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  • Un sol vivant

     

     

    « C’est la plante qui façonne le sol, et pas l’inverse »

     

    https://lareleveetlapeste.fr/cest-la-plante-qui-faconne-le-sol-et-pas-linverse/

     

    Véronique Chable plaide pour « une science holistique, qui étudie les écosystèmes dans leur globalité plutôt que de les réduire à des équations chimiques ». Les résultats sont là : les aliments issus de l’agroécologie sont plus riches en nutriments, et les sols regagnent en fertilité.

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    Texte: Isabelle Vauconsant Photographie: Oleh Malshakov / iStock 15 octobre 2025

    Véronique Chable, ingénieure de recherche et agronome, consacre sa carrière à la génétique végétale et à l’amélioration des plantes. Dans cet entretien, Véronique Chable révèle comment les plantes façonnent les sols, comment les semences paysannes redonnent vie aux écosystèmes, et pourquoi l’agroécologie est bien plus qu’une méthode de culture : c’est une philosophie de vie.

    Le sol n’est pas un support inerte

    Depuis 2005, Véronique Chable s’investit dans la recherche participative et l’agriculture biologique, en réponse à un besoin politique et écologique croissant. Son parcours accompagne la transition de l’agriculture industrielle, fondée sur l’homogénéisation et la chimie, vers une agriculture respectueuse des écosystèmes, où la plante et le sol entretiennent une relation symbiotique essentielle.

    Le sol n’est pas un simple support inerte. Il est le fruit d’une coévolution entre la roche mère et les plantes. Véronique Chable explique que « les plantes pionnières, en colonisant la roche, la dégradent progressivement grâce à leurs racines et aux micro-organismes associés. Ces micro-organismes transforment la matière minérale en nutriments assimilables, créant ainsi un sol fertile.»

    C’est un écosystème vivant. Chaque plante, en mourant, enrichit le sol en matière organique, favorisant la prolifération de bactéries et de champignons. Ces derniers, à leur tour, nourrissent les plantes suivantes.

    « C’est un cercle vertueux, où chaque acteur joue un rôle précis ».

    La rupture de l’agriculture chimique

    L’agriculture industrielle a brisé ce cycle. « En sélectionnant des plantes homogènes et en les cultivant dans des conditions artificielles (serres, cultures in vitro), on a créé des variétés incapables de dialoguer avec les micro-organismes du sol ».  Résultat : ces plantes, déconnectées de leur environnement, dépendent des engrais chimiques et des pesticides pour survivre.

    Cette agriculture a une vision réductionniste qui considère le sol comme un simple réservoir de nutriments (azote, phosphore, potassium – NPK). Pourtant, comme le souligne Véronique Chable, « cette approche ignore la complexité du vivant. Les plantes ne se nourrissent pas seulement de NPK : elles ont besoin d’un écosystème microbien riche et diversifié. »  

    Véronique Chable – Crédit : Rennes Ville et Métropole

    Les Semences Paysannes

    Face à la standardisation des semences, Véronique Chable et ses collègues ont développé une recherche participative. En collaboration avec des paysans bio, ils ont réintroduit des variétés anciennes, adaptées aux terroirs locaux. « Ces semences, conservées dans des banques génétiques, sont souvent oubliées mais recèlent un potentiel énorme ».

    Réadapter ces semences prend du temps. Il faut les multiplier, les observer, et comprendre leur comportement dans des conditions réelles. Mais les résultats sont probants : « en quelques années, les sols se régénèrent, et la biodiversité microbienne explose ».

    Contrairement aux monocultures, les semences paysannes favorisent la diversité. Et, cette diversité est la clé de la résilience : « un sol riche en espèces végétales et microbiennes résiste mieux aux maladies, aux sécheresses et aux variations climatiques ».

    Les agriculteurs bio qui cultivent des céréales associées à des légumineuses (comme le maïs, les haricots et les courges dans la milpa sud-américaine) observent une amélioration rapide de la qualité de leurs sols. Les adventices, autrefois considérées comme des « mauvaises herbes », sont aujourd’hui reconnues comme des indicatrices de la santé du sol.

    Le microbiote végétal

    Les plantes ne sont pas des entités isolées. Leurs racines abritent des millions de micro-organismes qui jouent un rôle crucial :

    Digestion : Les bactéries et champignons décomposent la matière organique, libérant des nutriments.

    Protection : Certains micro-organismes protègent les plantes contre les pathogènes.

    Communication : Les plantes communiquent avec les micro-organismes via des signaux chimiques, créant un réseau d’échanges complexe.

    « Comme le microbiote présent dans nos intestins ou sur notre peau, le microbiote du sol est indispensable à la santé des plantes. Sans lui, les plantes sont vulnérables et dépendantes des intrants chimiques. »

    Lire aussi : « Il faut défendre les semences paysannes face aux nouveaux OGM »

    L’impact de l’agriculture chimique

    L’utilisation massive d’engrais et de pesticides a appauvri les sols. Les micro-organismes bénéfiques ont disparu, laissant place à des pathogènes résistants. Véronique Chable souligne que « cette dégradation n’est pas une fatalité » : en réintroduisant des semences paysannes et en arrêtant les intrants chimiques, les sols se régénèrent naturellement. C’est un changement de paradigme

    Passer à l’agroécologie nécessite une transformation profonde :

    Observer plutôt que prescrire : Les agriculteurs doivent apprendre à comprendre leur écosystème plutôt que d’appliquer des recettes standardisées.

    Repenser les circuits alimentaires : Les consommateurs doivent accepter des produits moins uniformes et plus diversifiés, adaptés aux terroirs locaux.

    Soutenir les paysans : La transition vers le bio est coûteuse et prend du temps. Les pouvoirs publics doivent accompagner les agriculteurs, notamment en subventionnant les pratiques agroécologiques plutôt que l’agriculture conventionnelle.

    Véronique Chable s’agace : « Pensez-vous qu’il soit normal que ce soit aux bio de payer leur label quand on subventionne la chimie ? »  

    Un choix de civilisation

    Véronique Chable insiste : « le choix entre agriculture industrielle et agroécologie est un choix de civilisation. Il s’agit de décider si nous voulons être des consommateurs passifs ou des acteurs conscients de notre environnement. C’est aussi un choix d’avenir, voulons-nous manger jusqu’à en être malade ou bien faire de notre alimentation notre meilleur médicament. »  

    Elle appelle à l’action : Chaque achat alimentaire est un vote. « En soutenant les producteurs locaux et bio, les consommateurs contribuent à la régénération des sols et à la préservation de la biodiversité. »

    Malgré le peu de chercheurs travaillant sur les semences paysannes (moins de cinq en France, une trentaine en Europe), le mouvement est mondial. Des associations comme Réseau Semences Paysannes et sa coordination internationale “Libérons la Diversité” fédèrent des paysans, des chercheurs et des citoyens autour d’un objectif commun : retrouver une agriculture respectueuse du vivant.

    Véronique Chable plaide pour « une science holistique, qui étudie les écosystèmes dans leur globalité plutôt que de les réduire à des équations chimiques ». Les résultats sont là : les aliments issus de l’agroécologie sont plus riches en nutriments, et les sols regagnent en fertilité.

    Pour les acteurs du réseau, les semences paysannes ne sont pas une nostalgie du passé. Elles sont une solution d’avenir fondée sur un corpus scientifique très sérieux. Elles permettent de concilier production alimentaire et respect de l’environnement, tout en redonnant aux paysans leur autonomie.

