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/ Vendredi 10 avril 2020 à 09:1028Image d'illustration © GILE MICHEL/SIPA
Une entreprise spécialisée dans la papeterie médicale s’est fait recaler par la Direction générale de l’Armement, habilitée à tester le matériel sanitaire, sous prétexte que les masques sont en papier.
Depuis le début de la crise du coronavirus, la pénurie de masques de protection met en péril le personnel soignant et les forces de l’ordre, particulièrement exposés, mais aussi toute la population française. Dépassé par les événements, l’Etat a bien commandé des millions de protections à la Chine, mais ces dernières arriveront… d’ici fin juin. Pourtant, ce ne sont pas les solutions alternatives qui manquent. L’entreprise Damiron, par exemple, spécialisée dans la papeterie médicale, a proposé de fabriquer et de livrer 15 millions de masques par mois, rapporte Capital. Seulement, les services de l’Etat ont refusé de les homologuer…
Rejetés par la DGA parce qu’en papier
Plutôt que de mettre son entreprise au chômage partiel, Laurent Chatin, le patron de Damiron, a voulu se rendre utile et mettre à profit les machines et le savoir-faire que son équipe possède pour fabriquer des masques et « en faire profiter le pays ». Avec ses huit salariés, il a donc travaillé pendant une quinzaine de jours pour concevoir un masque de protection anti-coronavirus qui réponde aux normes. Son produit, livrable en kit, se présente comme un cône en papier, parfaitement adaptable aux différentes formes de visages. Actuellement, l’entreprise est capable d’en produire 15 millions par mois, au prix unitaire de 50 centimes. Seulement, les prototypes n’ont, dans un premier temps, même pas été examinés par la Direction Générale de l’Armement (DGA), qui s’occupe (étrangement) de tester l’efficacité des nouveaux modèles. Débordés, les fonctionnaires de la DGA ont simplement envoyé un mail à Laurent Chatin, lui expliquant qu’ils ne testeront pas ses modèles parce qu’ils sont… en papier. Pourtant, comme l’explique Capital, les masques en papier sont plus intéressants que ceux en tissu, pour la simple et bonne raison que le virus ne survit que trois heures sur du papier, contre deux jours sur du tissu.
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Rejetés par l’Apave parce que jetables
Devant l’insistance du patron de Damiron, la DGA accepte finalement de tester les masques. Deux jours plus tard, ils sont à nouveau refusés, cette fois parce qu’ils ne collent pas bien au visage. Pour justifier leur décision, les fonctionnaires envoient une photo d’un des cônes pendant, et ce devant la bouche d’un mannequin. Problème : « Ils n’avaient pas compris que c’était un kit et qu’il fallait fixer l’attache », explique Laurent Chatin, stupéfait. Il leur signale immédiatement leur bévue, leur demandant de refaire un test, mais sa requête reste sans réponse. Loin de se laisser abattre, le patron de Damiron se tourne alors vers le principal organisme privé de certification, l’Apave, sur les conseils de la secrétaire d’Etat Agnès Pannier-Runacher. Mais il y reçoit le même accueil. Cette fois, on lui adresse un refus parce que son masque est jetable et à usage unique, et que « cela n’entre pas dans [leur] processus ». D’une ténacité à toute épreuve, Laurent Chatin écrit alors directement au directeur général de l’Apave. D’après Capital, ce dernier aurait, semble-t-il, débloqué la situation et les masques pourraient enfin être testés.