Créons-nous notre propre réalité?
- Par Thierry LEDRU
- Le 16/02/2010
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Créons-nous notre propre réalité? Tout le monde admet qu'il y a du vrai là-dedans. Le tout est de savoir jusqu'à quel point vous acceptez cette idée. Jusqu'au point d'hésiter à aller faire vos courses ou de croire que la feuille qui vous est tombée sur la tête était le résultat de votre création? Les implications de ce principe sont énormes. Pas seulement pour nous et pour la vie que nous menons, mais aussi pour des choses bien plus vastes, comme les villes, les États, les pays et la planète. Mais, tout d'abord, qu'en est-il en ce qui vous concerne?
Qu'y a-t-il pour déjeuner? Que me réserve la vie?
Vous reconnaîtrez sans doute que vous créez quotidiennement votre vie, et ce, d'innombrables façons. Lorsque le réveille-matin se met à sonner, vous décidez si vous allez vous lever ou non. Vous choisissez ensuite les vêtements vous allez porter, ce que vous allez manger au petit-déjeuner, ou vous décidez peut-être même de ne rien manger. Puis, chaque fois que vous croisez quelqu'un durant la journée, que ce soit à la maison, au travail ou sur l'autoroute, vous décidez comment vous allez vous comporter envers cette personne. Vos intentions pour la journée - ou votre décision de ne pas avoir d'intentions précises, mais de vous laisser simplement flotter au gré de vos envies et des événements - influent sur ce que vous faites et sur ce qui vous arrive.
D'un point de vue plus large, la trajectoire de toute votre existence est déterminée par vos choix. Voulez-vous aller à l’université, vous marier, avoir des enfants? Vers quoi orienterez-vous vos études? Quelle carrière choisirez-vous? Quelle offre d'emploi accepterez-vous? Les circonstances de votre existence ne sont pas le fruit du "hasard"; elles sont basées sur les choix que vous faites - ou ne faites pas - chaque jour.
Mais la question demeure: dans quelle mesure tout cela contribue-t-il à façonner votre existence? La rencontre fortuite avec la femme de vos rêves est-elle due à vos choix? Avez-vous vraiment choisi d'avoir un patron tyrannique? Est-ce grâce à vous-même si vous avez gagné à la loterie? Et, au fait, vous façonnez la vie de qui au juste? La question peut sembler idiote, mais il est intéressant de se demander qui est exactement ce " je " lorsque vous dites: "Je crée ma propre réalité." La réponse à cette fascinante question jettera un peu de lumière sur tout ce sujet de la création.
Qui suis-je?
Revenons aux grandes questions. Le sage indien Ramana Maharshi a construit tout son enseignement autour de celle-là. Selon lui, un examen minutieux de cette question peut mener directement à l'illumination. Mais laissons de côté l'illumination pour l'instant et limitons-nous à l'acte de création.
Selon Fred Alan Wolf, "ce qu'il faut tout d'abord réaliser, c'est que l'idée que nous créons notre propre réalité est probablement erronée si nous entendons par ce "nous" cette personne égotiste qui, en nous, pensons-nous, mène le bal. Ce n'est sans doute pas cet aspect de nous qui crée la réalité ". Mais cela soulève une autre question: " Alors, qui l'a créé? "
Assurément, lorsque vous commandez votre première tasse de café, le matin, il est assez évident que c'est votre personnalité égotiste qui a décidé de prendre ce double cappucino, et non votre moi transcendant et immortel. Et quand un arbre atterrit sur votre rutilante voiture neuve, votre personnalité n’y est absolument pour rien.
La plupart des gens rejettent l'idée qu'ils sont responsables de la création de leur réalité lorsque survient dans leur vie quelque chose qu'ils n'auraient jamais voulu voir se produire. "Jamais je ne créerais une pareille chose!" C'est vrai; jamais leur personnalité ne le ferait. Mais, ainsi que l'affirment toutes les traditions spirituelles, notre être comporte plusieurs dimensions. Cette schizophrénie divine porte de nombreuses étiquettes: l'ego versus le véritable moi, la personnalité versus la divinité intérieure, le fils de l'homme versus le fils de Dieu, le corps mortel versus l'âme immortelle; mais, essentiellement, elle implique qu'il existe différents niveaux d'être à partir desquels vous pouvez créer. Le but de l'illumination est de dissiper cette fragmentation du moi et de créer à partir d'une unique source. Il s'agit donc d'élargir notre conscience jusqu'à ce que nous soyons pleinement conscients de toutes nos créations.