    Comme le dit Véronique Chable, «  il ne s’agit pas seulement de produire, mais de faire société ». En choisissant l’agroécologie, nous choisissons un monde où l’humain et la nature coexistent en harmonie.

    Un autre monde est possible. Tout comme vivre en harmonie avec le reste du Vivant. Notre équipe de journalistes œuvre partout en France et en Europe pour mettre en lumière celles et ceux qui incarnent leur utopie. Nous vous offrons au quotidien des articles en accès libre car nous estimons que l’information doit être gratuite à tou.te.s. Si vous souhaitez nous soutenir, la vente de nos livres financent notre liberté.

  • L'exploration du sentiment océanique.

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    Depuis plusieurs jours, je lis et relis une étude (un mémoire) réalisée par Dagmar Bonnault sur "le sentiment océanique" à travers l'oeuvre de Pierre Hadot, un terme utilisé la première fois par l'écrivain et philosophe Romain Rolland.

    Wikipedia : Le sentiment océanique est une notion qui se rapporte à l'impression ou à la volonté de se ressentir en unité avec l'univers (ou avec ce qui est « plus grand que soi »). Ce sentiment peut être lié à la sensation d'éternité[1]. Cette notion a été formulée par Romain Rolland et est issue de l'influence de Spinoza.

    Ce que je retire principalement de cette étude, c'est que nous, en tant qu'individu, nous existons dans un état de conscience endormie, c'est à dire une absence au regard du Réel, de cette perception intégrale de notre insertion dans la vie, non pas dans l'existence mais dans le phénomène vivant et je suis convaincu depuis bien longtemps déjà que la suprématie destructrice de l'humanité est le résultat de cette construction d'une réalité, c'est à dire l'idée commune que nous avons de notre place dans le monde, le maître ordonnateur, possédant le droit de vie ou de mort, alors que nous n'aurions jamais dû nous extraire du réel, c'est à dire de l'unité, l'osmose, la fusion et donc de l'humilité, le respect, l'empathie, envers l'intégralité du vivant.

    Le "sentiment océanique" survient lorsque cette conscience endormie explose, lorsque les murailles s'écroulent, que les conditionnements sociétaux, éducatifs, familiaux, historiques sont balayés par un phénomène que nous ne déclenchons aucunement volontairement mais qui s'impose à nous.

    Il n'existe pas de méthode et n'importe qui peut être atteint. Beaucoup rejetteront malheureusement le phénomène, par peur, parce qu'il est beaucoup trop perturbant, parce que l'idée de la folie s'impose alors que c'est bien au contraire la destruction du cadre quotidien de la folie qui survient. Car nous sommes bel et bien fous de ne pas être conscients, continuellement, de cette extraordinaire merveille de la vie, fous de considérer que nos formes d'existences sont la norme et que rien d'autre n'importe.

    Je suis toujours sidéré et attristé de voir que les individus qui ont basculé hors de ce cadre limitant de la conscience endormie sont perçus comme des "illuminés", voire des déglingués, des fous, et tous ces termes issus de cette population "normale" qui ne peut voir les existences déformatées autrement que par le filtre étroit de leurs certitudes. Alors que ces certitudes ne sont que des conditionnements issus de la société matérialiste.

    La société occidentale est matérialiste et inévitablement ses valeurs vont à l'opposé de toute idée et de toute expérience menant à un état de conscience éveillée. Pour la simple raison que les individus éveillés par cet état d'unité n'ont aucunement besoin de la société matérialiste, dans ses outrages et ses exagérations et que la "simplicité volontaire" guide leurs existences. Et que la simplicité volontaire est contraire à l'idée de croissance si chère à toute société matérialiste. 

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    Dagmar BONNAULT – M2 Philosophie – UFR10 - 2015/2016 21

    https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01427038/document

     Il est possible d’en déduire que ce « sentiment » ou cette « sensation » océanique se situe à
    l’intersection du corps et de l’esprit, que les deux y sont mis en jeu. Les hésitations
    de Rolland quant au choix des termes les plus adéquats pour traduire son expérience
    sont aussi le signe d’une certaine difficulté pour décrire ce sentiment. Il n’est pas
    quelque chose que l’on peut exprimer clairement simplement. Il est difficile de
    l’exprimer par des mots et cela révèle donc déjà une dimension importante du
    sentiment dont il parle, celle de la difficulté qu’il y a justement à en parler.

    En somme, ce sentiment océanique correspond aux quatre caractéristiques que William
    James attribue à l’expérience mystique21 : il est de nature instable, c’est-à-dire qu’il
    n’est pas un état durable, et il ne peut pas non plus être convoqué à volonté ; le sujet
    est passif dans l’expérience, elle s’impose à lui ; il a un caractère intuitif : il semble
    à celui qui l’éprouve être une forme de connaissance d’un type nouveau mais
    extrêmement forte, c’est comme si le voile de l’habitude se déchirait brièvement ;
    et enfin : il est difficile d’en parler.

    Je suis vraiment heureux d'avoir trouvé l'intégralité de cette étude (103 pages) car elle éclaire, sur le plan philosophique, chacun de mes romans. Alors que je ne connaissais aucunement ces écrits sur le "sentiment océanique" ou sur la mystique sauvage dont j'ai parlé précédemment, j'ai réalisé au fil du temps que mes propres expériences et que mes tentatives de les partager relevaient de phénomènes connus, étudiés, analysés, partagés, commentés depuis des décennies et que la singularité de ces phénomènes induisait une difficulté certaine de transmission orale tout autant qu'écrite. Et qu'il s'agissait donc pour moi d'un défi littéraire.

    Comment traduire le plus clairement possible ce qui relève de l'inconnu et comment ne pas dénaturer cet inconnu que certains et certaines ont pourtant traversé ?

    Si je reprends chacun de mes huit romans publiés, ils portent tous, à leur manière, selon les circonstances, l'exploration du sentiment océanique.  

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  • La mystique sauvage

    De retour à la maison, j'ouvre le manager de mon blog et je vois que le dernier article, "Ce sentiment océanique"  a disparu.

    Un mystère.

     

    Je me souviens que j'avais mis des liens vers d'autres textes du blog mais je ne sais plus lesquels :) 

    Le sentiment océanique est parfois associé à la mystique sauvage. J'invite à lire l'ouvrage de Michel HULIN

    La mystique sauvage par Hulin
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    Lire un extrait

    3,76★

    20 notes

    EAN : 9782130571155
    368 pages

    Presses Universitaires de France (15/08/2008)

    Résumé :

    "Le problème posé par la mystique sauvage est avant tout d'ordre culturel et historique... Il refait surface dès que les codes se brouillent et perdent de leur efficacité. C'est ce qui se produit dans toutes les périodes de transition historique et de crise religieuse... Il y a là comme un défi à la pensée philosophique et religieuse."
    Publié en 1993 dans la collection Perspectives critiques, cet ouvrage relate de nombreuses expériences, "visions des choses d'en haut" ou "contemplation des idées pures" et autres phénomènes divers, dont certains sont reconnus et théorisés par les principales orthodoxies religieuses. L'originalité de cette approche est de s'en tenir aux phénomènes de caractère a-théologique, évitant ainsi de les confiner dans le ghetto du religieux. A partir de ces divers témoignages, la réflexion philosophique s'efforce ici de montrer comment l'expérience mystique peut dévoiler quelque chose de l'absolu, alors même qu'elle possède une frontière commune avec la folie.
    (4e de couverture)

    Cette mystique sauvage ou ce sentiment océanique, ce que personnellement, j'appelle "le sentiment d'être", j'ai souvent tenté de le transcrire dans mes romans. C'est un état de conscience modifiée, une "zone", une dimension spirituelle. Aucune connotation religieuse. On est ici, hors cadre, hors structure, hors dogme, hors référence.

    il faut comprendre le mot « être » non pas comme une abstraction verbale, comme un verbe auxiliaire, mais comme la quintessence du sentiment d’exister ou plus profondément encore d'être en lien avec la vie. Je le vois comme un détachement de l'existence pour une fusion avec le phénomène de la vie. Et c'est bien autre chose qu'une joie, une jubilation ou de l'euphorie. Il est d'ailleurs particulièrement délicat de le décrire car dès lors qu'on doit faire appel à son mental pour l'usage réfléchi des mots, on en perd la richesse.

