Nucléaire et consommation électrique
- Par Thierry LEDRU
- Le 20/01/2021
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C'est un très sérieux problème. Et dans la deuxième partie de cet article, on voit ce que ça peut donner : un "black out".
Très peu d'articles ont mentionné ce qui s'est passé il y a quelques jours. Il faut fouiller pour en trouver une explication.
Le nucléaire est, à ce jour, la seule production électrique de masse. On en connaît les risques et les "désagréments".
Nous en sommes considérablement dépendants.
Etant donné que la consommation électrique ne cesse d'augmenter, la question se pose de l'avenir de la production.
Nucléaire ? Production alternative ? Diminution de la consommation ?
Dans la troisième option, nous sommes acteurs.
Les deux articles suivants viennent d'un site informatif POUR le nucléaire.
Comme je tiens toujours à peser le pour et le contre, jusqu'à tenter de trouver un juste milieu, je lis aussi ces sites d'informations. Les multiples liens soulignés dans ces deux articles permettent de renforcer encore cette information. Etre informé ou "éclairé", c'est d'ailleurs le seul moyen de ne pas passer pour des "écolos à la bougie".
Le risque de pénurie d’électricité est une réalité appelée à durer
11 janvier 2021
6 minutes de lecture
Les Français ont été appelés à la fin de la semaine dernière à réduire leur consommation d’électricité face à une vague de froid très modérée. Des décalages d’opérations de maintenance sur des centrales nucléaires liés au confinement et surtout des choix politiques à courte vue et les errements d’EDF ont conduit à cette situation. On peut citer pêle-mêle, la fermeture de Fessenheim, les retards répétés de Flamanville, une incapacité depuis des années à construire une stratégie énergétique cohérente, des développements peu maîtrisés dans l’éolien et le solaire… Ce qui se passe n’est une surprise pour personne et tient peu à la pandémie. RTE, le gestionnaire du réseau électrique, avertissait déjà en novembre 2019 des problèmes à venir pour plusieurs années. A force de retarder décisions et investissements et de faire des choix purement politiques…
On ne peut pas vraiment parler de surprise. Vendredi 8 janvier, compte tenu d’une vague de froid pourtant modérée, RTE (le gestionnaire du réseau de transport d’électricité), a demandé aux Français de réduire leur consommation d’électricité face à une menace de pénurie et d’éventuelles coupures. Dans un pays qui vient pourtant de connaître une baisse historique de sa consommation d’énergie et une récession d’une ampleur inégalée depuis plus de 75 ans… Dans un pays qui était encore il y a une dizaine d’années le premier exportateur d’électricité au monde et en Europe. Il n’y a pas meilleur exemple des errements depuis plusieurs années de la stratégie de transition énergétique et des erreurs accumulées par EDF.
Faire tourner à plein régime les centrales à gaz et à charbon et importer de l’électricité allemande… au charbon
Vendredi 8 janvier dans la matinée, comme le montre les graphiques publiés par RTE, la France a été contrainte d’importer jusqu’à 3.000 MW et de faire fonctionner à plein les 4 centrales au charbon qu’il lui reste et celles à gaz… Dans le même temps, le solaire et l’éolien assuraient à peine ensemble 2% de la production… On mesure bien la différence entre le potentiel théorique des énergies renouvelables (53.000 MW environ en France) et leur production effective un jour d’hiver sans vent et avec peu de soleil (moins de 3.000 MW).
Et ce n’est pas spécifique à la France en cette période de l’année. Dans la plupart des pays européens, il y a peu de soleil et peu de vent. Ainsi, l’Allemagne, en dépit de ses investissements massifs depuis deux décennies dans l’éolien et le solaire, produisait vendredi 8 mai dans la journée à peine 20% de son électricité avec des renouvelables.
Samedi 9 janvier, la situation était comparable même si l’activité économique était plus faible. Dimanche 10 janvier, toujours la même chose, des importations et de l’électricité provenant d’énergies fossiles en grande quantité, l’éolien et le solaire produisant tout de même un peu plus à savoir 8% au maximum en milieu de journée.
La pandémie a bon dos
En fait, la pandémie a bon dos. Bien sûr, elle a contribué à accélérer la survenue des problèmes en compliquant et retardant la maintenance de plusieurs réacteurs nucléaires. Mais sur le fond, le problème est identifié depuis plusieurs années même si rien n’a été fait pour y remédier, au contraire. Les 1.800 MW des deux réacteurs de Fessenheim auraient été bien utiles.
