Le désir mimétique

« L'homme désire toujours selon le désir de l'Autre » est le postulat du désir mimétique, développé par René Girard, dans un conflit tragico-comique dont les protagonistes deviennent interchangeables et transformés en « doubles » symétriques « en miroir » dans une relation duale de la rivalité mimétique qui conduit à la violence mimétique.

http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9sir_mim%C3%A9tique

Sur le plan individuel, les hommes se haïssent parce qu'ils s'imitent. Le mimétisme engendre la rivalité, mais en retour la rivalité renforce le mimétisme. Les protagonistes d'un tel conflit tragique ou comique ne voient pas qu'ils sont interchangeables, symétriques, des « doubles », mais l'observateur extérieur le voit : il y a double logique, celle du désir et celle de l'imitation. En d'autres termes, faire de l'Autre un modèle, c'est faire de lui un rival.

La notion de désir mimétique devient pleinement intelligible avec le « modèle » du désir qui devient « obstacle » dans la réalisation de ce désir, comme dans l'exemple illustratif donné par Girard des enfants qui se disputent pour un même jouet, alors que bien d'autres sont disponibles. C'est le phénomène fondamental du modèle-obstacle.

Au niveau physique, la mimétique est un camouflage dont l’exemple illustratif est le caméléon. C’est aussi le niveau des besoins ou appétits.

Au niveau social des congénères et des collègues qui partagent la même loi (lex. legis) et le même héritage (legs), la mimétique consiste à faire « comme tout le monde » dans le conformisme dont l’exemple illustratif est l’effet de la mode. C’est le niveau de la confusion (à la fois « prendre l’un pour l’autre » et « fondre ensemble l’un dans l’autre ») entre « besoin » et « désir ». Le besoin d’habillement peut être satisfait par n’importe quel vêtement, alors que « le désir selon l’Autre » du postulat girardien se rapporte à la particularité d’une telle marque et d’un tel type désignée par la mode.


Ce qui m'intéresse particulièrement dans cette analyse, c'est de constater que ce désir de mimétisme conduit paralèlement à la confrontation entre les individus. L'individu copie mais cherche simultanément à faire mieux, ce qui lui laisse croire qu'il fait différemment. Chaque étape de différenciation, aussi insignifiante soit-elle, renforce le phénomène chez l'autre qui va à son tour s'accorder aux désirs de ses congénères tout en cherchant à s'en défaire en les approfondissant encore davantage. C'est le fondement même de la société de consommation. Il n'y a aucune liberté dans ce système et la possession générée par la multiplicité des désirs assouvis conduit immanquablement à la dépossession de soi.

La publicité suggère que les autres ont tel désir mais propose en même temps la satisfaction de ce désir à une échelle supérieure.

"Vous voulez posséder une voiture, tout comme vos contemporains mais grâce à nous, vous posséderez une voiture différente..."

On est bien entendu là encore dans le paradigme du moi encapsulé qui se soumet à des valeurs matérielles élevées au rang de valeur humaine. L'individu se persuade d'une grande valeur au regard de ce qu'il possède et que les autres désirent. C'est la course en avant. L'autre est un modèle que chacun veut dépasser, l'autre est un miroir qu'il faut briser pour parvenir à constituer un miroir plus vaste ne reflétant que son propre reflet.

Tant que durera cette illusion de la valeur humaine nourrie par des paramètres évènementiels et épisodiques, l'élévation spirituelle sera bridée. Tant que l'individu sera incapable de s'extraire de cette futilité, il n'y aura aucune issue. Les hommes seront enchaînés à des désirs libérant en eux des intentions toujours plus carcérales.


 

 

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