     

    "L'émotion la plus magnifique et la plus profonde que nous puissions éprouver est la sensation mystique. Là est le germe de toute science véritable. Celui à qui cette émotion est étrangère, qui ne sait plus être saisi d'admiration ni éperdu d'extase est un homme mort."

    Albert Einstein

     

    Quelques anciens articles :

    Une étrange distance.

    Etrange

    Un étrange phénomène.

    "Cet étrange sentiment de transcendance"

     

    Romans :

    JUSQU'AU BOUT : La conscience.

    A CŒUR OUVERT : la vie en soi

    LA-HAUT : Plénitude de l'unité

    KUNDALINI : La Présence et la Grâce

     

     

  • Randonnées du vertige

     

    Un type de randonnées qui ne sera jamais victime du tourisme de masse. 

    On y est en général tout seul. 

    Et il ne faut pas tomber.

    On ne déplace un membre que si les trois autres sont assurés. 

    Nathalie avait fait la traversée intégrale du Roc d'enfer à 26 ans et moi quelques semaines plus tard. On ne se connaissait pas encore. Alors, cette année, trente-sept ans plus tard, on a décidé d'y retourner, ensemble.

    Dans les randonnées du vertige, on parle très peu. On est très, très concentrés. Sur soi, sur la maîtrise du corps et tout autant sur les pensées insoumises, celles qui voudraient s'imposer et qui crient, "mais tu es fou, qu'est-ce que tu fais là, tu as vu ce vide, si tu tombes, tu es mort."

    Oui, on le sait et on est là pour apprendre à se contrôler, apprendre ce que l'existence dans les vallées ne nous apprend pas. 

    Certains et certaines font ces itinéraires en courant, d'autres n'y mettront jamais les pieds. Mais pour savoir ce qu'il en est, pour connaître ce potentiel inexploré, il faut essayer, aller voir, explorer ce qui est en nous, accepter de quitter cette fameuse "zone de confort". Ce sont des journées intenses, physiquement et nerveusement.

    On a enchaîné huit jours de sommets avec un jour de repos le temps de laisser passer une dépression. Le dernier jour, au matin, Nathalie a décidé de ne pas monter, grosse fatigue. Maux de ventre et de tête. Et on ne part pas dans ce type de parcours avec un physique entamé. 

    Je suis monté tout seul, au sommet de la Tournette, avec l'idée "d'arracher la viande", la tête dans le guidon, comme disent les cyclistes. Le topo donnait la montée en 4 heures. J'ai fait la montée en 2h20, l'aller-retour en 4 h, avec 3h 30 de déplacement effectif, le reste pour les photos et un temps de discussion avec un gars au sommet, à essayer d'identifier tous les sommets, tous ceux qui nous restaient à faire :) La montagne est un terrain de jeu infini.

    Alors, oui, je suis érodé, fissuré, crevassé, usé mais pas encore en ruines.  

     

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    SUR MA PAGE STRAVA

    08:47, le mardi 7 octobre 2025 Talloires-Montmin, Haute-Savoie

    La Tournette

    4 h aller retour pour un topo qui donne la montée en 4h. Je ne suis pas encore pourri. Jamais vu un rocher aussi usé sur une rando. Et dans les rampes lisses avec le verglas en plus, c'est chaud.

     

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    13,96 km

    3:33:38

    15:18 /km

    Dénivelé positif

    1 256 m

    Temps écoulé

    4:07:48

    Pas

    20 974

    Strava Android App

     

     

  • Capital extrémiste

    Oui, bien évidemment que les adeptes du capitalisme libéral sont des extrémistes environnementaux, qu'ils sont les seuls destructeurs et que les zadistes et les "écolos" ne sont pas des terroristes. Ils réagissent à la terreur, avec leurs moyens, des moyens insignifiants. Insignifiants parce que les maîtres du capitalisme libéral écrivent les lois. Alors, effectivement, parfois, des victoires surviennent, des projets dévastateurs sont abandonnés.

    Un pour mille, à quelques drames près. 

     

    Philippe Pereira :

    "Je crois effectivement qu’il existe des extrémistes environnementaux.

    Je crois que faire disparaître 200 espèces par jour relève de l’extrémisme.

    Je crois que causer, comme le dit le biologiste Michael Soulè, la fin de l’évolution des vertébrés, relève de l’extrémisme.

    Je crois que faire baigner le monde dans les perturbateurs endocriniens relève de l’extrémisme.

    Je crois que déverser tellement de plastique dans les océans, qu’on y retrouve 10 fois plus de plastique que de phytoplancton (imaginez que sur 11 bouchées que vous prenez, 10 soient du plastique), relève de l’extrémisme.

    Je crois qu’avoir une économie basée sur une croissance infinie sur une planète finie, relève de l’extrémisme.

    Je crois qu’avoir une culture basée sur l’incitation « Soyez féconds et multipliez-vous » sur une planète finie, relève de l’extrémisme.

    Je crois que détruire 98 % des forêts anciennes, 99 % des zones humides natives, 99 % des prairies, relève de l’extrémisme.

    Je crois que continuer à les détruire relève de l’extrémisme.

    Je crois que vider les océans, tellement que si on pesait tous les poissons dans les océans, leur poids actuel correspondrait à 10 % de ce qu’il était il y a 140 ans, relève de l’extrémisme.

    D’impassibles scientifiques nous disent que les océans pourraient être dépourvus de poissons durant la vie de la prochaine génération. Je crois qu’assassiner les océans relève de l’extrémisme.

    Je crois qu’assassiner la planète entière relève de l’extrémisme.

    Je crois que produire en masse des neurotoxines (e.g. des pesticides) et les relâcher dans le monde réel, relève de l’extrémisme.

    Je crois que changer le climat relève de l’extrémisme.

    Je crois que voler les terres de chaque culture indigène relève de l’extrémisme. Je crois que commettre un génocide contre toutes les cultures indigènes relève de l’extrémisme.

    Je crois qu’une culture envahissant la planète entière relève de l’extrémisme.

    Je crois que croire que le monde a été conçu pour vous relève de l’extrémisme.

    Je crois qu’agir comme si vous étiez la seule espèce de la planète relève de l’extrémisme.

    Je crois qu’agir comme si vous étiez la seule culture sur la planète relève de l’extrémisme.

    Je crois qu’il y a effectivement des « extrémistes environnementaux » sur cette planète, et je crois qu’ils sont appelés capitalistes. Je crois qu’ils sont appelés « les membres de la culture dominante ». Je crois qu’à moins d’être arrêtés, ces extrémistes tueront la planète. Je crois qu’ils doivent être arrêtés.

