Les informations catastrophistes

Ces deux articles représentent à mes yeux ce que devrait être une "information". Tout ce que je vois défiler, par exemple, sur la forêt amazonienne ces jours-ci s'arrêtent au constat des incendies. Pour trouver une réelle analyse, il faut chercher par soi-même.

Les incendies au Portugal ont une cause majeure : l'exploitation des forêts par l'industrie du papier et donc la plantation d'eucalyptus...

Les incendies au Brésil ont également des raisons. C'est cela qu'il faut chercher à connaître.

Quant à savoir si le végétarisme permettrait d'arrêter ce massacre ou pas, si le végétarisme génère lui aussi des pollutions, si c'est aux états de prendre leurs responsabilités et pas aux consommateurs, si tout ça nous dépasse et qu'on a bien d'autres soucis à gérer, si Greta Thunberg est manipulée par des sectes, si Borsolano est aussi taré que Trump, si le prix de l'essence va baisser ou si le PSG sera de nouveau champion de France, c'est sans intérêt et tout va dans le même compost à ordures.

On peut toujours trouver des raisons de ne pas s'engager, de contredire, de défendre ses convictions ou de ne rien faire, de ne pas se sentir concerné et de se contenter de partager des infos alarmistes, de prendre parti ou de se sentir mieux en participant à un mouvement de pensées, de discuter encore et encore et encore. C'est juste le meilleur moyen pour que ça continue. 

L'information et la connaissance n'ont strictement aucun intérêt si elles ne sont pas suivies dans les faits.

Dans deux ou trois semaines, les medias parleront d'autre chose et rien n'aura été compris, analysé, disséqué et personne ne se sentira plus touché, ni encore moins concerné.

L'audimat reprendra ses droits et les "journalistes" chercheront une autre information catastrophiste à donner en pâture à un public de comptoir.

Oui, j'en ai ras le bol...

 

 

 

Le Portugal a déployé 18 500 chèvres pour lutter contre les feux de forêt

 

https://lareleveetlapeste.fr/le-portugal-a-deploye-18-500-chevres-pour-lutter-contre-les-feux-de-foret/?fbclid=IwAR0zJEj2ES5zM-pAElwC7DHcj5InPvRdf6mKzOgzlGfFAr0DBYTTf6p-zYY

 

Cette opération expérimentale va mobiliser une quarantaine de bergers pendant 5 ans. Payés 25 euros pour chaque hectare nettoyé, le retour des bergers dans les collines portugaises permet de repeupler des régions fortement touchées par l’exode rural. Le phénomène est tel qu’il est à l’heure actuelle plus difficile pour le gouvernement de trouver des bergers que des subventions pour financer le projet.

22 août 2019 - Laurie Debove

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Face à la recrudescence d’incendies dévastateurs, le Portugal a déployé 18 500 chèvres pour lutter contre les feux de maquis et de forêt. Ce projet expérimental veut pallier l’échec de l’utilisation de drones et satellites, et améliorer la gestion de l’environnement du pays.

Alors que les canicules et sécheresses frappent de plus en plus sévèrement le continent européen, le Portugal figure parmi les pays les plus touchés par le phénomène. En dix ans, le Portugal a perdu plus de la moitié de ses forêts à cause des incendies. L’un des plus mortels est celui de Pedrógão Grande, au centre du Portugal. En 2017, il a détruit plus de 20 000 hectares et tué 65 personnes, brûlées vives dans leurs véhicules immobilisés par les flammes.

Crédit photo : Peter Lloyd

Après avoir tenté d’étouffer les foyers de feux grâce à l’utilisation de drones et satellites, le Portugal se tourne maintenant vers une solution beaucoup plus low-tech : les chèvres. Depuis mars 2018, 18 500 chèvres ont été envoyées dans les maquis pour manger bruyères, genêts et arbustes. Elles laissent dans leur sillage des sites défrichés, même les plus escarpés et rocheux, ce qui permet de limiter la propagation des feux en cas d’incendie.

Cette opération expérimentale va mobiliser une quarantaine de bergers pendant 5 ans. Payés 25 euros pour chaque hectare nettoyé, le retour des bergers dans les collines portugaises permet de repeupler des régions fortement touchées par l’exode rural. Le phénomène est tel qu’il est à l’heure actuelle plus difficile pour le gouvernement de trouver des bergers que des subventions pour financer le projet.

