Un shoot d'endorphines

Je sais bien que ça n'est pas recommandé de courir avec une sténose, trois hernies, des crampes liées à la dégénérescence des nerfs.

Marche et petit trot

18,66 km

3:01:02

9:42 /km

Dénivelé positif

703 m

Temps écoulé

3:05:04

 

 

Oui, le parcours était rude, montées, descentes, montées, descentes, dix-huit kilomètres, 700 mètres de dénivelée, trois heures à trottiner, toutes les montées en poussant avec les bâtons, en appui à chaque foulée dans les descentes. J'ai toujours mes bâtons de randonnée parce que les dégâts neurologiques font que mes chevilles se tordent facilement, trop facilement. Je cours avec des chaussures montantes qui serrent la malléole. Elles sont plus lourdes que des chaussures de trail classiques mais je n'ai pas le choix. Une entorse au fin fond d'une gorge, seul, à des kilomètres d'une route fréquentée, je n'ai pas envie de tester.

Donc, je cours. Pas vite mais je tiens le rythme qui me convient. Et là, aujourd'hui, je finissais par une montée de deux kilomètres, avec des portions bien raides, dans la caillasse.

J'avais les écouteurs dans les oreilles, comme toujours et j'ai bien senti arriver le moment du "shoot", quand les endorphines prennent la relève, qu'elles deviennent le carburant alors que les muscles sont durs.

"Les endorphines sont des neurotransmetteurs produits naturellement par le corps, agissant comme des analgésiques naturels et procurant une sensation de bien-être."

Je ne veux pas arrêter. C'est ma drogue. Je ne fume pas, je ne bois pas, je cours. Là, ce soir, je suis cassé, je marche au ralenti, j'ai mal partout, les jambes, le dos, la nuque, je sais que cette nuit, les crampes seront sans doute plus violentes que d'habitude. Mais demain, ça ira.

Et il me reste en mémoire cette dernière montée, quand j'ai ri tout seul, juste pour ce plaisir qui ne se raconte pas, la puissance, la force, les appuis, la bave aux lèvres, les souffles, les yeux exorbités pour déceler les pièges, les pierres de travers, les ornières sous les feuilles, et la poussée des bâtons, la poussée des bâtons, les abdos serrés, ne rien lâcher, tenir, tenir et boire jusqu'à la lie les flots d'endorphines. J'avais dans les oreilles les battements de mon coeur comme une rythmique qui accompagnait la musique, boum, boum, boum, le sang qui gicle et parcourt les artères, l'oxygène nécessaire, c'est tellement insignifiant de se contenter de respirer calmement, c'est tellement insuffisant, il faut pousser la machine, arracher la viande, que ça brûle, que ça soit dur, que les muscles crient misère jusqu'à ce moment libérateur du shoot préhistorique, les endorphines qui ont permis à nos ancêtres de courir plus vite que les prédateurs.

Le seul prédateur qui me concerne aujourd'hui, c'est la vieillesse mais pour l'instant, je cours plus vite qu'elle. Je n'ai aucunement envie de me préserver, de marcher à l'économie, de viser le grand âge. Je l'ai déjà écrit ici : que mon coeur lâche d'un coup au milieu d'une crue d'endorphine me comblerait de bonheur.

 

blog

Ajouter un commentaire