- L'élevage est responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre
- Et de 63 % de la déforestation en Amazonie.
- Le 5e rapport du GIEC recommande une diminution importante de la consommation de viande : suivre les recommandations de la Harvard Medical School serait aussi efficace que de diviser par deux le parc automobile mondial.
- Les trois plus gros producteurs mondiaux de viande réunis ont à eux seuls une empreinte carbone supérieure à celle de la France.
- Un végétalien émet 2,5 fois moins de GES par son alimentation qu'un omnivore occidental.
- Un changement de régime alimentaire peut permettre des bénéfices écologiques à une échelle qu’il ne serait pas possible d’atteindre uniquement par changements de pratiques de production agricole.
- L'élevage émet plus de gaz à effet de serre que les transports
- Chiffres clés
- L’élevage ne se fait pas en forêt
- Les pâturages et les puits de carbone en France
- Lutter contre le réchauffement climatique par l'alimentation
L’élevage émet plus de gaz à effet de serre que les transports
En 2006, un rapport de la FAO, Livestock's Long Shadow, a révélé que l’élevage produisait une quantité importante de gaz à effet de serre (GES), environ 18 % des émissions d'origine humaine. Dans un rapport postérieur, Tackling Climate Change Through Livestock (FAO, 2013), des calculs fondés sur des données plus précises établissent à 14,5 % la contribution de l'élevage dans les émissions de gaz à effet de serre d'origine anthropique, dont 8,8 % pour les seuls bovins. C'est légèrement plus que les émissions directes du secteur des transports (IPCC, 2014).
Un rapport de l’IATP (Institut des politiques agricoles et commerciales) et de l’association GRAIN (association internationale de soutien aux agriculteurs) a révélé que la plupart des 35 entreprises produisant le plus de viande et de lait au monde ne rendent aucun compte de leurs émissions de gaz à effet de serre (GRAIN, 2018). À l’aide de données publiques, les auteurs de ce rapport ont pu estimer que les trois plus gros producteurs réunis (JBS-Friboi, Tyson Foods et Cargill) émettent à eux seuls plus de gaz à effet de serre que la France.
Le secteur de l’élevage a émis un total estimé entre 7,1 et 8,1 milliards de tonnes équivalent CO2 en 2010 (FAO, 2014 et 2018). Cela représente de 14,5 % à 16,5 % des 49 milliards de tonnes équivalent CO2 émises par l’ensemble des activités humaines cette année-là (IPCC, 2014). L’Accord de Paris, le premier accord universel sur le climat, prévoit que ces émissions globales doivent être réduites de 38 milliards de tonnes équivalent CO2 d’ici 2050 pour limiter la hausse de la température à 1,5 °C.
Cependant, le secteur de la viande et des produits laitiers poursuit aujourd’hui ses objectifs de croissance et de rentabilité : produire toujours plus pour répondre à une demande mondiale croissante. Si cette tendance se poursuit, en 2050 l’élevage représentera à lui seul plus de 80 % des émissions globales maximales pour ne pas dépasser 1,5 °C. En d’autres termes, cela signifierait que l’ensemble des autres activités humaines (transport, logement, industrie…) devrait émettre quatre fois moins de gaz à effet de serre que l’élevage seul. Il est donc primordial d’agir sur ce secteur en modifiant notre modèle agricole et alimentaire.
Les émissions de GES dans le monde.
Chiffres clés
Le secteur de l'élevage a produit de 7,1 à 8,1 milliards de tonnes d'équivalent CO2, soit environ 1/7 de l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre.
Ces émissions de GES se répartissent comme suit. 45 % sont attribuables à la production et au transport des aliments (dont 9 % imputables à la déforestation liée à l'extension des cultures et des pâturages). 39 % proviennent de la fermentation gastrique des ruminants. 10 % résultent du stockage et de l'utilisation du lisier. 6 % sont causés par le transport, l'abattage des animaux et le stockage des produits animaux.
Les émissions sont dues majoritairement à l'élevage des ruminants. Produire 1 kg de protéines sous forme de viande de bœuf émet en moyenne 290 kg d'éq. C02, contre moins de 50 sous forme de viande de porc, de poulet ou d'œufs.
Source : GIEC.
NB : les « bovins laitiers » sont exploités pour leur lait, mais aussi pour leur chair.
Les émissions de GES en France.
Un rapport de 2011 prévoit que, entre 2005 et 2050, la demande de viande augmentera de 73 % et celle de lait de 58 % (FAO, 2011).
L'élevage ne se fait pas en forêt
L’élevage extensif et le soja exporté comme aliment du bétail sont la première cause de la déforestation au Brésil (Margulis, 2004). Greenpeace affirme que l’élevage bovin est responsable à 63 % de la destruction de la forêt amazonienne (Greenpeace, 2016).
