Le survivalisme (4)

Voilà un autre thème particulièrement d'actualité... Le terrorisme biologique. 

Nous vivons dans un monde éminemment dangereux et il serait illusoire, encore une fois, de penser que cela ira mieux dans quelques temps...

La question qui se pose est donc la suivante : "Qu'est-ce que je devrais faire si cela arrivait ? "

Et l'erreur monumentale serait de penser que ça ne peut pas arriver...


 

http://www.academie-medecine.fr/publication100035704/


 


 


Académie nationale de médecine

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Bull. Acad. Natle Méd., 2007, 191, no 6, 993-1003, séance du 12 juin 2007

SÉANCE THÉMATIQUE SUR « LA RÉPONSE SANITAIRE AU DÉFI DU TERRORISME HORS CONFLIT ARMÉ »

La réponse sanitaire au risque biologique terroriste

Mots-clés : anthrax.organismes genetiquement modifiés. surveillance environnement.. terrorisme biologique. variole

Healthcare response to bioterrorism

Keywords (Index medicus) : bioterrorism. carbuncle. environmental monitoring.. organisms, genetically modified. smallpox

Jean-Étienne Touze, François Bricaire, Daniel Garin

Résumé

Le risque biologique agressif fait appel à des agents pathogènes hautement virulents, susceptibles d’induire au sein des populations un état de panique et une désorganisation socio-économique. Si certains agents historiques (charbon, peste, toxine botulinique…) sont faciles à produire, il n’en est pas de même pour d’autres agents pathogènes (virus des fièvres hémorragiques par ex) dont la culture nécessite une infrastructure sophistiquée et un support étatique. Le bioterrorisme pourrait évoluer demain vers l’utilisation de nouveaux pathogènes génétiquement modifiés dont l’obtention pourrait être facilitée par l’essor et la diffusion des nouvelles technologies. Dans ce contexte, il convient de compléter notre capacité de réaction en optimisant notre dispositif d’alerte et notre capacité diagnostique. La surveillance épidémiologique en temps réel et la création d’un réseau de laboratoires de haute sécurité couvrant tout le territoire national permettront d’avoir une réponse adaptée face à toute nouvelle maladie infectieuse qu’elle soit émergente ou provoquée. Le regroupement des compétences cliniques et de recherche au sein d’infectiopôles apporteront à la microbiologie une nouvelle dynamique
 

 

INTRODUCTION

Le risque biologique qu’il soit émergent ou provoqué, est devenu une préoccupation majeure car il fait référence à des agents d’une grande virulence, hautement pathogènes et dont certains ont dans un passé récent, déclenché des épidémies sévères.

Surtout, ce type de menace réveille dans notre inconscient collectif des peurs ancestrales. Il génère au sein des populations un état de panique et peut être la cause d’une désorganisation socio-économique de grande ampleur. Le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), l’épidémie de grippe H5N1 et les attentats à l’anthrax qui ont touché les Etats unis en octobre 2001, en sont des exemples démonstratifs.

Face à cette menace, les pouvoirs publics sont désormais confrontés à plusieurs interrogations. Quel est le risque réel du bioterrorisme et quelle importance lui accorder par rapport aux autres périls collectifs ? Quelle est notre capacité de réaction vis-à-vis de ces agents pathogènes et à ceux du futur ? Quelles recommandations peut-on proposer dans la réponse sanitaire au risque biologique intentionnel ?

LES AGENTS BIOLOGIQUES HISTORIQUES.

Les données de l’histoire et des dernières décennies ont permis d’établir une liste des agents pathogènes vivants ou non, issus du monde animal, végétal ou microbien auxquels s’associent des substances toxiques chimiques, potentiellement utilisables à des fins militaires ou terroristes.

L’emploi et l’efficacité de ces moyens agressifs impliquent un certain nombre de critères. Si la virulence et la toxicité sont déterminantes, il faut aussi prendre en compte les contraintes techniques (fabrication, vectorisation, dispersion), le concept d’emploi, la réponse de l’hôte, le pouvoir épidémiogène et de nombreux facteurs environnementaux [1, 2].