Accepter la responsabilité de ce que nous créons constitue un outil extraordinaire pour faciliter cette expansion de la conscience, car, si cette responsabilité existe, c'est une partie de nous-mêmes que nous rejetons ou nions chaque fois que nous refusons d'admettre le rôle que nous jouons dans la création de la réalité. Alors, la fragmentation continue. En fait, selon les sages illuminés, la partie spirituelle de notre être crée ces réalités dans le seul but de devenir complète. Pour évoluer, nous devons faire l'expérience de certaines choses qui ne sont pas nécessairement le premier choix de notre ego/personnalité. C'est ce qui s'appelle le karma: nous avons créé, dans un passé récent ou lointain, toutes les conditions auxquelles nous faisons face dans cette vie-ci. Mais de quelle façon les karmas de toutes les personnes vivant dans le monde sont-ils en interaction? Comment tout cela s'harmonise-t-il? Comment sont orchestrées toutes ces "coïncidences" heureuses (ou malheureuses) qui sont des signes avant-coureurs d'un nouveau monde? Qui fait fonctionner l'ordinateur qui gère tout cela pour plus de six milliards d'humains?
Comment cela fonctionne-t-il ?
C'est l'univers lui-même qui est l'ordinateur. Voilà la non-dualité. Tout est interconnecté et enchevêtré de telle sorte que tout est raccroché à tout et est créé à partir de tout ce qui est. L’univers ne réagit pas à nous; il est nous. Selon le modèle dualiste du karma, si je frappe quelqu'un, quelqu'un d'autre me frappera en retour. Cette manière de concevoir le phénomène est entièrement fondée sur le modèle newtonien de cause et d'effet. Mais si l'on aborde la chose à partir du modèle non dualiste de l’enchevêtrement de tout, on aura une vision fort différente du karma. On comprendra alors que l'idée d'une action ou d'une pensée (qui sont la même "chose") surgit dans une partie de ma conscience et qu'une certaine fréquence ou vibration y est associée. En accomplissant l'action, j'adhère à cette réalité, de sorte que je suis désormais relié à l'univers par cette fréquence ou cette vibration. Tout ce qui vibre à cette même fréquence dans l'univers y répondra et se reflétera ensuite dans ma réalité. [ C'est le principe sur lequel sont fondées la transmission et la réception d'ondes radio, rendues possibles lorsque le transmetteur et le récepteur syntonisent la même fréquence. ]
Il s'ensuit que tout ce qui se trouve dans notre vie - les gens, les lieux, les époques et les événements - n'est rien d'autre que le reflet de notre signature vibratoire. Selon Ramtha, "tout ce qui existe dans votre vie est en résonance spécifique avec qui vous êtes". Par conséquent, si vous voulez connaître la réponse à la question "Qui suis-je?", il vous suffit de regarder autour de vous. L’univers vous la fournit constamment.
L’ennui, c'est que les parties cachées et refoulées de notre être sont également reflétées, et nous les refoulons parce que nous ne les aimons pas. Ce sont ces reflets qui nous font dire: "Jamais je ne créerais une telle chose." Et c'est ce qui nous est reflété encore et encore jusqu'à ce que nous le comprenions. C'est la roue du karma, le grand manège de la vie. Ou encore, ainsi qu'un professeur de philosophie l'a déjà affirmé: "La vie est un sandwich à la merde et chaque jour nous en prenons une bouchée." Voilà le langage des vraies victimes.
La victimisation : un remède à la réalité présente
Se percevoir comme une victime, c'est peut-être la pire forme de refus de l'idée que nous créons notre propre réalité. Et cela arrive constamment. Ainsi, la victime dira: "Cette situation-là m'est tombée dessus. C'est injuste et injustifié." Comme corollaires, elle ajoutera : "Pauvre de moi. L’univers est injuste. Le karma s'applique de façon arbitraire et aléatoire."
L’avantage de cette attitude, c'est que l'on obtient la sympathie des autres et que l'on peut ainsi se sentir mieux parce que l'on ne se croit pas responsable de la situation. On peut donc jeter l'expérience aux oubliettes sans voir le rôle qu'on y a joué.
Le désavantage, c'est que l'on souscrit alors à l'idée que nous ne créons pas notre réalité (nous renonçons donc à ce pouvoir), et la leçon nous sera répétée à maintes et maintes reprises. Cela entraîne aussi une fragmentation de la réalité, puisque nous éliminons alors de la création le créateur.
Pour constater à quel point le sentiment de victimisation est répandu, on n'a qu'à en observer le reflet dans l'ensemble de la société. Les nouvelles télévisées s'intéressent grandement aux victimes. Aux États-Unis, la mentalité de victime a atteint des proportions épiques. S'il arrive quoi que ce soit de fâcheux à quelqu'un, sa première réaction est de chercher un coupable à qui intenter un procès. Comme le dit Don Juan à Carlos Castaneda dans Le Voyage à Ixtlan : "Tu t'es plaint durant toute ta vie parce que tu n'assumes pas la responsabilité de tes décisions. En ce qui me concerne, je n'ai aucun doute ni remords là-dessus. Tout ce que je fais est le fruit de ma décision et j'en assume la pleine responsabilité."
