Bouddhisme et Zen
- Par Thierry LEDRU
- Le 23/02/2010
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Présentation
Le bouddhisme, l'une des principales religions du monde, apparut au nord de l'Inde et fut fondée sur les enseignements de Bouddha.
Il y aurait 361 985 000 bouddhistes (56% mahayana, 38% theravada et 6% lamaïstes) à travers le monde (« Britannica Book of the year 2001).
Le bouddhisme compterait 300.000 à 400.000 fidèles en France (2006).
Vie du Bouddha
Les premières informations disponibles sur la vie du Bouddha (v. 563 -v. 483 av. J.-C.) ne sont que des comptes rendus.
Le Bouddha (de son vrai nom Siddhârta Gautama, prince des Sakya), dit Shakyamuni (« sage des Sakya »), serait né, sous un figuier, à Lumbini (Rupendehi) au Népal. Son père, Suddhodana, aurait gouverné le petit royaume de Kosala.
La légende dit qu'à sa naissance des maîtres de renom le reconnurent comme un être exceptionnel, né, sans coopération d'aucun homme, de la reine Mayadévi à l’extraordinaire beauté [d’où son surnom de « Maya » (illusion)] qui possède les 32 espèces de qualité (« aucune autre femme n’est capable de porter ce premier des hommes »).
L'enfant se serait mis aussitôt debout, aurait « pris possession » de l'Univers en se tournant vers les points cardinaux, puis aurait fait 7 pas vers le nord.
Le jeune prince fut élevé dans le luxe jusqu'à l'âge de 29 ans.
Puis il réalisa combien sa vie avait été vide et partit en quête de la paix et de l’Eveil, cherchant à s'affranchir du cycle des renaissances.
Pendant quelques années, il pratiqua le yoga et se soumit à de rigoureuses pratiques ascétiques.
Après 7 années d'efforts, il abandonna cette approche qui ne le satisfaisait pas et suivit une voie à mi-chemin entre une vie d'acceptation du monde et une vie de total renoncement.
Il s'asseyait sous un figuier pippal (connu depuis comme l'arbre de la Sagesse), méditait, expérimentait des états de conscience de plus en plus subtils ; il était « bodhisattva », c'est-à-dire candidat à la dignité de Bouddha.
Au cours d'une nuit, assis sous son figuier, il reçut l’Eveil et devint le Bouddha (« l’Eveillé »).
Il se mit à prêcher, allant de village en village, et, rassemblant un groupe de disciples, il forma une communauté de moines mendiants.
Il consacra le reste de sa vie à un enseignement purement oral (ce n'est qu'après sa mort que sa doctrine fut retranscrite par ses disciples).
Il mourut, âgé de 80 ans, dans une forêt, à Kusinagara (aujourd’hui Kasia, à 175 km au nord-ouest de Patna) où il avait fait halte au cours d’un long voyage à pied.
Une légende chinoise, réfutée par les hindous, identifie le Bouddha à Lao-Tseu.
La doctrine
Le bouddhisme fut à l'origine un mouvement monastique au sein de la tradition brahmanique.
Il prit rapidement une orientation bien différente puisque le Bouddha rejeta les aspects fondamentaux de la philosophie hindoue, récusa l'autorité sacerdotale, ne reconnut pas la validité des Ecritures védiques et renia le culte des divinités sur lequel elles étaient fondées.
De plus, la Voie qu'il prêchait était ouverte aux hommes et aux femmes de toutes castes car il refusait d'admettre que la valeur spirituelle d'une personne dépende de sa naissance.
Dans sa doctrine, le bouddhisme regarde le Bouddha comme un sage ayant montré le chemin du « nirvana » (l’extinction de tout désir et de toute peur), la libération de la roue (dharmaçakra) des incarnations (karma) appelée roue de la loi (dharmaçakrapravartana), l’abandon de la matière (sangsara) et la sérénité absolue.
Selon la pensée tibétaine, l'univers expérimentable de la conscience est constitué de 6 grands royaumes dans lesquels se répartissent les âmes suivant leur attachement aux illusions du monde.
Ces royaumes sont représentés, dans la branche tibétaine du bouddhisme, par la Roue de la Vie à 6 rayons, tenue par le dieu Yama, personnification de la mort et juge des âmes.
Lorsque le dernier souffle s'évade du corps du mourant, il fait tourner cette Roue de Vie à laquelle il communique son énergie, faite des expériences positives et négatives qu'il vient de vivre.
Pour le bouddhisme, toute mort donnée est un sacrilège et le respect dû à la vie s'étend à toute existence animale, ce qui entraîne l'obligation d'une nourriture végétarienne.
