L'aéroport et le campagnol

La dernière question du journaliste est consternante et incite à la réflexion... Comment est-il possible de concevoir encore que la vie d'animaux n'est respectable qu'au yeux de leur "intérêt" pour l'humain ? C'est cette idée que la question contient.

"Est-ce si grave si le campagnol disparaît ? "

Ça me sidère.

En tout cas, les campagnols sont sauvés du désastre. Et tout ce qui vit avec eux dans cette zone humide.

 

http://www.20minutes.fr/nantes/1924935-20160915-dame-landes-interroge-specialiste-campagnol-amphibie-animal-menace-aeroport

publié le 15 septembre 2016

Un campagnol amphibie.

Un campagnol amphibie. — Pierre Rigaux

Il est inscrit sur la liste nationale des mammifères terrestres protégés depuis 2012. Le campagnol amphibie est devenu l’un des symboles de la biodiversité menacée par le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. L’inquiétude des naturalistes est montée d’un cran mercredi puisque le préfet de Loire-Atlantique a autorisé, de manière dérogatoire et sous conditions, sa destruction afin de mener les travaux de construction.

Mais qui est donc au juste ce petit animal inconnu du grand public ? Et pourquoi serait-il si précieux ? Le point avec Pierre Rigaux, administrateur de la Société française pour l’étude et la protection des mammifères (SFEPM) et l’un des rares spécialistes du campagnol amphibie.

Un campagnol amphibie.
Un campagnol amphibie. - David Perez/wikimediacommons

A quoi ressemble-t-il ? C’est un rongeur d’une « vingtaine de centimètres (sans la queue) et qui pèse environ 200 g », donc un peu plus gros que ses cousins campagnols terrestres. Très bon nageur, vivant en groupe, il est actif de jour comme de nuit. Sa période de reproduction s’étend de mars à octobre. La femelle peut donner naissance à une douzaine de petits par an. « Très discret, de couleur brune, il est quasiment impossible à repérer par l’homme. »

Où vit-il ? Le long des cours d’eau, des marais et étangs. En France, on le trouve surtoutdans l’ouest, le centre et le sud-est. Dans le bocage de Notre-Dame-des-Landes, la population serait « relativement importante ».

« Il faudrait des moyens humains énormes »

Qu’a-t-il de particulier ? « Il n’existe que deux espèces de rongeur indigènes évoluant en milieu aquatique en France : le castor et le campagnol amphibie [le ragondin est originaire d’Amérique du sud]. En dehors de la France, on ne le trouve que dans deux pays : l’Espagne et le Portugal. Son aire de répartition extrêmement réduite et sa population qui ne cesse de diminuer expliquent qu’il soit inscrit sur la liste rouge mondiale des espèces menacées de disparition. »

Pourquoi est-il menacé ? Principalement « à cause de la destruction des terres humides » lors de remblaiements ou projets urbains. Il est également une victime collatérale des campagnes d’empoisonnement des rats et ragondins dans les campagnes.

Sera-t-il facile de le transférer hors de Notre-Dame-des-Landes ? L’Etat prévoit le transfert des campagnols dans des zones dites de compensation. « C’est une véritable inconnue car ça n’a jamais été fait. On sait comment attraper quelques individus, avec des petits pièges, pour les étudier. Mais en capturer un très grand nombre, ça me paraît très compliqué. Il faudrait des moyens humains énormes, presque chirurgicaux. On va forcément en oublier sur le site, en particulier les petits qui ne sortent pas. Et puis il y aura de la mortalité car ce sont des animaux fragiles. Pour moi, c’est clair, on va droit vers une perte massive de campagnols amphibies. »

« On aura une mortalité invisible importante »

Peut-il s’adapter à un nouveau territoire ? « Si la zone a été bien pensée, oui, certains arriveront peut-être à s’intégrer et à se reproduire. Mais on peut craindre une mortalité invisible importante car ce sont des animaux territoriaux, très exigeants avec leur habitat. Ils ont en plus le défaut de se reproduire relativement lentement pour des rongeurs. Reconstituer une population n’est donc pas gagné d’avance. »

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Au fond, est-ce si grave que ça s’il disparaît ? « Outre sa rareté, il a évidemment un rôle dans l’écosystème. Il se nourrit de végétation et participe donc à la régulation du milieu aquatique. Il sert aussi de proie à beaucoup de carnivores. Bien sûr, s’il disparaît, ça ne va pas changer notre quotidien à nous, humains. Mais ça ne justifie pas de le supprimer. »

 

 

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