"Mars", Fritz Zorn.

L'éducation nie-t-elle la nature de l'enfant?...

Au siècle de Rousseau, on ignorait les particularités de l'enfant. Il était défini de manière négative comme un être qui n'est pas encore adulte. Rousseau disait que l'on ne connaît pas l'enfance et qu'en matière d'éducation, les adultes commettent deux erreurs : vouloir enseigner aux enfants ce qu'il importe aux adultes de connaître, sans prendre en considération ce que les enfants sont en état d'apprendre et systématiquement toujours chercher l'homme dans l'enfant, sans penser à ce qu'il est avant d'être adulte.

L'enfant ne serait qu'un adulte en devenir et n'existerait pas pour lui-même. Il serait un projet et non une réalité aboutie...

Pourquoi, selon Rousseau, empêcher les nourrissons de se mouvoir en les emmaillotant, pourquoi dissoudre les liens du sang en les confiant à une nourrice ?

Pourquoi penser qu'en les entourant de mille délicatesses, on ne les protège pas mais on les affaiblit?

Pour Rousseau, une éducation qui respecte l'ordre naturel est une éducation qui doit prendre le contre-pied de ce que l'on tient habituellement pour bon.

Selon rousseau, les âges de l'enfance ont tous leur caractère propre. L'ordre naturel veut que l'enfant se développe à son rythme. Il est donc pernicieux de vouloir brûler les étapes de ce développement. Inutile par exemple, que de chercher à l'intéresser en lui parlant de ce qu'il sera plus tard. Pareillement, c'est aller à l'encontre de l'ordre naturel que d'enseigner des langues, c'est à dire des mots et seulement des mots, à l'âge où l'enfant est seulement capable d'accéder à la connaissance des choses, des objets.

"Oserai-je exposer ici la plus grande, la plus importante, la plus utile règle de toute éducation ? Ce n'est pas de gagner du temps, c'est d'en perdre. " Rousseau.

Pour les opposants de l'époque et les fondamentalistes actuels de l'Education nationale, la nature a fait de l'enfant un être inachevé. Seul le soutien de l'éducation et de l'enseignement peuvent permettre à cet enfant de parvenir à l'autonomie. 

L'autonomie ???

C'est dans ce terme que se joue la manipulation effroyable que nous connaissons. S'il s'agissait réellement d'accéder à l'autonomie, c'est le développement de la totalité de l'enfant qui serait mis en avant et non son conditionnement à des systèmes mercantiles, politiques, scientifiques, éducatifs.

Il est illusoire de croire au libre arbitre et encore moins pour un enfant. Comme il n'est pas perçu comme un être achevé, à l'instant où il existe, il apparaît comme une mission salutaire de le combler de données partagées par les dirigeants.

L'enseignement ne peut pas amener l'enfant à l'autonomie puisque l'enseignement lui-même n'est absolument pas autonome. Un système, dont l'intention est de mouler l'individu aux piliers du système lui-même, ne peut pas se permettre d'éveiller des enfants à une conscience réelle.

Pourquoi la philosophie n'apparaît dans le système scolaire qu'en classe de terminale ? La réponse est évidente. Socrate est bien trop dangereux. 

L'éducation peut parvenir à développer cette autonomie si les parents ont eux-mêmes engagé un travail de fond sur leur appartenance aux systèmes, s'ils sont parvenus à s'observer lucidement. S'ils ne sont que des individus insérés, sans aucune distance, sans aucun esprit critique, ni même d'esprit du tout, il est vain, là encore d'envisager la moindre autonomie. Il ne s'agit bien évidemment pas d'une autonomie financière mais bien d'une autonomie de conscience.

D'autres fondamentalistes ont exploité les propos de Rousseau jusqu'à abandonner leurs enfants à la nature. Plus aucun repère, plus aucune structure. Un désastre.

Il y a toujours dans les mouvements de pensées des extrêmes qui apparaissent. Ceux qui n'y comprennent rien.

Les fondamentalistes opposés ont tenu à instaurer les enceintes les plus hautes. Religions, mariages sociaux, mariages de castes, hiréarchie.


Lisez, si ce n'est déjà fait, le livre de Fritz Zorn, "Mars"


"Je suis jeune et riche et cultivé ; et je suis malheureux, névrosé et seul. Je descends d’une des meilleures familles de la rive droite du lac de Zurich, qu’on appelle aussi la Rive Dorée. J’ai eu une éducation bourgeoise et j’ai été sage toute ma vie. Ma famille est passablement dégénérée, c’est pourquoi j’ai sans doute une lourde hérédité et je suis abîmé par mon milieu. Naturellement j’ai aussi le cancer, ce qui va de soi si l’on en juge d’après ce que je viens de dire. "

 

C’étaient les premières lignes d'un roman unique écrit par un professeur devenu écrivain, et nommé Fritz Angst.

Plus connu sous son pseudonyme Fritz Zorn (qui signifie en allemand « la colère ») il est mort d’un cancer à l’âge de 32 ans, en 1976, quelques temps après la publication du livre.

Rien ne prédestinait ce natif de Zurich à écrire ses mémoires…

C’est en fait la révélation de sa maladie qui va le conduire à remettre en question sa brève existence, et à s’interroger sur les origines de sa souffrance.

Fritz Zorn est désormais sûr d’une chose : son cancer est la conséquence logique d’une éducation trop bourgeoise, qui l’a empêché de s’épanouir et d’être heureux.

A travers ce récit fragmentaire, l’auteur se livre sans complaisance, déclarant la guerre – tel le Dieu Mars – à sa famille et à son héritage.


 

Un cancer...

Mais que vit la planète aujourd'hui si ce n'est l'extension de tumeurs ?

L'éducation et l'enseignement sont les poisons qui coulent dans nos veines.

Depuis le début de l'année, dans ma classe, les moments les plus beaux, les émotions les plus puissantes, les réflexions les plus profondes, sont apparus dans les échanges d'ordre philosophique. Le besoin est immense, la réception complète. Des individus affamés.

Il faut rompre cette dégénérescence des tumeurs éducatives, la stopper, en inverser le cheminement.

Cette crise n'aura de sens qu'au jour où elle deviendra une mutation réelle, profonde, totale, irréversible.

Cela passera par les enfants.

"La femme est l'avenir de l'homme" disait Aragon.

Les enfants sont l'avenir des deux.

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