Le grand revirement
Tout comme le sentiment de victimisation constitue la pire forme de rejet de la prémisse de ce chapitre, le fait de dire "J'accepte ma responsabilité" en exprime la plus inconditionnelle acceptation. C'est là un revirement majeur dans la manière d'aborder le monde et les expériences que l'on y vit. Chaque situation peut susciter en nous une foule de questions: "Où suis-je dans cette situation? Quel aspect du moi est en cause? Qu'est-ce qui m'est ainsi reflété? De quel niveau de mon être cela provient-il?"
Au lieu de demander à l'univers de vous prouver que c'est bien vous qui créez la réalité, afin de pouvoir rester assis entre deux chaises et d'accepter ou de rejeter ce qui se passe, vous considérez comme allant de soi que vous créez vous-même votre vie et ses événements, et vous cherchez à comprendre ce qu'ils vous réflètent. Voilà en quoi consiste le revirement. Il ne s'agit pas de chercher à comprendre le sens philosophique ou cosmique de tel ou tel événement, mais plutôt de chercher à saisir ce qu'il révèle sur vous-même, sur votre création ou sur ce que vous niez dans votre vie. Désirez-vous changer des choses dans votre existence? Effectuez ce revirement et observez bien toutes les transformations qui se produiront
"Les gens attribuent toujours aux circonstances de leur vie ce qu'ils sont devenus, affirme le dramaturge britannique George Bernard Shaw. Je ne crois pas qu'elles soient en cause. Les gens qui réussissent tout en ce monde sont ceux qui recherchent les circonstances qu'ils désirent et qui les créent eux-mêmes s'ils n'ont pu les trouver."
Comment peut-on créer les circonstances? Comment fait-on apparaître les coïncidences qui auront un effet déterminant sur la direction que prendra notre existence? Il semble invraisemblable que quelqu'un puisse créer une série de coïncidences comme celles-ci: "J'avais oublié le formulaire chez moi et j'ai donc dû retourner le chercher en quatrième vitesse, mais j'ai eu une crevaison en chemin. Je me suis arrêté pour la réparer, et quand je me suis penché pour examiner le pneu, mon pantalon s'est déchiré. Je me suis mis une couverture autour de la taille et voilà qu'une personne passant par là en voiture a reconnu cette couverture qu'elle avait conçue. Elle s'est donc arrêtée, et, au bout de quelque temps, nous nous sommes mariés." Il ne s'agissait là que d'une série de coïncidences, mais ce que nous voulons démontrer par cet exemple, c'est qu'il s'agissait de co-incidences. Cet heureux époux avait-il créé la crevaison? Ou bien avait-il imaginé qu'il se marierait et l'univers a mis au point les détails ? (C'est le genre de questions qui sont soulevées lorsqu'on admet l'idée que nous créons notre propre réalité.) Lors des expériences visant à provoquer un changement de pH de l'eau, William Tiller fit observer ceci: "On me demande parfois s'il est préférable de formuler en détail ses intentions ou bien de les énoncer sommairement en laissant l'univers trouver un moyen de les réaliser. En général, la seconde méthode est la meilleure."
Autrement dit, au lieu de dicter toutes les étapes du changement de pH de l'eau, comme le réarrangement des liens chimiques, l'échange d'ions et ainsi de suite, les méditateurs impliqués dans les expériences du docteur Tiller se sont focalisés sur le résultat souhaité et ont laissé toute la latitude à l'univers en ce qui concerne les détails.
Le temps et les possibilités
Pourtant la question demeure: comment tout cela fonctionne-t-il? Et comment peut-on être davantage conscient des possibilités de sorte que le processus de création soit plus conscient? Voici ce qu'Amit Goswami nous confiait à ce sujet:
On peut prendre comme hypothèse de travail que la conscience est le fondement de l'être. Il y a tout un éventail de possibilités auxquelles elle a accès. Parmi ces possibilités, elle en choisit une qu'elle manifeste et qu'elle observe. En physique quantique, on parle souvent de possibilités, mais, lorsque vous y réfléchissez, combien de fois vous êtes-vous demandé quelles étaient toutes les possibilités? Vous pouvez vous en tenir à des choses banales, comme la sorte de crème glacée que vous choisirez cette fois-ci, vanille ou chocolat, ce qui repose entièrement sur vos expériences antécédentes. Mais vous ratez ainsi la dimension quantique de votre vie.
