Taxations des GAFA

Je n'ai même pas envie de commenter tellement c'est révoltant. Lire l'article émanant du groupe OXFAM pour réaliser l'ampleur de ce détournement. 

 

 

 

Pourquoi l'accord sur les taxations des multinationales, signé par 136 pays, essuie-t-il déjà des critiques ?

 

Les multinationales comme Google, Amazon et Facebook seront bien soumises à un impôt mondial d’au moins 15% sur leurs profits. Mais selon l'ONG Oxfam, cela reste insuffisant.

Article rédigé par

franceinfo

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Publié le 09/10/2021 17:43Mis à jour le 09/10/2021 17:45

 Temps de lecture : 4 min.

Les applications des multinationales Google, Amazon et Facebook sur un téléphone, le 28 juillet 2019. (DAVID HIMBERT / HANS LUCAS  / AFP)

Les applications des multinationales Google, Amazon et Facebook sur un téléphone, le 28 juillet 2019. (DAVID HIMBERT / HANS LUCAS / AFP)

Une avancée majeure ou un texte trop timoré ? L'accord sur la taxation des multinationales signé par 136 pays, vendredi 8 octobre, permet la mise en place d'un impôt de 15% sur les profits de ces sociétés. Un aboutissement après près de "quatre années de négociations intenses", a insisté Bruno Le Maire. Parmi les signataires figurent les Etats-Unis, la Chine, l'Inde et les Etats de l'Union européenne.

Mais cet accord historique est déjà l'objet de plusieurs critiques. Franceinfo vous explique pourquoi. 

Parce que c'est "un accord au rabais", selon Oxfam

L'une des critiques portées par les ONG, dont Oxfam, à l'égard de cette taxe est que son taux est bien en deçà de celui recommandé par le Groupe de haut niveau sur la responsabilité, la transparence et l’intégrité financières internationales (FACTI Panel). Cette assemblée d'experts, composée d’anciens chefs d’Etat et de gouvernement, de gouverneurs de Banques centrales, de chefs d’entreprises, de figures de la société civile et de chercheurs, appelait à un taux compris "entre 20 et 30%", comme le rapporte l'ONG Oxfam dans un communiqué. De la même façon, la Commission d’experts de l’ICRICT, qui vise à lutter contre les inégalités sociales, composée notamment du prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz et de Thomas Piketty, préconisait un taux de 25%.

Finalement, l'accord présenté samedi 8 octobre a tranché pour un taux de "15%" au lieu d'un taux "d’au moins 15%". "Sous la pression des paradis fiscaux comme l’Irlande, l’OCDE accouche d’un accord au rabais pour les pays comme la France", estime Quentin Parrinello, porte-parole d'Oxfam France, contacté par franceinfo. Une concession clé dont le ministre des Finances irlandais, Paschal Donohoe, s'est vanté dans un communiqué (en anglais), en soulignant que cette nuance permet à Dublin de se protéger de la menace d'augmentations futures de ce seuil minimum.

L'Irlande offrait jusqu'ici aux entreprises présentes sur son territoire, parmi lesquelles se trouvent de nombreuses multinationales dont Google ou Apple, un taux de taxation de 12,5%, soit l'un des plus faibles de l'Union européenne.

Pour Quentin Parrinello, le taux d'imposition de l'Irlande, qui passera donc de 12,5 à 15%, se fait "en échange de fortes contreparties et de beaucoup d'exonérations, notamment au cours des dix prochaines années. C'est ce qui permettra aux multinationales de baisser leur taux d'imposition en deçà de 15%, explique-t-il. Nous avons absolument voulu avoir l'Irlande [dans cet accord], mais nous avons fait baisser le niveau général."

Parce que les pays en développement sont lésés

Selon les estimations de l'OCDE, les 136 pays signataires de l'accord, qui représentent 90% du PIB mondial, vont pouvoir dégager environ 150 milliards d'euros de recettes supplémentaires grâce à cet impôt minimum. Un montant colossal. Mais les pays en développement ne vont pas beaucoup en profiter, assure Oxfam.

En effet, d'après l'accord, une entreprise doit réaliser au moins un million d'euros de chiffre d'affaires dans un Etat pour que ce dernier puisse bénéficier de la mesure, ou 250 000 euros si le PIB de l'Etat est inférieur à 40 milliards d'euros. Or la majorité des recettes des multinationales sont enregistrées dans les pays du Nord.