Il y a plus d’un an, en novembre 2019, bien avant la pandémie, RTE tirait déjà la sonnette d’alarme.Il annonçait, avec de multiples précautions, que l’arrêt annoncé des centrales à charbon, la fermeture définitive de la centrale nucléaire de Fessenheim (voir la photographie ci-dessus) et les retards de l’EPR de Flamanville allaient réduire la capacité de production d’électricité en 2022 et 2023 ce qui permettrait tout juste de couvrir les besoins en période hivernale. Les problèmes commencent dès 2021… Et le plus difficile est encore à venir. Car seuls 7 réacteurs sont à l’arrêt aujourd’hui pour maintenance et ils seront 13 en février…
Le Comité social et économique (CSE) central d’EDF avait prévenu en octobre dernier dans un langage moins diplomatique que RTE. «La continuité de l’approvisionnement en électricité pour les mois de décembre 2020, janvier et février 2021 n’est pas sécurisée et dépendra uniquement des conditions climatiques… Face à une politique qui réduit les moyens de production d’électricité pilotables, il sera impossible en cas de période de froid (simplement comparable aux hivers 2018 et 2012) d’assurer l’équilibre du réseau électrique qui, à chaque seconde, doit permettre une égalité entre production et consommation», ajoute-t-il. Le CSE d’EDF s’en prenait au passage à RTE qui «commence à admettre les difficultés, mais compte sur les importations et les mesures d’effacement pour sauver le réseau de tout black-out. Une vision digne d’avant-guerre».
Des politiques énergétiques incohérentes
Tout cela montre l’incohérence des politiques énergétiques menées depuis plusieurs années qui reviennent, en dépit des discours sur la transition énergétique, à faire tourner aujourd’hui à plein régime des centrales utilisant des énergies fossiles du type gaz et charbon et à importer de l’électricité… au charbon allemande pour éviter les coupures. Et on demande aux Français et aux entreprises de limiter leur consommation et leur activité. Dans un pays qui a connu l’an dernier sa pire récession depuis plus de 75 ans… Pour rappel, le gaz émet 490 grammes de CO2 par kilowatt/heure produit, le charbon 820 grammes et le nucléaire 12 grammes.
Les capacités de production électrique dites pilotables, c’est-à-dire capables de produire à la demande, ne cessent de se réduire en France. Les capacités de puissance théoriques additionnant les sources pilotables et renouvelables n’ont aucune importance. Depuis 2012, elles ont augmenté en France et sont passées de 126 GW à 133 GW. Mais tandis que les capacités renouvelables augmentaient, celles de production d’électricité dites pilotables, qui ne dépendent ni du vent ni du soleil, c’est-à-dire les centrales nucléaires, les barrages et les centrales thermiques, n’ont cessé de diminuer. Elles sont aujourd’hui tout juste dimensionnées pour pouvoir répondre à la demande dans des conditions dites normales, mais pas dans une situation «exceptionnelle» de grand froid en hiver et de programme de maintenance perturbé par les confinements.
Au cours des dix dernières années, la France a fortement réduit son parc pilotable. Les capacités fossiles (charbon et fioul notamment) ont été amputées de 8,7 GW et les capacités nucléaires de 1,8 GW avec la fermeture l’an dernier pour des raisons uniquement d’affichage politique des deux réacteurs de la centrale de Fessenheim. Avec Fessenheim en service, la France aurait très certainement pu passer l’hiver dans de meilleures conditions… Mais le gouvernement n’a rien voulu entendre. Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique, a même été jusqu’à expliquer que les risques de pénurie tenaient au fait que la production d’électricité en France était trop dépendante du nucléaire…
La transition demande plus d’électricité… pas moins
En fait, depuis plusieurs années, les gouvernements français ont pris le risque non maîtrisé de mettre en danger la sécurité d’approvisionnement électrique du pays sans être même efficace sur le plan climatique. Car il devient impossible de fermer les centrales à charbon comme cela était pourtant annoncé.
La seule parade qu’a trouvé aujourd’hui RTE consiste à utiliser une application baptisée Ecowatt et mise au point avec l’Ademe permettant de «consommer mieux et au bon moment». Il s’agit de demander aux Français de faire baisser la puissance de leurs radiateurs électriques ou d’attendre avant de faire fonctionner leurs machines à laver. Cela s’appelle du rationnement.
Si cela ne suffit pas, RTE envisage de demander à certains industriels de fermer des usines, de baisser la tension sur le réseau (ce qui peut affecter le fonctionnement de certains appareils) voire de recourir à des coupures «temporaires, anticipées, localisées et tournantes»…
Une situation aberrante quand ont sait que la transition énergétique et écologique ne peut se faire que par une utilisation accrue et élargie de l’électricité… notamment dans les transports, la chaleur et l’industrie. Cela s’appelle l’électrification des usages. Réduire de fait les capacités de production d’électricité en les rendant intermittentes et aléatoires, comme le fait le gouvernement depuis des années, est en contradiction avec la logique même de la transition. L’affaiblissement du système électrique français inquiète même depuis quelques temps l’Agence internationale de l’énergie.