    Nous sommes des animaux. Nous avons besoin d’eau propre pour boire. Nous avons besoin d’une nourriture propre et saine pour manger. Nous avons besoin d’un environnement habitable. Nous avons besoin d’un monde viable.

    Sans tout cela, nous mourrons. La santé du monde réel est la base d’une philosophie morale soutenable, fonctionnelle, et saine. Il doit en être ainsi, parce qu’elle est la source de toute vie.

  • Ecrire l'incompréhensible

    Ce que j'ai vécu et qui n'est pas compréhensible. S'agissait-il d'une hallucination ou d'une autre vérité, d'un espace inconnu qu'on ne peut inventer ? Je n'étais pas dans une grotte mais sur un sommet, seul. J'avais vingt ans. Une ascension en solo, l'attention extrême, la concentration et l'application de chaque geste, une rupture, un mental qui se tait car ses bavardages inquiets auraient pu être fatals. Et c'est là que s'ouvre l'autre dimension, celle d'un esprit libéré de tout et qui capte enfin ce qui n'est pas "raisonnable". Je n'étais pas un puma mais un rapace. Une vision macroscopique de l'étendue, ce qui ne peut être vu par l'oeil humain, tout était là, dans une vision que je contrôlais.

    Je n'ai jamais rien oublié et c'est en écrivant ce roman, l'histoire de Laure, que le désir intense, corporel, viscéral de tout transcrire est venu. Je sais combien, après avoir écrit plusieurs romans, que dans chacun d'entre eux se retrouve cet état de décorporation, cette expérience de conscience modifiée. J'ai mis longtemps en fait à le comprendre.

    Il m'est parfois douloureux de ne pas pouvoir le revivre comme je le voudrais, de ne pas pouvoir le déclencher selon mon bon vouloir, de n'être finalement que celui qui reçoit et je m'en veux de cette déception car je sais en même temps le privilège que j'ai d'avoir été libéré, à quelques reprises, de la pesanteur humaine et d'avoir pu goûter à la beauté ineffable de l'inconnu.

    C'est sans doute la raison essentielle pour laquelle j'écris. Retourner à travers les mots dans cette dimension. Ce passage-là, je n'en changerai pas une ligne, pas un mot, pas une virgule. Il y a de la même façon, dans chacun de mes romans, des passages qui sont inscrits, gravés, immuables.

    Ça ne signifie pas qu'ils sont parfaits mais ils sont ce que je porte. 

    Il y a deux nuits, j'ai rêvé, encore une fois, que je volais. Toujours au-dessus des montagnes. Je sens parfaitement le mouvement de mes ailes, le vent dans mes plumes, le moindre positionnement de mon corps, je peux me déplacer à des vitesses vertigineuses sitôt que je décide de m'approcher d'un lieu. Il y a des couleurs, des lumières, les forêts, les cours d'eau, les glaciers, les sommets, les crêtes et les neiges éternelles.

    Je suis éveillé, parfaitement éveillé, totalement conscient.

    Et pourtant, à un moment, le rêve s'arrête. Et c'est douloureux et en même temps merveilleux d'avoir pu le vivre. 

     

    TOUS, SAUF ELLE

    Tout à l'heure, dans une autre vie, elle avait rejoint la grotte, elle était entrée et s’était assise dans l’ombre, au plus profond, sur une roche plate. L'ombre...

    Elle en avait ressenti la présence, comme celle d'une personne. Là, tapie dans l'ombre. L'ombre dans le secret d'elle-même.

    Elle avait eu un vertige.

    Elle avait pris un des deux bidons sur son sac, elle avait bu trois gorgées, lentement, avec application puis elle avait replié les jambes en tailleur. Une posture incongrue après une course mais qui lui paraissait incontournable. Elle avait longuement écouté le goutte à goutte de la source puis elle avait senti une étrange torpeur l’envahir, une fatigue inhabituelle. Elle s’était allongée sur le dos avec son petit sac sous la tête. Elle avait ausculté chaque point de contact de son corps avec la roche, elle avait un peu bougé pour trouver la position idéale, le désir aimant de s’accorder au moindre relief minéral, puis elle était entrée dans une immobilité totale. Les mains posées en croix sur son ventre.

    Elle ne se souvenait pas avoir fermé les yeux.

    Elle ne se souvenait pas non plus les avoir ouverts, ni du moment où elle avait entamé la descente. La descente vers quoi, d'ailleurs ? Elle avait suivi des traces sans accorder la moindre importance à la direction prise, comme aimantée, reliée par un fil invisible à un lieu sacré qu'elle devait rejoindre. Elle se souvenait juste d'un désert et d'une histoire de Barbares.

    Elle marcha ainsi, mue par une intuition puissante.

    Quand elle arriva à la ferme, elle repensa au texto et décida de le relire.

    Elle ouvrit la porte, alluma la lampe sur pied du salon et s’assit dans le fauteuil.

    « Tout va bien. Il ne s’est rien passé. Je reste à Lyon demain, deux, trois trucs à vérifier. Je t’aime. »

    Elle leva les yeux et balaya l’intérieur du regard et ce fut comme un rappel à soi, la sortie d’un tunnel, le retour à une vie connue.

    Il y a longtemps, elle était entrée dans une grotte et elle s’était allongée dans l’ombre. Le temps s’était étiré au-delà de l’espace habituel et elle avait maintenant l’impression de ne pas être redescendue. Ou d’être quelqu’un d’autre.

    Une femme était montée là-haut. Quelqu’un d’autre était revenu. Elle et lui, lui en elle. Comment le comprendre ?

    Elle ne se souvenait pas avoir fermé les yeux. Elle n’avait plus aucun repère temporel depuis l’instant où elle avait quitté le monde connu.

    La main de Figueras s’était posée sur son front.

    Mais à l’intérieur.

    L’évaporation intégrale des ressentis humains. L’effacement de son corps allongé sur la roche. Aucun point de contact. Rien de connu. Et tout ce qui avait jailli n’était aucunement identifiable.

    Elle s’étonna même de ne pas oser vraiment se le remémorer comme si de telles pensées relevaient de la psychiatrie et ne devaient pas être ranimées.

    Elle pensa alors qu’elle n’en parlerait peut-être jamais.

    Elle s’enfonça dans le fauteuil, posa le smartphone sur le plancher et ferma les yeux. Volontairement, cette fois.

    Qu’avait-elle vécu là-haut ? Elle devait se souvenir, ne rien perdre, elle en sentait douloureusement l’importance et s’en voulait de gâcher la beauté du voyage par une peur ténébreuse.

    Plonger dans la lumière, la retrouver, se nourrir de sa bienveillance, du cadeau offert.

    La main de Figueras la regardait et elle savait maintenant que, si la phrase n’avait aucun sens, elle possédait en revanche une puissance évocatrice phénoménale. Elle réalisa qu'en pensant à ces quelques mots – la main de Figueras la regardait– elle basculait immédiatement dans une vision intérieure d'une acuité stupéfiante. Elle distinguait les rides et les taches sur sa peau, le cheminement des veines. Elle percevait l'odeur de la terre sur ses doigts.

    L’énergie qui coulait la visitait comme un flux électrique, un produit révélateur. Un circuit interne qui la ravissait. Figueras regardait en elle et elle se souvenait de la tendresse, de l’intention bienveillante.

    Elle était gênée et simultanément comblée de deviner dans le phénomène un acte d’amour. Sans rien y comprendre.

    Elle ne savait plus rien. Pas dans la dimension humaine.

    Elle était un puma. Un puma…

    Elle n’en connaissait rien avant d’entrer dans la grotte. Elle savait tout de lui maintenant. Puisqu’il était elle et qu’elle était lui.

