TOUS, SAUF ELLE : l'amour de la vie
- Par Thierry LEDRU
- Le 20/09/2025
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Laure ne cherchait plus à s’expliquer les raisons de cette attirance pour Théo. C’était juste une évidence. Elle ne comprenait pas davantage la puissance de cette étreinte, cette joie en elle, une diffusion inconnue qui l’avait emplie, une lumière intérieure qui n’avait rien d’un orgasme habituel. Elle aurait pu ne pas jouir d’ailleurs, sans en éprouver la moindre frustration. Et plus étrange encore, Théo n’avait pas été qu’un simple partenaire aimant mais l’opportunité d’une révélation.
Elle n’avait jamais éprouvé l’orgasme de la vie dans son ancienne existence. Juste un orgasme génital. Ce qui comblerait déjà de bonheur un certain nombre de femmes, pensa-t-elle. Mais là, ce qu’elle avait éprouvé était bien au-delà du connu, au-delà de l’imaginable.
Elle réalisa qu’elle n’avait absolument jamais entendu parler d’une sexualité révélatrice. Que lui voulait cette lumière en elle ?
La lumière. Elle était toujours là et elle ne savait la nommer autrement.
Le sexe de Théo en elle. Un canal d’énergie. Elle avait senti le flux l’envahir, bien au-delà de ses expériences passées.
Elle avait perdu le lien avec le réel. Une plongée verticale vers des altitudes inexplorées, l’effacement de son être et l’émergence d’une entité indéfinissable, une chaleur d’étoile, une radiation solaire qui l’avait embrasée au-delà de son corps, comme si autour d’elle son âme s’était réjouie.
Elle était assise dans le canapé du salon, les yeux dans le flou, un regard poreux fixé sur le mur devant elle, une vision intérieure.
Nous n’étions pas, fondamentalement, des êtres de matière mais des âmes délivrant des corps, une énergie capable d’aimanter des particules pour en fonder un véhicule.
Elle savait que ces pensées n’étaient pas à elles, qu’elles lui étaient données, qu’elles étaient comme des vents cosmiques venus des confins de l’univers.
L’espace avait joui en elle. L’impression d’être devenue soudainement une nurserie d’étoiles.
Qu’était-elle cette lumière ? Pourquoi l’avait-elle empêchée de mourir dans l’habitacle de la voiture ? Pourquoi elle ? Et pourquoi ne l’avait-elle pas connue plus tôt ? Que devait-elle en faire désormais ?
Elle comprit alors qu’elle n’avait rien su de la vie, qu’elle en avait ressenti uniquement l’illusion de l’existence, que le réel était bien au-delà de ce que la raison humaine lui avait enseigné, que des limites transmises l’avaient bridée et qu’elle était entrée désormais dans le champ de tous les possibles.
Sans pouvoir aucunement présager de la suite.
Cette perception des atomes, cette vibration dans tout ce qui était empli du flux vital, cette pénétration des êtres comme s’ils n’avaient plus de carapace mais qu’ils étaient devenus des entités sans frontières, intégralement ouvertes, offertes, des espaces à découvrir sans que rien vienne en brider l’exploration.
Elle n’avait pas aimé le corps d’un homme, ni même un homme, ni même un cœur.
Elle avait aimé l’amour de la vie.
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