Un black-out a été évité de justesse en Europe le 8 janvier
13 janvier 2021
4 minutes de lecture
Une baisse brutale de tension sur le réseau électrique européen interconnecté, aujourd’hui encore inexpliquée, a nécessité vendredi 8 janvier en début d’après-midi des mesures d’urgence pour éviter un black-out (une coupure de courant généralisée). Cet incident illustre la fragilité grandissante des réseaux électriques. Ils sont aujourd’hui inadaptés à des productions renouvelables toujours plus importantes qui sont intermittentes et aléatoires.
C’est un incident majeur passé relativement inaperçu. Le réseau électrique interconnecté européen a failli sauter et priver soudain plusieurs pays d’électricité. Cela met en lumière les faiblesses de réseaux électriques inadaptés à l’augmentation de la part de productions renouvelables intermittentes qu’il est par définition impossible de mobiliser en cas d’urgence. Cela est particulièrement sensible en hiver quand la demande d’électricité est en général plus forte et l’ensoleillement réduit. L’incident est notamment relaté par Sylvestre Huet, journaliste reconnu dans le domaine scientifique, sur son blog publié par Le Monde.
Il s’est produit vendredi 8 janvier dernier entre 14 heures et 15 heures. Il a été marqué par une chute brutale de tension, encore aujourd’hui inexpliquée, au sud est du réseau interconnecté européen (Entso-E). Entso-E en fait état dans un communiqué laconique. L’incident a pourtant mis en péril l’ensemble du réseau électrique européen et mériterait une meilleure information des opinions publiques.
Coupures d’alimentations de sites industriels et activation dans l’urgence de centrales thermiques et hydrauliques
Pour éviter un black-out total (une coupure de courant généralisée), les systèmes automatisés et les responsables de la gestion des réseaux ont isolé le sud ouest de l’Europe du reste du réseau, coupé l’alimentation de certains sites industriels gros consommateurs et activé les réserves de production disponibles. RTE, le Réseau de transport d’électricité en France, a ainsi coupé l’alimentation de 16 grands sites industriels sur le territoire national ce qui a permis de réduire la consommation de 1.300 MW. Et cela n’a rien à voir, c’est une coïncidence, avec la demande formulée la veille par RTE aux Français de réduire leur consommation le 8 janvier dans la matinée. RTE précise par ailleurs dans un communiqué que le gestionnaire du réseau de transport d’électricité italien, Terna, a lui aussi le 8 janvier à partir de 14 heures «activé son mécanisme d’interruptibilité, permettant de diminuer la consommation d’environ 400 MW en Italie. L’ensemble de ces actions a permis de rééquilibrer la fréquence électrique européenne».
Réduire la consommation industrielle et activer dans l’urgence des sources de production d’électricité pilotables (fossiles, hydroélectrique voire nucléaire…) a permis d’éviter un black-out dont les conséquences économiques, sociales et en terme de sécurité auraient été lourdes. On imagine les conséquences de l’arrêt des trains et des métros, des ascenseurs, des éclairages, des systèmes de communications, des système de chauffage, des feux aux carrefours… Dans ces conditions, ni l’éolien, ni le solaire ne sont capables de soutenir le réseau. Ils sont même dans une certaine mesure à l’origine du problème quand ils remplacent des moyens de production dits pilotables. «Ils ne disposent ni de réserves de puissance ni de régulation de fréquence. Seuls des moyens de production pilotables et rapidement mobilisables peuvent éviter la catastrophe: hydraulique de barrage et gaz pour l’essentiel», écrit Sylvestre Huet.
L’AIE met en garde depuis des mois sur l’intermittence des renouvelables qui fragilise les réseaux
Cet incident illustre parfaitement les craintes exprimées depuis plusieurs mois par l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) sur la fragilité grandissante des réseaux électriques dont les économies et les populations sont pourtant de plus en plus dépendantes. L’AIE résume cette problématique de la façon suivante: la transition énergétique passe par une augmentation rapide de la consommation et de la production d’électricité et le développement des renouvelables. S’ils sont indispensables, leur production intermittente et aléatoire pas nature représente aujourd’hui un danger pour les réseaux électriques. Ces derniers doivent absolument se moderniser et devenir plus robustes en additionnant les sources de production, en étant plus flexibles et en se renforçant face aux cyber attaques et aux catastrophes naturelles.
Toujours selon l’AIE, la part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie dans le monde est appelée à augmenter de façon continue. Elle est passée de 15% en 2000 à 20% aujourd’hui et devrait représenter au moins 24% d’ici 2040. Dans son rapport publié à la fin de l’année dernière et intitulé «Power Systems in Transition, Challenges and opportunities ahead for electricity security», l’Agence souligne l’incapacité des réseaux électriques tels qu’ils existent aujourd’hui à accompagner ces changements.
La rédaction
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