 

Le Center Disease Control (CDC) a ainsi retenu une liste de deux classes d’agents :

— classe A : Bacillus anthracis agent du charbon , Yersinia pestis agent de la peste, les orthopoxvirus ( variola major , Monkey Pox , Camel Pox , la toxine botulinique, les virus des fièvres hémorragiques (virus Lassa, Ebola, Marburg, Rift Valley, Crimée-Congo) ;

— classe B : Francisella tularensis responsable de la tularémie, Burkholderia mallei agent de la mélioidose,

Coxiella burnetii responsable de la fièvre Q, les rickettsioses (

Rickettsia prowaseki, conorii …), la brucellose, Vibrio cholerae et la ricine.

 

Dans cette liste, de nombreux agents peuvent être acquis avec une technologie rudimentaire. C’est le cas en particulier de Bacillus anthracis, Yersinia pestis, la toxine botulinique , les rikettsies ( R. prowaseki, R. conorii, R. ricketsii ) et Coxiella burnetti . Ces derniers peuvent être facilement cultivés et produits en grande quantité par un laboratoire modestement équipé. Leurs spores sont peu altérées par la chaleur, la dessiccation et les rayons UV. Ils ont une résistance prolongée dans le milieu extérieur et peuvent être utilisés à des fins terroristes. Il n’en est pas de même pour d’autres (virus des fièvres hémorragiques, Burkholderia ,…) qui nécessitent des chercheurs de haut niveau et des laboratoires de technologie avancée inaccessibles à des groupes isolés et dépourvus de support étatique [3].

La variole constitue un cas particulier. Cette maladie qui a été dans le passé un des pires fléaux qu’ait connu l’humanité, a été éradiquée en 1978, grâce à la large campagne vaccinale menée par l’OMS. Toutefois, des quantités importantes de souches virales ont été conservées aux Etats Unis et en Russie et la découverte de programmes russes secrets, d’emploi militaire, ont fait craindre leur possible utilisation par des états « proliférants » ou par des groupes terroristes. La mortalité induite par ce virus est dans des populations non immunisées, de 20 à 50 %. En revanche, ses effets seraient limités dans des populations plus âgées, ayant été vaccinées au moins une fois dans leur vie [4, 5]. Face à ce risque hypothétique, la France s’est préparée dès 2002, en reconstituant un stock vaccinal à partir des premiers vaccins historiques, produits jusqu’au début des années 80 auxquels ont été associés des vaccins de deuxième génération utilisant les mêmes souches (souche Lister, NYCBH). L’emploi d’aiguilles bifurquées et les nouvelles présentations (150 à 500 doses) ont permis à l’Etat de disposer de plus de 70 millions de doses. Cette démarche capacitaire a été complétée par la création en 2003, d’une équipe vaccinale spécifique, capable en présence d’une variole confirmée sur le territoire national, d’immuniser en moins de 14 jours, toute la population. Cette disposition est actuellement écartée en l’absence de menace identifiée, en raison des risques vaccinaux prévisibles et d’inévitables complications pouvant survenir chez des personnes allergiques ou immunodéprimées (estimés à plus de 2 millions). Les vaccins de troisième génération obtenus par synthèse génétique ou par passages cellulaires répétés devraient être théoriquement dénués d’effets indésirables mais les données obtenues avec la seule souche disponible MVA (Modified Vaccinia Ankara) très atténuée et non réplicative restent encore limitées [6].

 

LES MODALITÉS D’EMPLOI.

Les conséquences sanitaires de l’utilisation d’une arme biologique dépendent largement de son concept d’emploi et de la vulnérabilité des populations concernées. En effet, pour qu’une maladie infectieuse touche le maximum d’individus ou ait toutes les chances de déclencher une épidémie, il faut une population vierge et réceptive.

Pour y parvenir, l’agresseur éventuel se heurtera inévitablement à deux écueils. Le premier est qu’il lui sera impossible d’avoir une connaissance préalable du niveau immunitaire des habitants du pays ciblé avec pour corollaire, l’imprévisibilité de la réaction de l’hôte vis à vis des agents pathogènes. Le second est que si l’on souhaite un plein succès à la diffusion d’une épidémie, il faut tenir compte de l’écologie de la zone, des conditions climatiques (humidité, vents, hygrométrie, chaleur, rayons UV …), de la présence pour certains germes d’animaux réservoirs et ou de vecteurs.

