Le chapelet des jours

Je n'aurais jamais pu imaginer l'ampleur que la trilogie de romans en cours prendrait dans ma vie.

Il était totalement hors de mes capacités imaginatives de prévoir les multiples directions que prendraient mes recherches et en même temps, les liens qui se créeraient dans toutes mes découvertes.

Je réalise, roman après roman, à quel point l'écriture a pris une importance considérable dans ma vie, non plus seulement sur un plan émotionnel et existentiel mais également sur un plan cognitif.

Autant, il y a quelques années, je m'appliquais à transcrire, sous forme de fiction, diverses expériences personnelles ou à explorer des réflexions liées à des thèmes qui me touchaient particulièrement, autant maintenant, je me sens happé, aimanté, conduit moi-même par une forme d'exploration d'une terre inconnue, comme si l'écriture elle-même me projetait au-delà de moi-même et m'invitait à aller voir bien plus loin que ma propre histoire ou mes propres connaissances actuelles.

J'ai écrit toute la journée. Depuis sept heures ce matin et je ne sais pas à quelle heure j'éteindrai l'ordinateur, en sachant qu'une fois allongé, mon esprit continuera jusqu'à l'endormissement à s'agiter en tous sens et que je m'appliquerai à encadrer le foisonnement de pensées et à punaiser sur le mur mémoriel chaque phrase, chaque image, chaque séquence, en demandant à ma conscience de ranger tout cela soigneusement jusqu'à mon réveil.

Le plus douloureux étant d'imaginer que la semaine prochaine, je serai en classe et que tout cela devra être mis en pause...

Un an, encore, .................un an pendant lequel j'effacerai un à un chacun de ces centaines de petits points, à chaque jour passé, jusqu'au moment où le chapelet sera terminé, ce jour où je tiendrai dans mes mains, la clé qui ouvrira la cellule.

Pour que je puisse écrire enfin, jours et nuits, si mon esprit le souhaite, sans aucune interruption forcée, pour que je puisse continuer à apprendre, à avancer dans des espaces inconnus, à stimuler mon esprit, à verbaliser les pensées, à contraindre ma concentration dans une direction précise, sans que rien ne vienne en perturber l'inertie. Aller, là-haut, dans les sphères de la pensée.

Et sur les sommets des montagnes, tout aussi librement, sans qu'aucun planning professionnel ne vienne interférer sur mes désirs physiques, émotionnels, énergétiques.

J'ai parfaitement conscience qu'à 57 ans, je serai un privilégié au regard de nombre de citoyens français qui ne se verront accorder cette mise en liberté que bien plus tard.

Je leur souhaite juste de tenir jusque-là. 

 

 


 

 

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