Conscience de l'individu unifié (spiritualité)
- Par Thierry LEDRU
- Le 14/02/2011
- 3 commentaires
La conscience est-elle soumise à l'affectivité ? Si je suis heureux ou triste, ma conscience en subit-elle les effets ou est-ce uniquement ma perception de l'existence à travers mon affectivité ? Lorsque nous alternons entre les moments euphoriques et les moments de détresse, est-ce que notre conscience est touchée ou reste-t-elle dans une dimension parallèle ou même englobante ? A-t-elle la capacité à identifier les causes de ces fluctuations et à les analyser ou est-elle saisie elle-même par les effets épisodiques de nos conditions de vie ?
Prendre conscience, c'est se donner les moyens d'observer tout en ayant conscience d'être l'observateur. Un détachement qui permet de ne pas être totalement saisi par les émotions générées par cette observation mais de rester lucide. Il ne s'agit pas non plus de rester inerte mais d'être capable de cerner les raisons profondes des émotions. Etre emporté par une bouffée de bonheur ou de colère n'implique pas nécessairement une perte de contrôle tant que l'individu parvient à observer cette émotion exacerbée en lui-même. La perte de contrôle survient dès lors que les émotions ne sont plus regardées par cette conscience macroscopique et que le mental se soumet à ce flot de perceptions.
Il suffit de penser à la peur pour en prendre conscience...Si j'observe ma peur, je m'offre un point de contrôle. C'est la conscience qui dépasse l'affectivité, qui la surplombe ou l'englobe. Je vais pouvoir me servir de cette peur pour exploiter les poussées d'adrénaline, je vais même pouvoir l'entretenir parce qu'elle m'offre des capacités physiques insoupçonnées. Sans l'adrénaline, les hommes préhistoriques auraient succombé aux prédateurs. La peur est un carburant, une source de forces, une énergie redoutablement efficace. Mais elle l'est encore plus lorsque la conscience reste le chef d'orchestre.
Si cette peur n'est pas conscientisée, elle passera en mode panique et c'est un désastre à venir.
Il ne s'agit pas de rejeter l'affectivité mais de prendre conscience du potentiel qu'elle propose. Lorsque j'écris avec une musique que j'aime, il m'arrive de voir les mots débouler en cascades, des flots d'émotions surpuissants, une osmose avec ce que je porte, c'est une affectivité que j'entretiens, je ne cherche pas à l'effacer, je la laisse m'emporter et en même temps, je l'observe, je la nourris, je l'honore et la vénère, j'ai pleinement conscience de sa présence, du "jeu" que j'instaure et des règles à suivre. Cette affectivité ne dépend pas de moi à la source mais la conscience que j'en ai sait l'entretenir. De la même façon, un sportif saura avec l'expérience faire monter l'adrénaline, la tension, le stress, avant une épreuve mais en apprenant à l'observer et à en avoir pleinement conscience, il parviendra à l'entretenir, à s'en servir, alors que si l'absence de conscience l'emporte, cette adrénaline l'enverra au décor. Le fil du rasoir est très affûté. Il faut l'effleurer, jouer avec la lame avec délicatesse sans appuyer comme une brute.
On pourrait à travers cette description assimiler la conscience avec la raison. Et c'est là que je me heurte à une problématique qui me tracasse.
Je ne vois pas la raison comme une entité observant l'observateur mais comme une entité oeuvrant à la neutralité. Elle est déterminée à ne pas laisser les émotions se développer. Elle est davantage éducative, formative, un conditionnement qui agit comme un étouffoir. Elle va chercher à convaincre l'individu que sa peur est injustifiée ou que ce bonheur ne durera pas. Elle n'existe que dans le maintien du contrôle. Elle est le piédestal du "raisonnable". Je ne la vois que comme une incapacité à recevoir les émotions en toute conscience. Cette conscience qui est au contraire de la raison capable d'assumer pleinement les élans émotionnels, à s'en servir pour la création artistique par exemple. Si je m'interdisais d'être bouleversé par une musique, je n'ouvrirais pas en moi les horizons littéraires et si je laissais de la même façon, les émotions m'emporter, je ne parviendrais pas à écrire une seule phrase. La conscience devient dès lors le trait d'union entre la raison qui me sert de transcripteur des émotions pendant que ma conscience observe l'ensemble. C'est en cela que je vois la conscience comme englobante. Elle est le placenta qui permet le lien.
C'est sans doute dans cette osmose qu'apparaît l'individu unifié.
Commentaires
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- 1. simon Le 02/03/2011
complètement d'accord avec toi Thierry, super blog avec des réflexions de vie très pertinente.
A bientot -
- 2. Thierry Le 25/02/2011
Je pense que dès lors que l'individu garde sa lucidité pour ne pas s'identifier aux conditions de vie, qu'elles soient bienheureuses ou malheureuses, il garde en lui la capacité à dépasser ces instants épisodiques. Il peut en "jouer" si elles sont favorables, rien ne l'interdit mais elles ne seront jamais que des paravents. C'est l'être qui est derrière. Et c'est lui qui importe. -
- 3. Le 25/02/2011
Je me permets d'étayer d'un exemple propre. J'ai véçu, il y a peu, un grand bonheur pendant quelques jours. J'étais consciente tout à fait de ce que je ressentais et en profitais pleinement, je m'obervais réellement, aucune idée de perte de ce bonheur ne venait à mon esprit sans qu'aussitôt je me dise, à cet instant voilà ce que je ressens et je le prends. A cemoment là, j'ai réécrit de jolies poésies.
Quand ce bonheur s'en est allé, grande tristesse, larmes, etc... Je me suis vue là aussi même si je ne semblais pas me dominer, ma pensée: "je suis en train d'apprendre quelque chose, même si je ne comprends pas encore quoi". Je n'ai pas conservé ce chagrin trop longtemps, une tristesse plane un peu encore parfois mais alors, je me souviens avoir consciemment "profité" de ce bonheur. Est-ce grace à cette conscience d'alors que j'ai pu ne pas m'enfoncer dans la peine soudaine trop longtemps? Je dirais plutôt "oui".
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