Tous ces facteurs qui conditionnent la survie et la diffusion des agents dans l’environnement sont difficiles à prévoir dans une démarche terroriste.

Il est malgré tout possible pour l’agresseur, de s’affranchir des modèles épidémiologiques en dispersant artificiellement par aérosols des agents biologiques. De nombreux scénarios d’attaque sont régulièrement évoqués : contaminations de la chaîne alimentaire, des systèmes de confinement ou de ventilation de lieux publics, épandage d’aérosols infectieux. Dans ces hypothèses, on individualise des germes qui associent des conditions de production facile et une grande résistance ( bacillus anthracis, coxiella burnetii, Rickettsia prowaseki …) et d’autres plus fragiles comme yersinia pestis . Pour ces agents pathogènes, la dissémination par voie aérienne (aérosols, épandage) est le plus souvent évoquée mais sa réalisation est complexe.

L’hypothèse la plus plausible est la contamination des systèmes d’aération de lieux publics (métro par ex) mais pour y parvenir de grandes quantités devront être introduites en raison de la vitesse de dilution de l’agent dans des courants d’air importants. Il faudrait aussi que les particules pathogènes soient suffisamment fines (1 à 5 microns) et d’un faible pouvoir électrostatique pour qu’elles pénètrent le poumon profond. Même si ces conditions étaient réunies, le nombre de victimes serait probablement limité, mais la répercussion médiatique et la panique de la population occasionneraient de lourdes perturbations [3]. Ce fût le cas en 2001, lorsque les Etats Unis furent touchés par une vague d’attentats utilisant des lettres et colis piégés avec de la poudre d’anthrax. Le produit utilisé avait été efficace (plusieurs cas de charbon pulmonaire) parce que les contraintes de l’aérosolisation avaient été franchies par un laboratoire américain de haute technologie. Les dégâts causés par cette attaque, faibles en terme de morbi-mortalité (22 cas de charbon, 5 décès), furent considérables par les répercussions socio-économiques : désorganisation du travail parlementaire et du tri postal, plusieurs dizaines de millions de dollars dévolus à la décontamination et à l’antibiothérapie préventive de la population.

A côté des agents microbiens, certaines toxines et composés chimiques peuvent être adaptés à des fins terroristes. Dans ce domaine, la ricine et la toxine botulinique (surtout A, B ou E) sont le plus souvent citées. La première a déjà été utilisée ponctuellement comme arme biologique antipersonnelle (on se souvient de l’assassinat en 1978 de Gregory Markov, journaliste bulgare avec un parapluie contenant à son extrémité une seringue de ricine). La seconde est l’un des plus puissants poisons actuellement connus. Nous n’avons pour le combattre aucun antidote spécifique et peu de stocks d’anatoxines disponibles. La toxine botulinique pourrait être dispersée par aérosol mais cette éventualité suppose une technique de dissémination n’altérant pas son activité. Son introduction dans les circuits d’eau potable ou dans la chaîne alimentaire (grande distribution, restauration collective) souvent évoquée, provoquerait des toxi-infections redoutables. Toutefois, il convient de tempérer la dangerosité de tels scénarios en rappelant que la toxine botulinique est sensible à la chaleur, aux oxydants et à la chloration de l’eau, significativement augmentée dans les réseaux d’adduction depuis 2002.

