L’œil était dans la cage et regardait l'humain.
- Par Thierry LEDRU
- Le 21/04/2018
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L'oeil était dans la cage et regardait l'humain.
Tout comme il était dans la tombe et regardait Caïn.
Il faut regarder cet oeil, non pas distraitement mais au plus profond de nos coeurs, de nos âmes, de nos consciences.
Avons-nous conscience de cette ignominie du meurtre répandu sur la Terre comme un fait avéré qu'on ne peut renier ?
J'ai mangé des animaux pendant quarante ans et je ne supporte plus ces regards désemparés.
Je ne sais pas à quoi ce cochon pense mais il pense, c'est une certitude.
Tout comme les poules et les lapins, les agneaux et les moutons, les vaches et leurs veaux.
Et je n'oublie pas les animaux de la mer arrachés à leur élément pour mourir sur cette terre ferme où ils n'ont que faire.
Que me dit ce regard ? Que me dit ce cochon et tous ces êtres vivants que l'on condamne à l'assiette ?
Ils pensent peut-être à cette nature perdue qu'ils ont si peu connue et pour certains jamais avant de mourir.
Bien entendu, je n'en ai aucune certitude mais je peux avancer en tout cas que ce cochon n'est pas heureux de son sort.
Qui donc le serait ?
Il m'est impossible d'affirmer que les animaux n'éprouvent pas la joie de vivre. Il suffit de les observer dans leur mileu naturel.
Leur milieu naturel et non une cage.
Et il convient dès lors de repenser à la phrase de Spinoza :
"Nous ne désirons pas les choses parce qu'elles sont bonnes ; nous les considérons bonnes parce que nous les désirons".
Et dès lors disparaît la joie de vivre de l'animal derrière le paravent immense de nos désirs alimentaires.
Des désirs que nous jugeons comme de bonnes choses.
Et l'oeil de l'animal dans sa cage n'existe même plus. Cette tristesse infinie est bannie des assiettes.
Il ne reste qu'une tranche de viande.
Un jour, j'ai donc décidé que je ne mangerai plus jamais d'animaux, qu'ils soient terrestres ou marins.
J'ai décidé également que je ne porterai plus de graisse superflue parce que cela représente à mes yeux le pillage de la Terre. Je prends un peu de poids en hiver, comme le font les marmottes. Je le reperds en quelques semaines au retour des beaux jours.
Je ne mange que selon ma faim. Rien d'autre.
Et le plaisir de cette conscience de mes actes est un plaisir bien supérieur à celui d'une côtelette d'agneau.
Je pesais 75 kilos avant de ne plus manger d'animaux.
J'en pèse aujourd'hui 55 pour une taille de 1m76. Pour la médecine, je suis dans un état de maigreur. Mon IMC est trop bas.
J'ai pourtant enchaîné cette semaine deux sommets en ski de randonnée et deux sorties de vélo de route. Je retourne en montagne demain.
En ne mangeant que le matin et le soir. Juste le nécessaire. Et avec grand plaisir et non cette idée fausse de la privation ou de l'ascétisme ou même comme on me l'a dit de l'anorexie.
C'est juste une question de conscience de mes actes et cette conscience me nourrit bien plus que la matière elle-même.
Je ne souffre d'aucune carence. Mon médecin généraliste devant mon amaigrissement a tenu à ce que je fasse une prise de sang et son commentaire a été le suivant : "J'aimerais que tous mes patients aient de tels résultats. "
L'éducation alimentaire de nos sociétés modernes a rendu le meurtre animal légal, banal, généralisé, irréfléchi, inconscient.
Je voudrais que sur les barquettes de viande et les étals de charcuterie soient affichés les regards des animaux dans leur cage, la terreur dans leurs yeux quand ils sentent la mort s'approcher.
Bien évidemment qu'ils savent qu'ils vont mourir.
Je pourrais mettre ici des dizaines de vidéos qui le prouvent.
Mais depuis que j'ai commencé à parler de végétarisme, d'écologie, de survivalisme, de collapsologie, je sais que des lecteurs et lectrices ont effacé ce blog de leurs listes.
Il pourrait ne plus y avoir aucun lecteur que rien ne changerait dans mes convictions. Mais se poserait alors le problème de la diffusion du message.
Si j'en viens à écrire dans le vide, quel serait l'intérêt ?
Je n'ai pas besoin de me convaincre de ce que je dis.
Doit-on dès lors se taire et espérer que chaque conscience humaine suivra un jour le même chemin que le mien ?
Je ne me pose plus la question de la légitimité de mon engagement pour la cause animale, pour la planète entière.
J'ai la certitude que j'ai raison.
Il est impossible, humainement, de continuer à remplir nos assiettes d'une telle souffrance.
Et le mot "humainement", je l'emploie volontairement.
Que sommes-nous sur cette planète ? Des humains ou des bourreaux ?
La masse considérable de gens obèses m'interpelle. Je ne parle pas de problèmes médicaux profonds et de leurs effets secondaires mais de ces gens qui se gavent de tout comme pour remplir un vide existentiel.
L'obésité et le surpoids sont bien souvent des troubles existentiels.
Et c'est donc à travers la conscience de soi, et de la vie en soi, et de la vie autour de soi que se trouvent la guérison de ces êtres. Je ne les juge pas. Je les plains.
Mais je plains plus encore les animaux qui perdent la vie pour les troubles existentiels de ces humains.
Des scientifiques ont mis à jour une maladie moderne : la stéatose non alcoolique. L'acronyme "NASH". Ils parlent de pandémie. La "maladie du foie gras".
Une partie de l'humanité meurt à se nourrir. Se nourrir et mourir.
Les Anciens le disaient : "Il ne faut pas vivre pour manger mais manger pour vivre."
Nous avons enterré nos Anciens et leur sagesse avec.
Et nous avançons aveuglément vers un futur immonde.
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