Tour de vélo

Il faisait beau, j'ai pris mon vélo. Evidemment, la machine à penser s'est mise en route en même temps que les jambes.

Toujours cette interrogation par rapport à l'espoir et l'intention.

Et puis, alors, que j'attaquais une belle côte, le flash, la lumière !!

Tout au long de mon parcours de vie, j'ai été confronté à des épreuves qui m'ont placé dans une situation de dépendance au regard de la médecine. Mon frère d'abord. Puis moi ensuite. Et là, j'ai compris que je détestais la notion d'espoir parce que j'en ai immensément souffert. Cet espoir que les médecins allaient sauver mon frère, puis qu'ils allaient me sauver. Je ne pouvais rien faire, j'étais dans une impuissance totale, du moins c'est ainsi que je le vivais. Même si je m'engageais autant que possible, cet espoir restait omniprésent et prioritaire. Mes actes passaient au second plan. 

Je n'avais aucune intention étant donné que je m'en remettais à leur toute puissance. Habitude éducative de l'abandon, l'image sacrée de la science.

 Cet espoir concernait par conséquent l'intention des autres. Pas la mienne.

J'ai appris peu à peu, au fil du temps à élaborer un autre cheminement. A me détacher intégralement de toute forme de soumission et de dépendance. Les espoirs appartenaient aux autres. Moi, je m'en tenais à l'intention. C'est à dire à ce que je pouvais mener à terme sans aucune aide extérieure.

J'ai repensé à cette expérience du canyoning, lorsqu'on s'est fait coincer Nathalie et moi et qu'on a failli se noyer sous les yeux de Léo. Je sais que je n'ai eu aucun espoir mais une détermination absolue, une force et une capacité de décision phénomènale, au-delà de tout ce que j'avais connu.

DÉLIVRANCE (récit)

J'avais une intention, celle de sauver Nathalie et de rester en vie. Et chaque geste, chaque décision, chaque pensée se joignait à une énergie fabuleuse. J'étais détaché de toute forme d'espoir. Et tout dépendait de moi. Nathalie comptait sur moi, même si elle aussi se retrouvait largement au-dessus de ses possibilités habituelles. Un saisissement extrême de chaque instant, une vie qui ne pouvait pas se projeter dans un futur inexistant. Etre là était la seule chance de rester en vie. L'espoir aurait été un dévoreur d'énergie.

Je sais que tout remonte à l'hôpital avec Christian que je veillais, jours et nuits. Toute ma vie a pris forme là-bas. J'avais seize ans. 

La vie m'a apris à me défaire de l'espoir et à me battre pour des intentions.

L'espoir est attaché à des dépendances envers autrui.

L'intention est ma propriété, je l'élabore, je la possède, j'en suis le seul garant.

Maintenant, tout est  clair. Mais il me reste à ré-appendre l'acceptation envers les personnes qui désirent m'aider...Délaisser les méfiances tout en restant vigilant. Ne pas absorber leurs espoirs, c'est leur propriété.

C'est en passant les 55 km que je me suis aperçu que je ne pensais plus à rien. Un grand éclat de rire.

 

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