L'engagement
- Par Thierry LEDRU
- Le 24/09/2015
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Cette colère envers l'humanité, je sais aujourd'hui qu'elle ne sert à rien. Et même pire que ça, elle l'entretient....Car à combattre, on apporte sa propre énergie aux "forces ennemies" et c'est la puissance de notre opposition qui nourrit leurs convictions....Mais abandonner les luttes, c'est aussi la porte ouverte aux dictatures et aux manipulations de toutes sortes. Oui, il est vrai qu'il est impossible de se cacher les yeux, de se boucher les oreilles. Mais il est important de combattre là où c'est utile. Utile dans le sens où il y aura un effet réel et non un combat contre des forces indestructibles....Je ne peux rien contre l'Etat à part lui montrer mon opposition mais je sais que je ne le ferai pas changer. Ça serait totalement illusoire de le croire. Je peux par contre, à ma mesure, informer ceux que ça intéresse. MAIS il y a un travail essentiel à faire dès lors : c'est de n'apporter AUCUNE émotion dans ce travail car elles sont anthropophages, épuisantes, versatiles, instables, destructurantes. N'y adjoindre aucune colère, aucune rage.......... C'est en cours..........
Adénome prostatique, kyste sur l'épididyme du testicule gauche, diverticulites à répétition, vésicule biliaire totalement hors service, douleurs abdominales très fortes, douleurs dorsales et une ossification du ligament jaune sur deux vertèbres avec une excroissance assez impressionnante en bas du dos.
Et bien, tout ça, c'est la rage immense que je porte envers l'éducation nationale et les raisons de mon refus d'obéissance.
Je n'avais rien de tout ça il y a deux ans.
Est-ce que c'est utile que je continue comme ça ?
Non, bien évidemment.
Il n'est qu'à voir d'ailleurs le peu d'engouement des enseignants lors de la dernière grève. 30% grand maximum (étant donné que ce sont les statistiques syndicales)....10 % selon le Ministère.
Combien d'enseignants en refus d'obéissance ?...Il y en a sûrement, tout comme il y en a qui continuent à oeuvrer humainement dans leur classe. Mais se pose dès lors l'effet de cette participation aussi opposante soit-elle sur le Ministère...Puisque ces enseignants réfractaires qui vont jusqu'au bout sont peu nombreux et que ceux qui luttent avec leurs moyens dans leur classe restent majoritaires, pour quelles raisons le Ministère reviendrait-il en arrière ?....C'est là toute la problématique posée par la notion de "collaboration contestataire..."
J'entends parler d'un nombre croissant d'enseignants de qualité qui explosent en vol.
A mon sens, la raison essentielle tient dans la notion "d'espoir".
L'espoir est une "pensée-émotionnelle" dans le sens où il génère de l'excitation, de l'euphorie, de l'énergie même. Mais il porte en lui-même la désillusion. Ce ne sont pas les actes eux-mêmes qui déclencheront cette désillusion lorsqu'ils seront négatifs à nos yeux mais bien cette émotion infantile de l'espoir. Comme un élan qui retombe violemment au sol.
Je n'ai plus aucun espoir.
Et les luttes que je continuerai à mener ne seront plus des luttes mais des engagements. L'engagement sans émotion. Sans colère, sans rage et donc sans désillusion. Car la rage aussi porte un espoir : celui de l'effet généré par cette rage. Et lorsque cette rage n'aboutit pas, c'est le désespoir engendré par l'espoir lui-même qui l'emporte.
Je ne veux plus disparaître sous ma rage.
Je ne veux plus porter le moindre espoir.
Je ne garderai que mon engagement.
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