Le docteur Goswami compare les possibilités offertes dans la vie d'un individu aux ondes de probabilité d'un électron qui se dispersent. Cela signifie que les options de votre vie sont aussi "réelles" que les ondes prédites par l'équation de Schrodinger. Stuart Hameroff pousse ce concept un peu plus loin:
Chaque pensée consciente peut être considérée comme un choix, une superposition quantique s'effondrant pour devenir un choix donné. Supposons, par exemple, que vous regardez le menu d'un restaurant en essayant de décider si vous prendrez des crevettes, des pâtes ou bien du thon. Imaginez que vous avez une superposition quantique de toutes ces possibilités coexistant simultanément. Vous pouvez même vous projeter en pensée dans l'avenir quelques instants afin de goûter à ces différents mets. Ensuite vous décidez: "Ah! Je vais prendre du spaghetti."
Se projeter ainsi dans l'avenir ne relève pas autant de la science-fiction qu'on pourrait le croire. Comme le docteur Hameroffle fait remarquer : "Dans la théorie quantique, on peut aussi remonter dans le temps, et des indices nous laissent croire que certains processus du cerveau permettent à la conscience de se projeter dans le passé." Si toutes ces théories s'avèrent correctes, cela veut dire que la conscience d'un individu scrute constamment toutes les possibi1ités futures, allant peut-être même dans l'avenir afin, par exemple, de "sentir" s'il convient d'épouser ou non telle personne, pour ensuite se focaliser sur la possibilité retenue et l'amener à se manifester (s'effondrer) dans la réalité présente. La façon dont tout cela se produit est prise en charge par l'univers superintelligent et immensément interactif, qui réagit automatiquement à la conscience parce que telle est sa nature fondamentale.
L'univers est comme un ordinateur qui supervise tout ce qui se passe; voilà pourquoi il existe. Et s'il peut créer des formes de vie douées de conscience et capables de se reproduire elles-mêmes, il est certainement capable de réparer un pneu crevé.
En quoi cette vision des choses rend-elle la création plus consciente? Pour bien des gens, l'avenir paraît se trouver de l'autre côté d'un grand mur qu'il leur est impossible de franchir. Ces possibilités latentes ne sont donc pas décelées et c'est ainsi une surprise totale ou même un choc pour eux lorsqu'elles se manifestent. Mais le fait de prendre conscience que ces possibilités sont bel et bien réelles, et qu'elles peuvent être développées, manipulées et manifestées (effondrées), nous fait progresser au-delà du mur et jusque dans l'avenir, où de nouveaux horizons s'ouvrent alors à nous.
Créer sa journée
Votre pool de réalité créée se trouve juste devant vous. S'étalant sur le paysage du temps, ces possibilités attendent un "mouvement de la conscience" pour lui faire vivre un événement réel. Mais supposons que vous faites preuve d'un peu plus d'initiative, et imaginons, par exemple, que vous êtes un paysagiste engagé qui ne veut pas laisser les mauvaises herbes de l'univers s'implanter en lui et qui ensemence plutôt ce paysage de possibilités avec ses créations conscientes.
Ce qui semble avoir fasciné le plus les gens qui ont vu le film What the BLEEP Do We Know? [Que sait-on vraiment de la réalité?], c'est le concept de la création de sa journée. Cette technique fut enseignée par Ramtha à ses étudiants pour la première fois en 1992 et elle est l'un des fondements des enseignements de son école, à Yelm, dans l'État de Washington. "Aucun maître digne de ce nom, expliquait Ramtha, ne laisse la journée se dérouler sans l'avoir préalablement visualisée. Les maîtres créent effectivement leur journée."
* * *
Cet admirable enseignement aborde la question de l'identité du moi, qui est le véritable sujet de ce chapitre. Qui est le " je " qui crée? Si c'est la personnalité, les créations seront alors constituées à partir des structures existantes, c'est-à-dire vos habitudes, vos penchants naturels, le contenu de vos réseaux neuronaux et toute votre vieille personnalité, et vous ne créerez rien d'autre que les mêmes vieilles choses habituelles. Créer ce qui existe déjà peut difficilement être qualifié de nouvelle création.
Mais vous pouvez aussi créer à partir du moi supérieur, de votre moi divin. Dans ce cas, cela se fait habituellement de façon inconsciente et c'est le résultat d'un karma quelconque dont les racines sont profondément enfouies en vous. Alors, bien que ces créations soient merveilleuses pour l'esprit, elles semblent arbitraires et injustes aux yeux de la personnalité déconnectée, et elles font naître des sentiments d'impuissance et de victimisation.
Il faut noter que cette technique tire avantage du moment de non-moi ou d'émergence du nouveau moi. On peut manifester quelque chose de véritablement nouveau et le faire en toute conscience à partir de cet aspect supérieur de notre être. Créer de cette manière fait disparaître pour toujours le piège de la victimisation et de la déresponsabilisation.
