah s’intéresse à cette thématique des EMI. Dès son plus jeune âge, elle se questionne sur la vie et la mort. Puis son parcours est marqué par plusieurs événements forts. Âgée de 11 ans, elle perd son grand-père et sa tante lui recommande alors la lecture du livre La Vie après la vie de Raymond Moody, pionnier de l’étude des EMI. "Ces témoignages m’avaient fait beaucoup de bien", confie la réalisatrice avant de poursuivre.
A 14 ans, j’ai vécu une expérience similaire à une EMI. Je me suis retrouvée à flotter dans ma chambre, en voyant ma chambre vue de haut, avec une expérience très particulière avec la chaîne hi-fi.
Sonia Barkallah, réalisatrice du film Témoins
Mais le véritable déclic a lieu en 1999. En proie à une grave dépression, elle envisage de mettre fin à ses jours. C'est alors qu'elle tombe par hasard sur un documentaire composé uniquement de témoignages d’EMI. Ces récits bouleversants la touchent en plein cœur et la sortent littéralement de la dépression. "Ça m'a fait un bien fou ! Je me revois encore pleurer à chaudes larmes. Les témoignages étaient sincères et authentiques. Ils m'ont fait renoncer à me suicider et ils ont suscité ma vocation de devenir réalisatrice", raconte-t-elle.
"Jusqu’à ce que les arguments manquent"
Sonia rencontre scientifiques et témoins et cela donne naissance à son premier film, Faux départ, en 2010. Comme vous l’aurez compris, l’aventure ne s’est pas arrêtée là pour la réalisatrice. "Avec Témoins, j’ai voulu rendre ce qui m’a été donné", avoue Sonia Barkallah. Sauf que cette fois, elle accorde une importance particulière à la valeur d’un témoignage corroboré. "Quelle est la valeur d’un témoignage aux yeux de scientifiques, surtout quand celui-ci est corroboré par des tierces personnes ou du personnel soignant ?", interroge-t-elle.
Neuroscientifiques, psychiatres, psychologues, convaincus, septiques… Sonia rencontre des scientifiques de tout bord. "Cette diversité est très importante. Aujourd’hui, un documentaire objectif qui fait parler les différents points de vue, malheureusement ça n’existe plus, regrette-t-elle. Cette thématique suscite beaucoup de débats passionnants et passionnés." Le documentaire est construit comme une enquête policière, où chaque argument trouve une contrepartie.
Elle détaille que lorsqu’un scientifique estime que les EMI pourraient être des hallucinations, elle présente des témoignages d’aveugles de naissance ayant décrit des scènes visuelles impossibles pour eux. Si l'on parle d'hallucinations auditives, elle montre des cas de personnes sourdes ayant perçu des sons. Des exemples, "jusqu’à ce que les arguments manquent".
Sonia, elle, de par son expérience et ce dont elle a été témoin, pense que la conscience peut fonctionner indépendamment du cerveau.
je me laisse aussi cette possibilité que la science n'a pas tous les outils aujourd'hui pour expliquer ce phénomène.
Sonia Barkallah, réalisatrice du film Témoins
Car pour l’instant, d’un côté comme de l’autre, il n’y a aucune preuve de quoi que ce soit. "Cependant, c'est intéressant de voir des témoignages inédits, des témoignages vraiment troublants qui bousculent."
"Sortir du caractère paranormal et ésotérique"
L'objectif de Sonia Barkallah n'est pas de prouver l’après-vie, mais d'ouvrir un véritable débat scientifique et de pousser la recherche à explorer ces phénomènes encore inexpliqués. Il n’est pas non plus question d’imposer sa propre conviction, mais de laisser aux téléspectateurs le soin d’avoir leur opinion personnelle. Des faits, rien que des faits. "Le but, c’est d’arriver à co-construire, ensemble, un dispositif scientifique qui permettra peut-être de trancher sur cette éternelle question", déclare-t-elle.
Est-ce que ces expériences sont des hallucinations ou, au contraire, laissent-elle accès à une autre réalité ?
Sonia Barkallah, réalisatrice du film Témoins
Au fil des projections, le film Témoins bouleverse le public.Il apporte un apaisement aux personnes ayant perdu un proche, aide ceux qui ont vécu une EMI à se sentir compris, et suscite l'intérêt du corps médical. Plusieurs hôpitaux, dont l'hôpital Henri-Laborit, ont demandé à projeter le film pour leurs soignants. "C'est super, parce que mon but était aussi de sortir du caractère paranormal, ésotérique et New Age."
"Loin de toute pseudoscience"
Sonia Barkallah a même été invitée en Inde par un chef de service hospitalier pour présenter son film à des psychiatres. Cette tournée l'amène à partager ses recherches en Belgique, en Espagne, aux États-Unis, au Canada, en Allemagne et même en Iran et en Chine. "Mon travail repose sur des études publiées dans des revues scientifiques sérieuses à comité de lecture, loin de toute pseudoscience." Pour elle, tout cela montre le caractère universel des expériences de mort imminente et de l'intérêt que les chercheurs leur portent.
En attendant que la recherche avance, Sonia Barkallah continue son chemin, portée par l'émotion et la gratitude du public. "Mon rôle de réalisatrice, c'est de provoquer des émotions et d'apporter quelque chose aux gens. Et ça, c'est magnifique." Pour y arriver et pour toucher le plus de personnes possible, elle a fait le choix de témoignages éclectiques. "Ça va résonner à chacune des personnes dans le public en fonction de leur histoire. Le film bouleverse énormément", raconte-t-elle. Actuellement en Suisse, elle raconte voir de nombreuses personnes pleurer à chaudes larmes.
Le film apaise les gens qui ont perdu des proches, fait du bien aux gens qui l'ont vécu et qui n'ont jamais osé en parler, et fait questionner des scientifiques.
Sonia Barkallah, réalisatrice du film Témoins
Exactement tout ce qu’elle recherchait. En revanche, si vous venez pour chercher une réponse, vous faites fausse route. "C’est un film qui fait se poser des questions puisqu'il ne donne pas de conclusion. Et ça, c'est important", insiste la réalisatrice.
>>> Des séances de ciné-débat vont avoir lieu à Marseille (24 avril), Cagnes-sur-Mer (25 avril) et Berre-l’Etang (27 avril).
-
Diversité fantôme
- Par Thierry LEDRU
- Le 18/04/2025
- 0 commentaire
Sachant que la population planétaire continue à croître et que l'extension humaine dans les zones naturelles ne sera jamais freinée volontairement, que restera-t-il de la biodiversité dans cent ans ?
"Nous avons été surpris par l'ampleur du résultat" : une nouvelle étude pointe l'impact majeur de l'homme sur la baisse de la biodiversité. Quand vous vous promenez en forêt en France, vous voyez en moyenne seulement 20 % des plantes que l'on pourrait observer s'il n'y avait pas d'activité humaine".
L'un des sites étudié en France. • © Christophe Carcaillet - CNRS
Contact(s)
Imprimer
Fil d'Ariane
La diversité fantôme, ou « dark diversity », révèle l’impact mondial des activités humaines sur l’érosion de la biodiversité
04 avril 2025
Résultats scientifiques
Une étude publiée dans la revue Nature, menée par l’Université de Tartu (Estonie) et impliquant plus de 200 scientifiques à travers le monde, dont plusieurs chercheurs français du CNRS, met en lumière l’effet majeur des activités humaines sur l’érosion de la biodiversité végétale. L’analyse simultanée de la diversité observée et de la diversité qui, au vu de ses caractéristiques, devrait être présente, révèle que de nombreuses espèces de plantes natives sont absentes de leurs habitats naturels, notamment dans les régions les plus impactées par l’activité humaine.
En résumé
La "diversité fantôme" désigne les espèces qui pourraient naturellement occuper un environnement en raison de leurs besoins écologiques, mais qui en sont absentes pour des raisons historiques.
Une équipe de chercheurs internationale a analysé le potentiel de la diversité végétale de plus de 5 000 sites dans le monde, en mesurant la part de diversité réellement présente, révélant l’impact inapparent des activités humaines sur la végétation.
Dans les régions fortement affectées par les activités humaines, les écosystèmes ne contiennent que 20 % des espèces qui pourraient s’y établir, contre 35 % dans les régions les moins impactées, un écart causé par la fragmentation des habitats, favorisant la part de la diversité fantôme.
La végétation naturelle est souvent dépourvue de nombreuses espèces qui pourraient y être présentes, en particulier dans les régions fortement touchées par les activités humaines. Une nouvelle étude coordonnée par des chercheurs de l’Université de Tartu (Estonie) et impliquant plus de 200 scientifiques du réseau de recherche DarkDivNet, dont des chercheurs français du CNRS, des universités PSL, Claude Bernard-Lyon 1, de Toulouse et de Bordeaux, a mis en lumière ce phénomène.
Pour réaliser cette étude, l’ensemble des espèces végétales de près de 5 500 sites répartis dans 119 régions du monde ont été recensées. Grâce à ce travail, les chercheurs ont identifié la "diversité fantôme" (dark diversity), c’est-à-dire les espèces natives susceptibles de vivre sur ces sites, mais qui en sont actuellement absentes. Cette approche permet d’évaluer le potentiel de la diversité végétale, et de mesurer la proportion de celle qui est réellement présente, soulignant l’impact inapparent des activités humaines sur la végétation.
Dans les régions fortement affectées par la présence humaine, les écosystèmes ne contiennent que 20 % des espèces qui peuvent s’y établir. Les mesures classiques de la biodiversité, comme le simple comptage d’espèces, ne détectent pas cette différence, en raison des variations naturelles qui masquent l’ampleur des conséquences anthropiques. Celles-ci peuvent être mesurées à l’aide de l’indice d’empreinte humaine, incluant la densité des populations, l’usage urbain ou agricole des terres, ainsi que les infrastructures routières et ferroviaires.
L’équipe de scientifiques révèle que la diversité d’un site se retrouve négativement influencée par cet indice et la plupart de ses composantes, dans une zone pouvant atteindre plusieurs centaines de kilomètres. Ce constat alarme sur l’étendue des conséquences des activités humaines, plus importantes qu’on ne le pensait, affectant même les aires protégées.
La pollution, l’exploitation forestière, les déchets, le piétinement et les incendies d’origine anthropique peuvent exclure certaines plantes de leurs habitats. Cependant, l’impact humain est moins prononcé lorsqu’au moins un tiers de la région environnante est naturelle, soutenant ainsi l’objectif mondial de protection de 30 % des terres de la planète.
Richesse végétale en fonction de l’empreinte humaine, sur fond de carte des sites étudiés dans le projet DarkDivNet.
Cette étude dévoile l’importance de préserver les écosystèmes au-delà des aires protégées. Le concept de diversité fantôme offre aux défenseurs de l’environnement un outil précieux pour identifier les espèces absentes pourtant adaptées à un milieu, et suivre ainsi les bienfaits de la restauration des écosystèmes.
* Le terme dark diversity se réfère à celui de dark matter, ou matière noire en français, qui est une matière hypothétique dont les scientifiques soupçonnent la présence dans l'Univers mais qui reste indétectable à ce jour.
Référence de la publication
Pärtel, M., Tamme, R., Carmona, C. P., Riibak, K., Moora, M., Bennett, J. A., Chiarucci, A., Chytrý, M., Francesco, D. B., Eriksson, O., Harrison, S., Lewis, R. J., Moles, A. T., Öpik, M., Price, J. N., Amputu, V., Askarizadeh, D., Atashgahi, Z., Aubin, I.,. . . Zobel, M. (2025). Global impoverishment of natural vegetation revealed by dark diversity. Nature. Publié le 2 avril 2025.
Laboratoires CNRS impliqués
Centre de Recherche sur la biodiversité et l’Environnement (CRBE - CNRS/IRD/Univ. Toulouse III - Paul Sabatier/Toulouse INP)
Environnements et paléoenvironnements océaniques et continentaux (EPOC, Bordeaux INP/CNRS/Univ. Bordeaux)
Laboratoire d'Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés (LEHNA - CNRS / ENTPE / Université Claude Bernard)
Contact
Auréle Toussaint
-
"Les danseurs aux pieds nus"
- Par Thierry LEDRU
- Le 18/04/2025
- 0 commentaire
Oui, j'ai espéré que la crise des taxes douanières déclenche un frein conséquent sur la mondialisation et l'énorme commerce planétaire mais je ne considère évidemment pas le cowboy comme un défenseur de la vie, de la biodiversité, de l'écologie. Tous les produits chinois destinés aux USA sont déjà en route vers l'union européenne. On n'arrête pas les cargos...
Je ne cible pas l'individu comme l'unique représentant du chantre de la croissance. En France aussi, nos politiciens ne comprennent que le langage de l'économie, de la création d'emplois, du développement.
Un exemple parmi beaucoup d'autres :
«Assez de ces danseurs aux pieds nus» : le département du Rhône coupe les subventions de trois associations environnementales
Par Antoine Sillières, Le Figaro Lyon
Publié le 18 avril 2025 à 17h40
«Ils veulent réduire les dépenses ? On va réduire les dépenses ! Ça va être vite fait», s’est emporté le président du département, Christophe Guilloteau, avant de faire voter la suppression des subventions, approuvée à la quasi-unanimité de l’assemblée. MATTHIEU DELATY / Hans Lucas via AFP
Le président du département, Christophe Guilloteau (LR), a annoncé la suppression des subventions accordées à trois associations environnementales qui avaient critiqué un projet de port de plaisance sur la commune d’Anse, le mois dernier.