LES NOUVELLES RÉALITÉS DU RISQUE BIOLOGIQUE Les organismes génétiquement modifiés

En portant un regard sur l’avenir, il est possible d’imaginer les futures menaces terroristes. Les progrès spectaculaires réalisés dans le domaine du génie génétique sont d’indéniables avancées bénéfiques pour l’humanité mais peuvent aussi être détournées à des fins agressives. A très long terme, la progression et la généralisation incontrôlée de ces nouvelles biotechnologies pourraient déboucher sur une palette de menaces potentielles. Il est ainsi facile d’introduire des plasmides de résistance dans des souches bactériennes ou d’amplifier la virulence d’un agent pathogène en modifiant son génome. Cela a déjà été réalisé en 2001, lorsqu’une équipe australienne a intégré accidentellement le génome de l’interleukine-4 dans une souche de poxvirus, la rendant particulièrement virulente, résistante aux anti-viraux et capable de tuer toutes les souris infectées, même celles préalablement immunisées [7]. Les perspectives ouvertes par cette expérimentation sont inquiétantes par leurs applications à des fins belliqueuses. Une telle hypothèse est a priori, purement théorique car elle ne peut être envisagée sans une structure de haut niveau technique, difficilement accessible à un groupe terroriste isolé. De plus, il est possible que ces organismes génétiquement modifiés, soumis à une concurrence microbienne ne puissent survivre dans le milieu extérieur.

L’agroterrorisme est un autre sujet de préoccupation envisagé par de nombreux

Etats. L’épidémie de fièvre aphteuse survenue en 2001 au Royaume Uni et celle récente de grippe aviaire, bien qu’elles n’aient pas été intentionnellement provoquées, ont montré toutes les répercussions d’une maladie infectieuse sur le monde animal et sur la chaîne alimentaire et qu’il pouvait être plus facile de s’attaquer à la filière animale qu’aux personnes. L’histoire nous rapporte de possibles contaminations délibérées de l’agriculture ou du bétail. Les USA furent ainsi accusés par la Chine et la Corée d’avoir introduit des plantes toxiques sur leurs territoires. On leur attribue aussi l’épidémie de peste porcine qui décima le cheptel porcin de Cuba en 1971. De leur côté, les USA accusèrent l’URSS d’avoir utilisé entre 1978 et 1980 des toxines (aflatoxines, mycotoxines ?) contre les tribus Mong du Laos. Toutes ces allégations n’ont jamais été confirmées mais dans ces exemples les conséquences sociétales et économiques ont été chaque fois désastreuses [1]. Un tel risque ne peut être aujourd’hui exclu, mais son impact serait pour nos sociétés probablement limité par les mesures drastiques de sécurité et de contrôle de la chaîne alimentaire.

QUELLE EST NOTRE CAPACITÉ DE RÉACTION ?

Face à la menace bioterroriste, les pouvoirs publics ont pris trois grandes dispositions : la création d’un ensemble de mesures médicales, le renforcement du système d’alerte et la création d’un réseau de laboratoires capable d’assurer en permanence, sur tout le territoire, une chaîne diagnostique. Toutes ces actions s’intègrent dans le plan de réponse gouvernemental BIOTOX.

Les mesures médicales

Dès 2001 et jusqu’en 2005, un effort budgétaire significatif a été consacré à la constitution de stocks d’antibiotiques (cyclines, quinolones de 3eme génération) et de vaccin antivariolique. Elles ont été récemment complétées par des stocks importants d’oseltamivir et de masques de protection pour faire face à une éventuelle pandémie grippale. Ce changement de priorités est habituel en santé publique car l’Etat doit répondre dès la survenue d’un événement, pour rassurer rapidement la population apeurée par la presse, avant d’être amené à réagir quelques mois plus tard, devant d’autres circonstances. Une telle approche peut être dangereuse car elle aboutit à une banalisation des risques et pour la population, à une perte des postures de sécurité [8]. Le principal point positif est que ces nouvelles maladies émergentes, qui ont occupé l’actualité ces dernières années, ont permis d’établir des plans nationaux de lutte contre la variole, le SRAS et la grippe aviaire qui complètent le dispositif BIOTOX. Ils prennent en compte : les nouveaux niveaux d’alerte définis par l’OMS, les rôles de chaque intervenant aux échelons ministériel, zonal et départemental, la formalisation des principes d’information et de communication en direction du public et des professionnels. Ces dispositions ont surtout l’avantage d’être évolutives et adaptables à toute menace liée à un nouvel agent infectieux.