    Plus rien n’avait de sens, rien n’était vérifiable, rien n’était racontable, rien n’était traduisible, aucun rêve n’avait cette portée.

    Un territoire infini s’était ouvert et elle n’en était pas revenue.

    Elle avait couru dans les montagnes, la puissance de l’animal dans ses fibres, elle était lui, il était elle, une reconnaissance cellulaire, des retrouvailles, la joie éblouissante de l’euphorie musculaire, quatre pattes volant au-dessus de la terre, chaque appui dans une perfection totale, elle avait couru en lui, dans l’acuité de ses regards, le saisissement fulgurant de la moindre brindille dans son champ de vision, dans le couronnement de ses sens, l’extrême déploiement de sa vitalité, la puissance de son corps, tout entier impliqué dans la chasse, elle avait vu l’étendue des existences, le cheminement millénaire des incarnations, le tournoiement des âmes en attente, dans l’immensité des montagnes, à l’envers des cieux, elle avait cavalé sur les nuages, elle avait traversé les abîmes du temps en découvrant leur inexistence, rien n’avait de durée, tout n’était que l’instant, éternellement.

    C’est là qu’elle avait ressenti le danger, une menace immense, constante, où que l’animal soit, qu’il coure dans les montagnes ou les forêts, qu’il traverse les torrents ou explore les ravins les plus profonds.

    Où qu’il soit, un péril majeur, un risque de disparition et elle découvrit l'horreur de cette existence, cette menace constante, cette attention vitale, le calvaire des animaux persécutés, la diminution dramatique des congénères.

    Elle ne savait pas quand elle avait ouvert les yeux. Ni quand elle avait décidé de quitter la grotte. Ni comment elle avait franchi les ressauts, les pentes, les vires et les couloirs rocheux pour rejoindre la forêt. Elle ne savait rien de ces instants inexistants.

    C’est dans l’espace fermé des murs de la ferme qu’elle avait réellement repris conscience.

    Ou qu’elle l’avait perdue.

  • Le dilemne du prisonnier

    Il est évident que ces situations sont grandement étudiées dans les écoles de commerce et dans les études menant à la vie politique. (si tant est qu'on puisse appeler ça une "vie")

     

    Dilemme du prisonnier

     

    concept de théorie des jeux De Wikipédia, l'encyclopédie libre

    Dilemme du prisonnier

    PrincipeDilemme du prisonnier classiqueFormulationDilemme à plusieurs joueursExemples de situations réellesMarché de l'informationÉconomieSportÉcologiePolitique internationaleDérèglement climatiqueLe dilemme répétéVariantesLe jeu de la poule-mouilléeAmi ou ennemiLe dilemme du prisonnier dans la cultureFilmographieCinémaTélévisionLittératureRomanVidéoRéférencesVoir aussiBibliographieArticles connexesLiens externes

    Le dilemme du prisonnier, énoncé en 1950 par Albert W. Tucker à Princeton, caractérise en théorie des jeux une situation où deux joueurs auraient intérêt à coopérer, mais où, en l'absence de communication entre eux, chacun choisit de trahir l'autre si le jeu n'est joué qu'une fois. La raison en est que, si l'un coopère et que l'autre trahit, le coopératif est fortement pénalisé. Pourtant, si les deux joueurs trahissent, le résultat leur est moins favorable que si les deux avaient choisi de coopérer.

    Le dilemme du prisonnier est souvent évoqué dans des domaines comme l'économie, la biologie, la politique internationale, les politiques commerciales (avantage et risques d'une guerre des prix), la psychologie, le traitement médiatique de la rumeur[1], et même l'émergence de règles morales dans des communautés.

    Il a donné naissance à des jeux d'économie expérimentale testant la rationalité économique des joueurs et leur capacité à identifier l'équilibre de Nash d'un jeu.

    Principe

    Thumb

    Un exemple de matrice de gains du dilemme du prisonnier.

    Tucker suppose deux prisonniers (complices d'un crime) retenus dans des cellules séparées et qui ne peuvent pas communiquer ; l'autorité pénitentiaire offre à chacun des prisonniers les choix suivants :

    si un seul des deux prisonniers dénonce l'autre, il est remis en liberté alors que le second obtient la peine maximale (10 ans) ;

    si les deux se dénoncent entre eux, ils seront condamnés à une peine plus légère (5 ans) ;

    si les deux refusent de dénoncer, la peine sera minimale (6 mois), faute d'éléments au dossier.

    Ce problème modélise bien les questions de politique tarifaire : le concurrent qui baisse ses prix gagne des parts de marché et peut ainsi augmenter ses ventes et accroître son bénéfice, mais si son concurrent principal en fait autant, les deux peuvent y perdre.

    Ce jeu ne conduit pas spontanément à un état où on ne pourrait améliorer le bien-être d'un joueur sans détériorer celui d'un autre (c'est-à-dire un optimum de Pareto ; voir aussi équilibre de Nash). À l'équilibre, chacun des prisonniers choisira probablement de faire défaut alors qu'ils gagneraient à coopérer : chacun est fortement incité à tricher, ce qui constitue le cœur du dilemme.

    Si le jeu était répété, chaque joueur pourrait user de représailles envers l'autre joueur pour son absence de coopération, ou même simplement minimiser sa perte maximale en trahissant les fois suivantes. L'incitation à tricher devient alors inférieure à la menace de punition, ce qui introduit la possibilité de coopérer : la fin ne justifie plus les moyens.

    Le dilemme du prisonnier est utilisé en économie, étudié en mathématiques, utile parfois aux psychologues, biologistes des écosystèmes et spécialistes de science politique. Le paradigme correspondant est également mentionné en philosophie et dans le domaine des sciences cognitives.

    Dilemme du prisonnier classique

    Formulation

    La première expérience du dilemme du prisonnier a été réalisée en 1950 par Melvin Dresher et Merill Flood, qui travaillaient alors pour la RAND Corporation. Par la suite, Albert W. Tucker la présenta sous la forme d'une histoire :

    Deux suspects sont arrêtés par la police. Mais les agents n'ont pas assez de preuves pour les inculper, donc ils les interrogent séparément en leur faisant la même offre. « Si tu dénonces ton complice et qu'il ne te dénonce pas, tu seras remis en liberté et l'autre écopera de dix ans de prison. Si tu le dénonces et que lui aussi te dénonce, vous écoperez tous les deux de cinq ans de prison. Si personne ne dénonce l'autre, vous serez condamnés tous les deux à six mois de prison. »

    On résume souvent la situation dans un tableau[2]

    Davantage d’informations Le suspect B se tait, Le suspect B dénonce ...

    et les utilités de chacun dans ce tableau appelé "Matrice des Paiements" :

    Davantage d’informations Le suspect B se tait, Le suspect B dénonce ...

    Chacun des prisonniers réfléchit de son côté en considérant les deux cas possibles de réaction de son complice.

    « Dans le cas où il me dénoncerait :

    Si je me tais, je ferai 10 ans de prison ;

    Mais si je le dénonce, je ne ferai que 5 ans. »

    « Dans le cas où il ne me dénoncerait pas :

    Si je me tais, je ferai 6 mois de prison ;

    Mais si je le dénonce, je serai libre. »

    « Quel que soit son choix, j'ai donc intérêt à le dénoncer. »

    Si chacun des complices fait ce raisonnement, les deux vont probablement choisir de se dénoncer mutuellement, ce choix étant le plus empreint de rationalité. Conformément à l'énoncé, ils écoperont dès lors de 5 ans de prison chacun. Or, s'ils étaient tous deux restés silencieux, ils n'auraient écopé que de 6 mois chacun. Ainsi, lorsque chacun poursuit son intérêt individuel, le résultat obtenu n'est pas optimal au sens de Pareto.