Christophe Guilloteau (LR) n’a visiblement pas goûté la critique. Visé par plusieurs associations environnementales dans une lettre dénonçant l’impact écologique d’un projet de port de plaisance, le président du département du Rhône a décidé de couper les subventions accordées à trois d’entre elles pour l’année en cours. France Nature Environnement, la Ligue de Protection des Oiseaux et Arthropologia vont ainsi perdre entre 24.000 et 29.000 euros de subsides départementaux chacune. Elles ont demandé un rendez-vous avec Christophe Guilloteau à ce sujet.
Ce dernier s’est montré particulièrement véhément à la tribune du conseil départemental le 4 avril. Il a d’abord mentionné la lettre envoyée le 31 mars dernier qui demandait l’arrêt du projet de création du port du Boredelan, dans la commune d’Anse. Projet qui prévoit «l’artificialisation d’une surface équivalente à 30 terrains de football» sur une zone humide selon les associations contestataires. Un projet à 39,5 millions d’euros dont les signataires de la lettre interrogeaient le montant.
«Ils veulent réduire les dépenses ? On va réduire les dépenses ! Ça va être vite fait», s’est emporté le président du département avant de faire voter la suppression des subventions, approuvée à la quasi-unanimité d’une assemblée largement acquise à sa cause. Christophe Guilloteau a vanté un «projet économique» «soutenu par tant d’hommes et de femmes» depuis «tant d’années». «Moi, je ne suis pas prêt à ce que mes enfants mangent tous des graines et fassent de la bicyclette tous les jours», a-t-il encore lancé.
«On ne nous paie pas à rien faire les pieds nus»
«J’en ai assez de ces associations de danseurs aux pieds nus, qui viennent nous expliquer ce que nous, élus, devons faire sur nos territoires», a encore tempêté Christophe Guilloteau, annonçant une refonte du modus operandi avec les structures subventionnées. «En tant qu’association naturaliste nous sommes dans notre rôle de contrepouvoir quand on alerte sur l’impact d’un projet qui va détruire une zone humide, rétorque Hugues Mouret, directeur scientifique d’Arthropologia, dénonçant un écolo bashing simpliste. Ces zones humides sont essentielles pour la préservation du vivant et on ne sait pas les refabriquer (sic), les compensations ne sont jamais à la hauteur de ce qu’on a détruit».
À lire aussi Lyon : une plainte déposée par les écologistes contre Laurent Wauquiez après ses attaques envers l’OFB
Les trois associations sont suffisamment établies pour ne pas voir leur survie menacée par cette coupe brutale. Mais certains programmes en souffriront. Pour Arthropologia, les 24.000 euros du département servaient à financer un programme scientifique d’études sur l’activité pollinisatrice des abeilles sauvage, «donc la protection alimentaire des populations», éructe Hugues Mouret. «Il ne s’agit pas de subvention de fonctionnement, poursuit-il, on ne nous paie pas à rien faire les pieds nus». Et de préciser que l’essentiel des revenus de l’association ne provient pas de fonds publics.
Donald Trump réautorise la pêche commerciale dans un vaste sanctuaire marin de l'océan Pacifique
Créé par George W. Bush et étendu par Barack Obama, le sanctuaire abrite des récifs coralliens vierges et des espèces en danger.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
France Télévisions
Publié le 18/04/2025 08:13
Temps de lecture : 2min
Donald Trump présente le décret élargissant les droits de pêche dans le Pacifique, à la Maison Blanche; le 17 avril 2025. (BRENDAN SMIALOWSKI / AFP)
Il fait presque deux fois la taille du Texas. Donald Trump a signé un décret, jeudi 17 avril, visant à réautoriser la pêche commerciale dans un vaste sanctuaire marin situé au beau milieu de l'océan Pacifique et abritant l'un des écosystèmes les plus vulnérables au monde.
Le "Pacific Remote Islands Marine National Monument" avait été créé en 2009 par le président George W. Bush, puis largement étendu en 2014 par Barack Obama(Nouvelle fenêtre). Il comprend aujourd'hui plus de 1,2 million de kilomètres carrés d'eaux protégées, autour de sept îles et atolls de l'océan Pacifique. La pêche commerciale ainsi que l'extraction de ressources, notamment minières, y étaient jusqu'ici interdites, mais la pêche traditionnelle et de loisir continuaient d'être permise.
Selon le président américain, cette interdiction de pêche commerciale "désavantage[ait] les pêcheurs commerciaux honnêtes des Etats-Unis" en les poussant "à pêcher plus loin au large dans les eaux internationales pour rivaliser avec des flottes étrangères mal réglementées et fortement subventionnées". Et "une pêche commerciale correctement gérée ne mettrait pas en danger les objets d'intérêt scientifique et historique" protégés par le sanctuaire, a-t-il affirmé.
Des environnements marins immaculés et vulnérables
Les zones maritimes qui composent le sanctuaire abritent des récifs coralliens vierges ainsi que de nombreuses espèces en danger, parmi lesquelles des oiseaux de mer et certains requins et baleines, et figurent parmi les environnements tropicaux marins les plus immaculés et vulnérables de la planète, notamment face au changement climatique.
Autant de zones qui seront, avec ce décret, désormais en partie accessibles à la pêche commerciale. L'interdiction est ainsi levée sur de larges zones au large des îles et atolls, "pour les navires battant pavillon des Etats-Unis".
Des permis de pêche pourront également être "délivrés à des navires battant pavillon étranger pour qu'ils puissent transporter des poissons pêchés par des pêcheurs américains", est-il encore détaillé(Nouvelle fenêtre). Dans ce texte, Donald Trump demande également à son gouvernement d'"amender ou abroger toutes les réglementations contraignantes qui restreignent la pêche commerciale" dans le sanctuaire.
Depuis son retour à la Maison Blanche le 20 janvier, le républicain, ouvertement climatosceptique, s'attaque à nombre de normes environnementales et assume mener une politique de dérégulation pour favoriser l'économie.
-
L'oppression du monde humain.
- Par Thierry LEDRU
- Le 07/04/2025
- 0 commentaire
On a vendu la maison dans la Creuse et on est arrivé dans notre nouvelle région.
On avait besoin de faire des achats alimentaires et de bricolage. Comme on ne connaît pas encore le secteur et qu'on est à fond dans l'aménagement de la maison, on n'a pas cherché les magasins qu'on apprécie et on s'est juste contenté d'aller au plus près. Vingt kilomètres de route de montagne.
Zone commerciale, des voitures dans tous les sens. Quand on a vécu quatre ans dans la Creuse, on en oublie qu'il ne faut surtout pas "descendre" en ville un samedi matin... Erreur d'ermites. Et là, déjà, on a commencé à se sentir mal, oppressés.
Magasin de bricolage, on savait ce dont on avait besoin, pas question de faire toutes les allées mais quand on passe du petit magasin local en zone rurale à un magasin de bricolage de grande surface, le choc est rude. Des gens qui déambulent dans les allées, à se demander s'ils savent pour quelles raisons ils sont là. On regarde les panneaux affichés en hauteur pour trouver le rayon qui nous intéresse. On est effaré de tout ce qui est à vendre, tous les rayons débordent de produits, les allées sont étroites et à chaque extrémité, des produits "soldés" sont présentés. On finit par passer à la caisse et on s'enfuit.
Episode 2, le cauchemar. On entre dans un "hyper", incapables de retrouver dans nos mémoires notre dernier passage dans ce genre de lieu. Et là, c'est bien plus qu'un malaise, on bascule dans l'oppression, la sensation d'enfermement, l'étouffement. Cette profusion de produits est totalement folle, on passe au pas de charge dans les rayons boucherie, charcuterie, poissonnerie, plats préparés, des milliers d'animaux morts, des allées qui doivent faire trois kilomètres de long, avec des étagères de cent mètres de haut et des gens qui se grimpent les uns sur les autres pour attraper les produits "en promotion". Mais qu'est-ce qu'on fait là ? C'est quoi ce monde ? Qui sont tous ces gens, que font-ils là, à discuter, à regarder toutes les étiquettes, à ouvrir des compartiments, avec des caddies déjà remplis ? Et où sont les fruits et légumes ? On a juste besoin de quelques légumes. Pourquoi est-on entré ici ? C'est une jungle. Il faut qu'on sorte avant de perdre connaissance.
On avait des cartons à déposer à la ressourcerie, des objets que les anciens propriétaires ont laissés et qui ne nous serviront pas. On reprend la route, on cherche, on suit attentivement le GPS vocal sur mon smartphone, on voit en une matinée plus de monde qu'en un mois dans la Creuse...On trouve enfin le lieu, on dépose nos cartons et on s'enfuit.
La nausée.
On remonte en altitude.
On savait déjà que nous n'étions pas "normaux". Mais on n'imaginait pas que c'était à ce point-là.
-
Trump et la décroissance
- Par Thierry LEDRU
- Le 04/04/2025
- 0 commentaire
Finalement, Trump, le climatoseptique, ne sera-t-il pas le meilleur allié du climat en effondrant l'économie mondiale ?
2 400 milliards de dollars évaporés : jeudi noir à Wall Street après Trump
La Bourse de New York a connu sa pire journée depuis la crise du Covid-19. Les investisseurs craignent une guerre commerciale et une récession mondiale.
Par P.B. avec Reuters
Publié le 04/04/2025 à 02h54
Temps de lecture : 2 min
Le grand plongeon. La Bourse de New York a dévissé, jeudi, enregistrant sa pire journée depuis juin 2020, en pleine pandémie, alors que les droits de douane annoncés la veille par le président américain Donald Trump ont exacerbé les craintes d'une guerre commerciale totale et d'une récession économique à l'échelle mondiale.
Dans le détail, l’indice Dow Jones a cédé près de 4 %, soit 1 679 points, le S & P 500 a reculé de 4,8 % et le Nasdaq, l’indice des valeurs technologiques, a chuté de presque 6 %. Au total, quelque 2 400 milliards de dollars de valorisation boursière ont été effacés parmi les 500 principales entreprises cotées.
Les Big Tech et les banques massacrées
Alors que l'essentiel de sa production d'iPhone est basé en Chine, Apple a chuté de 9,2 %, du jamais-vu sur une séance en cinq ans pour la firme à la pomme. L'entreprise doit au total faire face à des droits de douane cumulés de 54 % : 34 % de droits réciproques imposés à Pékin, auxquels s'ajoutent des droits préexistants de 20 %. Le géant du commerce en ligne Amazon a également plongé de 9 % et le fabricant de puces graphiques Nvidia de 7,8 %.
À LIRE AUSSI Tarifs douaniers : le scénario noir d'une « Trumpcession » pour l'économie mondiale
Les détaillants ont particulièrement reculé, à l'image de Nike et Ralph Lauren, en repli respectivement de 14,4 % et 16,3 %, dont les principaux sites de production sont situés au Vietnam, en Indonésie et en Chine, trois pays visés par d'importants droits de douane américains.
Les grandes banques américaines comme Citigroup et Bank of America et JPMorgan Chase & Co, particulièrement sensibles aux risques économiques, ont toutes perdu entre 7 % et 12 %.
40 % de risque de récession
« Les droits de douane annoncés par Donald Trump posent un risque important pour l'économie mondiale dans un contexte de croissance atone », a déclaré la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI). Kristalina Georgieva a estimé dans un communiqué qu'il était important d'éviter les mesures qui pourraient affecter davantage l'économie mondiale et a appelé les États-Unis et leurs partenaires commerciaux à travailler de manière constructive pour réduire les tensions.
À LIRE AUSSI « Inutile de chercher : il n'y a aucune logique économique chez Trump »
Si les droits de douane sont maintenus, « les risques de récession augmenteront probablement de manière significative », a indiqué Deutsche Bank dans une note, tandis que Bank of America a souligné que l'économie pourrait être poussée « au bord de la récession ». « Notre indicateur de probabilité implicite de récession basé sur le marché boursier suggère que les actions intègrent déjà (environ) 40 % de probabilité d'une récession d'ici la fin de l'année », ont écrit les analystes de HSBC.
En six semaines, le S & P 500 a perdu 12 %, impactant directement la retraite par capitalisation de millions d’Américains. Donald Trump a réagi à bord d’Air Force One : « C’est ce à quoi on s’attendait. C’était un patient malade. Il a subi une opération. Mais l’opération est terminée. Et maintenant, on le laisse se stabiliser. »
-
Coupes rases.
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/03/2025
- 0 commentaire
Depuis quatre ans qu'on est là, on n'a jamais vu autant de coupes rases. On marche beaucoup, on court dans les bois, on roule à VTT et à vélo de route. Il n'y a pas une sortie où on tombe sur des zones ravagées. Ne pas entendre un concert de tronçonneuses, c'est devenu rare. A croire que tous les "exploitants" forestiers du pays sont ici.
Demain, on part, on a vendu la maison. On change de région. Ici, dans dix ans, il n'y aura plus de forêts, de vraies grandes et riches forêts. Il n'y a aura que des plantations de résineux.
On recommence tout à zéro. On laisse 350 m² de potager, une mare et plus de deux-cents plantations.
"C’est pas de la gestion forestière, c’est du pillage" : en Creuse, l'association Canopée dénonce les coupes rases
Ce mardi, l’association Canopée est passée par la Creuse et les coupes rases qui sévissent à Châtelus-le-Marcheix et laissent les habitants dans un profond désarroi.
