Coronavirus : Ecole (4) : Refus d'ouverture

Le pouvoir décisionnaire aux régions, aux départements, aux communes. Un aspect positif de la crise.

 

Montpellier, Hautmont… Ces mairies qui s’opposent à la réouverture des écoles le 11 mai

De nombreux édiles estiment que leurs établissements n’auront pas les moyens de garantir la sécurité et la santé des élèves et des équipes.

 

Par L'Obs

Temps de lecture 4 min

Alors que le 11 mai, date de début du déconfinement progressif de la France, approche à grands pas, les questions sur les modalités de celui-ci se multiplient. Sujet s’il en est qui focalise les inquiétudes : la réouverture des écoles. Organisation, crainte d’une contamination entre les enfants, réticences des parents et du corps enseignant : la perspective d’un retour en classe dans deux semaines interroge. Au point que certains maires, inquiets du manque de moyens et de garanties sanitaires, préféreraient que leurs écoles gardent portes closes au matin du 11 mai.

Couvre-feu, port du masque obligatoire… Les maires en font-ils trop ?

C’est le cas notamment à Montpellier : « Je considère que l’ouverture des écoles le 11 mai n’est pas raisonnable »a déclaré samedi sur BFMTV le maire de la ville, Philippe Saurel. Le 20 avril déjà, il s’était publiquement opposé à la réouverture des écoles et des crèches. « Nous n’avons pas de masques, ni de tests, ni de protocole, je considère donc qu’il est dangereux de rouvrir les écoles et les crèches tant que nous n’avons pas de protocole », déclarait-il auprès de France-Bleu… tout en sachant que son coup de gueule avait surtout une valeur symbolique : « Je n’ai pas le droit de garder les écoles fermées, cela dépend de l’Education nationale, mais j’utilise mon droit de parole pour expliquer qu’il y a des risques et la balance risque/bénéfice pour un mois d’école pour moi, elle est démesurée. »

« Ouvrir les écoles aussi tôt, c’est criminel »

Dans l’Hérault, d’autres maires ont fait part de leur opposition à la réouverture des écoles le 11 mai, comme le souligne France 3 Occitanie. Parmi eux, Christian Bilhac, maire de Péret et président de l’association des maires du département. « Je ne veux pas qu’on me traite de criminel et je pense que c’est criminel d’ouvrir les écoles aussi tôt », affirmait-il auprès de France 3, le 15 avril.

Rouvrir des écoles le 11 mai, est-ce prématuré ?

Maire de Lattes, Cyril Meunier se montre lui aussi critique envers la stratégie de l’exécutif : « On va faire prendre des risques à tout un tas de gens, pour quinze jours d’école. » Tout comme le maire de Montpellier Philippe Saurel, il sait les limites de ses compétences en tant qu’édile, mais souligne aussi ses responsabilités de maire.

Les maires veulent plus de garanties

Dans un courrier du 21 avril adressé au directeur académique des services de l’Education nationale en Seine-Maritime, le maire PS de Rouen Yvon Robert a de son côté prévenu que « sans garanties suffisantes et suffisamment transmises en amont, nous nous réservons la possibilité de ne pas rouvrir les écoles ».

Il a notamment demandé plus de masques et de gel hydroalcoolique pour chacun, et souligné qu’en respectant les règles de distanciation sociale, les écoles ne pourront pas accueillir plus du tiers des effectifs le 11 mai, rapportait « Ouest-France ».

Flippés, soulagés, culpabilisés… Comment réagissent les parents au retour à l’école le 11 mai ?

Le maire de Courcelles-lès-Gisors, village de quelque 800 habitants dans l’Oise, a lui informé les parents d’élèves par courrier que l’école sera fermée jusqu’au 31 août afin « de préserver la santé du personnel communal », rapportait samedi « le Courrier picard ».

Quant au maire de Colmar Gilbert Meyer, il a affirmé qu’il « n’autoriserait pas la réouverture des écoles avant d’avoir la certitude que toutes les mesures de sécurité sanitaire auront été prises », selon « les Dernières Nouvelles d’Alsace ». Rappelant les recommandations de l’Académie de médecine, qui « souligne l’importance du port du masque pour les activités récréatives pour les élèves à partir du CP », il a estimé que « chaque enseignant et chaque élève doit être doté d’un masque ».

Des arrêtés municipaux pour garder les écoles fermées

D’autres maires ont pris une décision plus drastique pour garantir la fermeture des écoles après le 11 mai : la prise d’un arrêté. C’est le cas dans le Nord, à Hautmont, où le maire Joël Wilmotte a fermé les six écoles de sa commune « jusqu’à nouvel ordre », par un arrêté pris vendredi. Celui-ci suit le modèle des arrêtés pour décréter la fermeture des équipements sportifs et autres salles municipales, détaille France-Bleu Nord. Joël Wilmotte a évoqué le « pouvoir de police » du maire pour lutter contre l’épidémie.

Un nombre important d’enfants ne reverra pas l’école avant septembre. Voilà pourquoi

Même manœuvre dans la Drôme, à Saulce-sur-Rhône, où le maire Henri Fauqué a pris, jeudi, un arrêté municipal indiquant que « les bâtiments publics abritant les écoles et le restaurant scolaire ne rouvriront pas jusqu’à nouvel ordre », rapporte « le Dauphiné libéré ». Citant le manque de masques et la difficulté de faire appliquer les gestes barrières à des enfants, le maire estime qu’il est dans l’incapacité de garantir le maintien de l’ordre public et de la sécurité des élèves.

Mais pour le préfet de la Drôme Hugues Moutouh, cet arrêté municipal est « entaché d’illégalité ». Il a rappelé que pendant l’état d’urgence sanitaire, déclaré le 23 mars pour une durée de deux mois, seules les autorités de l’Etat ont « compétence pour édicter les mesures générales et individuelles visant à mettre fin à l’épidémie », rapporte encore « le Dauphiné libéré ». Le préfet a donc demandé à Henri Fauqué de retirer son arrêté, et n’exclut pas un recours devant le tribunal en cas de réponse négative.

Une fronde au-delà des maires

Ces maires ne sont cependant pas les seuls à être réticents à une réouverture des écoles le 11 mai : jeudi, le président du Conseil exécutif de la collectivité territoriale de Martinique, Alfred Marie-Jeanne, a estimé qu’« il s’avère impossible de rouvrir les collèges et les lycées aux scolaires en mai ». Face au Premier ministre Edouard Philippe lors de la visioconférence avec tous les présidents de région, il a mis en avant les difficultés d’approvisionnement en masques pour tous les personnels, y compris ceux du nettoyage des locaux.

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La veille, le maire de la commune de Prêcheur, ville du nord de la Martinique, avait annoncé sa décision de ne pas rouvrir l’école de sa commune le 11 mai. Marcellin Nadeau a appelé tous les maires de l’île à se concerter pour prendre une position commune sur le sujet.

 
 

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