La guérison

Lacet route montagne 600x436

 

La guérison, c'est comme une montée de col à vélo.

C'est rempli de virages et quelques bouts de ligne droites et elles sont parfois bien plus difficiles à regarder que les lacets car au moins, ceux-là ne nous projettent pas trop loin, juste quelques mètres en avant et c'est bien assez vu l'effort que ça demande pour avancer.

Il arrive même que les yeux viennent se fixer sur l'avant de la roue, pas plus loin, juste le défilement du goudron et même si la vitesse est très faible, cette concentration du regard devient réjouissante et c'est là qu'on réalise que la seule chose à faire, c'est d'être là, maintenant, nulle part ailleurs, rien d'autre et surtout pas plus loin parce que plus loin, c'est trop loin et que c'est déprimant.

Il est également très réjouissant de se souvenir du lacet précédent et des autres qui sont loin derrière maintenant alors qu'ils semblaient presque inatteignables. Cette habitude, ce conditionnement, cette condamnation qui nous est transmise dès notre enfance, ces phrases "si tu travailles bien à l'école, tu auras un bon métier", cette projection constante vers l'avenir, cet avenir qui n'existe nulle part ailleurs que dans notre imaginaire, dans le domaine de la guérison, il faut absolument s'en libérer. Il s'agit de bienveillance envers soi, cette satisfaction d'avoir franchi ce dernier lacet et les précédents, toutes ces épreuves inévitables puisqu'il n'est pas question de mettre pied à terre.

Sisyphe poussait son rocher et ne pouvait l'empêcher de retomber en bas de la pente. Camus parlait de l'absurdité de l'existence mais simultanément de la liberté acquise dans la conscience de cette absurdité.

"Il faut imaginer Sisyphe heureux".

Alors, oui, cette épreuve des lacets qu'il s'agit de franchir, les uns après les autres, elle est absurde dans sa finalité puisque c'est la mort qui est au bout. La différence entre celui qui "pédale" et celui qui reste "assis", c'est le bonheur du lacet franchi. Rien d'autre. C'est un passé assumé qui nourrit les forces pour le lacet en cours, juste celui en cours. Réaliser que chaque effort contribue à retarder l'échéance et permet de continuer à grimper. 

On ne guérit que dans l'instant, jamais plus loin.

 

blog

Ajouter un commentaire