Le progrès...et l'esclavage.
- Par Thierry LEDRU
- Le 25/02/2018
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Inutile de longuement commenter.
Et pour "dénoncer" cette situation, j'utilise mon ordinateur portable qui contient du cobalt et d'autres "terres rares".
Et oh combien, tout cela est d'une absurdité à vomir.
Finalement, pour ne pas faire de mal, à qui que ce soit, il n'y a qu'une solution.
Vivre dans une cabane au fond des bois.
Le progrès serait de n'en plus vouloir.
Mine de cobalt : « Toutes les parties de mon corps me font mal ». Richard 11 ans
3 mars 2017 / par Diane Scaya
Cette semaine, le média anglais Sky News a rapporté un reportage édifiant sur les conditions de travail dans des mines de cobalt congolaises. Le fer de lance de ces mines qui alimentent les batteries au lithium-ion (smartphones, appareils photos, tablettes, ordinateurs, voitures électriques etc.) ne sont autres que les enfants.
Pieds nus sous la pluie
Le reportage vidéo de Sky News met mal à l’aise et fait ressentir un mélange d’effroi et de pitié pour celui ou celle qui le regarde. La pluie bat le sol et les pieds nus aussi, on y voit Dorsen, 8 ans et Richard, 11 ans, qui s’affairent pour récolter le cobalt de la province de Katanga située en République Démocratique du Congo. On y voit des petits corps désorientés qui abattent un travail physique sous le joug de mains prêtes à s’abattre sur eux. Les 12h de travail effectuées par jour leur permettent d’amasser seulement 8 pence par jour ; au moment du reportage, le jeune Dorsen a expliqué que cela ne suffisait pas pour vivre et que cela faisait déjà deux jours qu’il n’avait pas pu manger. Les deux jeunes enfants dont la mine a volé l’enfance travaillent sans aucune protection et subissent une pression permanente de leurs supérieurs, à la botte du Grand Occident qui attend sagement ses batteries. Les deux jeunes enfants exténués se sont confiés à la journaliste :
« Quand je travaille ici, je souffre. Ma mère est déjà morte… et du coup je dois travailler tout la journée et ma tête me fait mal » – Dorsen, 8 ans
« Quand je me lève chaque matin, je me sens mal car je sais que je dois revenir ici pour travailler. Toutes les parties de mon corps me font mal » Richard, 11 ans
Pas d’alternatives
La République du Congo abrite plus de la moitié de l’offre mondiale de cobalt. D’après le gouvernement, 20% du cobalt actuellement en circulation depuis la RDC provient de mineurs artisanaux basés au Sud du Pays. Ils sont entre 110 000 et 150 000, on les appelle les « creuseurs », ils extraient le cobalt à la main en utilisant les outils les plus rudimentaires et descendent dans les tunnels creusés artisanalement qui menacent de s’effondrer à chaque instant. Lors de son reportage, la journaliste est tombée nez à nez avec une enfant de 4 ans qui triait, elle aussi, le cobalt de la pierre. En plus des conditions de travail terrible, une telle exposition au cobalt ainsi que la consommation d’une eau contaminée développe des pathologies chez les habitants, notamment chez les nouveaux nés (problèmes respiratoires et pulmonaires, tumeurs, cancers, malformation de naissance etc.).
Avec de telles conditions de travail, pourquoi les travailleurs n’ont-ils pas le choix ? La RDC est un des pays les plus pauvres du monde (74% des Congolais vivent en dessous du « seuil de pauvreté multidimensionnel »), marquée au fer rouge par son histoire coloniale, elle est soumise à une gestion terrible et à de nombreux conflits. Les mines artisanales se sont imposées à de nombreux habitants comme un moyen de subsistance à la suite de l’effondrement de la plus grande société minière publique (années 1990). Le Président Laurent Kabila a même encouragé la population à creuser elle-même car le gouvernement n’avait pas les ressources pour relancer l’industrie minière durant la Seconde guerre du Congo, qui a eu lieu entre 1998 et 2003.