Le réseau d’alerte épidémiologique

Le système de surveillance épidémiologique actuellement opérationnel en France, repose sur le signalement sans délai à l’autorité sanitaire, des maladies à déclaration obligatoire. Leur liste a été complétée par les infections pouvant être liées à une attaque biologique. L’Institut de veille sanitaire a complété son système d’alerte par la mise en place au sein des cellules interrégionales d’épidémiologie (CIRE), de postes spécialisés sur le bioterrorisme. Par ailleurs nos réseaux de veille épidémiologique sont en relation permanente avec les grands organismes internationaux de surveillance de l’OMS, du CDC d’Atlanta et du système « Bichat » (Biochemical and Chemical Attack Threat) mis en place par l’union Européenne à Luxembourg.

Cette organisation permet un échange permanent des données et le déclenchement à tout moment, des alertes spécifiques.

Le réseau de laboratoires

A la suite des attaques avec du bacille du charbon survenus aux États-Unis en octobre 2001, la France et le Royaume Uni ont été concernés par une vague d’alerte utilisant des enveloppes et des colis contenant des poudres suspectes de contenir du Bacillus anthracis . Plusieurs milliers de prélèvements ont du être analysés dans des laboratoires de haute sécurité, paralysant pendant plusieurs mois, l’activité de plusieurs centres de recherche militaires et civils. Le nombre et la diversité de ces alertes a mis en évidence de nombreuses failles dans la chaîne d’identification :

surcharge majeure des circuits de laboratoires, absence de procédure de tri et de suivi des envois suspects. C’est pour cette raison que le Secrétariat Général pour la Défense Nationale (SGDN) a mis en place en décembre 2004, une coordination scientifique du réseau des laboratoires experts. Sa mission est de répondre à plusieurs objectifs :

— établir une cartographie des compétences dans le domaine du risque biologique agressif ;

— améliorer et compléter le maillage territorial en laboratoires, les uns de haute sécurité (niveaux 2 et 3) et les autres spécialisés dans l’étude des toxines et des agents pathogènes orphelins (ricine, burkholderia ). L’objectif est aussi de disposer d’un laboratoire de référence par zone de défense et de ne laisser aucune grande agglomération en dehors du réseau d’alerte biologique ;

— standardiser les procédures techniques et les protocoles de prise en charge, obtenir une accréditation et une certification des laboratoires experts par un contrôle des bonnes pratiques et de la qualité ;

— valider de nouveaux outils d’identification des agents pathogènes (techniques PCR quantitative ou en temps réel, biopuces avec sondes ADN ou ARN, typage moléculaire…) ;

— organiser des formations de techniciens et des exercices d’alerte ;

— exprimer les besoins en recherche-développement qui pourraient conduire à l’amélioration des techniques.

L’architecture instaurée assure une couverture nationale du diagnostic des prélèvements provenant de l’environnement, des réseaux d’adduction d’eau et de la chaîne alimentaire ainsi que des échantillons biologiques prélevés chez des malades ou des personnes potentiellement exposées à un danger identifié. L’organisation mise en place est décentralisée sur les laboratoires de référence des sept zones de défense avec comme maillon ultime d’identification, le laboratoire P4 (INSERM-Mérieux) de Lyon. La coordination du réseau est assurée par le SGDN. Ce nouveau dispositif actuellement opérationnel, est d’une conception très proche de ceux qui existent dans d’autres pays en particulier en Grande Bretagne et aux USA.

LES LIMITES DE LA RÉPONSE AU BIOTERRORISME L’alerte épidémiologique.

 

