L'interprétation
- Par Thierry LEDRU
- Le 31/08/2016
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Les interprétations génèrent les ressentis.
Ce qui nous amène à ne pas saisir ce qui est mais à constuire une réalité issue de notre identification.
Il ne s'agit pas pour autant d'une condamnation dès lors que la conscience de ces émotions reste entière. A défaut de conscience, l'individu est emporté dans le flot. Il peut en souffrir si cela vient renforcer l'interprétation de la situation ou s'en réjouir si cette situation réveille des souvenirs lumineux.
Le danger vient de cet abandon au flux.
La conscience élève au contraire le donjon au sommet duquel l'individu peut observer les phénomènes et en jouer selon son désir.
Il ne s'agit donc pas de fuir les douleurs et de rechercher frénétiquement les bonheurs mais de tenir ce poste de sentinelle et de nourrir la vigilance.
Si je prends l'exemple de cette musique, selon mon état d'esprit, je peux à son écoute en éprouver une certaine tristesse ou au contraire, une profonde sérénité.
Ni le premier état, ni le second n'ont d'importance s'ils sont consciemment observés et que l'individu, entraîné par un mental insoumis, ne se laisse emporter.
Il ne s'agit pas de fuir cette tristesse ou de plonger dans le bain délicieux de la paix mais de maintenir l'observation de l'émotion. Il ne s'agit pas de nier ce qui est en nous mais de saisir l'opportunité de conscience qui est proposé.
Cette conscience établit, peu à peu, un état de réception intégrale, un saisissement de ce qui est.
L'émotion, elle-même, se retire et laisse place à une écoute qui emplit, comme une respiration. On ne pense pas à respirer la plupart du temps. Et personne n'oublie pourtant de le faire.
La conscience de ce qui est ne possède pas ce pouvoir mais lorsque l'individu parvient à l'établir, elle devient ce donjon et la sentinelle prend place.
L'âme est le gardien du lieu. Elle ne souffre ou ne se réjouit d'aucune émotion. Elle est là, c'est tout et elle se remplit de ce qui est.
Il n'y a dès lors dans cette musique, ni tristesse, ni bonheur, rien qui ne soit généré par une mémoire intrusive, rien qui n'appartienne à l'individu dans son histoire.
Il ne reste que la musique, comme une respiration.
Elle est là et ne subit aucun jugement, aucune interprétation, elle n'est pas devenue ce que nous sommes, elle ne souffre d'aucune transformation, d'aucune métamorphose.
L'âme peut jouer avec elle et décider en toute conscience de plonger en son coeur et de respirer avec elle.
Le mental n'y est pour rien parce qu'il n'a aucun pouvoir d'observation. Celui-là n'est qu'un bout de bois emporté par le courant de son histoire.
L'âme dans cette respiration peut explorer l'étendue infinie de la tristesse ou de la joie sans jamais se perdre. C'est juste une expérience, jamais un égarement, c'est juste un horizon à parcourir, jamais une disparition.
Le mental écoute et interprète.
L'âme ne se contente pas d'écouter. Elle vit la musique.
De cette vie qui résonne et de l'observation que l'âme entretient, elle prend conscience d'elle-même.
C'est là que le bonheur s'érige, c'est là que les frissons ruissellent, c'est ce qui arrive de plus beau quand on aime.
La musique n'est rien d'autre que l'escalier qui mène au sommet du donjon.
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