Le fait qu'il n'exige pas de culte à un dieu ne signifie pas qu'il soit athée mais simplement que dieu et les divinités étant les maîtres ordonnateurs du monde, il n'est pas nécessaire de leur rendre un culte.
Les 4 vérités
L'enseignement du bouddhisme peut se présenter par ces 4 grandes vérités fondamentales :
- La Première Vérité énonce que tout est éphémère ; les joies momentanées que nous éprouvons ont nécessairement une fin, ce qui occasionne de nouvelles douleurs. Le moi n'est que temporaire et subit naissance et mort, tandis que la conscience est seule soumise aux enchaînements karmiques qui occasionnent les réincarnations.
- La Seconde Vérité précise que le malheur des êtres provient de leurs désirs des choses de la vie et de leur volonté de vivre toujours.
- La Troisième Vérité est le résultat de l'acquisition des deux premières. Si l'on parvient à supprimer les désirs, les frustrations et souffrances qui en découlent disparaîtront.
- La Quatrième Vérité enseigne comment réaliser sa libération de l'enchaînement karmique, comment parvenir à la méditation pure, comme celle qui permit à Siddhârta de devenir Bouddha.
Petit Véhicule et Grand Véhicule
Le bouddhisme est scindé en deux grandes tendances :
- la doctrine primitive ou Theravada, dite encore Hinayana ou « Petit Véhicule »
- le Mahayana ou « Grand Véhicule » qui se développa dès le Ier siècle.
Le philosophe de l'Inde du Sud, Nagarjuna (fin du IIème s. apr. J. C.), le plus grand théoricien de la doctrine madhyamika (la voie du milieu), donna au bouddhisme du Mahayana une orientation décisive.
Nagarjuna exposa huit préceptes proches du jainisme : "S'abstenir de tuer, de voler, de commettre l'acte sexuel, de mentir, d'ingérer de l'alcool, de manger à des heures indues, de s'asseoir avec plaisir sur des sièges élevés, de chanter, de danser et d'arborer des ornements" (D. Hiilsman / M.-A Malfray, op. cit).
Le bouddhisme mahayana admet un paradis, un enfer et un juge souverain : Ksitigarbha.
Le bouddhisme s'est répandu en Inde, au Sri Lanka, en Thaïlande, au Cambodge, en Birmanie et au Laos, où la forme dominante a été le Theravada ; le Mahayana a surtout été représenté en Chine, au Japon, à Taïwan, au Tibet, au Népal, en Mongolie, en Corée, au Viêt-Nam, ainsi qu'en Inde.
Le zen
Le zen, une des formes les plus tardives du bouddhisme, est l'école de la méditation « dhyâna » apportée de Chine au Japon par des moines qui reçoivent les laïcs dans leurs monastères.
Le zen consiste à rechercher la sagesse et la maîtrise de soi par la méditation, une vie simple et naturelle, une discipline rigoureuse et la pratique de toutes sortes de travaux physiques (le zen considère les travaux manuels comme un support à la méditation).
Le but du zen est de parvenir à l'illumination « satori » sans que soit exigé un travail intellectuel ni une recherche spirituelle ou philosophique.
Il suffit de découvrir intuitivement la nature de Bouddha comme le dévoilent les « koans », sorte de problèmes insolubles qui démontrent que le raisonnement et l'intelligence ne sont pas nécessaires pour que s'éveille la « prajna » (sagesse) qui sommeille dans tout être humain.
L'intuition est jugée supérieure au raisonnement intellectuel, car le zen n'a pour objectif que le développement de l'être et la connaissance de soi selon l'aphorisme : « Regarde en toi, tu es le Bouddha ».
Historique
68 : l'empereur Mingdi (58-75) fait construire le premier temple bouddhiste de Chine : le monastère du Cheval Blanc à Luoyang (Hénan).
Vers 127/147. Sous le règne de Kanishka Ier [127(1)-147], le « concile » bouddhique de Kundalavana (Cachemire), définit les fondements du bouddhisme du « Grand Véhicule » : il est à l’origine de la division entre Grand et Petit Véhicule
277 : le lundi 26 février, Mani (ou Manès), fondateur du manichéisme, autoproclamé dernier prophète de la lignée des Zoroastre (ou Zarathoustra), Bouddha et Jésus, est mis à mort par le roi de Perse.
Vers 350 : apparition du bouddhisme zen au Japon.
448 : en Chine, le bouddhisme devient religion d’état.
502-549 : l’empereur de Chine, Liang Wudi, fervent bouddhiste, proscrit le taoïsme.