L’identification des maladies émergentes et des groupements épidémiques est souvent faite a posteriori, sur la base des déclarations des systèmes d’alerte et de surveillance épidémiologique, utilisés par la plupart des pays. Or, l’absence fré- quente de spécificité de la phase initiale des maladies infectieuses peut dans le cas d’une attaque bioterroriste, être à l’origine d’un retard diagnostique lourd de conséquences. C’est dire tout l’intérêt d’une déclaration par syndromes qui complé- terait efficacement le dispositif de surveillance [9,10]. Ce procédé a permis la détection précoce de l’épidémie de West Nile qui a touché l’état du Maryland entre 1999 et 2001. Dans cette approche, le recours à la surveillance épidémiologique en temps réel permet d’identifier et de résoudre très précocement tout événement inopiné susceptible d’avoir un impact sur la collectivité. Ces nouveaux outils de surveillance épidémiologique utilisent la transmission satellitaire et le suivi temporo-spatial. Les données recueillies sont confrontées à des paramètres environnementaux (pluviométrie, température, hygrométrie, importance et direction des vents…) et aux flux migratoires humains, animaux et vectoriels. Il est alors possible grâce à des modèles bio-mathématiques de prévoir la dynamique d’une maladie transmissible et d’intervenir très précocement. Cette surveillance automatisée et en temps réel a été récemment instaurée par l’Institut de Veille Sanitaire (InVS) au sein des hôpitaux de Paris. Son principe est de recueillir et d’analyser les syndromes qui correspondent aux phases prodromiques des principaux agents du bioterrorisme (syndromes digestifs, respiratoires, cutanés, neurologiques). Ce dispositif a vocation à terme d’être généralisé à l’ensemble du territoire.

Des compétences dispersées

Toutes les actions concernant le bioterrorisme comme celles en cours de développement, ont trait aux relations entre l’homme et les agents pathogènes. Dans la prévention de ce danger, il convient de garder en mémoire plusieurs notions. La première, est qu’il n’existe aucune frontière entre le risque biologique naturel et intentionnel. La seconde, est que les maladies émergentes sont pour la plupart issues du monde animal et inévitablement appelées à se développer. La dernière, est l’absence, en dépit des dispositions prises par le SGDN, de synergies dans le domaine de la recherche, qu’il s’agisse des structures étatiques (INSERM, CNRS, Université) ou du partenariat privé- public. Les secteurs vétérinaires et l’INRA sont peu sollicités pour l’expertise microbiologique alors que les moyens dont ils disposent (nombreux experts, laboratoires de haute sécurité, animaleries) compléteraient utilement le dispositif mis en place pour la veille et la recherche sur les maladies infectieuses. C’est dire tout l’intérêt d’établir une étroite synergie entre la pathologie humaine, vétérinaire et le monde agricole. La création de véritables « infectiopoles » regroupant toutes les compétences permettrait de corriger cette lacune et d’apporter à la recherche en microbiologie, une nouvelle dynamique [11].

L’absence de posture de défense

Il n’existe en France aucune politique préventive efficace dans la lutte contre les agents du terrorisme. La posture nationale de défense doit concerner tous les citoyens. Si le plan Vigipirate est bien connu, la culture de prévention est insuffisamment instaurée. Elle doit concerner tous les agents du risque qu’ils soient biologiques, chimiques ou radionucléaires. Dans la suite des attaques terroristes de 2001, des efforts ont été faits avec la réalisation d’exercices de défense et de sécurité, en France et en Europe, ayant pour objectifs de valider les circuits de commandement, de tester le fonctionnement de la chaîne opérationnelle et les équipements, de préparer une politique de communication face à une menace identifiée. Ce sont les exercice variole (mai 2004), pandémie grippale (juin 2005) et à propos des autres formes d’agression, les exercices METROTOX 2003, 2004, 2005 et EURATOX 2002.

Ces expériences qui ont impliqué les acteurs de premier secours, n’ont malheureusement pas été suffisamment portées à la connaissance de la population. Celle-ci ne pourra avoir de réaction adaptée que si elle est suffisamment préparée. Les citoyens doivent bénéficier eux aussi d’exercices, d’une pédagogie du risque et d’un apprentissage des postures de sécurité. Le rôle de l’école et des enseignants est sur ce point, essentiel. En sensibilisant les élèves aux dangers et aux mesures de prudence qu’il convient d’adopter face à une menace non identifiée, la réaction de panique, objectif prioritaire de tout acte terroriste, pourrait être limitée. Des formations ont déjà été initiées par l’Education nationale et sont dans certains départements, renforcées par les actions des trinômes académiques (IHEDN-Défense-Education nationale).

