Ecrire, lire, écrire, lire...

C'est fou l'écriture d'un roman ce que ça peut vous amener à faire : lire la réglementation des armes à feu en Nouvelle Zélande, trouver l'adresse d'un magasin informatique à Bombay, l'emplacement d'un lac d'altitude dans la Sierra Nevada de Santa Marta en Colombie, étudier la carte de l'Irak, de la Turquie et de l'Europe de l'est, chercher la distance entre Paris et Istanbul, lire des dizaines de documents et articles scientifiques, visionner des dizaines de vidéos, analyser des données économiques et les comparer d'un site à un autre, étudier le réchauffement climatique, trouver l'adresse d'une banque à Dunedin, chercher les procédures d'ouverture de compte bancaire à l'étranger, apprendre les différentes versions du réel à travers les peuples premiers, tenir à jour le registre de tous les personnages, égrener des éléments disparates pour que l'ensemble du puzzle se forme, au fil des pages et sur trois romans...ou quatre...ou plus...Je ne sais pas où je vais mais c'est magnifique d'être perdu de la sorte.

L'écriture d'une trilogie... Je découvre en fait la particularité de ce travail. Un élément du tome 1 peut avoir une importance considérable dans le tome 3 et il est particulièrement délicat de mettre ainsi en place des éléments disparates sur une telle longueur. 

Hier soir, j'ai envoyé un mail à mon éditrice pour lui dire que j'avais oublié un détail dans le tome 1, "Les héros sont tous morts". Je voulais savoir s'il était possible de le rajouter avant la publication de la version papier. Et pendant la nuit, je me suis réveillé et immédiatement, j'ai réalisé que cet "oubli" n'était pas dans le tome 1 mais dans le tome 2 que je suis en train d'écrire... Là, j'ai compris à quel point, je m'étais embarqué dans une aventure aux horizons lointains. Au point d'en perdre de vue mes repères habituels dans l'écriture et à ne plus savoir qui est où, qui fait quoi, qui a fait quoi avec qui...

Tout ça pour dire que l'écriture, c'est un vaste chantier, une construction monumentale, qui occupe un espace et un temps immense, que l'engagement de l'auteur se doit d'être intégral.

J'ai longtemps refusé de m'attribuer le terme d'écrivain. Je ne m'en sentais pas le droit au regard de l'excellence de ces écrivains qui avaient empli mes jours et mes nuits. Je disais juste que j'aimais écrire.

Maintenant, j'arrive à me le dire, intérieurement. "Tu es écrivain."

M Ollier, professeur de lettres en seconde qui me rend un devoir et qui me dit en souriant : "Un jour Ledru, vous serez édité".

J'aime repenser au visage de cet homme. Il ne disait pas cela comme une boutade. Il en était persuadé. 

 

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