"Les Etats-Unis et l'Europe vont essentiellement en bénéficier", affirme à l'AFP Daniel Bunn, responsable des projets internationaux à la Tax Foundation, à Washington (Etats-Unis). Car les multinationales "y abritent leurs sièges sociaux et la plupart de leurs clients". D'après Oxfam, les pays les plus pauvres récupéreront moins de 3% des recettes fiscales supplémentaires. L'ONG a dénoncé "un simulacre" et une "capitulation" vis-à-vis des pays aux taux d'imposition les plus faibles.

Oxfam assure que "les pays en développement sont plus dépendants des recettes fiscales issues des multinationales". En 2018, 19% des recettes fiscales des pays africains étaient issues de la taxation des entreprises, contre seulement 10% pour les pays de l’OCDE.

Parce que cette réforme doit encore être approuvée par l'administration américaine

Bien que les multinationales concernées aient approuvé l'annonce de cet accord, celui-ci doit encore être validé par l'administration américaine. Une étape importante dans le processus, car à la fin juin, les Etats-Unis ont demandé à plusieurs pays européens de retarder le projet de taxe sur les géants du numérique dans le cadre d’une démarche diplomatique discrète. "Il n’y a rien de dirigé contre les Américains et je souhaite que nous puissions lever les inquiétudes américaines là-dessus", avait assuré Bruno Le Maire en juin.

La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a déclaré que le plancher fixé par l'impôt minimum mondial était une victoire pour les États-Unis et pour la capacité du pays à lever des fonds auprès des entreprises. "Les Américains trouveront dans l'économie mondiale un endroit beaucoup plus facile pour trouver un emploi, gagner leur vie ou faire évoluer une entreprise", s'est félicitée Janet Yellen.

Elle a exhorté le Congrès à adopter rapidement les propositions fiscales internationales. Comme le rapporte le Wall Street Journal (article en anglais), de nombreux analystes assurent que cela nécessiterait un traité, qui devra obtenir le vote favorable de deux tiers des élus au Sénat, ce qui nécessiterait au gouvernement Biden d'obtenir le soutien d'une partie des élus républicains. Ce qui pourrait prendre du temps.

 

https://www.oxfamfrance.org/inegalites-et-justice-fiscale/taxe-francaise-sur-les-gafa-bonne-nouvelle-ou-ecran-de-fumee-decryptage/

Taxe française sur les GAFA : bonne nouvelle ou écran de fumée ?

 

POSTED ON5 FÉVRIER 2021

5 MINUTES DE LECTURE

Après 2 ans de tergiversations pour tenter d’empêcher des sanctions économiques américaines, la France devrait collecter pour la première fois fin 2020 une taxe sur le chiffre d’affaires des GAFA – Google, Amazon, Facebook, Apple. Ces géants numériques qui réalisent des profits gigantesques, même en pleine pandémie, échappent pourtant largement à l’impôt en France.

S’assurer que les GAFA jouent selon les mêmes règles du jeu fiscal que les autres entreprises est légitime, mais la taxe GAFA française risque de passer à côté de l’objectif. Décryptage.

Pourquoi taxer les GAFA ?

Alors que les GAFA profitent aujourd’hui de la crise pour réaliser des profits exceptionnels, une large partie de ces bénéfices échappent aujourd’hui à l’impôt français.

Les géants du numérique font partie de cette poignée de grandes entreprises mondiales qui réalisent des bénéfices record pendant cette pandémie du Covid-19 alors que l’ensemble de l’économie est à terre. Oxfam a révélé dans son rapport « Les profits de la crise » que Jeff Bezos pourrait, avec les bénéfices qu’il a réalisés pendant la crise, verser une prime 105 000 dollars aux 876 000 personnes employées par Amazon dans le monde, y compris les quelques 10.000 salariés en France, tout en restant aussi riche qu’il l’était avant la pandémie de coronavirus.

Les GAFA sont aussi les champions de l’évasion fiscale. Les faits sont là : les chiffres d’affaires des GAFA en France sont souvent largement supérieurs à ceux effectivement déclarés.

Si Google déclarait payer en 2017 en France 14 millions d’euros d’impôt pour un chiffre d’affaires de 325 millions d’euros, ce chiffre est, selon le Syndicat des Régies Internet, largement sous-estimé, au vu du quasi-monopole de la marque : Google domine près de 90% du marché de la publicité des moteurs de recherche qui pèse près de 2 milliards de dollars.

C’est également le cas pour Amazon. Les activités de ventes en propre de la marque 2,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2017 pour 40 millions d’euros d’impôts payés. Selon le cabinet d’étude Kantar, le chiffre d’affaire réel de l’entreprise en France atteindrait 6,6 milliards d’euros en 2018.

