Vacarme des pensées. (spiritualité)

Trois heures à tronçonner du bois aujourd'hui. Jusqu'à ce que les crampes me reprennent...Aucune énergie, aucune force, une pesanteur pénible, usante, mes muscles qui crient leur peine là où ils devraient à peine être échauffés... Je dois m'extraire de cette vase...

Le bruit rageur de la tronçonneuse parvenait parfois à couvrir le vacarme des pensées. 

Je me suis arrêté à un moment et je me suis assis sur un tronc. 

Est-ce que ce sont les pensées elles-mêmes qui font ce bruit ou ne sont-elles que l'écho d'un vacarme plus profond, plus vaste, plus insaisissable aussi...?

Les pensées sont-elles la source ou ne sont-elles que les effets d'un phénomène qui se tient caché ? 

C'est là que m'est apparue la conscience.
J'ai une conscience affinée de ma situation, de toutes les émotions qu'elle génère, des sentiments de rage et de tristesse, comme un gâchis qui laisse un goût tenace de vomi.

 

Cette perception de mes sensations, cette nausée qui jaillit lorsque je pense à ma vie passée, tout semble tenir au creux de mon corps, comme lorsque je prends conscience que mon corps a faim et que je pense à ce que je pourrais bien faire à manger, comme lorsque je sens la pesanteur de la fatigue qui m'appelle au sommeil et que je pense à ce que je dois faire avant d'aller me coucher...Des pensées corporelles en quelque sorte.

 

Et puis, il y a les pensées nourries par la mémoire.

Et puis, il y a les pensées nourries par l'incertitude de l'avenir.

 

La pensée n'est qu'un effet, une continuité, un résultat, une conséquence. Elle n'existe pas en dehors d'un environnement précis.

Mais alors, d'où vient le silence ? Sur quel support parvient-il à prendre forme ? 

Il n'est que l'écho inversé du souvenir que l'on garde du vacarme. 

Il ne peut pas s'étendre dans le vacarme. Il n'y a pas de silence dans le bruit.

Mais ce silence ne peut pas exister s'il n'a pas de contraire. 
Ca serait comme dire que je n'ai plus faim sans avoir jamais connu la brûlure du ventre vide. 

 

Il faut donc que je parvienne à me défaire des sensations et de ma mémoire et de toutes mes projections temporelles.

Rien.

Il ne faut plus rien. C'est là que se trouve la paix.

Mais comment se libérer des pensées ?

Comment ne plus rien ressentir qui ne soit associé au vacarme ?

 

Et pourquoi est-ce que je m'en inquiète et pourquoi est-ce que je m'interroge ? 

Puisque le faisant, je fabrique une pensée...

Cercle pervers qui consiste à creuser un trou en cherchant à en sortir...

 

Bon. 

Puisque j'ai conscience du vacarme de mes pensées, puisque j'ai conscience que pour m'en défaire, il est inutile d'y penser, puisque j'ai conscience que la dimension temporelle est un terreau inépuisable, il me reste à m'inscrire dans l'instant, consciemment, à chaque seconde, vivre en ayant conscience que je vis et non pas continuer à vivre comme si je devais faire de chaque instant ce qu'il n'est pas, c'est à dire une autre vie...

 

Cette vie passé n'existe plus.

Cette vie à venir n'est qu'une image mentale, une pensée qui s'échappe. 

 

Tout ça n'est rien. 

Rien qui ne soit fabriqué par moi-même. 

Et puisque que c'est moi-même qui le génère, il est nécessairement possible que je ne le fasse pas. 

 

Toute crise est en germe la destruction de ce qui doit disparaître, un passé morbide et un avenir illusoire, et l'opportunité de saisir intégralement ce qui est déjà là. 

 

La Vie est là. 

 

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