Tous crétins

Les perturbateurs endocriniens condamnent l’humanité à la stupidité…

1 décembre 2017 / par Auguste Bergot

FacebookTwitter

Nous parlons souvent des perturbateurs endocriniens comme d’une menace. Mais que savons-nous véritablement sur la manière dont ils agissent, sur leur présence, et sur les outils à notre disposition pour s’en protéger ? A vrai dire, pas grand-chose. Ou plutôt pas suffisamment. Nous continuons à les voir comme une menace lointaine, un sentiment largement entretenu par l’inertie de nos dirigeants qui nous mène à croire que nous pouvons encore minimiser l’importance de ce sujet.

Et pourtant, l’omniprésence des perturbateurs endocriniens dans notre environnement est un enjeu de santé publique globale : nous sommes tous concernés, tous affectés, et à plus forte raison, nous sommes en train d’engager l’avenir de toute l’humanité en restant inactifs, en prétendant être démunis. C’est pour apporter un éclairage scientifique à ces questions auxquelles nous sommes tous sensibles, quoiqu’insuffisamment informés, que Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade ont réalisé le documentaire « Demain, tous crétins », diffusé samedi 11 novembre sur Arte.

Si l’accent a souvent été mis sur l’impact des perturbateurs endocriniens en ce qui concerne le développement de cancer du sein, des testicules, ou encore la détérioration de la qualité du sperme (et donc de la fertilité), le documentaire développe un aspect sans doute moins traité jusqu’alors : l’impact des perturbateurs endocriniens sur l’intelligence humaine. De plus en plus, les données s’accumulent et montrent que l’humanité est en train de connaître une diminution généralisée du quotient intellectuel (QI) depuis plus de vingt ans, un développement des cas de troubles du spectre autistique, une baisse de la capacité d’attention, et un accroissement des troubles du comportement.

Les chiffres qui apparaissent dans le documentaire donnent froid dans le dos. Un chercheur a ainsi eu accès aux tests de QI qui étaient réalisés dans l’armée scandinave en Finlande. Il a alors constaté que depuis 20 ans, le QI avait baissé de 2 points par décennie. Autre constat alarmant : « entre 1990 et 2001, le nombre d’enfants diagnostiqués autistes a augmenté de 600% en Californie. Aujourd’hui, 1 enfant sur 68 est diagnostiqué autiste aux Etats-Unis. » Par ailleurs, nos instituteurs constatent tous les jours la perte d’attention croissante des enfants (qui ne saurait être expliqué exclusivement par l’effet des perturbateurs endocriniens d’ailleurs – on pense notamment au temps passé sur les écrans et au format « information instantanée » qui forme la pensée à traiter des informations rapidement mais sommairement).

En quoi alors les perturbateurs endocriniens jouent-ils un rôle dans cette diminution du niveau intellectuel ? Pour comprendre ce rôle, les réalisateurs du documentaire font un détour par les études menées par Peter Pharoah dans une région de Papouasie Nouvelle-Guinée. Dans un groupe de sociétés tribales, le chercheur a remarqué que près d’un septième de la population était atteint de crétinisme – une maladie notamment caractérisée par le gonflement de la thyroïde. Or, en 1999, année où Peter se rend sur son terrain de recherche, la colonisation avait eu le temps de sonner le glas des pratiques traditionnelle de fabrication du sel, comme le souligne Barbara Demeneixdans son livre Cocktail toxique. Celui-ci a alors l’idée de faire une injection à l’ensemble des 16 000 habitants de la région – la moitié recevant une simple injection d’eau et l’autre une injection d’iode. Quelques années plus tard, ces résultats montrent que les enfants nés des femmes qui avaient reçu l’injection d’iode n’était plus touchés par le crétinisme (sauf si l’injection avait été réalisée alors que les femmes étaient déjà enceintes) et à l’inverse, que les cas de crétinisme persistaient pour les enfants dont les mères n’avaient reçu qu’une simple injection d’eau.

Quel rapport avec les perturbateurs endocriniens me direz-vous ? Eh bien, il s’avère que certaines molécules chimiques ont à peu de choses près la même structure que celles des hormones thyroïdiennes. Parmi celles-ci on trouve le brome, le chlore, et le fluor (qui sont sur la même colonne du tableau périodique des éléments que l’iode), des molécules omniprésentes dans notre environnement et qui prennent leur place dans notre organisme, notamment en lieu et place de l’iode dans notre thyroïde. Et c’est l’invasion de ces molécules qui va conduire à la perturbation de notre fonctionnement hormonal et à l’altération de notre développement cérébral.

« Nous volons littéralement à la population son potentiel intellectuel » 

A partir de là, c’est bien connu, on va retrouver en énormes quantités le chrome, le fluor et le brome notamment dans les PCB – qui, même interdits, se retrouvent encore dans les sédiments des sols et contaminent toute la chaîne alimentaire –, dans les pesticides et (moins connu) dans les retardateurs de flamme. Il serait trop long ici de détailler toutes les études présentées par le documentaire qui confirment les liens de cause à effet entre la surexposition à ces intrants chimiques et la diminution des capacités intellectuelles, mais soulignons toutefois à bon droit que dans la plupart des cas, c’est l’activité de lobbying des industriels qui – faisant abstraction de toutes les expertises scientifiques alertant des dangers des perturbateurs endocriniens – continue d’entretenir ce modèle et dessine en toute connaissance de cause le chemin d’un effondrement…

Crédit Illustration : Olivier Bonhomme

Mais face à ce lobbying dangereux, les scientifiques indépendants de tout conflit d’intérêt, à l’image de Barbara Demeneix ou Arlene Bloom, mènent une lutte acharnée auprès des politiques pour faire avancer les législations. Car en effet, « l’information reste le nerf de la guerre » et les lobbys n’ont pas de scrupules à commander des études scientifiques allant dans leur sens pour contredire les études menées par le reste de la communauté scientifique… Pourtant il est urgent d’agir, et pour cela il est urgent que NOUS soyons informés pour comprendre l’imminence de cette menace qui pèse sur l’ensemble de notre civilisation.

Pour agir déjà à notre échelle et éviter d’être trop impacté et de trop impacter le cerveau de nos enfants, l’iode semble être un moyen efficace. Comme il est souligné dans le dossier de presse du documentaire :

« Toute femme enceinte devrait veiller à avoir un apport d’iode suffisant chaque jour. D’une part, parce que l’iode est indispensable à la fabrication d’hormones thyroïdiennes nécessaires au développement cérébral, d’autre part, parce que l’iode, en saturant la thyroïde, pourrait se révéler un rempart contre certaines attaques chimiques. »

Nous ne saurions que trop vous conseiller le documentaire de Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade qui est clairement de l’ordre de l’utilité publique.

image 11

Pour commander notre nouveau Livre-Journal, cliquez sur l’image !

 

blog

Ajouter un commentaire