L'oppression

J'avais seize ans.

Je ne comprenais pas tout ce que Léo chantait mais j'étais bouleversé par la musique des mots, par sa voix, par la simplicité grandiose des mélodies.

Je sentais qu'il y avait là des messages à saisir, comme si se tenaient en moi des paroles secrètes et que Léo savait les faire émerger.

Il n'y avait pas de MP3. J'écoutais cette chanson avant de partir au lycée et elle tournait en boucle toute la journée.

J'allais m'asseoir sur un coin de pelouse parfois, je prenais un livre, je lisais quelques lignes et puis je fermais les yeux parce que les violons étaient là, que les premières paroles surgissaient...

"Ces mains, bonnes à tout, même à tenir des armes, dans ces rues que les hommes ont tracées pour ton bien,

ces rivages perdus vers lesquels tu t'acharnes où tu veux aborder et pour t'en empêcher les mains de l'opression..."

Je sais aujourd'hui ce que Léo chantait, je sais ce qu'il disait, je connais cette opression, elle est là.

Je sais aussi comment l'épuiser, comment m'en défaire.

Non pas dans les faits car je serai jusqu'à la fin dépendant d'une oppression sociétale.

Mais je connais des espaces où elle ne peut rien.

La paix intérieure.

La paix des émotions éteintes, lorsqu'elles ne sont plus que des grosses mouches noires zébrant l'azur et fuyant vers l'horizon, vers d'autres proies à tourmenter.

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