    Ce jeu est à somme non nulle, c'est-à-dire que la somme des gains pour les participants n'est pas toujours la même : il soulève une question de coopération.

    Pour qu'il y ait dilemme, la tentation T (je le dénonce, il se tait) doit payer plus que la coopération C (on se tait tous les deux), qui doit rapporter plus que la punition pour égoïsme P (je le dénonce, il me dénonce), qui doit être plus valorisante que la duperie D (je me tais, il me dénonce). Ceci est formalisé par :

    T > C > P > D (ici : 0 > − 0 , 5 > − 5 > − 10 )

    Pour qu'une collaboration puisse naître dans un dilemme répété (ou itératif) (voir plus bas), « 2 coups de coopération C  » doit être plus valorisant que l'alternat « Tentation T / Duperie D  ».

    Ce qui fait la condition 2 C > T + D [ici : 2 ∗ ( − 0 , 5 ) > 0 + ( − 10 ) ].

    Dilemme à plusieurs joueurs

    Le problème devient sensiblement différent lorsqu'ils y a plusieurs prisonniers tous à l'isolement. Le risque de défection de l'un d'eux devient de ce fait bien plus grand que lorsqu'il n'y en a que deux. Il peut en ce cas être plus réaliste de miser sur le fait qu'il y aura une défection… bien que si chacun en fait autant, tout le monde se retrouve avec une peine de cinq ans d'emprisonnement.

    Exemples de situations réelles

    Le dilemme du prisonnier fournit un cadre général pour penser les situations où deux ou plusieurs acteurs ont un intérêt à coopérer, mais un intérêt encore plus fort à ne pas le faire si l'autre le fait, et aucun moyen de contraindre l'autre. Les exemples suivants permettront de mieux cerner la diversité des applications possibles et la grande généralité du cadre du dilemme du prisonnier.

    Marché de l'information

    La situation concurrentielle des médias ressemble à un dilemme du prisonnier dans la mesure où ils privilégient la rapidité avant la qualité de l'information, d'où un phénomène de mutualisation des erreurs[3].

    Économie

    Un exemple est le cas de deux entreprises qui n'ont pas le droit de s'entendre sur une politique commerciale commune (comme c'est le cas par exemple avec le droit antitrust des États-Unis et les droits français et européen de la concurrence) et qui se demandent s'il leur faut procéder ou non à une baisse de prix pour conquérir des parts de marché aux dépens de leur concurrent. Si toutes deux baissent leur prix, elles seront généralement toutes deux perdantes par rapport au statu quo[4]. On peut aussi évoquer à ce propos les biens collectifs (dont tout le monde veut bénéficier, tout en voulant les faire financer par les autres), le cas des quotas textiles destinés à éviter une chute des prix mais que chacun cherche à contourner, ou les campagnes publicitaires coûteuses pour le même bien qui se neutralisent[5]. À noter que l'équilibre atteint dans le dilemme du prisonnier n'est pas un optimum au sens néo-classique du terme.

    Sport

    Les courses cyclistes sur route, dont le Tour de France, offrent d'autres exemples d'interactions stratégiques de type « dilemme du prisonnier », notamment lorsque deux coureurs échappés doivent décider s'ils font l'effort ou s'ils profitent au maximum de l'aspiration de leur co-échappé : si chacun profite de l'aspiration de l'autre (ce que chacun préfère), l'échappée échoue[6].

    Écologie

    La théorie des jeux, et le dilemme du prisonnier en particulier, sont fréquemment utilisés en écologie pour modéliser l'évolution des comportements entre individus d'une même espèce vers des stratégies évolutivement stables. L'apparition et le maintien des comportements de collaboration par exemple, se prêtent à ce type d'analyse. Richard Dawkins en a fait l'un des points centraux de sa théorie du gène égoïste, puisque l'optimisation de la survie peut passer par un comportement apparemment altruiste[7].

    Politique internationale

    Considérons deux pays rivaux. Chacun peut choisir de maintenir ou non une armée. Si tous deux ont une armée (de force à peu près équivalente), la guerre est moins « tentante », car très coûteuse ; c'était la situation de la guerre froide. Les dépenses militaires et la course aux armements sont alors une perte nette pour les deux pays. Si un seul a une armée, il peut évidemment conquérir sans coup férir l'autre, ce qui est pire. Enfin, si aucun n'a d'armée, la paix règne et les pays n'ont pas de dépense militaire. La situation de coopération permettant à chacun de ne pas avoir d'armée est évidemment préférable à la situation où les deux pays en entretiennent une, mais elle est instable : chacun des deux pays a une forte incitation à se doter unilatéralement d'une armée pour dominer l'autre[8].

    Dérèglement climatique

    Les efforts à mener pour limiter le dérèglement climatique sont soumis au dilemme du prisonnier. Si un État met en place des mesures qui limitent les émissions au détriment de l'économie, il prend le risque d'être dominé économiquement par les autres États. Ce mécanisme incite chaque état à limiter ses efforts écologiques et éloigne l'humanité de la solution optimale.

    Le dilemme répété

    Dans son livre The Evolution of Cooperation (en) (L'Évolution de la coopération, 1984), Robert Axelrod étudie une extension classique de ce dilemme : le jeu se répète, et les participants gardent en mémoire les précédentes rencontres. Cette version du jeu est également appelée dilemme itératif du prisonnier. Il donne une autre illustration à partir d'une situation équivalente : deux personnes échangent des sacs, censés contenir respectivement de l'argent et un bien. Chacun a un intérêt immédiat à passer un sac vide, mais il est plus avantageux pour les deux que la transaction ait lieu.

    Quand on répète ce jeu durablement dans une population, les joueurs qui adoptent une stratégie intéressée y perdent au long terme, alors que les joueurs apparemment plus désintéressés voient leur « altruisme » finalement récompensé : le dilemme du prisonnier n'est donc plus à proprement parler un dilemme. Axelrod y a vu une explication de l'apparition d'un comportement altruiste dans un contexte d'évolution darwinienne par sélection naturelle.

    La meilleure stratégie dans un contexte déterministe est « œil pour œil » (« Tit for Tat », une autre traduction courante étant « donnant-donnant ») et a été conçue par Anatol Rapoport pour un concours informatisé. Son exceptionnelle simplicité a eu raison des autres propositions. Elle consiste à coopérer au premier coup, puis à reproduire à chaque fois le comportement de l'adversaire du coup précédent. Une variante, « œil pour œil avec pardon », s'est révélée un peu plus efficace : en cas de défection de l'adversaire, on coopère parfois (de 1 à 5 %) au coup suivant. Cela permet d'éviter de rester bloqué dans un cycle négatif. Le meilleur réglage dépend des autres participants. En particulier, « œil pour œil avec pardon » est plus efficace si la communication est brouillée, c'est-à-dire s'il arrive qu'un autre participant interprète à tort un coup.

    Pour le dilemme du prisonnier, il n'existe pas de stratégie toujours optimale. Si, par exemple, toute la population fait systématiquement défaut sauf un individu qui respecte « œil pour œil », alors ce dernier a un désavantage au premier coup. Face à une unanimité de défaut, la meilleure stratégie est de toujours trahir aussi. S'il y a une part de traîtres systématiques et « d'œil pour œil », la stratégie optimale dépend de la proportion et de la durée du jeu. En faisant disparaître les individus qui n'obtiennent pas de bons totaux et en faisant se dupliquer ceux qui mènent, on peut étudier des dynamiques intéressantes. La répartition finale dépend de la population initiale.