De la responsabilité des entreprises
De nombreuses entreprises se vantent d’avoir une politique de RSE (Responsabilité sociétale des entreprises) – seulement, lorsque on parle des autres maillons de la chaîne de production de l’entreprise elle-même, les dents se serrent. Le grand tabou des multinationales, ce sont les intermédiaires dont elles ne s’estiment pas responsable, tous les secteurs se ressemblent en ce sens et le sens de la responsabilité s’effrite. Le cobalt extrait par les mineurs se revend directement à des traders dont la plupart viennent de Chine ou des Etats-Unis ; leur but est de payer le cobalt au meilleur prix, le reste importe peu. C’est ainsi qu’en se gardant de poser des questions, on se garde de pouvoir un jour dispenser des réponses.
Sky News a contacté différentes entreprises dans le secteur de l’automobile et de l’électronique, la plupart ont tout simplement expliqué qu’il était difficile de remonter jusqu’à l’origine et de savoir si leur cobalt provenait ou non du type de mines que l’on voit sur la vidéo. Ces entreprises ont également ajouté qu’il était plus bénéfique pour les communautés congolaises qui travaillaient dans ces mines d’améliorer les conditions de travail plutôt que de clore des contrats. Le géant Apple également, en pleine campagne RSE, a réagi : « Si nos fournisseurs ne sont pas capables ou ne souhaitent pas respecter nos standards de production, nous suspendons ou mettons un terme au contrat. L’année dernière, nous avons remercié 22 intermédiaires de notre chaîne de production ». Amnesty International et African Resources Watch (Afrewatch) ont publié en janvier, un rapport complet et documenté dans lesquels ils expriment le besoin urgent aux entreprises de réagir en instaurant un devoir de diligence obligatoire, révéler au public les pratiques d’atteinte aux droits humains, prendre des mesures correctives pour les intermédiaires mis en cause, réparer les préjudices subis par les personnes dont les droits humains ont été violés etc. Ce rapport s’adresse également au gouvernement de la RDC et de Chine.
Comment agir ?
La version courte du reportage de Sky News relayée sur les réseaux sociaux comptabilise plus de 21 millions de vues, 84 000 likes et plus de 400 000 partages : toutes ces actions quotidiennes proviennent de nos smartphones, ordinateurs ou tablettes. Le gouvernement de la RDC est responsable de ses citoyens, mais surtout, les entreprises qui travaillent avec ces intermédiaires se doivent de rédiger des standards de conditions de travail afin de protéger les droits humains élémentaires des mineurs. Au-delà de la rédaction de ces chartes, il est temps de mettre en place des cellules de contrôle permanentes en charge de vérifier la bonne application de ces chartes.
La responsabilité des entreprises est indéniable. Les consommateurs également ont le pouvoir de faire avancer les choses, si aujourd’hui, il n’existe pas de marque qui semble éthique pour ce qui est de l’exploitation de ce cobalt, la pression consommateur est un véritable levier. Le cas Nike est devenu un cas d’école, dans les années 1990, éclate le scandale des usines et de leurs terribles conditions de travail. Depuis ce scandale, l’entreprise a adopté une position très forte quant au RSE et est devenue un exemple ; en 2005, l’entreprise surprenait le monde des affaires en divulguant sa base de données de 750 usines dans le monde entier. La marque a compris que pour redorer son image et relancer ses ventes (qui avaient fortement chutées à l’époque), elle se devait d’adopter une stratégie de transformation. Rapports sur les conditions de travail abusives, système de surveillance interne (SHAPE), création d’une division de responsabilité et de conformité de l’entreprise, nomination de gestionnaires sur le terrain, création d’une base de données mondiales pour assurer un suivi de chaque maillon de la chaîne de production, examen d’experts externes. La réaction de l’opinion publique et des médias a fait prendre à la marque de sportswear et baskets un tournant à 180° – il est fondamental d’appliquer une pression générale sur les entreprises pour plus de transparence et un changement radical de ces pratiques abusives.
Sources : Sky News / Amnesty International / Réseau entreprise et développement durable
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