Droit dans le mur

Pour ceux et celles qui n'auraient pas percuté sur le message d'hier, il suffira de lire le compte-rendu de la COP 30 pour constater qu'il n'est jamais question de décroissance...

Jamais.

Donc, en conclusion, on va droit dans le mur. 

 

Adaptation au changement climatique, énergies fossiles, forêts tropicales... Ce qu'il faut retenir de la COP30 après l'accord trouvé à Belém

 

Article rédigé par Camille Adaoust, Robin Prudent

France Télévisions

Publié le 22/11/2025 18:42 Mis à jour le 22/11/2025 18:44

Temps de lecture : 13min Le président de la COP30, Andre Correa do Lago, applaudit lors de la plénière de clôture du sommet de Belém (Brésil), le 22 novembre 2025. (PABLO PORCIUNCULA / AFP)

Le président de la COP30, Andre Correa do Lago, applaudit lors de la plénière de clôture du sommet de Belém (Brésil), le 22 novembre 2025. (PABLO PORCIUNCULA / AFP)

Le sommet pour le climat qui se déroulait à Belém, au Brésil, s'est terminé samedi, après deux semaines de négociations. Franceinfo résume les avancées obtenues.

Pendant deux semaines sous la chaleur et les averses torrentielles, les négociateurs ont eu un aperçu de la vie sous un climat équatorial. La COP30 s'est terminée à Belém, au Brésil, samedi 22 novembre, et le coup de marteau du président du sommet, André Correa do Lago, a officialisé l'adoption, par près de 200 pays, d'un texte commun(Nouvelle fenêtre) sur l'action climatique.

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Titré "Mutirão(Nouvelle fenêtre) mondial : unir l'humanité dans une mobilisation mondiale contre le changement climatique", le document rappelle la "décennie cruciale" qui est en cours, acte le retard pris dans la lutte mondiale contre le phénomène et annonce plusieurs avancées. Voici ce qu'il faut retenir de cette COP30, qui s'est déroulée aux portes de l'Amazonie brésilienne.

Pas de feuille de route de sortie des énergies fossiles

Le sujet a fait l'objet de négociations acharnées : certains pays, dont ceux de l'Union européenne, souhaitaient réaffirmer l'objectif de sortir des énergies fossiles, comme l'avait vivement souhaité le président brésilien Lula lors de l'ouverture. Le texte final ne mentionne finalement pas le sujet. "Les combustibles fossiles sont la cause profonde de la crise climatique et il n'existe aucune voie crédible pour atteindre des objectifs climatiques fondés sur la science sans une sortie rapide, équitable et financée de ces énergies", a commenté Rachel Cleetus, directrice de la politique pour le programme Climat et Energie de l'Union des scientifiques préoccupés.

A la COP28 de Dubaï en 2023, plus de 190 pays s'étaient engagés(Nouvelle fenêtre) à "opérer une transition juste, ordonnée et équitable vers une sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques". Mais depuis deux ans, les négociations n'ont pas produit d'avancées notables sur sa mise en pratique. "La feuille de route [de sortie des énergies fossiles] telle qu'on l'imaginait inscrite dans le texte n'est plus là", a déploré la ministre de la Transition écologique française, Monique Barbut. Toutefois, André Correa do Lago a annoncé la création d'une feuille de route sur le sujet pour les pays volontaires, une initiative en dehors des négociations officielles, qui sera "guidée par la science".

Le texte de Belém fait toutefois référence au consensus de Dubaï, et lance un "Accélérateur mondial de la mise en œuvre", une "initiative coopérative, facilitatrice et volontaire" pour constater le retard pris et y remédier. "Le nouveau texte mentionne bien explicitement un programme de travail sur l'accélération avec un focus sur le consensus des Emirats Arabes unis, ce qui revient dans les faits aux mêmes effets que d'avoir une feuille de route sur la transition vers l'abandon des énergies fossiles", note depuis Belém Sébastien Treyer, directeur général de l'Institut du développement durable et des relations internationales. Ce n'est pas pour moi un échec sur ce sujet, parce que ça permet aussi de ne pas rouvrir la discussion sur la formulation de cet objectif durement gagné à la COP28."