Cela permet d'affirmer chaque jour, et de manière très réelle que vous créez votre propre réalité. Si tout cela est fondé, cette affirmation aura énormément d’impact dans votre vie.
William Arntz, Betsy Chasse et Mark Vincente : Extraits de leur livre Que sait-on vraiment de la réalité? p.108-117.Editions Ariane, 2006.
Qu'y a-t-il pour déjeuner? Que me réserve la vie?
Vous reconnaîtrez sans doute que vous créez quotidiennement votre vie, et ce, d'innombrables façons. Lorsque le réveille-matin se met à sonner, vous décidez si vous allez vous lever ou non. Vous choisissez ensuite les vêtements vous allez porter, ce que vous allez manger au petit-déjeuner, ou vous décidez peut-être même de ne rien manger. Puis, chaque fois que vous croisez quelqu'un durant la journée, que ce soit à la maison, au travail ou sur l'autoroute, vous décidez comment vous allez vous comporter envers cette personne. Vos intentions pour la journée - ou votre décision de ne pas avoir d'intentions précises, mais de vous laisser simplement flotter au gré de vos envies et des événements - influent sur ce que vous faites et sur ce qui vous arrive.
D'un point de vue plus large, la trajectoire de toute votre existence est déterminée par vos choix. Voulez-vous aller à l’université, vous marier, avoir des enfants? Vers quoi orienterez-vous vos études? Quelle carrière choisirez-vous? Quelle offre d'emploi accepterez-vous? Les circonstances de votre existence ne sont pas le fruit du "hasard"; elles sont basées sur les choix que vous faites - ou ne faites pas - chaque jour.
Mais la question demeure: dans quelle mesure tout cela contribue-t-il à façonner votre existence? La rencontre fortuite avec la femme de vos rêves est-elle due à vos choix? Avez-vous vraiment choisi d'avoir un patron tyrannique? Est-ce grâce à vous-même si vous avez gagné à la loterie? Et, au fait, vous façonnez la vie de qui au juste? La question peut sembler idiote, mais il est intéressant de se demander qui est exactement ce " je " lorsque vous dites: "Je crée ma propre réalité." La réponse à cette fascinante question jettera un peu de lumière sur tout ce sujet de la création.
Qui suis-je?
Revenons aux grandes questions. Le sage indien Ramana Maharshi a construit tout son enseignement autour de celle-là. Selon lui, un examen minutieux de cette question peut mener directement à l'illumination. Mais laissons de côté l'illumination pour l'instant et limitons-nous à l'acte de création.
Selon Fred Alan Wolf, "ce qu'il faut tout d'abord réaliser, c'est que l'idée que nous créons notre propre réalité est probablement erronée si nous entendons par ce "nous" cette personne égotiste qui, en nous, pensons-nous, mène le bal. Ce n'est sans doute pas cet aspect de nous qui crée la réalité ". Mais cela soulève une autre question: " Alors, qui l'a créé? "
Assurément, lorsque vous commandez votre première tasse de café, le matin, il est assez évident que c'est votre personnalité égotiste qui a décidé de prendre ce double cappucino, et non votre moi transcendant et immortel. Et quand un arbre atterrit sur votre rutilante voiture neuve, votre personnalité n’y est absolument pour rien.
La plupart des gens rejettent l'idée qu'ils sont responsables de la création de leur réalité lorsque survient dans leur vie quelque chose qu'ils n'auraient jamais voulu voir se produire. "Jamais je ne créerais une pareille chose!" C'est vrai; jamais leur personnalité ne le ferait. Mais, ainsi que l'affirment toutes les traditions spirituelles, notre être comporte plusieurs dimensions. Cette schizophrénie divine porte de nombreuses étiquettes: l'ego versus le véritable moi, la personnalité versus la divinité intérieure, le fils de l'homme versus le fils de Dieu, le corps mortel versus l'âme immortelle; mais, essentiellement, elle implique qu'il existe différents niveaux d'être à partir desquels vous pouvez créer. Le but de l'illumination est de dissiper cette fragmentation du moi et de créer à partir d'une unique source. Il s'agit donc d'élargir notre conscience jusqu'à ce que nous soyons pleinement conscients de toutes nos créations.
Accepter la responsabilité de ce que nous créons constitue un outil extraordinaire pour faciliter cette expansion de la conscience, car, si cette responsabilité existe, c'est une partie de nous-mêmes que nous rejetons ou nions chaque fois que nous refusons d'admettre le rôle que nous jouons dans la création de la réalité. Alors, la fragmentation continue. En fait, selon les sages illuminés, la partie spirituelle de notre être crée ces réalités dans le seul but de devenir complète. Pour évoluer, nous devons faire l'expérience de certaines choses qui ne sont pas nécessairement le premier choix de notre ego/personnalité. C'est ce qui s'appelle le karma: nous avons créé, dans un passé récent ou lointain, toutes les conditions auxquelles nous faisons face dans cette vie-ci. Mais de quelle façon les karmas de toutes les personnes vivant dans le monde sont-ils en interaction? Comment tout cela s'harmonise-t-il? Comment sont orchestrées toutes ces "coïncidences" heureuses (ou malheureuses) qui sont des signes avant-coureurs d'un nouveau monde? Qui fait fonctionner l'ordinateur qui gère tout cela pour plus de six milliards d'humains?