Article réservé aux abonnés
Par Julie Ho Hoa
Publié le 25 mars 2025 à 20h16 •
A Châtelus-le-Marcheix, dans l'ouest de la Creuse, plusieurs coupes rases ont défiguré le paysage. Le même constat est fait dans le reste du département. © BARLIER Bruno
« Ça me donne envie de pleurer, franchement. » Régine Foltzer n’ose même pas se retourner vers la coupe rase qu’elle est venue dénoncer. Un pan de massif épluché à perte de vue, des sols retournés jusqu’aux rives du Thaurion qui coule en contrebas. Pas loin d’une dizaine d’hectares d’une forêt de feuillus coupée à blanc sur des parcelles appartenant « à un groupement forestier, des gens qui n’habitent même pas là ».
@Bruno Barlier
Les premières coupes ont eu lieu il y a un an et depuis « ça s’amplifie. Dans tous les coins de la commune et partout autour, partout sur la Creuse », constate cette habitante de Châtelus-le-Marcheix et ancienne adjointe. Elle a profité du passage en Creuse du chargé de campagne forêts françaises de Canopée, Bruno Doucet, pour organiser un rassemblement sur cette coupe rase « d’une ampleur impressionnante ».
Une forêt entière de feuillus destinée au chauffage et au papier
En longeant les grumes de chênes et de hêtres de bons diamètres, on croise les estampilles « CBB » (pour Comptoir des bois de Brive, filiale de découpe de Sylvamo), « tritu » (pour trituration c’est-à-dire broyage) ou encore « chauffage ». Ce bois est sans doute destiné, en grande partie, à l’usine papetière de Saillat-sur-Vienne (Haute-Vienne), une autre partie à faire des plaquettes ou des granulés.
Cette vidéo peut vous intéresser
Feed digiteka
@ Bruno Barlier
@ Bruno Barlier
« J’ai vu qu’il y avait un petit peu de hêtres, beaucoup de chênes, quelques résineux aussi plus bas. C’était une forêt qui était mélangée, qui est venue naturellement il y a peut-être 60-80 ans. Donc c’est le genre de forêt que l’on peut tout à fait améliorer, sans la détruire, avec d’autres pratiques sylvicoles », explique Bruno Doucet.
Partager :
Châtelus-le-MarcheixEconomieEnvironnement
-
L'ouragan Rachid
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/03/2025
- 0 commentaire
Humour ^^
C'est très bien interprété et les dialogues sont ciselés.
-
L'individuation : Carl Gustav JUNG
- Par Thierry LEDRU
- Le 23/03/2025
- 0 commentaire
Je m'intéresse beaucoup au peuple Kogis et eux ne disent pas qu'il s'agit de devenir "adultes" mais de devenir "des êtres humains" quand nous ne sommes pour l'instant que des hommes et des femmes. Ils nous appellent d'ailleurs "les petits frères" ce qui sous-entend comme Jung que nous devons grandir.
« S’il répugne à ce point à devenir conscient du problème, c’est que cela exigerait de mettre en cause cette image de la Terre inépuisable et de “s’expliquer” avec un des archétypes les plus puissants qui soient, celui de la Mère. […] Alors, nous devons nous assumer, seuls, être réellement conscients, adultes. »
— Carl Gustav Jung, La voie des profondeurs
Ecole Jungienne de Psychanalyse Animiste - EJPA
orSnetosdp11gr0g1 g73t6mhhm804git42ht69,0c942mac2s:83ia89 tu ·
Devenir adulte : pourquoi l’individuation est devenue une urgence planétaire
Il est des mots qu’on relègue, trop vite, aux marges de la pensée. Parce qu’ils semblent appartenir à une époque plus lente, ou à des sphères plus intimes. Le mot individuation fait partie de ceux-là. Long, peu sonore, presque austère, il ne séduit pas d’emblée. Il ne fait pas frémir les foules. Il n’a rien d’un mot à la mode. Il parle d’un travail intérieur, patient, profond — tout ce que notre monde, saturé de bruit et de vitesse, apprend à fuir.
Et pourtant, c’est peut-être l’un des mots les plus essentiels de notre temps.
Carl Gustav Jung l’écrivait déjà avec force : l’individuation n’est pas un luxe réservé aux « belles âmes », ni un privilège d’initiés. Ce n’est pas une coquetterie psychologique, ni une quête réservée à ceux qui ont « du temps pour eux ».
C’est une nécessité vitale.
Vitale pour l’individu, bien sûr, qui a besoin de devenir un être entier, en lien avec ce qu’il porte d’unique et de profond. Mais vitale aussi pour le monde.
Car sans êtres individués, aucune évolution véritable n’est possible.
On voudrait croire encore que les solutions viendront d’en haut : des décisions politiques, de la science, d’une technologie salvatrice. On voudrait croire qu’un jour, le monde se réveillera, comme par enchantement, unifié, solidaire, raisonnable.
Mais cette croyance est une illusion dangereuse. Elle nous dispense de la transformation à faire en nous.
Le réel, lui, ne cesse de nous alerter.
Les signes sont là : l’épuisement des ressources, la disparition des espèces, les dérèglements climatiques. Un monde qui s’effondre lentement, et un autre qui peine à naître.
Nous le savons — et pourtant nous agissons comme si nous ne savions pas.
C’est là que le regard de Jung devient éclairant. Il ne s’arrête pas aux comportements, ni aux discours. Il va chercher la racine inconsciente, celle qui anime secrètement notre rapport au monde.
Et ce qu’il pointe, c’est un archétype non intégré : celui de la Grande Mère — la Nature comme source inépuisable, comme matrice fertile et indulgente. Cet archétype est puissant, ancien, fondamental. Il a nourri l’imaginaire de l’humanité pendant des millénaires. Mais aujourd’hui, il est devenu piégeant.
Tant que nous projetons sur la Terre l’image d’une mère toute-puissante, qui pourvoit sans jamais faillir, nous restons dans une posture d’enfant.
Un enfant qui prend, sans penser aux conséquences. Un enfant qui exige, sans mesurer les limites.
C’est cela que l’individuation vient renverser.
Car s’individuer, ce n’est pas s’isoler. Ce n’est pas se retirer du monde dans une tour d’introspection.
C’est au contraire entrer dans une responsabilité vivante, c’est oser faire face à ce qui nous habite, et en tirer les fruits les plus clairs.
C’est quitter la dépendance à l’archétype maternel pour devenir un adulte psychique : capable de discernement, de choix, de fidélité à soi-même.
Ce n’est pas un chemin confortable. Il demande du courage. Il demande de traverser ses zones d’ombre, d’assumer ses contradictions, d’écouter ses rêves, ses peurs, ses intuitions.
Mais c’est le seul chemin qui rende le monde habitable autrement.
À ce titre, l’individuation n’est pas une option secondaire.
Elle est devenue, comme l’écrit Jung, « la condition sine qua non de la survie de l’espèce ».
Ce sont les êtres individués qui résistent aux propagandes, aux fanatismes, aux engourdissements de masse.
Ce sont eux qui tiennent debout quand tout vacille.
Ce sont eux, aussi, qui peuvent faire émerger des formes nouvelles de présence au monde — des formes qui ne soient plus fondées sur la prédation, mais sur la coopération, l’écoute, le respect du vivant.
Christiane Singer disait qu’il y a, au cœur de chacun, un lieu inviolable, un sanctuaire où « quelque chose ne meurt pas ».
C’est ce lieu-là que le travail d’individuation permet de rejoindre.
Et ce lieu, aujourd’hui, est notre ressource la plus précieuse.
Il ne s’agit pas de réparer la Terre comme on colmate une fuite. Il s’agit d’aimer autrement. D’entrer en relation avec le monde depuis un autre endroit.
Moins enfantin. Moins exigeant. Plus humble.
Plus libre, aussi.
Alors oui, il faut le redire, avec des mots simples mais graves :
notre époque a besoin de femmes et d’hommes qui acceptent de devenir adultes.
Non pas dans un sens moral ou civique, mais dans un sens symbolique, psychique, spirituel.
Des êtres reliés. Intérieurs. Lucides.
Non pas parfaits, mais engagés.
Capables de faire silence en eux, pour mieux entendre ce qui appelle, ce qui meurt, ce qui espère.
Le monde n’attend plus d’idées. Il attend des êtres.
Et l’individuation est peut-être le plus grand acte politique et poétique qu’il nous reste à accomplir.
« S’il répugne à ce point à devenir conscient du problème, c’est que cela exigerait de mettre en cause cette image de la Terre inépuisable et de “s’expliquer” avec un des archétypes les plus puissants qui soient, celui de la Mère. […] Alors, nous devons nous assumer, seuls, être réellement conscients, adultes. »
— Carl Gustav Jung, La voie des profondeurs
-
JARWAL LE LUTIN : sur la peur
- Par Thierry LEDRU
- Le 21/03/2025
- 0 commentaire
Puisque la peur est un sujet récurrent et que ça n'est pas prêt de se calmer, il reste toujours la possibilité de lire ce qu'en dit Jarwal: )
"Ils avancèrent avec les mêmes précautions, les sens aux aguets, suspendus au silence oppressant. Ils débouchèrent soudainement au bord d’un puits opaque. Un gouffre de ténèbres. Jarwal pointa son doigt vers le fond et n’aperçut qu’un vide insondable dans les rougeurs coulantes.
« Sept mètres de large, précisa Maïeul. Mais pour le fond, je ne sais pas. Déjà huit mètres pour ce que ton doigt éclaire Jarwal.
-Merci pour ces mesures, Maïeul. »
Jarwal plongea une main dans sa besace et en sortit un petit sac noué par un lacet. Il le libéra et fit couler dans sa main une poignée de graines.
« L’occasion rêvée pour vérifier une de mes préparations. On peut supposer qu’au fond de ce trou, il y aura un peu de terre. Ça devrait suffire. »
Il demanda aux enfants de reculer de quelques pas.
« Les incantations sont puissantes et il est préférable de ne pas être dans leur champ immédiat. »
Le lutin se dressa au bord du gouffre. Il tendit la main portant les graines.
« Helichryse, Gaulthérie, Lentisque, Ravintsara, Callophylum, Rejoignez les forces de la Terre et venez-nous en aide. »
Jarwal vida le précieux chapelet. Personne n’entendit les graines atteindre le fond. Le lutin rejoignit ses compagnons. Ils perçurent alors quelques grattements, comme des rongeurs œuvrant à une mission d’exploration, des fouilles minutieuses puis des craquements de tiges, comme des croissances vives, des entrelacs de lianes, des racines fouissant l’humus, des frondaisons fracassantes.
Jarwal tendit le doigt pour éclairer l’espace circulaire et les enfants virent apparaître dans une arabesque frénétique des lacis de feuillages entremêlés, des réseaux de branches grossissant à vue d’œil, s’embrassant comme une foule bigarrée et joyeuse, un mélange hirsute dansant des farandoles endiablées, dénouant des tiges comme des pollens de pissenlit dans la brise, une sarabande passionnée, des étreintes enflammées de ramures colorées.
Le lutin attendit que les croissances se calment, que les branches s’épaississent au seuil du trou, que les arborescences fusionnent jusqu’au-dessus de leurs têtes et il invita ses amis à le suivre. Il s’engagea en équilibre sur les branches croisées et tendit la main.
Adeline, aidée par sa vision nocturne, s’élança la première. Hoel aida Florie à saisir un bois épais et tous les autres enfants suivirent le même itinéraire.
Arrivés au centre du puits, les pieds et les mains œuvrant à l’avancée, les corps cheminant ardemment dans le fouillis végétal, dominant les noirceurs sinistres, quelques murmures s’éveillèrent, des échanges de craintes dans le chambardement inextricable qui gênait la progression.
« J’ai vu quelque chose qui rampait.
-Moi aussi, je crois bien, mais ça sautait plutôt.
-Et moi, ça grimpait vers nous. »
Les regards affairés vers les profondeurs ténébreuses.
« Là, un serpent ! cria Adeline.
-Là, des rats ! ajouta Maïeul, soixante-douze exactement !
-Moi, je vois des scarabées, quelle horreur ! cria Thibaud. Ah ! je hais les scarabées ! Vite, vite, il faut sortir de là ! »
Jarwal, occupé à trouver un passage praticable, n’avait pas la possibilité de regarder précisément et il s’efforçait d’entraîner derrière lui les enfants paniqués. Il atteignit le bord opposé et scruta les abysses encombrés. Les branches grouillaient de bêtes, serpents, araignées, scarabées, rats, rongeurs de toutes sortes, un mélange hétéroclite et incompréhensible qui montait inexorablement. Hoel s’activait de son mieux pour sortir ses compagnons du puits.
« Il n’y a rien, les enfants, ce sont vos peurs ! Vous faites apparaître ce que vous redoutez, reprenez-vous ! »
Florie s’extirpa des lacis et se dressa immédiatement devant le puits. Les enfants passèrent un à un dans son dos et reculèrent dans l’ombre.
« Vous n’êtes pas les bienvenus, chers amis, lança la petite fille en s’adressant aux ribambelles d’animaux grimpant vers eux. Vous n’avez rien à faire là. Excusez mes amis, ils se sont trompés. Je sais bien que vous n’êtes pas dangereux. Ce sont les peurs de mes amis qui vous énervent, vous n’y êtes pour rien. Pardonnez-leur, je vais leur expliquer, vous pouvez retourner chez vous, ils ne vous dérangeront plus. »
Les serpents, les rats, les légions de scarabées et d’araignées velues se figèrent sur place, comme saisis par les paroles. Les éclaireurs firent demi-tour et entraînèrent dans leur mouvement de repli l’ensemble des troupes. En quelques secondes, les branches furent vidées de toutes présences animales.
L’immobilité des plantes instaura le silence.
Florie rejoignit ses compagnons en souriant.
