Supporter le constat de notre insignifiance.
- Par Thierry LEDRU
- Le 27/01/2025
- 0 commentaire
Je suis quelque peu dépité de lire nombre d'articles, de commentaires et de visionner des vidéos sur le duo Trump/Musk et de constater qu'un certain nombre de ces commentaires écrits ou audio mettent en avant le fait qu'il n'y a rien de nouveau, que des personnalités extrêmes, il y en a toujours eu, de tous côtés, qu'on peut trouver aussi agressifs dans bien d'autres coins du monde et même ici, en France et qu'il est donc inadéquat, voire injustifié de faire un "procès public" à Musk pour ce salut aux connotations quelque peu "étranges" ou aux frasques de Trump et ces propos glaçants et qu'on ferait mieux de regarder tout ce qui se passe ailleurs etc...etc... Et on en revient donc toujours au fait, qu'effectivement, le pire n'est jamais certain et que dès qu'on se lance dans une critique, on se place dans la situation d'être mis face à d'autres comportements tout aussi discutables.
Mais le problème n'est pas là. Le vrai problème, pour moi, c'est qu'on discute sur des faits et des personnalités qui posent problème, des tas de problèmes et pendant ce temps-là, on ne parle pas des gens honorables, des gens qui œuvrent pour le bien, des gens dont les valeurs ne mettent aucunement en péril celles des autres, des gens qui ne demandent qu'à vivre en paix, en osmose, en harmonie, dans la plénitude, loin des conflits.
Non, il ne s'agit pas d'une vision édulcorée, de rêves enfantins, d'immaturité, il s'agit de mettre juste en avant le fait que le monde qu'on nous montre, à travers les vitrines médiatiques, c'est un monde de confits. Et que les discussions qui émanent de ce monde génèrent d'autres conflits, d'autres prises de positions, d'autres arguments aussitôt contrés par les arguments des autres.
Et au final, nous nous retrouvons tous, les uns contre les autres, cherchant à savoir si le clan des uns est plus important que celui des autres, si l'équipe 1 est plus honorable que la 2 ou si la 1 est juste plus manipulatrice que la 2. Il n'y a plus de vérité, il n'y a que des oppositions qui détiennent leurs vérités, des vérités d'ailleurs modulables en fonction des alliances, des arrangements entre amis, des conflits d'intérêts ou des intérêts communs.
Et j'en arrive à me dire que le mieux à faire est de fuir, de me terrer dans un trou, de me boucher les oreilles, de ne plus dire un mot, de ne regarder que mes pieds et là où je les pose. Et d'écouter les oiseaux.
"“Que la force me soit donnée de supporter ce qui ne peut être changé et le courage de changer ce qui peut l'être mais aussi la sagesse de distinguer l'un de l'autre.” Marc Aurèle.
Si je m'en tiens à cette maxime et que je tente d'identifier les situations sur lesquelles j'ai un réel pouvoir, c'est à dire celui de changer ce qui ne répond pas à mes valeurs, il est clair qu'il n'y a pas grand-chose et certainement pas les luttes qui ont lieu au niveau mondial par l'entremise de personnalités dont la puissance dépasse l'entendement.
Mais se pose aussi le problème de ma responsabilité envers des agissements contraires à mes valeurs car on peut considérer que la fuite renforce le pouvoir des malfaisants. Cette lutte intestine est devenue un leitmotiv désespérant, assommant, une rumeur de fond aussi prégnante qu'une respiration. Mais si je me lance dans un état des lieux au regard de mes prises de position et que je tente d'établir un constat sous la forme d'un pourcentage de réussite et d'échecs quant aux résultats de mes engagements, il n'y a aucun doute quant au fait que mes actes se sont révélés dérisoires, insignifiants, inexistants au regard de l'ampleur du désastre actuel.
Rien de bon n'est advenu dans le constat que je fais de l'état du monde, de l'humanité, de la nature, de la préservation de la vie. On s'enfonce, on s'enfonce...
Alors, j'en suis là, encore une fois, avec le même questionnement, celui qui revient systématiquement lorsque cette fatigue dans l'observation du monde devient plus forte, plus lourde, plus dévorante. Dois-je continuer à chercher à comprendre au détriment de mon bien-être ou la quête du maintien de mon bien-être est-elle une fuite inacceptable ?
Il me reste malgré tout un point d'ancrage dans ma propre histoire, celle de "la désobéissance civique" que j'ai choisie pour m'opposer à la réforme des rythmes scolaires de Vincent Peillon. Je l'ai payé cher, je ne vais pas revenir en détail là-dessus mais il y a un élément qui est resté considérablement important dans cette épreuve, c'est que j'ai toujours eu la possibilité de me regarder dans un miroir sans avoir honte de moi-même. Si j'avais collaboré à cette réforme alors qu'elle s'opposait totalement à mes valeurs, les dégâts existentiels auraient été plus profonds que les dégâts physiques et psychologiques. Je n'ai pas collaboré et ça reste un tuteur qui m'a tenu debout.
Alors, aujourd'hui, dans la multitude de conflits et de dégradations de toutes sortes au niveau social et écologique, quels sont les comportements, les attitudes, les actes, les prises de positions qui peuvent concourir à ce que je puisse marcher "droit dans mes bottes" ? Tout ce qui concerne ma vie quotidienne. Rien d'autre.
Ce qui relève de la démarche intellectuelle ne doit être considéré qu'à travers le filtre de son inutilité réelle. Il reste ensuite à supporter ce constat.
Ajouter un commentaire