Sur la mort.
- Par Thierry LEDRU
- Le 11/06/2012
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Il existe dans la mort une étonnante contradiction : on sait tous ce que cela signifie quand on apprend que quelqu'un est mort et pourtant, il nous est impossible en même temps d'affirmer quoique ce soit sur l'inconnu que cela propose. On sait que l'individu n'est plus là, matériellement mais sans pouvoir présager de ce qu'il en est de l'âme ou de l'esprit ou de l'énergie vitale qui s'en est allée.
Ce qui est évident par contre, incontestable, c'est que la mort en nous est déjà programmée. Le moment où elle surviendra reste totalement insaisissable mais sa survenue est indéniable. Un jour, nous serons morts. C'est déjà inscrit. Il ne s'agit pas d'un phénomène qui survient soudainement et nous arrache mais d'un très long phénomène qui vit sa construction, jour après jour. La mort fait son chemin. Et puis, l'échéance atteint son apogée et le fil se rompt. Là, il s'agit bien entendu du meilleur des cas. Il reste ensuite tous les aléas de l'existence et les multiples formes que la fin peut prendre. Brutale dans la fleur de l'âge. Précoce dans l'enfance. Un accident, une maladie.
Rien de contradictoire quant au phénomène lui-même. La mort est inscrite. Elle n'est responsable de rien. Ce sont les accidents imprévisibles qui lui donnent cet air horrible et injuste. Mais la mort n'a rien décidé. Elle a juste été sollicitée de façon prématurée par la vie elle-même et toutes les situations qui s'y greffent.
C'est à se demander même si cette mort a une existence réelle. Les hommes ont donné ce nom à l'effacement de la vie. L'effacement matériel. L'enveloppe n'est plus animée. C'est la Vie qui est partie. Et c'est cet état qui se nomme la mort. On aurait pu dire tout simplement la non-vie.
Et c'est encore un terme qui ne contient peut-être qu'une vision partielle. Parce que nous ne savons rien de cette non-vie. En dehors de l'immobilité cadavérique.
Je portais l'âme de mon frère. Et mon dos n'en pouvait plus. La médium qui m'a sauvé voyait cette âme fatiguée de ce calvaire. Fatiguée de ma souffrance, de ma culpabilité alors qu'elle attendait sa délivrance.
J'ai entendu dans les noirceurs des nuits des auras bleutées qui me parlaient. Cloué au fond de mon lit, réduit à une peau de douleur, elles s'insinuaient en moi et me susurraient des paroles inconnues :
"Laisse la vie te vivre, elle sait où elle va. "
"Tu n'es pas au fil des âges un amalgame de verbes d'actions conjugués à tous les temps humains mais simplement le verbe être nourri par la vie divine de l'instant présent. "
Répétés sans fin comme dans un écho de montagnes, des lumières circulaires qui dansaient lentement devant mes yeux fermés.
Des âmes anciennes qui veillaient sur moi. Je ne sais pour quelles raisons. Peut-être simplement parce que je n'espérais plus rien.
La mort ?... Juste un autre espace habité. La rigidité cadavérique n'est qu'une enveloppe déchirée dont le message s'est envolé. Il faut ouvrir le pli pour lire le message. Le parcours terrestre est une approche minutieuse pendant lequel il convient simplement de ne pas alourdir le porteur du pli.
Se simplifier de tout pour être prêt.
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