Parmi les étoiles...
- Par Thierry LEDRU
- Le 02/02/2015
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J’avais douze ans. Je vivais en Bretagne. La maison de mes parents était au bord de la forêt et il suffisait que je traverse les bois pour arriver à la mer.
Je passais beaucoup de temps dans la nature. Je l’aimais.
François vivait dans les bois. Une petite maison en pierres que la Mairie lui prêtait. François était un Poilu. Il était parti à la guerre avec son frère et deux amis. Il était le seul à être revenu. Je ne sais pas quel âge il avait. Il m’emmenait dans les bois parfois, il ne marchait pas vite, il était au bout de sa vie. C’est comme ça qu’il disait.
Je n’ai jamais oublié ce qu’il m’a dit un jour. On était assis sur un banc en pierres contre le mur de la maison. On écoutait la forêt.
« Tu sais Thierry, quoi qu’il t’arrive, n’oublie jamais d’aimer la vie, de la remercier, de l’honorer. Quoi qu’il t’arrive ou même à ceux que tu aimes. Car si quelque chose de désagréable survient ou même de dramatique, à toi ou à ceux que tu aimes, n’oublie jamais que pour en ressentir les effets, il faut que tu aies bénéficié de ce miracle de la vie. Tu es vivant. »
Un jour, j’ai trouvé les volets fermés.
François était parti.
J’ai souvent regardé les étoiles le soir. Parfois, je me levais dans la nuit et je cherchais François. Je savais bien que c’était ridicule pour certains mais moi il me plaisait de penser qu’il était là. Il m’est même arrivé de lui parler. Je lui ai dit que je n’oubliais pas de remercier la vie comme il me l’avait appris.
François était très âgé.
……
Renaud était beaucoup trop jeune pour disparaître.
C’est insupportable, c’est même difficile à croire que c’est possible et lorsqu’on réalise que c’est arrivé, on s’en veut de finir par y croire.
On voudrait avoir perdu la raison plutôt que de s’avouer qu’on ne se trompe pas.
J’aimais la douceur de son regard et l’énergie qui émanait de son corps. Une Présence très forte sans qu’aucune prétention n’en émane. J’avais été surpris la dernière fois que je l’avais vu. Il avait un corps d’homme, une force tranquille et joyeuse. Il restait pourtant dans son regard la candeur de l’enfance et j’avais été touché par cette osmose. Je m’étais dit qu’il respirait la joie de vivre.
Alors que faire désormais ?
Je continuerai à aimer la vie, comme Renaud l’aimait, à aimer la nature, comme Renaud l’aimait, à vénérer les Montagnes comme il le faisait.
J’aurais aimé que Renaud en fasse autant si c’est moi qui avais disparu.
Il n’y a pas d’autres possibilités. Nous nous devons d’aimer la vie comme ceux qui ont disparu auraient su le faire.
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