« Quand les gens abandonnent les campagnes, ils laissent aussi le territoire extrêmement vulnérable aux incendies. Nous avons perdu un mode de vie dans lequel la forêt était précieuse. » a confié au NY Times João Cassinello, l’un des représentants du Ministère de l’Agriculture du Portugal

L’exode rural est loin d’être le seul facteur déterminant dans la propagation des incendies dans le pays. La crise climatique, avec des vagues de chaleur de plus en plus fortes, combinée à l’industrie de la cellulose crée une équation incendiaire pour le pays. Lancée à grande échelle dans les années 80, cette industrialisation s’est traduite par la plantation d’eucalyptus, une essence extrêmement inflammable et très demandée par l’industrie du papier. Aujourd’hui, au moins 9 % du territoire (plus de 800.000 hectares) serait recouvert d’eucalyptus.

Cette année, le Portugal a consacré près de la moitié de son budget de lutte contre les incendies en zones rurales aux mesures de prévention, contre 20 % seulement en 2017. Le succès de l’utilisation des chèvres dépendra également des financements alloués aux bergers, qui doivent s’occuper des animaux 24h/24, pour inspirer de nouvelles vocations.

22 août 2019 - Laurie Debove

 


 

https://lvsl.fr/pourquoi-le-portugal-brule-t-il/

 

POURQUOI LE PORTUGAL BRÛLE-T-IL ?

Par

Rédaction

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Eucalyptus forest fire, Madeira, Portugal, 3 July 2011 ©anagh
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Après les incendies de 2017, les plus meurtriers de son histoire pourtant riche en événements de ce genre[1], et le grand incendie de 2018 qui a ravagé pendant neuf jours la Serra de Monchique dans le Sud du pays, le feu à grande ampleur vient de récidiver au Portugal en 2019 dans le paysage meurtri des incendies de 2017 qui avaient fait rage dans le centre du pays. Par Cristina Semblano*.


Devant l’ampleur de ces tragédies qui tous les ans se traduisent par des milliers d’hectares de forêt brûlée, de pompiers ou de civils morts ou blessés, d’animaux brûlés vifs, de maisons et d’outils de travail détruits, il n’est pas rare d’entendre soutenir la thèse de l’inévitabilité pointant « la faute de la nature », celle de la criminalité et son corollaire, l’absence d’une répression suffisamment dissuasive, ou, enfin, celle de l’insuffisance des moyens de prévention et/ou combat des incendies. Or, si l’insuffisance de ces moyens est un fait, que les politiques d’austérité sont venues renforcer, sans que le nouveau gouvernement, en place depuis fin 2015, se soit empressé d’y remédier[2], le Portugal ne brûle pas plus que les autres pays qui lui sont climatiquement comparables parce qu’il y sévit plus d’incendiaires, se plaçant, de ce point de vue, dans la moyenne européenne[3].

Reste la nature, une autre explication avancée par ceux qui préfèrent ne voir que des phénomènes exogènes[4] là où l’analyse ne peut faire l’économie de facteurs structurels qui sont à l’œuvre et empêchent de contrer l’action destructrice de la nature, voire lui fournissent des armes pour qu’elle se débride. Sur fond d’un climat en mutation, de plus en plus chaud et sec, la première de ces armes est l’eucalyptus, ce dernier pouvant compter sur un puissant allié, la désertification rurale, phénomène qui l’a précédé, mais dont il amplifie le mouvement qui frappe aujourd’hui 1/5 du territoire national.

Espèce non autochtone de la Péninsule ibérique, l’eucalyptus n’est pas adapté au climat du Portugal, méditerranéen avec une influence atlantique. Pourtant c’est dans cette zone favorable à la survenance d’incendies et figurant parmi les plus vulnérables du globe aux changements climatiques, que l’eucalyptus occupe de vastes et croissantes extensions de territoire, faisant du Portugal le cinquième pays au monde en termes de nombre d’hectares de plantation et le premier en termes de rapport des plantations à la superficie du pays, très loin derrière l’Inde, la Chine, ou l’Australie. Cette situation n’a pas toujours existé, puisqu’on est passé de moins de 99 mille ha en 1963-1966 ou 214 mille en 1966-1980, à plus de 900 mille aujourd’hui, ce qui représente 10 % du territoire national.

Cette introduction à large échelle de l’eucalyptus au Portugal est grave à cause des incendies. Bowman, référé par João Camargo et Paulo Pimenta de Castro dans leur récent ouvrage consacré à la problématique des incendies au Portugal[5], est péremptoire sur la propension de l’eucalyptus à brûler. Espèce exotique, originaire de l’Australie, l’eucalyptus est hautement inflammable, vorace en eau et destructeur de la biodiversité. Par des journées chaudes, ses feuilles et son écorce brûlent comme des torches et font pleuvoir des morceaux incandescents de feuilles et d’écorce pouvant parvenir à des distances de plusieurs kilomètres. Plus grave encore, après un incendie, l’eucalyptus associe à sa plus grande capacité de régénération, une phase de diffusion naturelle pendant laquelle il va en se développant dans les territoires où les autres espèces ont une moindre capacité de survie et de diffusion.

