Dualité et réalité

L'accession au langage est le pilier de la mise en place de la dualité. Il y a une réalité de surface, une réalité conventionnelle, celle que nous nommons habituelle et il y a une réalité profonde. Le langage vient finaliser en soi l'expérience de la scission. Il y a un arbre, une fleur, le ciel, le soleil, le vent... et moi qui observe l'ensemble et qui le nomme. Et ce nom que je partage avec des millions d'individus est une étiquette collée sur nos esprits. Il vient valider l'idée d'un ego encapsulé et d'un environnement...Le mal est fait.

Il faudrait oublier les mots.

Le langage est un système de signes, qui relie un monde signifiant (le monde réel) à un monde signifié (le monde représenté). Mais le drame vient du fait que le signifié occupe une place prépondérante jusqu'à effacer la conscience en nous du monde signifiant.

Le langage finit donc par créer un monde représenté que beaucoup finissent pas considérer comme le monde réel.

La mort par exemple.

Le mot est chargé de tellement de représentations...Quelle est sa réalité ? Personne ne le sait.

Mais alors le vent, l'eau, un arbre, une feuille, un oiseau, quelle est leur réalité ? N'avons-nous pas érigé là aussi des paravents qui nous privent de l'accession, de l'ascension, de l'éveil ?

Cette réalité que j'envisage n'est d'ailleurs encore que la représentation qu'il me plaît de m'en faire...

Il faudrait se taire peut-être pour saisir, se taire au-delà du silence, au-delà des pensées, au-delà de tout ce qui "semble" nous constituer.

Qu'en est-il de l'Amour ?

Sommes-nous capables de l'accueillir tel qu'il est et non tel que nous le concevons ?

Cet abandon absolu qui nous plonge dans la fusion, cet embrasement gigantesque, est-il nourri par toutes les attentes que nous fabriquons ou est-il réel ?

J'aimerais connaître le Réel. J'aimerais me défaire de la réalité des signes, des paroles et des idées propagées.

Mais lorsque j'élabore cette pensée, je construis un réel en moi et ce réel n'est qu'une interprétation issue de mon imagination.

Et je n'ai donc rien compris.

Il est des jours où mon incomplétude me pèse. 


"L’ego se nourrit de la sensation « c’est moi »
et meurt de la simple vision « c’est ». - François Malespine


« Quand je vois que je ne suis rien, c'est la sagesse. Quand je vois que je suis tout, c'est l'amour. " Nisargadatta

De même qu'une main devant les yeux peut

cacher la plus grande chaîne de montagnes,

de même la vie matérielle occulte la lumière

et les mystères que prodigue le monde.

Et celui qui peut éloigner de ses yeux cette vie limitée

comme on retire une main,

celui-là contemplera l'incroyable splendeur

des mondes intérieurs.

(Rabbi Nahman de Breslev)


Un jour, j'abandonnerai tout ce que j'ai lu, tout ce que j'ai écrit, un jour, j'irai m'asseoir au pied d'un grand arbre, je regarderai les montagnes, je caresserai la peau du tronc, je boirai l'air, je m'effacerai.

Peut-être alors que je comprendrai.

Peut-être qu'il sera temps de mourir.

Puisque tout sera accompli.

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