Comment cela fonctionne-t-il ?
C'est l'univers lui-même qui est l'ordinateur. Voilà la non-dualité. Tout est interconnecté et enchevêtré de telle sorte que tout est raccroché à tout et est créé à partir de tout ce qui est. L’univers ne réagit pas à nous; il est nous. Selon le modèle dualiste du karma, si je frappe quelqu'un, quelqu'un d'autre me frappera en retour. Cette manière de concevoir le phénomène est entièrement fondée sur le modèle newtonien de cause et d'effet. Mais si l'on aborde la chose à partir du modèle non dualiste de l’enchevêtrement de tout, on aura une vision fort différente du karma. On comprendra alors que l'idée d'une action ou d'une pensée (qui sont la même "chose") surgit dans une partie de ma conscience et qu'une certaine fréquence ou vibration y est associée. En accomplissant l'action, j'adhère à cette réalité, de sorte que je suis désormais relié à l'univers par cette fréquence ou cette vibration. Tout ce qui vibre à cette même fréquence dans l'univers y répondra et se reflétera ensuite dans ma réalité. [ C'est le principe sur lequel sont fondées la transmission et la réception d'ondes radio, rendues possibles lorsque le transmetteur et le récepteur syntonisent la même fréquence. ]
Il s'ensuit que tout ce qui se trouve dans notre vie - les gens, les lieux, les époques et les événements - n'est rien d'autre que le reflet de notre signature vibratoire. Selon Ramtha, "tout ce qui existe dans votre vie est en résonance spécifique avec qui vous êtes". Par conséquent, si vous voulez connaître la réponse à la question "Qui suis-je?", il vous suffit de regarder autour de vous. L’univers vous la fournit constamment.
L’ennui, c'est que les parties cachées et refoulées de notre être sont également reflétées, et nous les refoulons parce que nous ne les aimons pas. Ce sont ces reflets qui nous font dire: "Jamais je ne créerais une telle chose." Et c'est ce qui nous est reflété encore et encore jusqu'à ce que nous le comprenions. C'est la roue du karma, le grand manège de la vie. Ou encore, ainsi qu'un professeur de philosophie l'a déjà affirmé: "La vie est un sandwich à la merde et chaque jour nous en prenons une bouchée." Voilà le langage des vraies victimes.
La victimisation : un remède à la réalité présente
Se percevoir comme une victime, c'est peut-être la pire forme de refus de l'idée que nous créons notre propre réalité. Et cela arrive constamment. Ainsi, la victime dira: "Cette situation-là m'est tombée dessus. C'est injuste et injustifié." Comme corollaires, elle ajoutera : "Pauvre de moi. L’univers est injuste. Le karma s'applique de façon arbitraire et aléatoire."
L’avantage de cette attitude, c'est que l'on obtient la sympathie des autres et que l'on peut ainsi se sentir mieux parce que l'on ne se croit pas responsable de la situation. On peut donc jeter l'expérience aux oubliettes sans voir le rôle qu'on y a joué.
Le désavantage, c'est que l'on souscrit alors à l'idée que nous ne créons pas notre réalité (nous renonçons donc à ce pouvoir), et la leçon nous sera répétée à maintes et maintes reprises. Cela entraîne aussi une fragmentation de la réalité, puisque nous éliminons alors de la création le créateur.
Pour constater à quel point le sentiment de victimisation est répandu, on n'a qu'à en observer le reflet dans l'ensemble de la société. Les nouvelles télévisées s'intéressent grandement aux victimes. Aux États-Unis, la mentalité de victime a atteint des proportions épiques. S'il arrive quoi que ce soit de fâcheux à quelqu'un, sa première réaction est de chercher un coupable à qui intenter un procès. Comme le dit Don Juan à Carlos Castaneda dans Le Voyage à Ixtlan : "Tu t'es plaint durant toute ta vie parce que tu n'assumes pas la responsabilité de tes décisions. En ce qui me concerne, je n'ai aucun doute ni remords là-dessus. Tout ce que je fais est le fruit de ma décision et j'en assume la pleine responsabilité."
