Idéalisme

Etymologie : du grec idea, idée.

L'idéalisme est une attitude qui consiste à fonder son action ou sa conduite sur un idéal, c'est-à-dire un but élevé que l'on se propose d'atteindre.

Un idéaliste est un adepte de l’idéalisme, quelqu'un qui fixe sa conduite sur un idéal ou qui se représente mal les conditions de la réalité.

"Quelqu'un qui se représente mal les conditions de la réalité..."

Voilà ce que j'ai à l'esprit depuis plusieurs jours.

J'ai vécu l'enseignement comme un idéal de vie. Accompagner des enfants nourrissait en moi l'idée que je pouvais agir sur cette réalité qui m'environne... Mon idéal n'était pas de transformer les enfants pour qu'ils correspondent à ma vision de l'être humain mais de les aider à trouver en eux ce qu'il y a de plus beau et de plus juste. Mon idéal se situait au niveau de l'amour de la vie à découvrir en soi jusqu'à parvenir à s'extraire des errances les plus sombres d'une certaine réalité du monde, un monde violent, mauvais, pervers...

Est-ce que cet idéal m'a amené à ne plus voir que cette réalité du monde était bien plus puissante que tous les philosophes, que tous les textes les plus bouleversants, plus puissante que la bienveillance que j'appliquais constamment dans ma classe, plus puissante que les ressentis les plus beaux, plus puissante que l'amour ? Est-ce que je vivais dans une illusion et que désormais le rideau qui m'aveuglait est tombé ?

Que reste-il de toutes ces années ? Y a-t-il des enfants qui ont su garder en eux l'esquisse d'un éveil intérieur ? Y a-t-il parmi ceux-là des adultes qui se souviennent encore de quelques paroles, de quelques mots lus, des citations affichées, un débat, une discussion impromptue sur un sujet existentiel ? Que reste-t-il de tout ça une fois que ces individus réintègrent la réalité du monde ?

L'idéaliste est-il condamné à périr par épuisement ? 

J'ai l'impression d'avoir été dévoré, qu'en moi des morceaux de chair ont été arrachées, l'impression d'avoir perdu un organe vital...

Mais j'en suis responsable, je ne rejette la faute sur personne. Ni sur l'État, ni sur les enfants. Je suis responsable de mes propres exigences et si elles s'avèrent irréalisables, il me suffit de ne plus chercher à les maintenir pour ne plus en souffrir...Mais c'est une grande souffrance de s'avouer ne plus pouvoir en souffrir... 

L'État et les attitudes mauvaises des enfants ne sont que les révélateurs de l'illusion de mon idéal. 

L'exporateur qui tente de rejoindre le Pôle Sud ne peut pas reprocher à la Nature de se montrer impitoyable ou à la malchance de le poursuivre. Il est responsable de sa situation. Il lui suffisait de ne pas s'acharner dans cet idéal de vie pour ne pas avoir à souffrir des conditions de vie.

S'il parvient à rester lucide, il connaîtra le bonheur de l'idéal vécu même s'il n'atteint jamais le Pôle Sud. 

C'est peut-être ça d'ailleurs la raison profonde de ce mal-être ambiant, de cette réalié sordide... L'absence d'idéal n'est-il pas un poison qui tue lentement par la dilution pernicieuse de la routine et la recherche frénétique de comportements addictifs.

J'ai toujours cherché à faire ressentir aux enfants la puissance extraordinaire de la passion. Les aventuriers, les chercheurs scientifiques, les sportifs de l'extrême, les écrivains, les artistes, les amoureux... J'ai toujours cherché à allumer un brasier en eux. Et que les émotions ressenties viennent nourrir la fondation de l'idéal. 

Mais comment tenir pour dix enfants lorsque les vingt autres adopteront des comportements qui me révoltent ?

Je sais avec le recul que cette proportion était radicalement inverse il y a dix ans...Et ça me terrifie.

Comme si l'idéal de paix était voué à mourir sous les coups d'une armée toujours plus nombreuse.

Ou alors, c'est que je ne sais pas m'y prendre.

Et je préfèrerais infiniment cette réponse car elle impliquerait au moins qu'il ne s'agit que de mes faiblesses et non d'une inéluctable déchéance de l'humanité entière.  

Sagesse et souffrance

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