    Si le nombre N d'itérations est fini et connu, l'équilibre de Nash est de systématiquement faire défaut, comme pour N=1. Cela se montre simplement par récurrence :

    au dernier coup, sans sanction possible de la part de l'adversaire, on a intérêt à trahir ;

    ce faisant, à l'avant-dernier coup, comme on anticipe que l'adversaire trahira quoi qu'il arrive au coup suivant, il vaut mieux trahir aussi ;

    on poursuit le raisonnement jusqu'à refuser de coopérer à tous les coups.

    Pour que la coopération reste intéressante, le futur doit donc rester incertain pour tous les participants — une solution possible est de tirer un N aléatoire.

    La situation est aussi étonnante si l'on joue indéfiniment au dilemme du prisonnier, le score étant la moyenne des scores obtenus (calculée de manière appropriée).

    Le dilemme du prisonnier est la base de certaines théories de la coopération humaine et de la confiance. Si l'on assimile les situations de transactions qui réclament de la confiance à un dilemme du prisonnier, un comportement de coopération dans une population peut être modélisé comme un jeu entre plusieurs joueurs, répété - d'où la fascination de nombreux universitaires depuis longtemps : en 1975, Grofman et Pool estimaient déjà à plus de 2000 les articles scientifiques sur le sujet.

    Ces travaux fournissent une base modélisable, quantitative, pour l'étude scientifique des lois morales.

    Axelrod donne dans son ouvrage Comment réussir dans un monde égoïste un exemple de stratégie œil pour œil dans le cadre du dilemme du prisonnier itératif : durant la guerre des tranchées, les combattants des deux camps, et ce, contre l'avis du commandement, appliquaient le principe « vivre et laisser vivre ». Les protagonistes ne déclenchaient ainsi jamais en premier les hostilités mais répliquaient fortement à toute agression.

    Variantes

    Il existe des variantes de ce jeu qui, en modifiant légèrement les gains, aboutissent à des conclusions très différentes :

    Le jeu de la poule-mouillée

    La poule mouillée est un autre jeu à somme non nulle, où la coopération est récompensée. Ce jeu est similaire au dilemme du prisonnier en ce qu'il est avantageux de trahir lorsque l'autre coopère. Mais il en diffère en ce qu'il est avantageux de coopérer si l'autre trahit : la défection double est la pire des solutions — donc un équilibre instable — alors que dans le dilemme du prisonnier il est toujours avantageux de trahir, ce qui rendait l'équilibre de double défection stable. La double coopération est dans les deux jeux un équilibre instable.

    Une matrice des gains ressemble à :

    si les deux coopèrent, ils reçoivent +5 ;

    si l'un coopère alors que l'autre se défausse, alors le premier obtient +1 et l'autre +10 ;

    si les deux font défaut, ils touchent -20.

    Davantage d’informations B coopère, B trahit ...

    L'appellation « poule mouillée » est tirée du « jeu » automobile :

    Deux voitures se lancent l'une vers l'autre, prêtes à se rentrer dedans. Chaque joueur peut dévier et éviter la catastrophe (coopération) ou garder le cap au risque de la collision (défection).

    Il est avantageux d'apparaître comme un « dur » qui ne renoncera pas et d'intimider l'adversaire… tant qu'on parvient à rester en jeu.

    On trouve des exemples concrets dans beaucoup de situations quotidiennes : l'entretien de la maison commune à un couple, par exemple, ou l'entretien d'un système d'irrigation entre deux fermiers. Chacun peut l'entretenir seul, mais ils en profitent tous les deux autant. Si l'un d'entre eux n'assure pas sa part d'entretien, l'autre a toujours intérêt à le faire à sa place, pour continuer à arroser. Par conséquent, si l'un parvient à établir une réputation d'indélicat dominant — c'est-à-dire si l'habitude est prise que c'est toujours l'autre qui s'occupe de l'entretien — il sera susceptible de maintenir cette situation.

    Cet exemple peut également s'appliquer en politique internationale, dans la situation où deux États entretiennent un différend qui est susceptible de déboucher sur une guerre. Passer pour une poule mouillée est la garantie d'être ultérieurement confronté à nouveau à la même situation (comme la France et la Grande-Bretagne le constatèrent avant 1939), mais maintenir une réputation suppose une dépense (entretien d'une armée) et des risques (guerre toujours possible).

    Ami ou ennemi

    « Ami ou ennemi » (« Friend or Foe? (en) ») est un jeu sur une chaîne câblée aux États-Unis (Game Show Network). C'est un exemple de dilemme du prisonnier testé sur des particuliers dans un cadre artificiel. Sur le plateau, trois paires de participants s'affrontent. Quand une paire est éliminée, ses deux membres se répartissent leurs gains selon un dilemme du prisonnier. Si les deux coopèrent (« Friend »), ils partagent équitablement la somme accumulée au cours du jeu. Si aucun ne coopère (« Foe »), ils se quittent sans rien. Si l'un coopère et que l'autre fait défaut, le premier part les mains vides et l'autre remporte le tout. La situation est un peu différente de la matrice canonique plus haut : le gain est le même pour qui voit sa confiance trahie ou qui emporte l'autre dans sa perte. Si un joueur sait que l'autre le trahira, sa réponse lui est indifférente. L'équilibre non coopératif est donc neutre ici, alors qu'il est stable dans le cas habituel (du prisonnier).

    La matrice à considérer est donc :

    si les deux coopèrent, chacun obtient 50 % ;

    si les deux font défaut, ils en tirent 0 % ;

    si l'un coopère et que l'autre le trahit, le premier reçoit 0 % et l'autre 100 %.

    Davantage d’informations B coopère, B trahit ...

    L'économiste John A. List a étudié le comportement des joueurs dans ce jeu pour tester les prédictions de la théorie des jeux dans un contexte réel. Les joueurs collaborent dans 50 % des cas mais on note des différences de comportement selon les caractéristiques socio-démographiques des joueurs. Par exemple, les hommes coopèrent moins souvent que les femmes. En revanche, il ressort de l'étude que les joueurs adaptent assez peu leur comportement à leur partenaire[9].

    Le dilemme du prisonnier dans la culture

    Filmographie

    Cinéma

    Le film The Dark Knight : Le Chevalier noir contient une version revisitée du dilemme du prisonnier[10].

    Télévision

    L'épisode 6 Le dilemme du prisonnier de Voyages au pays des maths aborde cette question.

    Littérature

    Roman

    Dans N'oublier jamais (2014) de Michel Bussi, deux coupables jouent en apparence le dilemme du prisonnier pendant dix ans, le jeu qu'un policier devine et tente en vain de clore[11].

    Vidéo

    Le dilemme du prisonnier est le titre d'une vidéo de Wil Aime où quatre amis se retrouvent interrogés par un enquêteur qui leur propose un dilemme du prisonnier[12].

     

  • "Quand la Chine s'éveillera"

    Que représentons-nous, petits individus insignifiants, dans cette guerre commerciale ?

    Croire que nous avons une importance relève du délire ou d'une prétention infantile.

    Il faut que je pense à aller chercher la liste (si elle existe) des mouvements de contestation envers le capitalisme libéral qui auraient abouti à des décisions allant dans le bon sens. (ça risque de me prendre du temps avant de trouver quelque chose...) 