« Ils ne sont pas méchants, vous savez. Mais ça les met en colère quand on a peur d’eux, c’est comme s’ils ne pouvaient pas s’empêcher de faire comme on pense. Alors, ils font peur.
-Merci Florie, pour ton aide, ajouta Jarwal. Je suis exactement du même avis que toi. J’ajouterais même que le phénomène inverse est tout aussi vrai. Si on les aime, ils ne peuvent pas s’empêcher de nous aimer aussi. »
Les autres enfants écoutèrent attentivement.
« Ce sont nos pensées qui font tout ça ? demanda Thibaud.
-Ce sont elles qui créent la réalité à laquelle tu crois. C’est ça l’essentiel Thibaud. Et ta réalité n’est pas celle des autres. La réalité d’un scarabée pour Florie, c’est un remarquable insecte, solide, opiniâtre, persévérant, d’une force herculéenne pour sa taille. Ton regard n’est pas le sien et dès lors, ta réalité n’est pas la même. Pourtant, il y a une vérité identique, au plus profond, au cœur de cette vie de l’insecte, comme de tout ce qui existe. C’est l’énergie créatrice. C’est la seule réalité. Mais, c’est justement celle qu’on ne parvient pas tous à voir. C’est là tout le drame de la vie des humains.
-Et tu la vois cette énergie ? demanda Florie.
-Oui, chère enfant. Je suis un lutin. J’ai appris des choses différentes de vous. Nous n’avons pas les mêmes objectifs que les humains. Ce qui nous importe, c’est d’être au cœur de la vie comme elle est au cœur du nôtre. »
Le silence dans le petit groupe, comme une concentration des pensées, le saisissement de l’essentiel.
« Moi, je la vois cette énergie, » annonça une voix menue.
La seule enfant qui ne s’était pas encore présentée. Jarwal éclaira le doux visage, des yeux si pénétrants qu’il en fut troublé, un sourire énigmatique, comme une âme ancienne qui s’amusait de son enveloppe juvénile.
« Je m’appelle Ysaline.
-Que vois-tu, chère enfant ? demanda le lutin.
-Des bulles qui pétillent comme l’eau d’un torrent. Et le courant ne diminue jamais.
-Où vois-tu ces bulles Ysaline ?
-Partout. Dans toi, et les autres, et les branches, et les animaux, et les pierres, tout, partout. Elles pétillent tout le temps, elles virevoltent comme des flocons, c’est beau. »
Cette émotion en lui, Jarwal ne l’oublierait jamais. Il s’approcha et posa un baiser sur le front de la petite.
« Tu es un trésor Ysaline. »
L’enfant lança un rire cristallin.
-
L'amnésie environnementale (2)
- Par Thierry LEDRU
- Le 20/03/2025
- 0 commentaire
La suite d'un ancien article à retrouver ici : L'amnésie environnementale
L’amnésie environnementale, clé ignorée de la destruction du monde
https://reporterre.net/L-amnesie-environnementale-cle-ignoree-de-la-destruction-du-monde
Le climat se réchauffe, la biodiversité s’effondre, mais il est pourtant difficile de prendre conscience de l’ampleur de la crise environnementale. La raison ? Notre amnésie environnementale. Analyse d’un mécanisme psychologique essentiel mais ignoré.
En fermant les yeux, on pourrait presque avoir l’impression d’être à la campagne. À une dizaine de mètres de la route principale, on peut encore entendre quelques grillons chanter dans les herbes hautes qui ont survécu à l’asphalte. De rares chardons griffent les pieds des passants. Le passage d’un poids lourd ou le bruit strident d’un avion au décollage ramènent cependant rapidement les visiteurs de la zone d’aménagement concerté (ZAC) des Tulipes à la réalité. Située dans le Val-d’Oise, à quelques kilomètres de l’aéroport du Bourget, cette zone industrielle s’étend sur près de 80 hectares. D’immenses entrepôts grillagés s’y étalent à perte de vue, entrecoupés par de longues artères bétonnés. Seul le ballet des camions et des voitures brise la monotonie du lieu.
Il y a un demi-siècle, l’aspect de ce terrain, situé à cheval entre Gonesse et Bonneuil-en-France, était pourtant bien différent. Un habitant de la commune voisine de Villiers-le-Bel, âgé de 64 ans, se rappelle les « millions et millions de tulipes » qui y poussaient dans son enfance. Avant que ces champs ne soient recouverts de bureaux et de bâtiments logistiques, il allait souvent y cueillir des fleurs, ou jouer à attraper des musaraignes. Mireille et son mari, artisans traiteurs à Gonesse, se souviennent également avec émotion de cette époque. « C’était impressionnant, raconte Jacques. À mon arrivée en 1979, ça m’avait fait drôle de voir des tulipes partout. » Des plantations de fleurs sur lesquelles elle a été construite, la ZAC n’a gardé que le nom. En à peine deux générations, ces champs de tulipes ont complètement disparu de la mémoire collective des riverains. À Gonesse, la plupart des adultes ont seulement vaguement entendu parler de cette période. Les adolescents, quant à eux, expliquent « ne rien savoir » sur le passé agricole de la ZAC.
La ZAC des Tulipes, à Gonesse.
Cet oubli progressif de l’histoire environnementale des environs de Gonesse s’apparente à ce que le psychologue américain Peter H. Kahn nomme « l’amnésie environnementale », c’est-à-dire l’acclimatation des êtres humains, au fil des générations, à la dégradation de leur environnement. Au fur et à mesure que nos relations avec le vivant s’étiolent, nous l’intégrons de moins en moins dans notre cadre de référence. Nous finissons ainsi par considérer comme « normal » un état de dégradation environnemental avancé, explique Anne-Caroline Prévot, directrice de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) et biologiste de la conservation au Muséum national d’histoire naturelle. Le biologiste marin Daniel Pauly parle quant à lui de « syndrome de la référence changeante ». Il a forgé ce concept en 1995 après avoir remarqué que les chercheurs spécialistes de la pêche prenaient comme référence scientifique la taille et la composition du stock de poissons du début de leur carrière. « Chaque génération de chercheurs oubliait que cet état qu’elle considérait comme normal était déjà dégradé par rapport aux générations précédentes, ce qui avait comme conséquence d’empêcher une prise de conscience globale de l’érosion de la biodiversité marine », précise Anne-Caroline Prévot, directrice de recherche au CNRS.
La zone industrielle des Tulipes s’étend sur près de 80 hectares.
On cultivait des roses à Fontenay-aux-Roses, des pêches à Montreuil, des ananas dans les serres du château de Choisy-le-Roi…
En région parisienne, par exemple, un grand nombre de territoires fortement urbanisés étaient autrefois des hauts lieux de l’agriculture française. Au 18e siècle, explique Jan Synowiecki, historien et auteur d’une thèse sur l’histoire environnementale de Paris à l’époque moderne, « le paysage était majoritairement rural et alternait entre des espaces de céréaliculture, des villages, des pépinières et des jardins potagers ». On cultivait des roses à Fontenay-aux-Roses, des pêches à Montreuil, des ananas dans les serres du château de Choisy-le-Roi… « Les environs de Paris étaient remplis de pépinières. On y commercialisait des graines et du végétal de façon massive, qui approvisionnaient ensuite tout le royaume de France. » Les espaces de nature productive ont progressivement régressé à Paris et en proche banlieue tout au long du 19e siècle. Comme le rappelle Thomas Cormier, urbaniste à l’Institut Paris Région, l’urbanisation de la région parisienne, qui a commencé en 1920 et s’est fortement accélérée dans les années 1950, a progressivement eu raison de la majorité des espaces agricoles. Au fil du temps, ces derniers ont disparu de notre mémoire collective. Peu de Franciliens se rappellent que l’on pouvait autrefois chasser la bécassine dans le quartier du Marais, ou entendre des oiseaux chanter dans les champs de blé de la Butte-aux-Cailles. « Ces références font désormais partie du folklore, analyse Philippe J. Dubois, ornithologue et auteur de La grande amnésie écologique (éd. Delachaux et Niestlé, 2015). On finit par oublier que ces territoires étaient autrefois bien plus riches en biodiversité. »
Les murs à pêches à Montreuil (Île-de-France) au début du 20e siècle.
Cette amnésie tient avant tout au manque de transmission de notre mémoire environnementale, selon Philippe J. Dubois. Il évoque l’exemple d’un ingénieur agronome franc-comtois qu’il a rencontré au cours de ses recherches. Fils et petit-fils d’agriculteur, il ignorait tout de la fémeline, une race de vaches pourtant emblématique de la région, aujourd’hui disparue. Son grand-père, qui avait dû bien la connaître, n’en avait probablement jamais parlé à ses descendants. « En seulement deux générations, la fémeline avait totalement disparu de la mémoire collective », déplore-t-il. Selon lui, les individus ayant un contact intime avec le vivant sont parfois trop accablés par les changements qu’ils observent pour en parler à leurs enfants. Résultat : nous oublions peu à peu des éléments constitutifs de notre environnement, accélérant ainsi sans le vouloir sa dégradation.
On peut ne pas remarquer que les hirondelles que l’on voyait dans notre enfance ont disparu
L’amnésie environnementale n’est pas uniquement générationnelle : nous pouvons également en souffrir sur des échelles de temps beaucoup plus courtes, selon Philippe J. Dubois. En seulement quelques dizaines d’années, nous pouvons nous accommoder de la disparation de ce qui faisait notre environnement proche. Cela tient au fonctionnement de notre cerveau, selon le chercheur. « À l’image d’un ordinateur, notre cerveau fait continuellement des mises à jour de notre perception du monde en écrasant la version précédente. Si l’on n’est pas très attentif au vivant et à ses évolutions, on peut très vite oublier ce à quoi il ressemblait. »
Une zone industrielle a remplacé les champs de tulipes.
Si l’on n’a jamais vraiment prêté attention aux autres êtres vivants, par exemple, on peut ne pas remarquer que les hirondelles que l’on voyait dans notre enfance ont disparu, explique le chercheur. Le culte que notre société voue à l’immédiateté joue également contre notre mémoire : « Nous n’avons plus le temps de fixer notre attention sur des éléments qui montrent que les choses changent. On le voit avec le réchauffement climatique : les canicules sont toujours perçues comme exceptionnelles, alors qu’elles se multiplient depuis plusieurs années. »
Afin de lutter contre l’oubli, l’importance d’« entrer en expérience avec la nature »
L’amnésie environnementale a pourtant des conséquences « terrifiantes », selon les mots de Philippe J. Dubois. D’abord parce qu’elles nous rend indifférents à la dégradation de nos relations avec le vivant, et donc de notre qualité de vie, mais également parce qu’elle étouffe toute possibilité de changement, selon Anne-Caroline Prévot. « Si les communautés humaines ne pensent pas que la dégradation de l’environnement est importante car elles n’y font pas attention, il n’y a pas de raison que les politiques ou les institutions s’en chargent », explique-t-elle.
« L’éducation à l’environnement est primordiale. »
Afin de lutter contre cet oubli et ses effets délétères, la biologiste souligne l’importance de ce qu’elle appelle « entrer en expérience avec la nature » : « Il est important de prendre conscience de la relation que l’on a et que l’on a envie d’avoir avec la nature, d’en parler et de partager ses souvenirs. » « L’éducation à l’environnement est primordiale, ajoute Philippe J. Dubois. Elle devrait être une discipline à part entière, enseignée dès la maternelle. » Selon lui, renforcer l’éducation à l’environnement au sein des écoles pourrait permettre aux plus jeunes « d’ouvrir les yeux » sur le reste du vivant, et ainsi d’éviter qu’ils ne deviennent amnésiques. Accorder davantage d’importance à l’histoire de la biodiversité et de notre relation au monde est également essentiel, selon lui, « afin d’éviter que les mêmes causes ne produisent les mêmes effets ». Il ne s’agit pas uniquement, selon le chercheur, d’affubler les territoires dégradés de noms faisant allusion à leur passé, mais de conserver des traces concrètes de leur richesse environnementale. À la ZAC des Tulipes, par exemple, trop peu d’éléments permettent aux jeunes générations de se faire une idée de l’aspect historique de la région, et donc d’imaginer une alternative à ces alignements d’entrepôts sans âme : « Ce qu’il aurait fallu, c’est garder un petit bout de champ, qui aurait pu montrer qu’il s’agissait auparavant d’un lieu de culture de tulipes. »
Prendre conscience de notre amnésie environnementale et de la dégradation historique du vivant peut être difficile à vivre, prévient Philippe Dubois. Elle conduit souvent à éprouver de la solastalgie, c’est à dire le sentiment douloureux de se trouver dans un environnement qui n’est plus le sien. Cette expérience est pourtant essentielle, selon le chercheur. « C’est en ayant des connaissances sur le passé que l’on peut prendre des bonnes mesures, préserver ce qui est préservable et éviter l’effondrement du vivant. La nature est comme un tsunami : la grande vague destructrice est souvent précédée de petites vagues annonciatrices. Si l’on oublie notre passé environnemental, le réveil sera d’autant plus difficile. »
-
Economie de guerre
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/03/2025
- 0 commentaire
Pour bien comprendre dans quoi nous sommes entrés.
Aux Forges de Tarbes, les commandes européennes dopent la fabrication d'obus
information fournie par AFP •17/03/2025 à 19:43
Un salarié fabrique des corps d'obus aux Forges de Tarbes, le 17 mars 2025 ( AFP / Ed JONES )
Les Forges de Tarbes, au bord de la liquidation en 2021, ploient sous les commandes, avec comme principal enjeu, augmenter la cadence de production des corps d'obus de 155 mm destinés à l'Ukraine et au réarmement des forces européennes.
