Ecriture et lectorat.

J'ai reçu ces derniers jours des messages de deux lectrices et d'un lecteur.

Des messages qui me touchent.

Beaucoup. 

Des gens que je ne connais pas et qui me disent en quelques mots à quel point mes écrits les ont "touchés". Profondément touchés. 

Je me suis souvenu alors de ce passage dans "Là-Haut". Une réflexion qui m'était venue sur l'impact de l'écriture, sur ce qu'elle est à même de déclencher. Sur l'intention que l'auteur doit chercher à atteindre. 

Je me suis souvenu également de ces milliers d'heures de lectures lorsque j'étais adolescent, de cette euphorie de la lecture, de cette "dévoration" qui m'animait. Des livres qui pour certains devenaient des "nourritures". J'aurais pu vivre de ces mots si mon corps n'avait pas réclamé de la matière. 

La lecture n'a jamais été pour moi "un passe temps" et encore moins un "mode d'évasion". Je la voulais toute entière comme une nourriture, je voulais qu'elle me comble, qu'elle fasse que mon esprit soit repu, apaisé, enflammé, emporté.

Un jour, j'ai commencé à écrire. J'avais trop de mots en moi pour qu'ils restent à l'intérieur, trop de pensées, de tourments, de rêves, d'amours, de contemplations, de bouleversements et de paix, parfois. De ce jour, j'ai toujours souhaité que mes écrits portent en eux les révélations que j'avais trouvées durant toutes ces années de lectures. Alors, lorsque je reçois des témoignages de lecteurs ou lectrices qui me disent que mes écrits les "bouleversent", je suis heureux. 

 

Image 2

"Il est au bureau. Il a terminé la maquette de son livre. Il effectue une dernière vérification avant l’envoi à l’éditeur. Pour lui, ça ne fait aucun doute, ce livre-là est le meilleur. Les autres n’étaient que des tentatives. Il n’avait jamais voulu alourdir ses photos par des phrases vides. Désormais, chaque cliché est accompagné d’un texte qui, à ses yeux, a autant d’importance que l’image. Une extension, une envolée. Il imagine désormais un prochain livre accompagné d’un disque sur lequel on entendrait les vents d’altitude, les craquements des pas dans la neige croûtée, le cliquetis des mousquetons, les mélodies apaisantes de l’eau qui ruisselle, les souffles puissants du marcheur, et peut-être même la respiration de l’âme dans la pureté des lieux. Des pages rugueuses comme une peau de granit, glacée comme une eau figée par le froid, chaude et douce comme un tapis d’herbes au soleil, rayonnante comme une dalle lisse exposée au midi, tranchante comme la bise dans les faces Nord. Il voudrait que les sens s’éveillent et que le lecteur ne soit pas qu’un lecteur, mais devienne un acteur. Et que le livre l’entraîne à son tour sur les pentes redressées, dans les horizons élevés, qu’il soit son premier guide, qu’il le sorte de sa torpeur, que le livre soit un accoucheur. Comme ce serait bon de croiser sur les chemins les yeux brillants d’amour des marcheurs nouveau-nés qui montent vers les cimes.

Il a chaud en son âme et ce courant d’amour l’étonne. Il ne s’était jamais vraiment projeté vers ses lecteurs. Il s’était contenté de donner à voir ce que son âme transportait, ce que la montagne avait semé en lui. C’est à lui qu’il parlait. Il n’en est plus là aujourd’hui."

 

 

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