Avec une superficie de 5,5 millions de km², la forêt amazonienne est la plus grande zone de forêt primaire tropicale de la planète. Durant les quarante dernières années, près de 800 000 km2 de forêt amazonienne ont été détruits. Grâce aux efforts du gouvernement brésilien, le rythme de la déforestation s'est ralenti depuis le milieu des années 2000 et tourne aujourd'hui autour de 6 000 km² par an au Brésil, ce qui reste très élevé.
La déforestation a causé 12 % des émissions mondiales de GES entre 2000 et 2005 (Congressional Budget Office, 2012), chiffre qui a légèrement diminué depuis. Elle perturbe le cycle de l’eau (la végétation et l’humus stockent et diffusent l’humidité) et réduit la biodiversité par la destruction de l’habitat de millions d’espèces végétales et animales. En outre, le compactage des sols, piétinés par le bétail, empêche les infiltrations d’eau et provoque des ruissellements qui érodent les sols et privent d’eau les derniers végétaux, rendant les terres inutilisables.
Les pâturages et les puits de carbone en France
La question du stockage de carbone par les prairies destinées à l’élevage est complexe et ne peut pas être tranchée en un simple paragraphe. Ce stockage dépend de nombreux facteurs : conditions climatiques, composition des sols, ancienneté des prairies, intensité du pâturage… Selon les cas, les prairies peuvent stocker moins, autant, ou plus de carbone que les forêts. Ce stockage de carbone peut compenser en partie les émissions de l’élevage dues à la fermentation entérique et aux déjections des animaux. Par ailleurs, l’utilisation des prairies ne concerne que l’élevage des ruminants, souvent nourris avec des céréales et tourteaux en complément de l’herbe.
L’élevage peut avoir un impact environnemental moindre grâce aux prairies, mais il ne faut pas oublier que son rendement par hectare est très faible : on élève en moyenne 1,5 grand bovin de 600 kg par hectare… (Agreste, 2006) Sachant que la viande consommable représente environ 37 % du poids d’une vache, on aurait une productivité de 333 kg par hectare. (Interbev, la-viande.fr) À titre de comparaison, un hectare de culture en France produit 3 tonnes de soja (FAOstat, 2017), qui contient 50 % de protéines de plus que la viande de bœuf (Anses Table Ciqual, 2016). Si l’utilisation des terres non arables en pâturage peut s’avérer avantageuse, il apparaît clairement que ce n’est pas une solution pour nourrir une population croissante.
Lutter contre le réchauffement climatique par l'alimentation
Le 5e rapport du GIEC (IPCC 2014, chapitre 11), reprenant les calculs de Stehfest et al. (2009), estime que la simple application des recommandations nutritionnelles de la Harvard Medical School, qui conseillent de limiter la consommation moyenne de viande de ruminants à 10 g par jour et la consommation des autres viandes, du poisson et des œufs à 80 g par jour, permettrait de réduire de 36 % les émissions de GES d’origine agricole, et de plus de 8,5 % les émissions totales. Cette mesure serait aussi efficace que de diviser par deux l’ensemble du trafic routier mondial.
Ne pas dépasser au XXIe siècle le taux atmosphérique de 450 ppm d’équivalent carbone demandera une réduction importante des émissions de GES, ce qui aura un coût, estimé à 2,5 % du PIB mondial en 2050. Par rapport au scénario basé sur les tendances actuelles, réduire la consommation de viande selon les recommandations de la Harvard Medical School réduirait ce coût de 50 %.
Une étude britannique (Scarborough et al., 2014) a évalué que les végétaliens émettaient 2,5 fois moins de GES pour leur alimentation que les omnivores (consommant 100 g de viande par jour ou plus).
Le poids des choix de consommation a été confirmé dans une étude publiée en mai 2018 dans la revue Science (Poore et al., 2018). En s’appuyant sur des données en provenance de 38 000 exploitations agricoles réparties dans 119 pays à travers le monde, l’étude a établi l’impact environnemental moyen de la production de 40 des principaux aliments consommés, selon 5 indicateurs, dont l’émission de GES et la surface annuelle occupée.
Un scénario remplaçant l’alimentation actuelle par une alimentation 100 % végétale permettrait de diminuer les émissions de GES liés à l’alimentation de 49 % et nécessiterait 76 % de surfaces en moins. Cela représente 3,3 milliards d’hectares, soit une surface équivalente à la somme des USA, de la Chine, de l’Australie et de l’Union européenne.
Les auteurs ont également étudié un second scénario, dans lequel on remplacerait la moitié des produits animaux par des équivalents végétaux. Ce scénario permettrait de réduire les émissions de GES de 36 % et nécessiterait 51 % de surfaces en moins.
Ces résultats confirment que pour répondre à l'urgence de baisser nos émissions de GES, la végétalisation de l'alimentation est une réponse efficace.