Musique pour l'écriture.

 

C'est une playlist. Je ne mets que les trois premières vidéos. 

J'ai besoin de musique lente, avec des sons profonds, des sons qui durent, sur lesquels je peux voguer. Des compositions qui stimulent les visions, qui m'isolent, qui me projettent dans l'espace où vivent mes personnages. 

TOUS, SAUF ELLE

Dix-sept heures trente quand elle ferma la maison.

Elle se concentra sur la route sans jamais relâcher sa présence auprès de Théo. Ne jamais perdre le contact. Comme avec elle-même quand elle méditait. Elle savait contraindre son mental au silence ou à une attention précise. Elle s’appliqua à respirer profondément, lentement, à insuffler dans son unique pensée l’amour de son âme pour lui.

La circulation de fin de journée était cauchemardesque. Une heure cinquante-cinq de trajet.

Elle se présenta enfin à l’accueil.

« Il est dans la chambre 18, tout s’est bien passé.

–Merci. »

Elle n’aimait pas l’odeur des hôpitaux. Elle n’aimait pas les portes entrouvertes, entre la vie et la mort, entre la paix provisoire et la reprise des souffrances, entre le soutien et la solitude, entre le monde agité du couloir et l’immobilité des survivants. Elle percevait toute la fragilité humaine et son acharnement à la dépasser. Des armées en blouses blanches qui luttaient contre des armées de microbes invisibles, des bataillons de personnels débordés qui combattaient des ennemis inépuisables, des assauts répétés et des trêves trompeuses, des mensonges cachant des vérités imprononçables, des soulagements craintifs dans l’angoisse d’un piège redoutable. Il n’y avait aucune certitude quand on entrait là. Et même une fois dehors, c’est comme si le mal restait ancré dans la mémoire et préparait une nouvelle offensive.

C’est en marchant dans le couloir qu’elle eut la certitude que le chaos venait de commencer. Une sensation épidermique, comme un air brûlant sur sa peau et la nuit glacée des déserts, une alternance frénétique, une succession de chocs thermiques interdisant le moindre répit. Elle frotta son visage pour en chasser les effets.

Quand elle entra dans la chambre et qu’elle croisa le regard de Théo, elle se reprocha furtivement de lui être attachée comme le cathéter qu’elle vit sur son bras, une pensée rebelle qui semblait remonter des profondeurs. En vivant avec Théo, elle avait pris conscience que les ruptures qu'elle avait toujours initiées étaient inéluctables. Elle avait systématiquement refusé de souffrir en amour. Souffrir d'inquiétude, endurer les doutes, accepter les concessions, contenir les frustrations, s'éloigner de soi, se perdre en l'autre.

Mais là, à cet instant précis, elle était heureuse de l’aimer. Le futur n’avait aucune importance au regard de cette force aimante. Elle pouvait souffrir de l'aimer puisque son amour pour lui était plus intense que la souffrance.

 

 

 

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