A Tarbes, sur le site de la société française Europlasma qui y emploie 80 salariés, l'objectif est de doubler le volume de production. C'est le seul centre de production en France de ces corps creux, qui sont ensuite envoyés à la société KNDS (ex-Nexter) qui dote les obus de leur charge explosive.
"Nous sommes passés d'une production quasi à l'arrêt en 2022 à pas loin de 60.000 corps d'obus en 2024. En ce moment, notre rythme hebdomadaire est de 2.000 obus par semaine et on a l'ambition à la fin de l'année d'en produire 15.000 par mois", précise à l'AFP Jérôme Garnache-Creuillot, PDG d'Europlasma.
Les Russes, eux, produisent 50.000 obus par jour, observe-t-il à titre indicatif.
A Tarbes, Europlasma fabrique des obus de "155 mm standard Otan" et de "152 mm standard Pacte de Varsovie" pour des pays de l'est.
- Pas seulement en Ukraine -
La guerre en Ukraine depuis 2022 et les récents projets de réarmement européen invitent les industriels à redimensionner leur outil de production.
Des corps d'obus entreposés dans les "Forges de Tarbes" le 17 mars 2025 ( AFP / Ed JONES )
Les obus pour l'Ukraine représentent une part importante de la production, mais l'activité ne dépend pas seulement du conflit entre Moscou et Kiev. Europlasma fait savoir qu'un des derniers contrats signés l'a été avec la République tchèque, pour 50.000 corps d'obus, dont 31.000 à livrer en 2025.
La capacité des Forges de Tarbes pourra être poussée au maximum à 20.000 obus par jour, estime le PDG d'Europlasma. Ces projectiles sont utilisés par les canons français Caesar qui se sont imposés sur le champ de bataille ukrainien contre la Russie.
"L'idée c'est de produire aux Forges de Tarbes et demain, d'être en mesure de fabriquer des obus de gros calibre à Valdunes", dans le département du Nord, où Europlasma a racheté en 2024 le dernier fabricant français de roues de trains, en faillite.
L'entreprise est par ailleurs candidate à la reprise des Fonderies de Bretagne, sous-traitant du groupe automobile Renault implanté à Caudan (Morbihan), où elle envisage de produire chaque jour plus de 20.000 obus de moyen calibre (120 mm). "On pense que cela peut élargir la gamme de produits et capitaliser sur le modèle de l'industrie automobile", explique M. Garnache-Creuillot. "Avec le monde de l'auto, on a accès à des lignes de production automatisées, on change d'échelle. D'un point de vue stratégique, il y a un vrai enjeu".
- Main d'oeuvre rare -
Aujourd'hui, pour monter en puissance, les Forges de Tarbes se heurtent à des difficultés de recrutement et d'acquisition de machines-outils.
"On a du mal à trouver de la main d'oeuvre qualifiée ou très qualifiée, on manque de chaudronniers, de forgerons, de soudeurs", regrette le PDG d'Europlasma.
Pour les machines et les moules permettant de fabriquer les ogives, ce sont surtout les délais de livraison qui sont en cause, souvent doublés en ces temps de forte demande.
Depuis le début du conflit, la France a livré 30.000 obus de ce type à Kiev, et l'objectif pour 2025 est d'en livrer 80.000 unités, indiquait le ministère français des Armées en janvier.
"Il nous faut une augmentation très rapide des capacités de défense européennes. Et il nous la faut maintenant!" a lancé mardi la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen devant le Parlement européen à Strasbourg.
L'Europe produit désormais près de deux millions d'obus par an, contre 300.000 à 400.000 avant la guerre en Ukraine, observe Léo Peria-Peigné, spécialiste de l'armement et de l'industrie de défense à l'Institut français des relations internationales (IFRI). "Il y a une volonté de montée en puissance qui est énorme. La demande est potentiellement forte, si on passe du discours aux actes, les besoins vont augmenter", estime le chercheur.
-
Dévorer la terre
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/03/2025
- 0 commentaire
Le zircon est utilisé dans l'industrie nucléaire.
L'ilménite est utilisé en sidérurgie.
Le rutile est utilisé comme source de titane métallique avec une large gamme d'applications dans des industries telles que l'aérospatiale, l'automobile, l'électronique et les dispositifs médicaux.
Je donne ces précisions pour bien comprendre pour quelles raisons l'extractivisme ne sera jamais arrêté, quelles qu'en soient les conséquences.
Et si les habitants de cette région du Sénégal ne parviennent plus à produire les fruits et légumes traditionnels, ils iront les acheter en magasins. Et tous les marchands seront contents...
Et toujours cet argument de la création d'emplois et des retombées économiques. Je ne nie pas les besoins financiers de ce pays. Je précise juste que cet argument sera toujours prioritaire.
Un moratoire, "cela voudrait dire 2.000 personnes au chômage et l'arrêt des retombées économiques pour l'Etat du Sénégal: ce serait irresponsable alors que le pays a vraiment besoin de se développer", estime-t-il. Frédéric Zanklan, directeur de Eramet Grande Côte.
Au Sénégal, les machines géantes d'un groupe minier français avalent terres et désert
information fournie par AFP •17/03/2025 à 18:16
Vue aérienne de l'usine flottante et des installations de Eramet Grande côte (EGC), filiale du groupe minier français Eramet, exploitant une concession le sable minéralisé du désert de Lompoul, dans le nord du Sénégal, le 11 février 2025 ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
Dans un vacarme assourdissant, la "plus grosse drague minière au monde" et la gigantesque usine flottante d'un groupe minier français fendent les dunes du singulier désert de Lompoul, au Sénégal, une vision digne du film "Dune".
Vingt-quatre heures sur 24, les deux machines géantes aspirent le précieux sable minéralisé des dunes de ce désert. Auparavant, elles ont avalé celui contenu dans des terres agricoles fertiles avoisinantes, qui produisent la majorité des légumes frais consommés au Sénégal.
La drague mobile se déplace avec l'usine flottante sur un bassin d'eau artificiel long d'un demi kilomètre, aspirant 7.000 tonnes par heure de sable brut et d'eau mélangés, une eau pompée à plus de 450 mètres de profondeur.
Cette mine colossale et itinérante du groupe minier français Eramet a causé depuis 2014 le déplacement de milliers d'habitants et paysans dans cette région agricole aux écosystèmes fragiles.
Elle a aussi engouffré des kilomètres de terres le long de la côte atlantique de ce pays - l'impressionnant tracé de l'avancée de la mine étant visible depuis l'espace.
C'est l'histoire d'"un désespoir et d'une désillusion qu'on a eu avec ce projet", lance à l'AFP Gora Gaye, 47 ans, maire de la communauté rurale de Diokoul Diawrigne, qui englobe le magnifique désert de Lompoul, l'un des plus petits au monde, un écosystème unique de dunes balayées par la brise de l'océan.
Vue de la plus grosse drague minière au monde utilisée par Eramet Grande Côte (EGC), filiale du groupe minier français Eramet, exploitant sur une concession de sable minéralisé des dunes du désert de Lompoul, dans le nord du Sénégal, le 11 février 2025 ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
Cet atout d'écotourisme dans ce pays en partie sahélien est actuellement défiguré par la mine.
Depuis 2014, le groupe minier exploite ces dunes - utilisant la "plus grosse drague minière au monde" selon Eramet - pour en extraire les minéraux (zircon, ilménite, rutile et leucoxène), exportés à travers le monde pour le marché du bâtiment et ses dérivés, la métallurgie, la céramique.
Une équipe de l'AFP a eu un accès rare aux installations de la mine, composée de la drague, de l'usine flottante de séparation des sables minéralisés et non minéralisés, d'une autre usine séparant les différents minerais par tri magnétique et électrostatique, d'un tronçon de chemin de fer privé jusqu'au port de Dakar, de logements, bureaux, routes sillonnées de véhicules 4X4, dénotant avec le calme de cette région arpentée par les dromadaires, les vipères et les oiseaux marins.
Pendant des années, le sort des villageois déplacés et leur mobilisation dénonçant un accaparement des terres et un système de compensation "dérisoire" ont été peu écoutés, voire étouffés, à la faveur d'autorités locales et nationales complaisantes, dénoncent les détracteurs de la mine.
- Écosystème unique -
Mais la controverse a récemment pris une ampleur nationale quand la mine est entrée dans la zone du désert de Lompoul (nord).
Montage daté du 13 mars 2025 montrant une image satellite distribuée par Landsat USGS Data 2025, prise le 27 avril 2014 (g) et une image satellite distribuée par Copernicus Sentinal Data 2025 (d), prise le 7 mars 2025, montrant le tracé de la mine du groupe minier français Eramet ( LANDSAT USGS DATA 2025 / - )
Se joignant aux paysans, des élus locaux et entrepreneurs notamment dans le tourisme ont dénoncé vivement l'impact de ces activités.
Fin janvier, le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye lui-même a fait des déclarations fortes en Conseil des ministres au sujet de l'industrie extractive. "L'exploitation des ressources minières dans plusieurs localités du pays ne participe pas activement au développement territorial et ne profite pas aux populations locales", a-t-il lancé.
Lors du Conseil du 12 mars, il a donné des directives à ses ministres sur la "transparence dans la gouvernance des ressources naturelles", leur demandant de "veiller à la gestion optimale des impacts environnementaux et sociaux de l'exploitation minière et pétrolière sur le bien-être des populations".
Se réclamant du souverainisme et élu en 2024 sur un agenda de rupture avec les pratiques du passé, le nouveau pouvoir au Sénégal est scruté sur d'éventuelles décisions concernant les activités d'EGC.
Vue aérienne de l'usine flottante reliée à la "plus grosse drague minière au monde" de Eramet Grande côte (EGC), filiale au Sénégal du groupe minier français Eramet, exploitant sur une concession le sable minéralisé du désert de Lompoul, dans le nord du Sénégal, le 11 février 2025 ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
C'est en 2004 que les autorités sénégalaises en place à l'époque ont accordé au groupe minier - détenu à 27% par l'Etat français et 4ème producteur mondial de zircon - cette concession pour y exploiter ce convoité sable minéralisé.
L'Etat du Sénégal détient 10% du capital de la filiale sénégalaise d'Eramet, Grande Côte Opérations (GCO), renommée depuis Eramet Grande Côte (EGC).
"La mine, elle avance; le sort des personnes quand la mine est passée ce n'est plus le problème" d'Eramet, estime Cheikh Yves Jacquemain, hôtelier franco-sénégalais et propriétaire d'un écolodge de tentes traditionnelles dans le désert.
A 150 mètres seulement de son campement, les deux machines tournent à plein régime. Parmi les sept sites d'hébergement touristique de Lompoul, six ont accepté le dédommagement de EGC ou une relocalisation. M. Jacquemain est toujours en négociation avec EGC pour obtenir des compensations financières "justes", pour lui et ses 40 employés.
Le groupe minier est accusé de "dégrader les dunes et les sols", de "menacer les ressources hydriques", ainsi que la sécurité alimentaire et les activités économiques.
Une habitante du village des "recasés" de Foth, le 11 février 2025, déplacée par l'exploitation minière menée dans le nord du Sénégal, sur une concession accordée par l'Etat sénagalais au groupe minier français Eramet ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
Des communautés pointent une détérioration de leurs conditions de vie. L'une des récriminations est un système d'indemnisation jugé "dérisoire", basé sur un barème national datant des années 70 et qui ne valorise pas la terre agricole par rapport à la perte irrémédiable de revenus provenant de ces zones fertiles.
- "Entreprise responsable" -
EGC répond à l'AFP qu'en "entreprise responsable", le groupe indemnise les habitants "cinq fois plus" l'hectare nu que ce barème national, et qu'au total l'indemnisation moyenne est de 8 à 10 millions de FCFA l'hectare (entre 12.190 et 15.240 euros).
Cette infographie dotée d'une image satellite montre le tracé de l'exploitation minière dans le nord du Sénégal par Eramet Grande Côte (EGC), filiale du groupe minier français Eramet, et qui exploite depuis 2014 un précieux sable minéralisé dans cette zone aux écosystèmes fragiles. La mine exploite actuellement le sable des dunes de Lompoul, l'un des plus petits déserts au monde ( AFP / Sylvie HUSSON )
Le maire de Diokoul Diawrigne indique à l'AFP que lui et sa communauté ont rejeté en 2022 l'étude d'impact environnementale présentée par GCO lors d'une audience publique. Mais l'étude a malgré tout été validée au niveau ministériel à l'époque.
Reconnaissant qu'"au début" le projet minier avait suscité "un espoir" parmi la population, il n'a apporté, selon lui, que des "promesses non tenues, une destruction de notre écosystème, des intimidations, des déplacements de villages de manière catastrophique et un recul sur le plan du développement économique dans la zone des Niayes".
Les détracteurs de la mine s'inquiètent du bouleversement de cet écosystème d'une biodiversité rare, composé de cuvettes interdunaires, des oasis où les sols permettent une agriculture "qui a produit jusqu'à un passé récent 80% des légumes frais consommés au Sénégal".
Au fil des années, les habitants déplacés ont été relogés dans "quatre grands nouveaux villages" équipés de commodités, "un total de 586 maisons et des infrastructures communautaires (centre de santé, école, etc...) ont été construites à ce jour" par le groupe minier et 3.142 personnes sont concernées, indique EGC.
Réunis sur la place du village des "recasés" de Foth, à 120 km au nord de Dakar, un alignement de concessions en dur sur une zone dépourvue de végétation, Omar Keïta et une vingtaine d'autres chefs de familles déplacées ont visiblement besoin d'exprimer leur colère.