552 : année traditionnelle de l’introduction du bouddhisme au Japon.
607 : au Japon, le shintoïsme est détrôné par le bouddhisme.
641 : le prince tibétain Srong-btsan Sgam-po succède au roi Nam-ri (empoisonné) ; il épouse 2 princesses bouddhistes (l’une chinoise, l’autre népalaise) ; il fonde Lhassa et fait construire la forteresse (le Potala) et des monastères (religion Bôn).
Le 5 mai 685, le bouddhisme devient religion d'État au Japon.
731 : 16 juillet, sur ordre de l’empereur de Chine, Xuanzong, un « évêque » manichéen compose le « Catéchisme de la religion du Buddha de Lumière, Mani » (Moni guangfo jiao fa yi liüe) : ce texte, adroit mélange de taoïsme, de bouddhisme et de manichéisme et présentant Laozi et Sakya-muni comme des précurseurs ou des avatars antérieurs de Mani, est destiné à renseigner les autorités sur les dogmes, les Écritures, la discipline de la secte afin de la faire agréer officiellement. En 732, un édit accorda la liberté de culte à la « doctrine de Mo-mo-ni » (Mar Mani).
792 : au Tibet, le bouddhisme devient la religion officielle.
845 : en Chine, l’empereur Wuzong étant favorable au taoïsme, toutes les religions étrangères sont interdites et plus particulièrement le bouddhisme (sécularisation des moines, monastères détruits).
847 : l’empereur de Chine rouvre des couvents bouddhistes.
850 : disparition du bouddhisme dans le Nord de l’Inde ; l’hindouisme et le jaïnisme le remplacent.
1192 : en Inde, Mohammed de Ghor commence l’élimination des moines bouddhistes.
1197 : à Nâlandâ (Inde), le centre d’études bouddhiques est détruit par les musulmans.
1281 : en Chine, le taoïsme est proscrit par l’empereur Kubilay Khan au profit du bouddhisme.
1863 : en avril, en Perse, Mirza Husayn-Ali (+1892), dit « Baha Allah » (la Gloire de Dieu) d’où « Foi Baha’ie » ou « bahaïsme », déclare être la manifestation divine annoncée par le Bab. Les bahaïs croient qu’il est le dernier d’une série après Zoroastre, Bouddha, Jésus et Mahomet ; leur communauté religieuse est reconnue par les Nations Unies.
1950 : le 7 octobre, Mao Zedong donne l’ordre à l’armée de la République populaire de Chine d’envahir le Tibet considéré comme une province chinoise. Dès cette occupation, la région souffre de la violente politique d’assimilation chinoise : persécution des nombreux adeptes du bouddhisme lamaïque (le dalaï-lama part en exil en 1959), répression sanglante de toute velléité d’indépendance ou d’opposition au régime communiste, imposition du mandarin comme langue officielle, sinisation forcée.
1955. En octobre, proclamation de la République du Vietnam du Sud ; les catholiques s’opposent aux bouddhistes.
2009. Le 17 mai, des reliques du Bouddha (trouvées en Inde au XIXème siècle, lors de l'écroulement d'un stupa) sont installées à la Grande Pagode de Vincennes, un des pavillons construits pour l'Exposition coloniale de 1931, qui devient ainsi le haut-lieu spirituel du bouddhisme en Occident. L'Union bouddhiste de France (UBF) assure que l'installation en France de ces reliques a fait l'objet d'une prédiction et qu'elle symbolise un passage de relais du bouddhisme entre l'Orient et l'Occident. Il existe plusieurs reliques du Bouddha : pour remercier l'ONU d'avoir décrété jour férié la fête du Vesak, la Thaïlande, le Sri Lanka, ainsi que le Myanmar ont transféré douze de ses ossements au siège des Nations unies, à New York.
Citations
J'ai peine à croire qu'on puisse faire un Français d'un bouddhiste. (Xavier Saintine)
L'humanité a été tour à tour, fétichiste, idolâtre, chrétienne et bouddhiste, juive et mahométane, déiste et panthéiste. (Proudhon)
Si le bouddhisme est prôné de nos jours avec tant de faveur dans certains milieux européens, c’est que tous les esprits qui veulent tirer de l’humanitarisme une morale de bonté pour un monde sans Dieu sont déjà virtuellement bouddhistes (Jacques Maritain, Eléments de philosophie)
Note
(1) La découverte d'une inscription dans les années 1990 a permis de situer avec certitude l'an 1 de Kanishka en 127.
Auteur : Jean-Paul Coudeyrette.
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