Le grand revirement
Tout comme le sentiment de victimisation constitue la pire forme de rejet de la prémisse de ce chapitre, le fait de dire "J'accepte ma responsabilité" en exprime la plus inconditionnelle acceptation. C'est là un revirement majeur dans la manière d'aborder le monde et les expériences que l'on y vit. Chaque situation peut susciter en nous une foule de questions: "Où suis-je dans cette situation? Quel aspect du moi est en cause? Qu'est-ce qui m'est ainsi reflété? De quel niveau de mon être cela provient-il?"
Au lieu de demander à l'univers de vous prouver que c'est bien vous qui créez la réalité, afin de pouvoir rester assis entre deux chaises et d'accepter ou de rejeter ce qui se passe, vous considérez comme allant de soi que vous créez vous-même votre vie et ses événements, et vous cherchez à comprendre ce qu'ils vous réflètent. Voilà en quoi consiste le revirement. Il ne s'agit pas de chercher à comprendre le sens philosophique ou cosmique de tel ou tel événement, mais plutôt de chercher à saisir ce qu'il révèle sur vous-même, sur votre création ou sur ce que vous niez dans votre vie. Désirez-vous changer des choses dans votre existence? Effectuez ce revirement et observez bien toutes les transformations qui se produiront
"Les gens attribuent toujours aux circonstances de leur vie ce qu'ils sont devenus, affirme le dramaturge britannique George Bernard Shaw. Je ne crois pas qu'elles soient en cause. Les gens qui réussissent tout en ce monde sont ceux qui recherchent les circonstances qu'ils désirent et qui les créent eux-mêmes s'ils n'ont pu les trouver."
Comment peut-on créer les circonstances? Comment fait-on apparaître les coïncidences qui auront un effet déterminant sur la direction que prendra notre existence? Il semble invraisemblable que quelqu'un puisse créer une série de coïncidences comme celles-ci: "J'avais oublié le formulaire chez moi et j'ai donc dû retourner le chercher en quatrième vitesse, mais j'ai eu une crevaison en chemin. Je me suis arrêté pour la réparer, et quand je me suis penché pour examiner le pneu, mon pantalon s'est déchiré. Je me suis mis une couverture autour de la taille et voilà qu'une personne passant par là en voiture a reconnu cette couverture qu'elle avait conçue. Elle s'est donc arrêtée, et, au bout de quelque temps, nous nous sommes mariés." Il ne s'agissait là que d'une série de coïncidences, mais ce que nous voulons démontrer par cet exemple, c'est qu'il s'agissait de co-incidences. Cet heureux époux avait-il créé la crevaison? Ou bien avait-il imaginé qu'il se marierait et l'univers a mis au point les détails ? (C'est le genre de questions qui sont soulevées lorsqu'on admet l'idée que nous créons notre propre réalité.) Lors des expériences visant à provoquer un changement de pH de l'eau, William Tiller fit observer ceci: "On me demande parfois s'il est préférable de formuler en détail ses intentions ou bien de les énoncer sommairement en laissant l'univers trouver un moyen de les réaliser. En général, la seconde méthode est la meilleure."
Autrement dit, au lieu de dicter toutes les étapes du changement de pH de l'eau, comme le réarrangement des liens chimiques, l'échange d'ions et ainsi de suite, les méditateurs impliqués dans les expériences du docteur Tiller se sont focalisés sur le résultat souhaité et ont laissé toute la latitude à l'univers en ce qui concerne les détails.
Le temps et les possibilités
Pourtant la question demeure: comment tout cela fonctionne-t-il? Et comment peut-on être davantage conscient des possibilités de sorte que le processus de création soit plus conscient? Voici ce qu'Amit Goswami nous confiait à ce sujet:
On peut prendre comme hypothèse de travail que la conscience est le fondement de l'être. Il y a tout un éventail de possibilités auxquelles elle a accès. Parmi ces possibilités, elle en choisit une qu'elle manifeste et qu'elle observe. En physique quantique, on parle souvent de possibilités, mais, lorsque vous y réfléchissez, combien de fois vous êtes-vous demandé quelles étaient toutes les possibilités? Vous pouvez vous en tenir à des choses banales, comme la sorte de crème glacée que vous choisirez cette fois-ci, vanille ou chocolat, ce qui repose entièrement sur vos expériences antécédentes. Mais vous ratez ainsi la dimension quantique de votre vie.
Le docteur Goswami compare les possibilités offertes dans la vie d'un individu aux ondes de probabilité d'un électron qui se dispersent. Cela signifie que les options de votre vie sont aussi "réelles" que les ondes prédites par l'équation de Schrodinger. Stuart Hameroff pousse ce concept un peu plus loin:
Chaque pensée consciente peut être considérée comme un choix, une superposition quantique s'effondrant pour devenir un choix donné. Supposons, par exemple, que vous regardez le menu d'un restaurant en essayant de décider si vous prendrez des crevettes, des pâtes ou bien du thon. Imaginez que vous avez une superposition quantique de toutes ces possibilités coexistant simultanément. Vous pouvez même vous projeter en pensée dans l'avenir quelques instants afin de goûter à ces différents mets. Ensuite vous décidez: "Ah! Je vais prendre du spaghetti."