Elles devront être généralisées et institutionnalisées. Dans le prolongement de ces démarches, les médias doivent être aussi impliquées. Ils ne doivent pas se limiter à la recherche du « scoop », mais doivent aussi délivrer des messages pédagogiques et scientifiquement validés. Il convient enfin de rappeler que la vigilance doit être permanente et régulièrement entretenue par les pouvoirs publics surtout pendant les périodes de répit comme c’est actuellement le cas. Force est de constater que depuis trois ans, le risque hypothétique de pandémie grippale H5N1 a éloigné de nos esprits, la crainte du bioterrorisme.

*

* *

Toutes les dispositions développées ci-dessus (veille épidémiologique, réseau de laboratoires, contre mesures médicales, collaboration internationale) nous permettent de mieux réagir à une éventuelle menace biologique quelle que soit sa nature.

Il serait toutefois imprudent d’affirmer que nous sommes prêt à faire face à une attaque bioterroriste. En effet, notre capacité médicamenteuse est limitée aux stocks nationaux de cyclines et de vaccins antivarioliques. répartis et troNous ne disposons à ce jour, ni d’antitoxines botuliniques, ni de molécules antivirales efficaces en raison du peu d’efforts que leur consacre la recherche industrielle. D’un point de vue épidémiologique, le système d’alerte est dans l’incapacité de détecter très précocement tout phénomène anormal pouvant avoir un impact en santé publique. Enfin, la recherche est éclatée, les moyens qui lui sont consacrés inégalement p souvent focalisés sur les soucis du moment.

Le SRAS, les épidémies de grippe aviaire H5N1 et de Chikungunya à la Réunion nous ont bien montré que la réponse sanitaire était à chaque fois retardée et disproportionnée. En revanche, les plans nationaux qui ont été mis en place ces dernières années nous ont permis de réorganiser nos moyens de lutte et d’avoir une réponse adaptée lorsque nous serons demain confrontés à une nouvelle menace biologique émergente ou provoquée. En définitive, il convient de garder à l’esprit que la menace bioterroriste est toujours présente même si elle a été reléguée au second plan par l’émergence de nouveaux agents infectieux.






 

Alors ? Le survivalisme ? Une abberation ou une prise de conscience de la situation ? 






 

On peut envisager également, en dehors du risque terroriste, un "accident" .... On en trouve des traces sur le Net... On dirait vraiment un scénario pour le cinéma... Et c'est pourtant réel...

 

La mystérieuse disparition de 2 349 tubes contenant du virus SRAS

Le risque infectieux de ces éprouvettes issues d'un laboratoire de l'Institut Pasteur est « nul », selon un comité d'experts réuni à la demande du ministère de la santé.

LE MONDE |  • Mis à jour le  | Par Elise Godeau

 

image: http://s2.lemde.fr/image/2014/04/15/534x267/4401271_3_da4f_deux-mille-trois-cent-quarante-neuf-tubes_88e2fdf996a898d968e0b67624b218ac.jpg

Deux mille trois cent quarante-neuf tubes contenant des fragments du virus SRAS ont disparu d'un laboratoire de l'Institut Pasteur.
Deux mille trois cent quarante-neuf tubes contenant des fragments du virus SRAS ont disparu d'un laboratoire de l'Institut Pasteur. AFP/PHILIPPE LOPEZ

Comment 2 349 tubes contenant des fragments du virus du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) ont-ils pu disparaître d'un laboratoire de l'Institut Pasteur ? Et le coronavirus SRAS, potentiellement perdu dans la nature, pourrait-il faire de nouvelles victimes, onze ans après la pandémie qui avait infecté 8 000 personnes et causé la mort de plus de 800 malades ?

La réponse à la seconde question est claire : d'après le comité d'experts réuni à la demande du ministère de la santé, le risque infectieux est « nul » car les éprouvettes égarées ne contenaient qu'une partie du virus. Incomplet, celui-ci est inoffensif, y compris en cas de contact, de transmission aérienne ou d'ingestion.

Passée la question de la dangerosité, celle de savoir comment l'institution a pu perdre plusieurs milliers de tubes de SRAS demeure. Plus de deux mois après l'inquiétante découverte – et quelques jours après en avoir fait l'annonce officielle par communiqué de presse –, l'Institut Pasteur n'est toujours pas en mesure d'expliquer avec certitude ce qui a pu se produire.

