Méditation (1)

Je ne pratique aucune méditation d'aucune sorte mais je fais du sport d'endurance. Vélo, marche, ski de fond, ski de rando. Je ne sais donc pas trop de quoi il retourne quand il s'agit de méditation zazen ou autre. Je ne peux que parler de ce décrochement mental que je vis parfois durant mes escapades longue durée ! Totalement imprévisible et nullement assuré mais je ne m'en soucie pas. Il se passe ce qui doit se passer, je suis de toute façon totalement heureux d'être déjà en montagne. La contemplation des paysages, de l'altitude et simultanément des horizons intérieurs.

 

Mais je m'interroge sur ces pratiques de méditation "organisées", bien orchestrées, planifiées. Une impression désagréable quant à la main mise du mental dans une pratique destinée à apporter une plénitude spirituelle, une connaissance ou une re-connaissance de nos univers intérieurs...J'aime beaucoup les écrits de Jacques Brosse et pourtant je ne m'imagine pas un seul instant entrer dans cette dimension du zazen, du yoga ni aucune autre "méditation" dictée. Je ne dis pas pour autant que ça ne porte pas ses fruits mais je m'interroge sur la durabilité de ces états de méditation dans la vie quotidienne et sur leur réalité.

S'il s'agit de se concentrer pour expurger l'esprit des pensées disparates en s'interdisant par la volonté de sortir du cadre épuré de la non pensée, le stratagème reste malgré tout une pensée. Elle est muette, non verbalisée, même intérieurement,( l'individu qui répèterait comme un mantra, "je dois me concentrer", on sait très bien qu'il n'arriverait qu'à faire bouillir son crâne comme une cocotte minute) mais même une pensée qui resterait à l'état de silence a une intention, un projet et j'y vois la même entrave qu'une pensée modelée par des mots. Vouloir se mettre dans un état donné pour accéder à l'état de non volonté reste tout de même une belle contradiction...Par conséquent, je suis interloqué par la méthode...D'autre part, étant donné que cette "méditation" me semble tout de même relativemement artificielle, je m'interroge quant à ses effets sur l'individu lorsque celui-ci replonge dans les évènements exogènes. Gardera-t-il la même sérénité, si tant est qu'il y soit parvenu, ou bien succombera-t-il aux assauts de son patron, de son collègue de bureau, de sa femme, de son chien, de sa voiture, de la dernière grève de la SNCF (non, je n'ai mis aucune ordre hiérarchique là-dedans :)

Les émotions auront-elles gardé le même pouvoir ? Ou cet individu aura-t-il appris à reconnaître ce qui vibre dans son mental et à maîtriser simultanément dans le silence ce qui vibre en lui ? En résumé, quelle est la portée réelle de cette méditation dans la gestion de la vie ? Etant donné que nous ne sommes pas des ermites, ni des sages ou des grands Maîtres, que faisons-nous profondément de ces états de méditation ? Que nous apportent-ils ?

Car je ne peux évidemment me résoudre à croire que ces méditations ne sont que des errances mentalisées, déguisées par de belles enluminures orientales. Il y a nécessairement des effets positifs, il existe des états réels dans cette réalité intérieure, des états d'éveil par-delà le sommeil éveillé. C'est une évidence. De même que sur mon vélo ou quand je marche, je suis parfois dans un état de sérénité et de lucidité que je ne connais pas dans le monde social.   

Mais alors, comment vais-je gérer la prochaine venue de mon inspecteur de l'éducation nationale ? Est-ce que je vais me liquéfier devant son autorité hiérarchique, est-ce que je vais me noyer dans le flot des angoisses, est-ce que je vais perdre tous mes moyens et me montrer incapable de mettre en avant mes qualités ? A quoi serviraient ces heures de silence et de voyage intérieur si je ne retire pas de ces expéditions lointaines une certaine maîtrise de mes émotions ? Au moins ça ...

La première méditation serait déjà de se dire que je n'ai rien à prouver à ce monsieur. L'essentiel, c'est ce que je fais avec les enfants. Pas besoin de respirer en zazen pour arriver déjà à cette conclusion :) Mais finalement, ne serait-ce pas ça l'essentiel de la méditation ? Savoir se vider de ses émotions pour participer pleinement à la réalité, sans l'alourdir...

A suivre. 

 

Commentaires

  • Thierry
    • 1. Thierry Le 07/10/2010
    Et bien, Françoise, on en avait déjà parlé et je te remercie de ce témoignage. C'est édifiant et ça rejoint pas mal d'autres commentaires glanés ci et là...Il y a vraiment un bug dans la quête spirituelle...
    • 2. Le 07/10/2010
    Avoir l'intention de s'éveiller. Qu'est-ce qui se cache effectivement derrière ça? Pourquoi cette intention? Faire pour. Pour quoi, qui? Pourquoi est-ce que j'ai fait ce séjour (écourté) en ashram? Ca, je le sais, je voulais découvrir ce que j'avais à faire ici, à quoi j'avais à répondre non pas comment faire pour m'éveiller. J'ai vite compris que... je devais être la seule dans ce cas. On va dans un ashram pour s'éveiller, devenir un être éveillé. Blasphème alors puisqu'on nous y serine que nous le sommes déjà! Orgueil aussi souvent. Certains se cherchent et pensent s'y retrouver, c'est peut-être déjà moindre mal mais je doute qu'ils y parviennent ainsi et qui cherchent-ils au juste? Qu'y ai-je vu? Des tas de gens fréquentant régulièrement le lieu et, promenant à longueur de journée une tête d'enterrement. L'air grâve est de rigueur, pire qu'à la messe, pourtant on y médite matin et soir... Et l'on dit aux nouveaux "Ne vous inquiétez pas de voir les gens si peu souriants, certains ont tellement de problèmes!" J'en conclus que leurs nombreux séjours et les nombreuses heures de méditation ne leur ont pas encore appris à regarder autrement, à s'extraire de ces pensées qui les détruisent. Car s'agit-il de s'efforcer à ne pas penser ou bien d'être vigilant quant au contenu des pensées pour éviter de (se) blesser et dès lors sourire et laisser venir ce qui veut venir sans intention? Voilà ce que je pense avoir à faire si vraiment il y a à faire quelque chose ici, peut-être qu'ainsi je "laisse la vie me vivre" et j'ai confiance, "elle sait où elle va". Ta phrase si parlante. Je n'ai effectivement pas besoin de techniques où de lieux spécifiques pour laisser faire ça. Et puis aussi, regarder autrement, la nature entière, humains compris, juste pour se nourrir de ce qu'elle offre.
    Quant à ces personnes à l'ashram ou ailleurs, je ne les juge pas être dans une erreur d'aiguillage, sans aucun doute ont-elles à passer par là.
    Il y a écrit à suivre en bas de ton article, je reviendrais.
    Françoise.

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