Vue aérienne du village de Foth, dans le nord du Sénégal, le 11 février 2025, construit par la société Eramet Grande Côte (EGC), filiale au Sénégal du groupe minier français Eramet, pour reloger les villageois déplacés dans cette région par l'exploitation minière menée par EGC depuis 2014 ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
"On veut retourner sur nos terres et que notre village soit reconstruit pour retrouver notre vie d'avant... Je lance un appel au président du Sénégal et même à la France!", s'exclame Omar, 32 ans, visage soucieux.
Il ose à peine montrer la chambre - "prêtée par son grand frère" - et la promiscuité où il vit "depuis six ans" avec sa femme et ses trois enfants: un lit, une commode, et un matelas pour lui par terre. Il déclare qu'on ne lui a pas attribué de maison.
Des affirmations que nie le directeur général de EGC, Frédéric Zanklan: "chaque famille est relogée selon l'état de la famille au moment du recensement", dit-il à l'AFP, ajoutant que si les familles s'agrandissent "ce n'est pas de leur fait".
- Appel au président -
Omar réplique qu'avant son déplacement, il "avait (ses) champs et (sa) maison". "On gagnait nos vies dignement mais GCO a remis ma vie à zéro, je dois tout reconstruire...".
"Le sol était fertile dans notre village, mais ici je suis même obligé d'aller travailler dans les champs d'autres personnes", indique-t-il.
Ibrahima Ba, agriculteur déplacé par l'exploitation minière menée dans le nord du Sénégal sur une concession accordée au groupe minier français Eramet, dans le village des "recasés" de Foth, le 11 février 2025, construit par Eramet Grande Côte (EGC) ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
Dans la cour de sa concession, Ibrahima Ba, 60 ans, ne décolère pas non plus: "nous avons régressé dans tous les sens".
"Je suis toujours agriculteur. La différence est que dans mon village, le sol était très fertile, l'eau était douce, on n'avait aucun problème".
"Nous demandons au président Diomaye Faye et à son Premier ministre de venir en aide à la population de Foth et des Niayes; nous croyons qu'ils peuvent faire quelque chose parce que c'est un pays étranger qui veut détruire la vie des citoyens sénégalais", lâche-t-il.
Dans un entretien à l'AFP, M. Zanklan déclare que la société est "dans un cadre tout à fait légal" dans ses activités, qui "respectent la convention minière" signée avec le gouvernement.
"C'est un projet qui bénéficie au Sénégal", plaide-t-il. EGC affirme avoir "généré 149 millions d'euros de retombées économiques pour le Sénégal en 2023", et avoir versé "25 millions d'euros sous forme d'impôts, de taxes et de dividendes" sur un chiffre d'affaires de la société de 215 millions d'euros en 2023.
Il met en avant les "près de 2.000 personnes qui travaillent au niveau de la mine et des usines de séparation, dont 97% sont des Sénégalais, et 48% de ces travailleurs proviennent du bassin d'emploi local", affirme-t-il.
En 2023, l'Initiative pour la transparence dans l'industrie extractive (ITIE) a classé EGC comme 4ème contributeur minier au budget de l'Etat du Sénégal, souligne-t-il.
Une partie des installations de l'usine de séparation des minerais de Eramet Grande Côte (EGC), le 12 février 2025 à Diogo, au Sénégal ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
La société indique aussi être "la première entreprise minière à restituer les terres valorisées au Sénégal", après un processus de réhabilitation constaté par l'AFP sur une partie de la zone avec des essences d'arbres permettant une diversification des cultures.
Mais les communautés déplorent que les terres ne leur sont pas "rendues", mais remises à l'Etat sénégalais - la terre étant propriété de la Nation dans ce pays et les paysans qui l'exploitent en ayant l'usufruit.
- "Un moratoire" -
Dans la même région, arpentant un champ sans culture et montrant des mares brunâtres, Serigne Mar Sow déplore les "dégâts incommensurables" de la mine, selon lui.
L'eau pompée pour la drague est redéversée dans le bassin artificiel et s'infiltre vers la nappe phréatique superficielle. EGC assure ainsi que les activités maraîchères "en bénéficient".
"On cultivait ici des légumes et des bananes et vous voyez que toutes les plantes sont mortes, c'est à cause de cette eau qui inonde nos champs car la drague de GCO se trouve à 2,5 km d'ici", se désole pour sa part M. Sow. "Le sol n'est plus fertile".
Une partie des installations de l'usine flottante et de la "plus grosse drague minière au monde" de Eramet Grande Côte (EGC), le 12 février 2025, dans le nord du Sénégal ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
Montrant des plants de manioc et des bananiers morts, il accuse cette eau redéversée de contenir des "produits chimiques".
"Il y a 15 à 20 parcelles qui ont été abandonnées à cause de cette eau qui remonte. Il y a une diminution drastique de nos espaces de récolte" et des emplois afférents.
De son côté, EGC affirme que le processus d'extraction "est purement mécanique" et qu'"aucun produit chimique n'est utilisé".
Aujourd'hui, le maire de Diokoul Diawrigne "demande à l'Etat de faire un moratoire, d'arrêter la mine pour un moment, et qu'on évalue via des études sérieuses l'ensemble des dégâts qui ont été causés et qui vont l'être, en comparaison à ce que cela a rapporté à l'Etat et aux communautés".
"Il ne faut pas qu'on ferme les yeux sur ce drame; quel que soit ce que le Sénégal gagne dans cette affaire, il faudra se tourner vers les communautés, voir ce qu'elles sont en train de vivre et les accompagner".
Frédéric Zanklan estime de son côté qu'il n'y a "pas besoin de moratoire". "S'il y a des inquiétudes, toute autorité peut venir voir par elle-même".
Il précise que le groupe espère augmenter la capacité d'absorption de la drague à 8.500 tonnes par heure à partir de 2026.
Frédéric Zanklan, directeur général de Eramet Grande Côte (EGC), filiale au Sénégal du groupe minier français Eramet, lors d'un entretien avec l'AFP, le 12 février 2025 sur le site de l'usine flottante et de la "plus grosse drague minière au monde", exploitant depuis 2014 le précieux sable minéralisé dans le nord du Sénégal ( AFP / PATRICK MEINHARDT )
Un moratoire, "cela voudrait dire 2.000 personnes au chômage et l'arrêt des retombées économiques pour l'Etat du Sénégal: ce serait irresponsable alors que le pays a vraiment besoin de se développer", estime-t-il.
En attendant, de jour comme de nuit, la drague continue à engouffrer les dunes de Lompoul avec fracas, loin de la quiétude passée du plus petit désert d'Afrique.
-
Eliminer la pensée philosophique
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/03/2025
- 0 commentaire
Pensez-vous que ça soit anodin ? Qu'il n'y ait aucune intention cachée, autre que budgétaire ?
La tribune « Dire non à la disparition de la philosophie ! » est parue dans le quotidien Le Monde :
https://www.lemonde.fr/.../nous-n-acceptons-pas-que-des...
Les départements de philosophie des universités d’Amiens, de Créteil, de Lille, de Nanterre et de Paris-VIII ont tous récemment appris que les avis émis par le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (Hcéres) concernant l’accréditation de leur licence et/ou de leur master étaient défavorables ou réservés.
Cela signifie que, si rien n’est fait, et si le ministère et les présidences des universités suivent cet avis du Hcéres, la quasi-totalité des diplômes nationaux de philosophie délivrés depuis des décennies par les universités situées sur le quart nord de la France auront disparu en septembre 2026.
La philosophie n’est pas la seule touchée : beaucoup d’autres disciplines, en général relevant des humanités (sociologie, arts, lettres, science politique, sciences de l’éducation, etc.), sont concernées par ces rapports sévères qui obéissent manifestement à des considérations budgétaires plutôt que de traduire des objectifs académiques. La philosophie l’est de manière tellement systématique que cela en est sidérant.
Les arguments avancés dans les différents rapports témoignent d’une mauvaise foi évidente et d’une ignorance complète des spécificités de cette discipline : décomptes erronés des étudiants ou des enseignants, description partielle et partiale des méthodes d’enseignement, insistance sur la nécessité d’une refonte des savoirs enseignés en « compétences », intimations à moins enseigner les exercices classiques de la discipline, injonctions contradictoires et rompant avec le principe de liberté pédagogique.
Par ailleurs, ces évaluations contreviennent à un principe fondamental de l’enseignement supérieur et de la recherche qui garantit la qualité pédagogique et scientifique des méthodes et des savoirs dispensés : l’évaluation par les pairs. Dans la plupart des comités Hcéres formés pour évaluer les licences et masters de philosophie ne figure aucun enseignant-chercheur de philosophie, voire de sciences humaines.
L’attaque est claire, politique, et extrêmement structurée. Elle vise, d’une part, des universités situées sur des territoires économiquement fragilisés, dont une grande partie des étudiants sont en grande précarité sociale, issus de milieux défavorisés, et n’ont souvent pas les moyens d’aller étudier dans d’autres universités : une telle attaque revient donc à remettre en cause la démocratisation du savoir et le principe de l’égalité des chances. Elle prend, d’autre part, pour cible privilégiée des disciplines qui ne correspondent pas aux attentes néolibérales d’une utilité et d’une rentabilité immédiates.
A l’ère des fake news, de la post-vérité et de la montée en puissance des technologies d’intelligence artificielle, la jeunesse a plus que jamais besoin de se forger un esprit critique, une réflexion et une sensibilité indispensables pour surmonter les défis du monde à venir : technologiques, écologiques, sociaux et politiques.
Voilà à qui et comment le gouvernement a décidé de faire assumer, entre autres victimes expiatoires, le coût du milliard d’économies qu’il exige de l’enseignement supérieur, d’une université déjà à bout de forces, après vingt ans de coupes budgétaires et de gestion managériale brutales.
Nous n’acceptons pas que soient ainsi abandonnés nos étudiantes et étudiants, nos collègues vacataires, et que disparaisse toute opportunité de poursuivre des études de philosophie dans les Hauts-de-France et dans certains départements de la région parisienne. Nous n’acceptons pas que des territoires de plus en plus vastes soient privés de l’accès à certains savoirs. Nous refusons cette casse sociale et ce mépris.
-
Liberté et responsabilité
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/03/2025
- 0 commentaire
« Là liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres ».
"Formule exécrable en ce qu’elle place la liberté dans une logique de la concurrence alors que la liberté ne peut être véritablement comprise que dans une logique de solidarité." Christian GODIN (Au fil de la philosophie)
Je mets de côté toute la problématique liée au fait que nous sommes des êtres "déterminés", que cette fameuse liberté n'est qu'une illusion et que cette liberté ne peut s'acquérir entièrement qu'au regard du travail intérieur qui consiste à identifier tout ce qui agit en nous. Je suis juste libre d'identifier l'étendue de ma geôle avant de tenter d'y creuser des ouvertures.
Ce qui m'intéresse ici, c'est de reprendre une phrase souvent entendue chez les individus qui réclament le droit de manger des animaux (et donc de valider leur souffrance), de prendre l'avion comme bon leur semble, de partir en croisière, de consommer à outrance, bref, de se lover confortablement dans le déni d'une situation planétaire qui relève de la destruction.
Cette liberté d'agir comme bon leur semble porte atteinte à ma liberté de vivre dans un monde préservé, autant que faire se peut. Et se pose dès lors ce problème de la responsabilité et de la solidarité.
Si je rejette cette responsabilité qui consiste à participer à des phénomènes mortifères, c'est donc que j'ai décidé de ne pas me montrer solidaire envers mes condisciples et encore moins envers les générations futures.
Bien entendu, les cas de conscience peuvent révéler une situation très complexe. Le cas présenté par Sartre est très représentatif : un jeune homme qui se demande s'il doit s'engager dans la Résistance ou rester auprès de sa mère dépendante.
La réponse est que nous sommes "condamnés" à prendre une décision, condamnés dans le sens où les conséquences ne peuvent se poser simplement du côté du bien ou du mal mais se combinent, s'entremêlent et génèrent une crise qui n'a pas de solution. Il n'y a pas de juste milieu.
Dans le cas d'un positionnement envers l'état de la planète, il ne s'agit pas de se heurter à un dilemme insoluble : ne pas manger d'animaux, ne pas prendre l'avion pour du tourisme, ne pas partir en croisière, ne pas consommer à outrance, ce sont des décisions qui ne mettent aucunement en péril notre intégrité physique ou celle d'autrui. Ces décisions ne nous privent pas de notre liberté puisque ce choix est libre. Personne ne peut me contraindre à ne pas manger d'animaux etc... Cette décision relève de ma liberté et cette liberté que je m'octroie prend forme parce que je décide de me montrer responsable et solidaire.
Le repli sur soi dans une "liberté égoïste" (Lévinas) doit être contrée par la responsabilité envers autrui.
Par conséquent, les individus qui viendraient me reprocher mon "intransigeance" en m'accusant de porter atteinte à leur liberté, je suis en droit de leur répondre que leur liberté individuelle participe à la condamnation de tous à en subir les effets.
Le problème actuel, c'est qu'il y a beaucoup plus d'individus prônant l'entière liberté que d'individus oeuvrant à établir une responsabilité inconditionnelle.
"Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité. Etre libre, rien n'est plus grave. La liberté est pesante et toutes les chaînes qu'elle ôte au corps, elle les ajoute à la conscience." Victor HUGO
-
Les seniors en croisière
- Par Thierry LEDRU
- Le 15/03/2025
- 0 commentaire
Bon, inutile que je précise ce que je pense de ces gens-là, tout comme ceux qui prennent l'avion pour aller prendre le soleil ou voir la "belle nature préservée". Intéressant de voir l'âge habituel de ces personnes qui aiment les croisières : des retraités pour la majorité. C'est à dire ceux et celles qui ont participé au désastre autant que possible et qui continueront jusqu'à ce qu'ils ne puissent plus. Les "après moi le déluge". Le plus sidérant, c'est de penser qu'ils sont sans doute, en grande partie, grands-parents. L'égoïsme total.
Au salon mondial du tourisme de Paris, les stands des croisières ne désemplissent pas, signe d'un intérêt grandissant des Français à la fois pour les petits bateaux en mode expédition polaire ou les mastodontes en Méditerranée.
"Je vous ai déjà vues l'année dernière!", lance une commerciale à deux clientes sur le stand Grands Espaces qui propose des croisières d'expédition dans les régions polaires lors de ce salon qui s'est ouvert jeudi et ferme ses portes dimanche.
Marie-Dominique du Fontenioux, 73 ans et Laurence Bolloré Bourdin, 71 ans sont déjà parties avec cette compagnie l'année dernière à Spitzberg, en mer du Groenland. "Pour la nature et les animaux, il y a des oiseaux à foison", se souvient Marie-Dominique du Fontenioux.
Les croisières plutôt qu'une destination fixe car "on est attachées à la mer", assure son amie Laurence Bolloré Bourdin.
Les deux bretonnes se sont offert aussi en novembre dernier trois semaines sur un bateau Costa, direction les Antilles depuis Marseille. Un voyage bien différent des bateaux d'expédition polaire qui ne comptent que quelques dizaines de voyageurs.
"Je voulais du soleil pas cher", lance Marie-Dominique qui en est à sa troisième croisière alors que son amie en compte "une dizaine".
Selon Cruise Lines International Association (CLIA), la principale voix de la communauté mondiale du secteur des croisières qui doit publier dans les semaines à venir les chiffres pour 2024, le nombre de Français ayant voyagé en croisière sur les trois premiers trimestres de 2024 est en hausse de 1% à 388.000.
C'est toutefois encore loin derrière les Allemands (1,9 million) et les Britanniques et Irlandais (1,8 million).
"La croisière est encore un marché relativement récent en France, avec une croissance significative observée depuis un peu plus de 15 ans", explique à l'AFP Leonardo Massa, vice-président Europe du sud de la division croisière du groupe MSC.
- "Effet wahou"-
Sur le stand de CroisiEurope, autre opérateur, l'animatrice confirme à l'AFP "un engouement constant" pour les croisières sur les 50 bateaux du groupe qui naviguent en Europe, sur le Mékong et en Afrique.
Des visiteurs s'informent sur les croisières au stand de CroisiEurope lors du Salon mondial du tourisme à Paris, le 13 mars 2025 ( AFP / Ludovic MARIN )
L'entreprise basée à Strasbourg transporte essentiellement des jeunes retraités mais aussi des familles pour les destinations telles que l'Espagne, le Portugal, l'Italie.
"Ce qui plaît au Français dans les croisières, c'est la qualité du service, le côté +tout compris+", explique à l'AFP Didier Arino, qui dirige le cabinet Protourisme.
Sur les grands bateaux aux milliers de cabines, souvent cibles de critiques pour leur impact environnemental, il y a "l'abondance d'activités, de nourriture, de spectacles, de boutiques", ajoute-t-il estimant que les Français aiment "l'effet +wahou+, le gigantisme".
Qu'il s'agisse des croisières sur les énormes bateaux ou plus intimistes de découverte et d'aventure, les vacanciers veulent "sortir du quotidien et s'offrir des souvenirs", estime M. Arino.
Anne Gayot, 64 ans, se renseigne quant à elle pour sa première croisière qu'elle souhaite faire en Norvège. "Je fuis le tourisme de masse", explique-t-elle à l'AFP, donc pas question de choisir un gros bateau et une destination soleil. Habituée des randonnées, elle voyage seule cette fois et a choisi la croisière vers une destination "pas encore trop connue".
Quant au climat, Didier Arino estime "que cela peut refroidir une partie de la clientèle qui se sent coupable surtout dans des villes comme Marseille".
Des ONG avaient d'ailleurs bloqué en septembre dernier l'arrivée de bateaux dans la ville pour dénoncer la pollution causée par ces navires.
Ces dernières années, Venise ou Amsterdam ont interdit leur centre-ville aux géants des mers.
"C'est pour cela que les armateurs développent des bateaux moins polluants", selon M. Arino. Et "il y a aussi un travail à faire sur l'électrification des ports" qui leur permet de couper le moteur à quai, poursuit-il.
Mais "c'est comme pour l'avion, les gens disent que c'est polluant mais le prennent quand même", résume-t-il.
-
L'effet global
- Par Thierry LEDRU
- Le 15/03/2025
- 0 commentaire
J'avais déjà lu des écrits sur cet "effet global", vécu par certains astronautes. Mais sans même quitter la planète, dépasser la fine "coquille" atmosphérique, ces témoignages de connexion ultime existent depuis bien longtemps. Le problème, c'est que pour y parvenir, le cheminement n'est pas celui suivi par les millions ou milliards d'individus dont le souci premier est celui mentionné par l'article : économie, société, planète. ce que j'écris dans la dystopie en cours, c'est justement l'effondrement de ce système et par conséquent, la possibilité pour les survivants de découvrir l'autre voie : planète, société, économie. Si nous ne le décidons pas volontairement, les limites planétaires s'en chargeront.
Dans chacun de mes romans publiés, j'ai toujours tenté d'exprimer cet état.
Jarwal le Lutin : de la réalité au Réel
LE DÉSERT DES BARBARES : La conscience de la nature
Hans Mues
dSnpootesriu36tur1im2cg1cm7i:m,s01g3ctf7a10a16u c64m0411a 0f ·
EFFET GÉNÉRAL
Ron Garan, un ancien astronaute de la NASA, a passé 178 jours dans l'espace et a accumulé plus de 114 millions de kilomètres en parcourant 2 842 orbites autour de la Terre. Votre voyage n'a cependant pas été seulement sur des chiffres impressionnants.
Au cours d'un de ces voyages, il a vécu quelque chose que peu d'humains n'ont jamais connu : ce qu'on appelle l'effet global, un phénomène qui transforme notre façon de voir notre planète.
L'effet général est un choc de réalité commune entre astronautes. En regardant la Terre depuis l'espace, ils se rendent compte viscéralement que la planète est un système unique, fragile et interconnecté. Pour Garan, l'expérience a été si remarquable qu'il la décrit comme un « grand réveil ». Lors d'une interview avec le site Big Think, il a révélé : « Certaines choses deviennent indéniablement claires quand vous êtes là-haut. "
De sa fenêtre sur la Station spatiale internationale, Garan a été témoin de phénomènes naturels impressionnants : des tempêtes éclairs ressemblant à des éclats paparazzi, des aurores boréales dansant comme des rideaux brillants, et l'atmosphère terrestre si mince que vous pouviez « presque la toucher de vos mains. "Mais c'était la délicatesse de cette cape qui l'a marqué. « J'ai réalisé que tout ce qui soutient la vie sur terre dépend d'une couche fragile, presque comme du papier », a-t-il expliqué.
L'atmosphère, avec ses quelques kilomètres d'épaisseur, protège toutes les formes de vie des conditions hostiles de l'espace. Pour Garan, cette vision a mis en évidence un paradoxe : alors que la biosphère est vibrante et pleine de vie, les systèmes humains traitent la planète comme une « subvention à l'économie mondiale. En d'autres termes, nous donnons la priorité à la croissance économique au détriment des systèmes naturels qui nous soutiennent. « Nous vivons un mensonge », a-t-il déclaré.
L'astronaute a également souligné comment des problèmes tels que le réchauffement climatique, la déforestation et la perte de biodiversité sont traités comme des problèmes isolés alors qu'ils sont en fait les symptômes d'un problème plus important : la déconnexion humaine avec la planète. "Depuis l'espace, il est clair que nous ne nous voyons pas comme faisant partie d'un tout. « Tant que nous ne changeons pas cette mentalité, nous continuerons à être en crise », a-t-il dit.
La solution, selon Garan, est un changement radical de priorités. Au lieu de penser « économie, société, planète », nous devrions inverser l'ordre : « planète, société, économie ». Ce simple échange reflète la nécessité de placer la santé environnementale comme base de toutes les autres décisions. « C'est la seule façon d'évoluer vraiment », a-t-il argumenté.
Un autre point crucial est l'indépendance. Garan a comparé l'effet global à "une lampe éclair" – une révélation sur la façon dont chaque action humaine, aussi petite qu'elle puisse paraître, affecte l'équilibre mondial. « Nous n'aurons pas de paix sur terre tant que nous n'aurons pas reconnu que tout est interconnecté », a-t-il déclaré.
Depuis son retour sur Terre, Garan s'est consacré à des projets qui favorisent la durabilité et la coopération mondiale. Son message est clair : nous devons de toute urgence repenser notre place dans le monde.
Avez-vous déjà imaginé ce que ça serait de voir la Terre sous cette perspective ? Même si cela n'arrive pas, la vision de Garan nous rappelle que chaque choix – de la consommation d'énergie à l'utilisation des ressources – est un pas vers la préservation (ou la destruction) de cette délicate « coquille » que nous appelons notre maison.
-
En soins palliatifs
- Par Thierry LEDRU
- Le 11/03/2025
- 0 commentaire
Voilà l'expression qui m'est venue lorsque j'ai entendu parler du plan du gouvernement présenté par la ministre de l'écologie. Je ne dis pas que les mesures annoncées sont inutiles, bien que très insuffisantes mais elles valident surtout l'idée que le gouvernement, comme ceux de tous les pays industrialisés, ont acté le fait que nous n'échapperons pas à une hausse importante des températures.
"Ce plan doit préparer la France à vivre dans un monde à +4°C d'ici 2100 afin de protéger la population."
A + 4 degrés, on ne protège plus personne, on compte les morts.
Ce qui signifie une hausse de plus ou moins 2 degrés dans 25 ans, à quelques années près. Ce qui me sidère, c'est qu'il n'est jamais question de décroissance. Tous les gouvernements rêvent de croissance pour éponger des dettes astronomiques et tous les grands groupes pétroliers investissent par milliards dans la quête effrénée de pétrole. Et l'UE prévoit de débloquer 800 milliards pour l'armement. Et la France est censée organiser en 2030 des JO d'hiver "écologiques".
Bon, c'est clair. On est entré dans la phase des soins palliatifs. On ne sauvera pas le malade. La fièvre continuera à grimper. Et ça n'est pas la prochaine COP ou autres grandes messes sous l'emprise des lobbies qui y changeront quelque chose ni les plans successifs de "transition écologique". Tous ceux qui s'intéressent au problème savent pertinemment que nos modèles de sociétés consuméristes ne sont plus viables.
Crise climatique : le gouvernement livre son Plan national d'adaptation et laisse les associations sceptiques
La version finale, présentée lundi, comporte quelques nuances par rapport à la première mouture dévoilée à l'automne. Ce troisième plan met l'accent sur la mise en œuvre d'une cinquantaine de mesures au niveau local, d'ores et déjà jugées insuffisantes par certains experts du climat.
Article rédigé par Louis San
France Télévisions
Publié le 10/03/2025 18:31
Temps de lecture : 5min
La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, à l'Assemblée nationale, à Paris, le 12 février 2025. (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS / AFP)
La copie a été revue. Avec plus d'un an de retard, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a présenté, lundi 10 mars, la version finale de la troisième édition du Plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc). Ce plan doit préparer la France à vivre dans un monde à +4°C d'ici 2100 afin de protéger la population.
Cette nouvelle mouture du Pnacc a été légèrement modifiée par rapport à la première, dévoilée en octobre 2024. Le ministère a souligné qu'elle était le fruit de plusieurs mois de concertation avec "toutes les parties prenantes", Etat, collectivités territoriales, acteurs économiques, citoyens. Au total, ils ont produit 6 000 contributions, dont 176 "cahiers d'acteurs".
L'un des priorités du plan est de réaliser une cartographie des vulnérabilités, avec une attention soutenue pour les établissements de santé, les infrastructures de transport ou de sécurité. L'accent est mis sur les territoires et secteurs les plus menacés comme le littoral, les montagnes, les forêts et l'agriculture. Parmi les mesures, le renforcement des protections pour les travailleurs exposés aux canicules, différentes études pour mieux adapter transports et exploitations agricoles ou encore une protection des principaux sites culturels français (tour Eiffel, mont Saint-Michel...).
Le confort d'été mieux intégré au DPE
Une autre mesure concerne la rénovation énergétique, afin d'adapter "les logements aux fortes chaleurs et pas seulement au froid". Il est prévu que le confort d'été soit mieux pris en compte dans le calcul du diagnostic de performance énergétique, le décrié DPE. Concrètement, "un travail sera lancé pour étudier la possibilité d'intégrer des gestes de confort d'été au dispositif MaPrimeRénov'", précise le ministère. Des mesures pour encourager le secteur bancaire à financer l'adaptation sont également mises en avant. Sous la houlette d'Agnès Pannier-Runacher et du ministre de l'Economie, Eric Lombard, une mission "sur le rôle du système bancaire dans la prévention des risques sera réalisée" au premier semestre 2026.