     

    Pourquoi la Chine est en train de battre les Etats-Unis : l'analyse choc de Dan Wang (https://en.wikipedia.org/wiki/Dan_Wang_(analyst)), article L'Express, interview par Anne Cagan : https://www.lexpress.fr/.../dan-wang-stanford-que-trump.../

    "Oubliez l’opposition entre socialisme autoritaire et démocratie capitaliste. Pour ce spécialiste, la Chine est avant tout un "Etat ingénieur" quand les Etats-Unis demeurent un "Etat juriste."

    ➡️ En plus de son regard sur la rivalité sino-américaine, l'analyste décrit bien comment la perte des industries fondamentales (sidérurgie) fragilise l'ensemble d'une économie et d'une société. Lorsqu'un pays a consommé ses seules véritables sources d'énergie (hydrocarbures), impossible de rester longtemps puissant face à d'autres qui appuient encore leur industrie sur les énergies fossiles. Les tentatives de décarbonation ne parviennent manifestement toujours pas, malgré un déploiement désormais suffisamment massif des ENS (énergies dites de substitution) pour l'estimer, à la fois à stabiliser les perspectives économiques, à réduire les émissions de CO₂ tout en garantissant la souveraineté. Les pays qui décarbonent se rendent - bien plus rapidement que nous le comprenons - dépendants de ceux qui conservent les moyens de soutenir toute une chaîne thermo-industrielle fondée sur la chaleur, depuis sa base (explications dans l'article "Transition énergétique et servitude", sur le site

    Défi énergie : https://www.defienergie.tech/transition-energetique.../).

    (J'invite les plus motivé-es à cliquer sur ce lien et à lire l'analyse qui est proposée. Et ensuite, à retourner au potager)

    Citation de Dan Wang :

    "Les industries technologiques fonctionnent comme une échelle. Il faut monter les barreaux un à un pour atteindre le sommet. Et si vous retirez les barreaux du bas, votre main-d’œuvre manufacturière n’a plus la capacité de créer un écosystème solide, avec de grandes entreprises et de petites, des entreprises sophistiquées et d’autres plus basiques.

    (...)

    Je m’attends à ce que les succès chinois accentuent encore la désindustrialisation. L’Europe le voit déjà très clairement dans les données allemandes. La Chine pourrait couler beaucoup d'industries européennes avant que son économie ne connaisse un véritable ralentissement. Et si l’économie européenne se détériore, il est peu probable que sa politique s’améliore."

    ➡️ Je montre dans l'article "Transition énergétique et servitude" que la transition énergétique elle-même constitue un levier de domination géopolitique pour la Chine (https://www.defienergie.tech/transition-energetique.../) :

    "La Chine déploie manifestement tous les moyens pour bouleverser la géopolitique au moyen de la décarbonation. Alors que construire une usine de batteries coûte 6 fois plus cher aux États-Unis qu’en Chine, celle-ci exporte pour 22 fois plus, en valeur, de batteries que les États-Unis. Elle exporte également pour 580 fois plus de panneaux et modules solaires et pour 3 fois plus de véhicules électriques que les États-Unis, la prise d’influence sur le marché de l’automobile étant un autre levier essentiel de la rivalité industrielle, économique et géopolitique.

    (...)

    L’hégémonie sur l’extraction et surtout le traitement des minéraux critiques, la maîtrise technologique, la saturation des marchés, l’endettement des pays (consécutif aux investissements que la Chine y aura faits) ainsi que la laisse des brevets subordonnent totalement aux desiderata de l’Empire du Milieu les territoires qui utilisent ne serait-ce que quelques composants d’origine chinoise pour leur décarbonation. L’espoir de relocaliser tout ou partie de l’industrie de la transition ne suffira pas à reprendre le dessus, alors que les infrastructures de transition ne constituent que les produits d’un processus industriel dont la première étape, celle qui autorise toutes les autres (la rencontre entre la chaleur des hydrocarbures et les minéraux sortis de la mine) a été subtilisée par la géologie et l’histoire."

     

    Qui a dit quand la chine sʼéveillera le monde tremblera ?

     

    ParFrançois Gérard

    Publié le29 novembre 2023

    Actualités de Chine

    Une prophétie ancienne, une réalité contemporaine

    Voici une citation, souvent citée, qui continue à résonner dans les couloirs du temps, et qui fait écho, aujourd’hui plus que jamais, à une réalité géopolitique incontournable : « Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera ». A la croisée entre prophétie séculaire et réalité contemporaine, ces mots semblent se matérialiser sous nos yeux. Les débats s’animent autour de son exacte paternité, de son origine, de son sens et de son impact sur l’histoire mondiale. Pour répondre à toutes ces questions, il nous faut remonter le fil de l’histoire.

    Napoléon Bonaparte, l’auteur présumé de la citation

    L’attribution de cette citation est souvent faite à Napoléon Bonaparte. En effet, l’empereur français aurait eu cette vision prophétique au début du XIXe siècle, alors que la Chine se trouvait encore dans un sommeil relatif sur la scène mondiale. Selon le récit populaire, il aurait déclaré lors d’une de ses conversations : « Laissez donc la Chine dormir, car quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera ». Selon les historiens, Napoléon, dans sa grande sagacité, aurait perçu le potentiel de cette nation-continent, et aurait prophétisé ses bouleversements futurs sur le monde.

    Alain Peyrefitte et l’Occident face à la Chine

    Cependant, il faut noter que la citation, telle que nous la connaissons aujourd’hui, n’apparaît pas dans les écrits de Napoléon. Son origine la plus sûre remonte à 1973, lorsque l’écrivain et homme politique français Alain Peyrefitte l’utilise pour le titre de son livre : « Quand la Chine s’éveillera… le monde tremblera ». Dans cet ouvrage, Peyrefitte dépeint une Chine en pleine transition, à la fois grandiose et inquiétante, qui se réveille lentement de plusieurs décennies d’isolement politique et économique. Sous sa plume, la citation prend une nouvelle amplitude, celle de la mise en garde contre l’ignorance de l’Occident, face à ce géant montant.

    Une prédiction pour l’ère contemporaine

    Avec le recul historique, la citation semble plus pertinente que jamais. Depuis le début du XXe siècle, la Chine est passée d’une dynastie impériale en déclin à une république communiste isolationniste, avant d’émerger en tant que superpuissance économique mondiale. Son éveil a bien secoué le monde, non pas avec la violence d’un tremblement de terre, mais avec la puissance tranquille d’une marée montante, submergeant les marchés mondiaux, et redéfinissant les dynamiques de pouvoir politiques et économiques.

    Il était une fois « Quand la Chine s’éveillera… »

    Alors, qui a dit « Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera » ? La réponse importe finalement moins que le message qu’elle véhicule. Emanait-elle de la vision éclairée d’un empereur envahisseur, du discernement aiguisé d’un érudit politique ou du mythe collectif façonné par l’imagination populaire ? Qu’importe. Sa voix retentit toujours avec force, car elle parle non pas tant du passé, mais du présent et de l’avenir. Cette citation reflète toutes les appréhensions, les enjeux et les fascinations que l’éveil de la Chine suscite aujourd’hui. En fin de compte, elle souligne notre besoin constant de comprendre, d’anticiper et d’appréhender les forces qui façonnent notre monde. Et à cela, il n’y a pas de réponse plus pertinente que celle-ci : « Quand la Chine s’éveillera, le monde tremblera ».