En parallèle, la Colombie a rassemblé une coalition de pays du Pacifique, d'Amérique latine et d'Europe (mais pas la France) pour soutenir "l'appel à élaborer une feuille de route pour une transition juste, ordonnée et équitable vers l'abandon des combustibles fossiles, afin d'intensifier l'action collective et sa mise en œuvre". Le pays a aussi annoncé la tenue de la première conférence internationale sur la sortie des énergies fossiles les 28 et 29 avril 2026, en partenariat avec les Pays-Bas.

Un meilleur financement pour l'adaptation au changement climatique

Alors que 71 pays ont soumis des plans nationaux d'adaptation au changement climatique, la plupart d'entre eux manquent de financements. Le texte final de la COP souligne donc "l'urgence de fournir et de mobiliser des ressources publiques et des subventions ainsi que des financements à des conditions très avantageuses pour l'adaptation dans les pays en développement, en particulier ceux qui sont particulièrement vulnérables (...), tels que les pays les moins avancés et les petits Etats insulaires en développement".

Les pays réunis à la COP30 ont décidé de tripler les financements alloués à l'adaptation d'ici à 2035. "La COP30 n'a pas répondu à toutes les attentes de l'Afrique, mais elle a permis de faire progresser les choses. Il est désormais plus clair que les acteurs historiques ont des devoirs spécifiques en matière de financement climatique", a salué Jiwoh Abdulai, ministre de l'Environnement et du Changement climatique de Sierra Leone.

Une réaffirmation de l'accord de Paris

Dix ans après la COP21 et l'accord de Paris qui, pour la première fois,(Nouvelle fenêtre) avait fixé un cap et des objectifs de réduction des gaz à effet de serre, les Etats devaient présenter, lors de cette conférence au Brésil, leurs nouveaux plans climatiques pour maintenir le réchauffement mondial sous la barre de +1,5°C par rapport à l'ère pré-industrielle. Si cet objectif est désormais jugé hors d'atteinte, l'accord de Paris a permis de limiter les dégâts : au lieu de se diriger vers un réchauffement de l'ordre de 4°C, la planète suit une pente l'amenant vers +2,5°C.(Nouvelle fenêtre)

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A la COP30, les pays ont ainsi constaté ces "lacunes". "Malgré les progrès accomplis, les trajectoires mondiales des émissions de gaz à effet de serre ne sont pas encore conformes à l'objectif de température de l'accord de Paris, et la fenêtre d'opportunité pour rehausser les ambitions et mettre en œuvre les engagements existants afin d'y parvenir se réduit rapidement", déplore le texte. Les Etats "réaffirment avec force" leur engagement envers le multilatéralisme et les objectifs de l'accord de Paris et s'engagent "à rester unis dans la poursuite des efforts". Et ce avec "l'espoir que l'accord bénéficiera à nouveau d'une quasi-universalité", référence à la sortie récente des Etats-Unis(Nouvelle fenêtre).

Une petite piqûre de rappel est faite aux pays qui n'ont pas encore publié leur feuille de route nationale, puisque seuls 122 l'ont fait dans les temps. La COP30 lance par ailleurs une "Mission Belém pour 1,5°C", afin de "renforcer l'ambition et la mise en œuvre" de ces plans.

Un fonds d'un nouveau genre pour protéger les forêts tropicales

La COP30, qui s'est déroulée en Amazonie, souligne "l'importance de conserver, protéger et restaurer la nature et les écosystèmes". Elle affiche ainsi la volonté d'intensifier "les efforts visant à stopper et inverser la déforestation et la dégradation des forêts d'ici à 2030". C'est cet enjeu même qui a fait l'objet de l'une des premières grandes annonces du sommet : le président brésilien a créé un mécanisme d'un nouveau genre pour protéger les forêts tropicales, la Facilité de financement des forêts tropicales(Nouvelle fenêtre) (TFFF). Concrètement, il s'agit d'un fonds d'investissements, qui sera abondé d'abord par des Etats, puis par des entreprises pour investir sur les marchés et financer la transition énergétique. Les profits, après paiement des intérêts aux investisseurs, seront reversés aux pays tropicaux présentant de faibles taux de déforestation.