« UNE SITUATION INACCEPTABLE ET INCROYABLE »

Fin janvier, des membres du personnel effectuent l'inventaire annuel quand ils remarquent une anomalie. Dans le congélateur d'un laboratoire P3 – un type de laboratoire très sécurisé où sont manipulés des virus pouvant entraîner des pathologies graves – à l'endroit où auraient du se trouver 2 349 petits tubes de quelques centimètres de hauteur, il n'y a rien. Les échantillons inscrits dans la base de données sont introuvables.

Deux mois plus tard, Christian Bréchot, le directeur général de l'Institut Pasteur, reste sidéré : « C'est une situation inacceptable et incroyable ! » Aussitôt après la constatation de l'absence des tubes, l'institut lance une enquête.

Pendant plusieurs semaines, le matériel, les personnes et les procédures sont passés en revue. « On a cherché ces boîtes [les échantillons étaient disposés dans 29 boîtes] partout. On a repris les listes de toutes les personnes qui avaient travaillé ici depuis un an et demi, y compris les stagiaires. On a analysé les profils pour vérifier qu'il n'y ait pas eu de conflit », détaille le directeur général.

Cependant, l'hypothèse d'un acte malveillant est « hautement improbable » d'après Christian Bréchot. D'abord parce que la réglementation en matière de micro-organismes et toxines hautement pathogènes (MOT) – famille à laquelle appartient le SRAS – est très contraignante.

« ON DOIT TOUT ENVISAGER »

Comme l'explique un chercheur qui souhaite garder l'anonymat, « quand on travaille sur les MOT, l'étiquetage des tubes est fait de telle manière qu'une personne étrangère au laboratoire, qui n'a pas accès à la base de données, ne peut pas savoir ce que les éprouvettes contiennent ».

Autre point qui discrédite la thèse d'une manipulation malveillante : on ne peut sortir d'un laboratoire classé P3 qu'en passant par un sas de désinfection. Le virus n'y aurait pas survécu. Et puis, plus simplement, il y a la question de l'accès. Sur les 2 500 personnes qui travaillent au sein de l'Institut Pasteur, seules 150 travaillent sur les MOT et ont accès aux différents laboratoires P3. Pour y entrer, il faut passer par le service personnel.

Malgré tous ces éléments, la piste d'un acte malveillant n'est pas complètement écartée à ce stade. L'institut a d'ailleurs déposé une plainte contre X. « On doit tout envisager », indique Christian Bréchot, même si d'après lui, l'hypothèse la plus probable est celle d'une erreur survenue lors d'un transfert entre deux congélateurs. Pour comprendre, il faut remonter à la fin de l'année 2012. A ce moment là, les 2 349 tubes de SRAS ont été changés de congélateur à cause d'un problème de décongélation.

« LES ÉCHANTILLONS ONT PU ÊTRE DÉTRUITS PAR INADVERTANCE »

L'institut a bien la trace des éprouvettes après le trajet aller, mais la faille pourrait se trouver au niveau du trajet retour : « Nous pensons qu'une erreur a pu se produire en mars 2013, lorsque les tubes ont réintégré le congélateur d'origine, explique le directeur. Les échantillons ont pu être détruits par inadvertance. Nous cherchons à savoir quand a eu lieu ce deuxième trajet.» Il s'agirait donc d'une erreur humaine, d'une personne qui aurait oublié de mentionner dans le cahier prévu à cet effet qu'elle avait jeté quelque chose.

Comme le prévoit la procédure, après l'enquête interne, l'Institut Pasteur a informé l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Celle-ci a ouvert à son tour une enquête la semaine dernière. Dans ce cadre, des scientifiques de l'institut ont été auditionnés. Les investigations de l'ANSM devraient permettre de pointer les dysfonctionnements en matière de traçabilité et de proposer des mesures correctives pour éviter que cette situation sans précédent ne se reproduise.


En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/societe/article/2014/04/15/la-mysterieuse-disparition-de-2-349-tubes-contenant-du-virus-sras_4401244_3224.html#GRBeXbgJxfmTMxED.99

 

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