Se projeter ainsi dans l'avenir ne relève pas autant de la science-fiction qu'on pourrait le croire. Comme le docteur Hameroffle fait remarquer : "Dans la théorie quantique, on peut aussi remonter dans le temps, et des indices nous laissent croire que certains processus du cerveau permettent à la conscience de se projeter dans le passé." Si toutes ces théories s'avèrent correctes, cela veut dire que la conscience d'un individu scrute constamment toutes les possibi1ités futures, allant peut-être même dans l'avenir afin, par exemple, de "sentir" s'il convient d'épouser ou non telle personne, pour ensuite se focaliser sur la possibilité retenue et l'amener à se manifester (s'effondrer) dans la réalité présente. La façon dont tout cela se produit est prise en charge par l'univers superintelligent et immensément interactif, qui réagit automatiquement à la conscience parce que telle est sa nature fondamentale.
L'univers est comme un ordinateur qui supervise tout ce qui se passe; voilà pourquoi il existe. Et s'il peut créer des formes de vie douées de conscience et capables de se reproduire elles-mêmes, il est certainement capable de réparer un pneu crevé.
En quoi cette vision des choses rend-elle la création plus consciente? Pour bien des gens, l'avenir paraît se trouver de l'autre côté d'un grand mur qu'il leur est impossible de franchir. Ces possibilités latentes ne sont donc pas décelées et c'est ainsi une surprise totale ou même un choc pour eux lorsqu'elles se manifestent. Mais le fait de prendre conscience que ces possibilités sont bel et bien réelles, et qu'elles peuvent être développées, manipulées et manifestées (effondrées), nous fait progresser au-delà du mur et jusque dans l'avenir, où de nouveaux horizons s'ouvrent alors à nous.
Créer sa journée
Votre pool de réalité créée se trouve juste devant vous. S'étalant sur le paysage du temps, ces possibilités attendent un "mouvement de la conscience" pour lui faire vivre un événement réel. Mais supposons que vous faites preuve d'un peu plus d'initiative, et imaginons, par exemple, que vous êtes un paysagiste engagé qui ne veut pas laisser les mauvaises herbes de l'univers s'implanter en lui et qui ensemence plutôt ce paysage de possibilités avec ses créations conscientes.
Ce qui semble avoir fasciné le plus les gens qui ont vu le film What the BLEEP Do We Know? [Que sait-on vraiment de la réalité?], c'est le concept de la création de sa journée. Cette technique fut enseignée par Ramtha à ses étudiants pour la première fois en 1992 et elle est l'un des fondements des enseignements de son école, à Yelm, dans l'État de Washington. "Aucun maître digne de ce nom, expliquait Ramtha, ne laisse la journée se dérouler sans l'avoir préalablement visualisée. Les maîtres créent effectivement leur journée."
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Cet admirable enseignement aborde la question de l'identité du moi, qui est le véritable sujet de ce chapitre. Qui est le " je " qui crée? Si c'est la personnalité, les créations seront alors constituées à partir des structures existantes, c'est-à-dire vos habitudes, vos penchants naturels, le contenu de vos réseaux neuronaux et toute votre vieille personnalité, et vous ne créerez rien d'autre que les mêmes vieilles choses habituelles. Créer ce qui existe déjà peut difficilement être qualifié de nouvelle création.
Mais vous pouvez aussi créer à partir du moi supérieur, de votre moi divin. Dans ce cas, cela se fait habituellement de façon inconsciente et c'est le résultat d'un karma quelconque dont les racines sont profondément enfouies en vous. Alors, bien que ces créations soient merveilleuses pour l'esprit, elles semblent arbitraires et injustes aux yeux de la personnalité déconnectée, et elles font naître des sentiments d'impuissance et de victimisation.
Il faut noter que cette technique tire avantage du moment de non-moi ou d'émergence du nouveau moi. On peut manifester quelque chose de véritablement nouveau et le faire en toute conscience à partir de cet aspect supérieur de notre être. Créer de cette manière fait disparaître pour toujours le piège de la victimisation et de la déresponsabilisation.
Cela permet d'affirmer chaque jour, et de manière très réelle que vous créez votre propre réalité. Si tout cela est fondé, cette affirmation aura énormément d’impact dans votre vie.
William Arntz, Betsy Chasse et Mark Vincente : Extraits de leur livre Que sait-on vraiment de la réalité? p.108-117.Editions Ariane, 2006.
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