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L'objectif est de rendre plus rentable la préservation des arbres par rapport à leur abattage, surtout dans les pays en développement, où se situent la majeure partie des forêts primaires. Ce fonds vise un rendement moyen de 5,5% sur vingt ans, soit 3,4 milliards de dollars de liquidités par an. De quoi tripler le financement international non remboursable alloué aux forêts. Plusieurs pays ont déjà annoncé qu'ils participeraient à ce fonds, dont le Brésil, l'Indonésie, la Norvège, le Portugal, l'Allemagne et la France.

Ce nouveau système ne fait toutefois pas fait l'unanimité : "Sans une réglementation stricte visant à mettre fin aux flux financiers vers les industries destructrices, le TFFF risque de devenir un énième mécanisme bien intentionné pris au piège dans un système défaillant", a réagi Tom Picken, de l'organisation environnementale Rainforest Action Network. La Global Forest Coalition estime de son côté que ce fonds est une "fausse solution" et dénonce le "capitalisme vert". Malgré les réticences, ce nouveau fonds "vaut mieux que d'attendre la solution parfaite, nuance Mauricio Voivodic, de l'ONG WWF, qui a participé à son élaboration. Il n'y a pas de solution miracle." Une feuille de route pour arrêter la déforestation a par ailleurs été annoncée par la présidence de la COP, samedi.

Une meilleure prise en compte des peuples autochtones

C'est l'image qui restera de la COP30. Des dizaines de représentants des peuples autochtones ont bloqué pacifiquement l'entrée de la conférence de l'ONU(Nouvelle fenêtre), samedi 15 novembre. "Nous espérons que les dirigeants mondiaux réunis à la COP30 prendront en considération notre existence et respecteront nos droits", ont notamment réclamé les membres du peuple des Munduruku.

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Réunis samedi 22 novembre, les pays du monde entier ont signé en faveur d'une reconnaissance "des droits des peuples autochtones, ainsi que leurs droits fonciers, et leurs savoirs traditionnels", et souligné leur "rôle important et [leur] engagement". Lors de la clôture du sommet des Peuples(Nouvelle fenêtre), organisés en marge de la COP30, dimanche 16 novembre, le gouvernement brésilien a annoncé que plus de démarcations – et donc de protection – de leur territoires seraient actées dans l'année à venir. La démarcation est une étape intermédiaire dans le processus de reconnaissance des terres appartenant aux autochtones, qui obtiennent le statut de réserves inviolables et protégées après homologation par le président. De nouveaux territoires ont déjà été délimités dans sept Etats du pays, au bénéfice des peuples munduruku, tupinamba, guarani-kaiwa et pataxo notamment, selon un communiqué de l'exécutif brésilien.

Des engagements pour diminuer les émissions de méthane 

Invisible, inodore, mais très nocif… Plusieurs engagements ont vu le jour durant la COP30 concernant le méthane(Nouvelle fenêtre). Généré par les bovins et les rizières et par les fuites de gaz fossile dans les gazoducs et les installations gazières, il est le deuxième plus important gaz à effet de serre après le CO2. Sept pays, dont la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni et le Canada, se sont engagés à réduire presque à zéro leurs émissions de méthane liées aux énergies fossiles, "le moyen le plus rapide de ralentir le réchauffement climatique" selon une déclaration commune.

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Egalement à l'occasion de la COP30, le Brésil et le Royaume-Uni ont lancé un programme de trois ans visant à réduire les émissions de super-polluants dans les pays éligibles à l'aide publique au développement, visant à enrôler 30 pays d'ici à 2030 en mobilisant 150 millions de dollars. Enfin, deux organisations, le Global Methane Hub et le Global Green Growth Institute ont annoncé un partenariat pour accélérer la réduction des émissions de méthane dans les pays en développement, avec l'espoir de mobiliser 400 millions de dollars.

Une déclaration pour accélérer la transition vers des carburants durables

Les dirigeants de 19 pays, dont le Brésil, le Canada et le Japon, ont adopté une déclaration visant à accélérer la transition vers les carburants durables, et ainsi s'éloigner de la dépendance persistante au gaz et au pétrole. Concrètement, l'objectif annoncé est de multiplier par quatre l'utilisation des carburants durables d'ici 2035, par rapport à 2024, en passant notamment par une utilisation plus importante de l'hydrogène, des biogaz et des biocarburants.

 

 

 

 

 

 

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