"Planet of the humans" de Michael Moore
- Par Thierry LEDRU
- Le 05/05/2020
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« Planet of the Humans », la diatribe de Michael Moore contre les énergies « vertes »
Durée de lecture : 4 minutes
5 mai 2020 / Élisabeth Schneiter (Reporterre)
https://reporterre.net/Planet-of-the-Humans-la-diatribe-de-Michael-Moore-contre-les-energies-vertes
Centrales à biomasse, panneaux solaires, voitures électriques... Dans « Planet of humans », dont il est producteur, le cinéaste engagé Michael Moore déboulonne le mythe des énergies vertes. Disponible gratuitement en ligne, le documentaire montre que « la seule énergie propre, c’est de consommer moins d’énergie ».
Après plusieurs films sur la fin du rêve américain, Michael Moore déboulonne cette fois le rêve du développement durable. En l’honneur du Jour de la Terre, le 22 avril dernier, il a mis en ligne un nouveau film Planet of the humans — il en est le producteur exécutif et Jeff Gibbs, le réalisateur [1].
Michael Moore y accuse le capitalisme vert et désigne les « traîtres » qui nous guident sur de fausses pistes : des stars de l’écologie étasunienne comme Van Jones, conseiller environnemental de Barack Obama, Bill McKibben, fondateur de 350.org, Elon Musk, constructeur automobile de voitures électriques, Robert F. Kennedy Jr, avocat en droit de l’environnement, Michael Brune, directeur du Sierra Club, influente organisation environnementale, Michael Bloomberg, ancien maire de New York et activiste du climat qui finance la campagne contre le charbon du Sierra Club, et l’ancien vice-président Al Gore, qui a convaincu l’homme d’affaires Richard Branson d’investir trois milliards de dollars dans l’énergie « verte ».
À la question : « Al Gore est-il un prophète ? » Branson répond par un jeu de mots entre « prophet » et « profit », semblables en anglais. Et c’est cette confusion que le film démontre.
Dans ce documentaire, qui cumule déjà six millions de vue sur YouTube, Jeff Gibbs enquête sur les centrales à biomasse qui ont envahi les États-Unis. Avec les biocarburants, la biomasse est de loin la principale énergie « verte » produite dans le monde, mais elle détruit les forêts anciennes et occupe les sols agricoles. Interviewés dans des manifestations, les militants écolos ne le savent pas et les leaders environnementaux s’empêtrent au micro de Jeff Gibbs, lui répondant confusément sur l’intérêt de brûler ou pas des arbres et des plantes.
Seule Vandana Shiva, militante écoféministe indienne, s’exprime clairement : « C’est la vieille économie fondée sur le pétrole qui, pour se perpétuer, se reconvertit avec une autre matière première, et grâce à des subventions. Nos esprits ont été manipulés pour qu’on se laisse gouverner par des illusions. »
Et le réalisateur, Jeff Gibbs, de commenter :
"On nous fait avaler la fable des renouvelables qui vont nous sauver du changement climatique parce que cela rapporte aux industriels et au système financier. On ne parle ni de surpopulation, ni de consommation, ni du suicide que constitue la croissance infinie, parce que cela nuirait au business. »
L’énergie verte ne nous sauvera pas, explique le film. « Au contraire, argumente le coproducteur Ozzie Zehner, elle repose sur les procédés industriels les plus toxiques qui soient. » L’enquête montre que les panneaux solaires, les éoliennes géantes, les voitures électriques se révèlent très décevants en matière d’efficacité, de rentabilité, de durabilité, et surtout, du fait des désastres qu’engendrent leur processus de fabrication : destruction de milieux naturels, forte consommation d’énergies extractives, utilisation de matières premières rares et polluantes à extraire. Et, au terme de leur fonctionnement, panneaux, éoliennes et batteries sont difficilement recyclables et difficiles à traiter une fois mis au rebut.
« La seule énergie propre, c’est de consommer moins d’énergie »
Les remèdes aux dégâts provoqués par l’industrie ne peuvent pas être industriels. On ne peut pas résoudre un problème avec les schémas de pensée qui l’ont créé, disait Einstein. Il faudra donc changer notre échelle de valeurs. L’un des activistes interrogés lutte dans le Vermont, aux États-Unis, contre 21 éoliennes et la destruction d’une forêt pour fournir de l’énergie à un futur parc aquatique, un projet inutile. Il dit aussi que la société propriétaire est Enbridge, celle-là même qui investit dans les sables bitumineux et construit l’oléoduc Keystone XL, qui transportera du pétrole de l’Alberta canadien au golfe du Mexique ! « Ils sont tous de mèche… La seule énergie propre, c’est de consommer moins d’énergie. »
Reste à espérer que le film qui, sans en parler directement, dément le Green New Deal du Parti démocrate, ne se révèle pas un atout pour Trump en novembre.
Planet of the humans a en tout cas été critiqué par une partie du mouvement écologiste, par exemple par Ketan Joshi, qui lui reproche de s’appuyer sur des faits et des données dépassés. L’équipe du film a répondu aux critiques en vidéo.
« Mettre en doute les énergies “vertes” ne veut pas dire qu’on défend les autres, extractives ou nucléaire », explique-t-elle. « Il faut qu’on puisse discuter librement des solutions entre personnes qui croient au changement climatique. Les énergies vertes ne répondent pas à l’urgence des extinctions animales dues principalement à la déforestation et à la réduction des espaces naturels. »
- Planet of the humans, 1 h 40, sous-titré en français par Nicolas Casaux, à voir gratuitement sur YouTube jusqu’au 21 mai :
[1] Ce dernier avait déjà collaboré avec Moore pour Fahrenheit 11/9, Palme d’or du Festival de Cannes en 2004, et pour Bowling for Columbine (2002).
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