La taxe sur les GAFA proposée rapportera des recettes insuffisantes

Cette mesure consiste à taxer temporairement le chiffre d’affaires de certaines activités numériques des GAFA à hauteur de 3%, dès le mois de décembre 2020 :

Une imposition provisoire de 3% sur les revenus tirés de trois principaux types de services, lorsque la valeur principale est créée par la participation des utilisateurs... Placement en ligne d'annonces publicitaires. Vente de données utilisateurs collectées. Plateformes numériques qui facilitent les interactions entre les utilisateurs. Et fournies par des entreprises dont le chiffre d'affaires annuel total à l'échelle mondiale est supérieur à 750M€, le chiffre d'annuel total à l'échelle de l'UE est supérieur à 50M€.

En 2018, le gouvernement estimait pouvoir collecter plus de 500 millions d’euros d’impôts grâce à cette taxe. En 2019, ce chiffre est ramené à 350 millions d’euros. Une somme bien dérisoire à côté de ce que vont coûter les mesures de pouvoir d’achat annoncées par le Président de la République en avril 2019, environ 11 milliards d’euros.

Au-delà du coût, l’impact de la taxe GAFA pourrait être nul faute de ciblage correct permettant de taxer l’ensemble des activités en ligne des géants du numérique échappant aujourd’hui à l’impôt. Amazon et Apple ont ainsi déjà annoncé qu’ils répercuteraient une partie de la taxe sur les commerçants utilisant leurs plateformes.

GAFA : Chronologie d’une taxe contestée

2018 :
La Commission européenne propose une taxe européenne sur le chiffre d’affaire des GAFA. Cette mesure, soutenue par la France, rencontre l’hostilité de plusieurs pays européens dont l’Allemagne et l’Irlande. Face au manque de consensus, la discussion est délocalisée au niveau international, où plus de 130 pays sont convoqués pour discuter d’une réforme de la fiscalité des multinationales et en particulier des géants du numérique, sous l’égide de l’OCDE. La France annonce son intention de mettre en place unilatéralement une taxation temporaire des GAFA en attendant la solution internationale.

2019 :
Sous la pression des Etats-Unis menaçant de rétorsions commerciales, la France suspend la mise en œuvre de la taxe GAFA nationale afin de donner une chance aux négociations internationales.

2020 :
Face à l’échec des négociations internationales, la France annonce qu’elle remet en place une taxation unilatérale des GAFA à partir de décembre 2020 dans un contexte de fronde face aux géants du numériques qui surfent sur la crise pour réaliser des bénéfices exceptionnels.

La France peut et doit aller plus loin

Taxer les GAFA, c’est s’attaquer à la face la plus visible de l’évasion fiscale car au-delà des géants du numérique, l’évasion fiscale est un fléau qui touche l’ensemble des secteurs d’activités. Aujourd’hui, les multinationales de tous les secteurs délocalisent en moyenne 40% de leurs bénéfices étrangers dans les paradis fiscaux. Si elles en sont capables, c’est parce que les règles fiscales internationales ne sont plus adaptées à l’économie du XXIe siècle. Pour y mettre un terme, il faut revoir en profondeur la façon dont les multinationales sont taxées.

Alors que faire ? En adoptant unilatéralement une taxe GAFA, la France rejoint l’Italie, le Royaume-Uni, l’Espagne et bientôt l’Autriche et met ses autres partenaires européens devant leurs responsabilités.

Mais pour être réellement efficace et éviter que le coût de la taxe soit transféré sur ses utilisateurs, la France devrait élargir le périmètre de la taxe GAFA aux activités en lignes comme la vente, ou le streaming.

Et cette taxe ne résoudra pas le problème de fond. Elle a été créée comme une solution temporaire en attendant trouver une solution de long terme pour adapter notre système fiscal à l’économie du 21ème siècle. C’est tout le système fiscal mondial qu’il faut réformer en profondeur.

La crise du COVID -19 rappelle l’urgence d’agir

Alors que les négociations internationales sur la réforme de la taxation des multinationales menées sous l’égide de l’OCDE sont au point mort, la France doit défendre une position ambitieuse et claire, pour :

Permettre de taxer les multinationales là où elles ont une activité économique réelle.

Mettre en place un taux minimum d’impôts payés par les grandes entreprises.

A l’heure où notre pays fait face à une crise sanitaire sans précédent, affaibli par des coupes budgétaires dans la santé depuis plusieurs années, il n’est pas acceptable de voir s’évaporer de telles sommes d’argent. Quand les multinationales ne paient pas leur juste part d’impôts, ce sont les citoyens qui en paient le prix, et en particulier les femmes et les filles qui sont les plus impactées par la réduction des services publics.

 

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