Le gouvernement a aussi insisté sur la place que doit prendre la trajectoire de référence d'adaptation au changement climatique (Tracc), c'est-à-dire le fameux scénario qui projette la France à +4°C d'ici la fin du siècle, en passant par un palier à +2,7°C en 2050. La démarche pour "donner une valeur juridique" à la Tracc doit connaître un coup d'accélérateur. Alors que l'exécutif voulait l'intégrer "progressivement" dans les textes publics, il affirme maintenant que la réflexion doit être achevée d'ici la fin de l'année.
Si certaines avancées sont enregistrées dans cette version finale du plan, des reculs sont également à signaler. Le Monde(Nouvelle fenêtre) rapporte ainsi que les entreprises du transport et de l'énergie ne seront plus obligées d'"instaurer progressivement" des plans d'adaptation, mais seront seulement incitées à le faire.
Flou sur le financement
La question du financement reste le point le plus épineux de ce plan. Adèle Tanguy, chercheuse à l'Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri), a salué sur le réseau social BlueSky(Nouvelle fenêtre) la mise en place d'une mission d'adaptation réunissant les agences de l'Etat, comme l'Ademe (l'agence de la Transition écologique), le Cerema (le Centre d'études et d'expertise sur les risques) et les agences de l'eau. Mais l'experte rappelle que ces agences disposent de "budgets diminués" et font face "à beaucoup de défiance politique, ce qui crée de l’incertitude". En effet, l'Ademe a été violemment critiquée, en janvier, par des figures de droite.
"Il est essentiel que l'adaptation soit dotée de moyens à la hauteur des enjeux", a déclaré Agnès Pannier-Runacher, disant avoir augmenté les enveloppes "à hauteur de 40%". Une affirmation "à nuancer", estime l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE), car en dépit des allégations, "les crédits dédiés à l'adaptation se maintiennent mais n'augmentent pas".
Autre voix critique, Oxfam juge le Pnacc "inopérant", pointant un manque "de gouvernance adaptée et de moyens budgétaires pour sa mise en œuvre". Condamnant un "brouillon inabouti", l'ONG écrit qu'il "prévoit de financer les politiques d’adaptation avec des fonds qu’il vient tout juste de supprimer, comme la coupe dans le Fonds vert" décidée pour le budget 2025. Oxfam accuse ainsi le gouvernement de "financer l'adaptation au détriment de la lutte contre le changement climatique". "Le changement climatique est un risque certain", a estimé de son côté Anne Bringault, directrice des programmes pour le Réseau action climat(Nouvelle fenêtre). Et de mettre en garde : "Il est plus que temps de le prendre réellement en compte dans les politiques publiques."
-
Une nature consciente
- Par Thierry LEDRU
- Le 10/03/2025
- 0 commentaire
Loin de moi l'idée prétentieuse que je m'oppose aux écrits de Camus mais il n'en reste pas moins que je n'aime pas dans cette citation le fait de considérer que le "monde" puisse se défaire s'il ne s'agit que de l'humanité et je suppose qu'il en était ainsi dans la pensée de Camus. Je n'ai pas souvenir dans mes nombreuses lectures de ses écrits que la nature elle-même ait tenu une place prépondérante. L'humanité oui, bien entendu. Les descriptions de la nature aussi mais pas dans le sens de sa nécessité. Juste de son impact. Il suffit de penser à "L'étranger" et au soleil, à la chaleur, à l'océan.
Ce monde qui se défait n'est donc pas juste la masse humaine mais bien l'entièreté de la vie. C'est elle que nous regardons souffrir. C'est elle qui se défait avec une ampleur que Camus n'aurait pu imaginer.
C'est pour cette raison que dans la dystopie en cours d'écriture, la nature devient un être réel, une entité intelligente, consciente, un personnage à part entière et comme l'humanité s'est engagée dans une voie destructrice, elle accompagne le mouvement, par mimétisme non par colère ou désir de vengeance. Juste parce que l'humanité représente une masse intelligente et qu'elle en vient à imiter ses comportements.
L'humanité souffrante, au lieu de se montrer solidaire et bienveillante envers l'ensemble du groupe humain, s'est dispersée, fragmentée, nourrie par des idées nationalistes, des suprématies, des désirs de puissance, de domination. Le chaos déclenché par des individus puissants, aux idées extrémistes, a plongé l'humanité toute entière dans une dévastation. Et la nature, si longtemps meurtrie, si impitoyablement martyrisée par les volontés d'exploitation s'engage elle aussi dans le chaos.
Les phénomènes naturels d'ampleur ne sont plus des effets de l'activité humaine mais des phénomènes intentionnels.
Je sais que cette idée remonte à loin dans ma vie. J'étais adolescent quand j'ai commencé à me demander si la nature ressentait l'amour que j'éprouvais pour elle et si elle s'en réjouissait. Il m'arrivait également de m'interroger sur ce qu'elle pouvait éprouver devant l'avidité destructrice des hommes. Est-ce qu'il était envisageable de penser qu'un jour peut-être elle ne le supporterait plus. Je n'imaginais pas pour autant une révolte de sa part mais bien plutôt un accompagnement. Puisque les hommes s'entretuent, elle se joint au mouvement. Dans une accélération du processus.
Un ancien texte écrit en 2012
L’AMOUR DE LA NATURE
Le titre évoque bien entendu, en première pensée, l'idée que l'homme peut aimer la Nature.
Mais la Nature éprouve-t-elle de l'Amour pour nous, pour tous les êtres, les végétaux, tout ce qu'elle crée ?
Y a-t-il en elle une émotion, un sentiment, un bonheur ?
Bien entendu, au premier abord, la proposition paraît absurde. Pour que cela soit, il faudrait une conscience et par conséquent un organe émetteur, un "cerveau", une entité extrêmement évoluée...
La Nature ne peut pas être assez évoluée pour ça.
Non, c'est cette phrase qui est absurde en fait. Rien de connu n'est plus évolué que la Nature. Nous en sommes un élément, performant c'est un fait, mais devant la richesse infinie de la Nature, rien ne dit que nous en sommes le point ultime au point d'être plus évolués qu'elle alors que nous en sommes issus. Cela signifierait qu'une des créations serait plus perfectionnée que l'entité créatrice elle-même... Que nous aurions conscience de l'élément qui nous a créés alors que ce créateur en serait dénué...
Il semblerait par conséquent que la performance humaine nous ait amenés à penser que rien ne serait plus conscient que l'être humain au point que la Nature dont nous sommes issus ne possèderait pas cette conscience. Comme s'il nous était insupportable d'imaginer une entité supérieure.
Et je ne parle évidemment pas d'un Dieu issu de la conscience des hommes.
Je parle uniquement de la Nature.
Mais si la Nature est effectivement dotée de cette conscience, cela suppose qu'il y a en elle une intelligence et par conséquent une intention quant à sa création. Nous sommes des êtres dotés d'intelligence et de conscience et nous nous engageons dans des voies précises avec une intention, un projet, une projection temporelle. C'est cela qui a permis l'évolution de notre espèce et nous ne pouvons pas regretter les temps préhistoriques. Nous vivons dans une sécurité bien supérieure à celle de Lucy, de Toumaï, des Gaulois, des serfs, des sans culottes, des Poilus, de nos grands-parents...Impossible de le nier. Malgré tout...
Bien, nous avons donc évolué en fonction d'une intention, celle d'améliorer le quotidien de chaque individu. Le nôtre d'abord. En travaillant à notre survie individuelle, nous avons contribué à celle de l'ensemble.
Pouvons-nous dès lors envisager que la Nature, dans l'hypothèse d'une conscience et d'une intelligence, agit différemment que la création la plus évoluée de son œuvre ? Il nous est bien nécessaire de considérer que cette Nature a un projet. Ou alors nous devons rejeter toute idée d'intelligence de sa part. Ce qui reviendrait à dire que nous sommes une entité disparate issue d'un fabuleux hasard...Hum...
Bien. Quel projet ? Voilà LA question... Ce projet nous est-il accessible dès lors que nous adoptons une attitude hautaine, dès lors que nous ne sommes plus dans un statut de création respectueuse mais que nous nous attribuons le rôle de maître supérieur ? Dès lors que nous considérons la Nature comme une entité hasardeuse, comment pourrions-nous accéder à ce projet alors que nous ne voyons dans notre évolution que le résultat de nos efforts et non une osmose constructive entre l'oeuvre créatrice ?
Si dans une classe, un élève en vient à penser qu'il est plus performant que le maître, il finira obligatoirement par fabriquer en lui un projet qui ne sera plus celui de ce maître...Je reconnais que parfois, c'est préférable pour les élèves au vu de certains professeurs...
Mais pour l’humanité ? Avons-nous bien fait de nous extraire ainsi d'une fusion nourricière en décidant que nos performances millénaires suffisaient à nourrir notre évolution ? Quelle évolution ?
Médicale, culturelle, technologique, matérielle. Oui, c'est indéniable.
Est-ce suffisant ?
Qu'en est-il de cet Amour dont je parlais ? Lorsque j'aime la Nature, le sait-elle ? N'y a-t-il de ma part qu'une opportunité que je saisis, la plénitude de la contemplation, le bonheur de la marche en montagne, l'émerveillement devant la neige qui tombe, ou cette joie infinie en moi transmute-t-elle dans le corps immense de la Nature ? Est-ce que je lui suis relié en tant que créature naturelle au point de lui faire ressentir ce que je vis lorsque je l'aime ?
On pourrait craindre si c'est le cas qu'elle ressente depuis un certain temps une animosité quasi générale et non un amour infini...Inutile de rappeler certains passages de la Bible par exemple. Ça remonte à loin tout ça...Et ça ne s'arrange guère...
Se pourrait-il dès lors que cette intention, ce projet de la Nature se soit révélé inconsidéré et que nous ayons échappé à son contrôle ? Mais a-t-elle instauré un contrôle ou sommes-nous une expérience libre de toutes entraves ? Le risque me paraît monstrueux...Se peut-il que cette intelligence humaine se soit retournée contre le créateur lui-même ou cela fait-il partie d'un projet qui nous échappe totalement étant donné qu'il semble se retourner contre l'expérimentateur lui-même ?
L'expérimenté se révolte et délaisse toute forme d'amour. Il brise ses chaînes ou ce qu'il imagine être des entraves, il s'élève sur le piédestal de son progrès, il réduit la création à une marchandise... Et cela ferait partie d'un projet ? Alors cela voudrait dire que la raison de la Nature est au-delà de la raison humaine. Et que nous ne pouvons pas la comprendre.
Ou bien que tout ceci n'était qu'une élucubration de plus et que nous ne sommes qu'un hasard fortuit au milieu d'un capharnaüm intersidéral.
Tant pis si c'est le cas. Je continuerai béatement à aimer la Nature en imaginant qu'elle m'aime en retour.
-
Les revenus de la guerre.
- Par Thierry LEDRU
- Le 09/03/2025
- 0 commentaire
"La guerre, un massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas. " ¨Paul Valéry
Artiste, écrivain, Philosophe, Poète (1871 - 1945)
"Il y a une lutte des classes, bien sûr, mais c'est ma classe, celle des riches, qui fait la guerre. Et nous gagnons.
Warren Buffet (milliardaire américain)
Sur les marchés financiers, les entreprises du secteur de la défense profitent du contexte géopolitique actuel. Lundi, les investisseurs se sont en effet rués à la bourse sur les actions des entreprises européennes d’armement.
Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié le 18/02/2025 08:27 Mis à jour le 18/02/2025 08:28
Temps de lecture : 2min
Dassault Aviation, avec son célèbre avion de combat Rafale, a gagné 6%. (YASUYOSHI CHIBA / AFP)
Le souhait de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen de lever les contraintes budgétaires pour permettre aux États-membres de financer la Défense a été entendue par les investisseurs. Ces derniers se sont en effet rués, à la bourse, sur les actions des entreprises européennes d’armement. Les indices boursiers en ont eux-mêmes profité : lundi 17 février, la bourse de Paris a gagné un peu plus de 0,13% avec un indice CAC40 arrimé au-dessus de 8 000 points. Progression proche de 0,1% de l’indice DAX à Francfort. Londres a gagné 0,2% grâce à cet appétit pour les valeurs de la Défense.
En France le groupe de hautes technologies Thales a gagné près de 6%, Safran (spécialisé dans l’aéronautique et le militaire) : +2%, Dassault Aviation (avec son célèbre avion de combat Rafale) a gagné 6%. Ces valeurs ont même atteint leur plus haut historique. La musique est la même ailleurs en Europe. L’action du constructeur aéronautique suédois Saab a flambé de 11%, l’allemand Rheinmetall de 9% à la Bourse de Francfort, etc.
Nouvel effet Donald Trump
Les déclarations d’Ursula von der Leyen en faveur d’une plus grande liberté budgétaire au niveau européen s’ajoutent aux positions exprimées très clairement par le président américain. Donald Trump met la pression sur les pays de l’Alliance atlantique pour qu’ils augmentent leur participation financière à l’effort de Défense de l’Otan jusqu’à 5% de leur PIB, leur richesse nationale. Quelque 5% pour l’heure, seule la Pologne en est la plus proche. Les autres tournent entre 2 et 3% de leur PIB.
Une perspective de hausse des budgets publics pour la Défense sous-entend une montée en puissance de la production industrielle d’armements et d’équipements militaire. Et il n’y a pas que la bourse. Une autre idée est de créer des obligations communes, des titres de dette émis par les États, pour financer nos efforts de Défense. L’équivalent des obligations vertes pour l’environnement. Nous sommes là dans un autre genre de beauté, mais les investissements nécessaires sont estimés à 3 000 milliards de dollars supplémentaires sur les dix prochaines années pour les puissances européennes.