Huile de palme contre Rafale

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La France achète de l’huile de palme pour vendre des avions Rafale

GÉRARD LE PUILL

VENDREDI, 13 AVRIL, 2018

HUMANITE.FR

900.000 tonnes d’huile de palme sont importées en France chaque année dont les trois quarts finissent dans les réservoirs des véhicules sous forme de « carburants verts ». Photo : Reuters

900.000 tonnes d’huile de palme sont importées en France chaque année dont les trois quarts finissent dans les réservoirs des véhicules sous forme de « carburants verts ». (le terme donne une idée du foutage de gueule)

Trente mois après la conférence de Paris sur le climat et l’adoption d’un texte visant à freiner le réchauffement de la planète, la France promeut la déforestation en Afrique et en Asie en choisissant d’accroître ses importations d’huile de palme afin d’exporter des avions Rafale en Malaisie et dans d’autres pays.

Depuis un certain nombre d’années, des millions d’hectares de forêts primaires ont disparu dans les pays tropicaux pour développer les plantations de palmiers à huile afin d’exporter cette huile bon marché. Comme elle est également facile à travailler, l’industrie agroalimentaire des pays capitalistes développés et émergents en consomme de plus en plus. Il y a quelques jours, plusieurs associations dont « Rainforest Action Network»  (RAN) dénonçaient la destruction de 10.000 hectares de tourbières normalement  protégées sur l’île de Bornéo par le groupe du magnat Anthoni Salim avec l’aide du groupe « Indofood « présenté par ces associations comme un « partenaire incontournable des multinationales Pepsi Co et Nestlé ».

Les associations citent un rapport selon lequel l’une des filiales du groupe Salim avait « fait modifier la carte du moratoire protégeant les tourbières, alors même que les cartes établie par l’Agence de restauration des tourbières  classaient la plupart en zones de tourbières à protéger en priorité ». Selon Gemma Tillak, en charge de la politique forestière au sein du RAN, « ce rapport est une preuve évidente de pratiques douteuses et d’immobilisme aux plus  hauts niveaux des entreprises, alors que les forêts tropicales continuent de disparaître à cause de l’huile de palme produite de manière illégale ». Au RAN, on considère que « les partenaires commerciaux du Groupe Salim, comme Pepsi Co sont complices de cette déforestation illégale, car ils continuent de faire des affaires avec Salim sans être inquiétés. Pepsi Co, Nestlé et Wilmar doivent faire en sorte que leur partenaire commercial respecte le droit indonésien et les normes de développement soutenable sans déforestation ou bien mettre un terme à leur relation commerciale », ajoute le RAN.

900.000 tonnes d’huile de palme importées en France chaque année

On peut aussi se demander si l’Etat indonésien souhaite faire respecter le droit indonésien. Cette question vaut aussi pour de nombreux pays dont la France. Le Canard enchaîné du 4 avril  rappelait que 900.000 tonnes d’huile de palme sont importées en France chaque année dont les trois quarts finissent dans les réservoirs des véhicules sous forme de « carburants verts ». Ce diester entre concurrence avec l’huile de colza, une plante qui fleurit tout en jaune en ce moment sur nos terres céréalières. Mais le prix de la tonne payée aux paysans est passé de 430€ en février 2017 à 351€ en avril 2018. C’est une des conséquences de l’importation d’huile de palme de pays comme l’Indonésie et la Malaisie.

(et après Macron and co vont nous dire qu'ils prennent en considération les difficultés du monde paysan...)

Conscients du problème, les parlementaires européens ont adopté récemment un amendement discriminant l’huile de palme en raison de ses conséquences sur la déforestation. Selon le Canard, ils étaient en phase avec le souci de Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire de « mettre en route son fameux plan d’action contre l’importation de produits contribuant à la déforestation ». Mais, toujours selon le Canard, l’Elysée a envoyé la ministre de la Défense Florence Parly en Malaisie pour dire au gouvernement de ce pays qu’une directive européenne sur l’énergie reprenant « l’amendement adopté par le Parlement ne saurait être soutenu par les autorités françaises dans la mesure ou il discrimine l’huile de palme ».

Quand les intérêts de Total s’ajoutent à ceux de Dassault

Et pourquoi donc ? Parce que la Malaisie menaçait de ne pas acheter les 18 avions de combat Rafale que Dassault s’apprêtait à lui vendre. Qui plus est, Total doit ouvrir cet été dans les Bouches-du-Rhône une usine capable de traiter chaque année 500.000 tonnes de biodiesel avec un pourcentage élevé d’huile de palme. Il s’agirait d’un diester issu de plusieurs huiles mélangées. Or le feu vert doit être donné à cette nouvelle unité de production par le ministère de la Transition écologique et solidaire de Nicolas Hulot. D’où ce cri de colère de Sylvain Angerand, de l’ONG Les Amis de la Terre repris dans le Canard : « La position du ministère de l’Ecologie est schizophrène. D’un côté, il fait de la lutte contre la déforestation l’une de priorités de son plan Climat; de l’autre, il laisse construire une usine qui pourrait quasiment doubler les importations d’huile de palme».

Sylvain Angerand refuse de voir la réalité en face. Nous sommes de plein pied dans le « et en même temps » préconisé à tout bout de champ par Emmanuel Macron dès lorsque sa politique correspond aux intérêts immédiats des patrons. Quant à Nicolas Hulot… (au bûcher...)

 

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