Cela étant et si « pour la plupart des eucalyptus, le feu n’a pas été un destructeur, mais un libérateur », comme l’a écrit Stephen Pyne, dans son livre sur l’histoire du feu en Australie[6], il est à se demander pourquoi il existe un discours officiel au Portugal selon lequel il n’y aurait pas d’études scientifiques sur le caractère inflammable des eucalyptus. Au-delà du mensonge qu’il renferme, ce discours officiel contredit ce que raconte l’histoire du feu au Portugal qui établit une relation entre les plantations massives d’eucalyptus et le nombre d’incendies. Si l’on se réfère aux grands incendies de juin 2017 (Pedrógão Grande et Góis) l’aire de la forêt brûlée était constituée à 60 % d’eucalyptus et il en est de même dans le grand incendie de 2018 à la Serra de Monchique, constituée à 76 % d’eucalyptus. C’est aussi l’eucalyptus qui domine les aires où viennent de survenir les incendies d’il y a une semaine.

La réponse à cette interrogation réside dans la volonté de protéger les intérêts de cette industrie de la cellulose que l’on a voulu développer au Portugal dans la décennie 80 à grande échelle – malgré une forte résistance populaire, matérialisée dans les affrontements entre les populations rurales et la police[7] –  et qui représente aujourd’hui, une part importante des exportations du pays (4.7 % du total en 2017). Une industrie rentable et proportionnant d’importantes marges bénéficiaires (liées au cycle de croissance rapide des eucalyptus), mais dont la rentabilité pourrait ne pas être aussi élevée qu’en apparence si elle ne bénéficiait pas des soutiens dont elle bénéficie de la part de l’Etat, d’une part, et si elle devait répercuter les coûts sociaux, économiques et environnementaux qui lui sont associés, d’autre part.

En effet, même si l’Etat portugais n’est propriétaire que d’une infime parcelle de la forêt nationale (2 %)[8], et que les zones de grands incendies du Nord, Centre et Sud du pays, sont dominées par la petite propriété rurale (le minifundium) rien ne l’empêcherait de réglementer le secteur, en lui imputant les coûts externes qu’il engendre, en mettant fin aux bénéfices qu’il lui octroie et, en stimulant, le repeuplement des territoires avec d’autres espèces. Au lieu de cela, l’Etat a même libéralisé la plantation d’eucalyptus, en 2013[9], sous le gouvernement de la Troïka[10] et il a fallu attendre les incendies meurtriers de 2017, pour qu’enfin, le nouveau gouvernement se décide à revenir ou plutôt à feindre de revenir en arrière[11].

Cependant, d’une façon générale, la situation est restée pratiquement inchangée : par son absence ou parti pris au niveau de la réglementation et d’autres faveurs, l’Etat protège ce lobby, constitué en duopole, et imposant sa loi par le biais notamment du chantage à la délocalisation et à l’investissement à l’étranger, et où le pantouflage est de règle : depuis Álvaro Barreto, grand promoteur de l’introduction à large échelle de l’eucalyptus au Portugal dans les années 80, passé trois fois de ministre à administrateur de sociétés de cellulose, on a assisté depuis les dernières décennies à un jeu éhonté de chaises musicales entre la haute administration des forêts et les sociétés de cellulose, sans parler du personnel politique (ministres et secrétaires d’Etat).

Au lieu de continuer d’octroyer des pans entiers du territoire à cette espèce – qui vole l’eau, sème le feu et empêche d’autres espèces de se développer –et des faveurs aux industriels planteurs, l’Etat devrait œuvrer dans le sens de la deseucalyptisation du pays, tout en adoptant un autre modèle de développement, moins soucieux de la demande et des déficits extérieurs et plus soucieux du territoire, du climat et des populations. Un modèle basé sur l’économie agraire, reposant sur les espèces autochtones et les cultures vivrières, le commerce local et le tourisme écologiquement soutenable… capable de créer des emplois[12] et d’assurer à la population des revenus décents[13] tout en contrariant l’abandon rural et en favorisant le retour des anciennes populations ou la fixation de nouvelles[14].

Une telle politique, qui exigerait également la réouverture des services publics fermés ou l’extension de ceux ayant été réduits, n’est toutefois pas compatible avec les déficits proches de 0 %[15], dont s’enorgueillit le gouvernement portugais et dont l’un des prix à payer – et non des moindres – est l’abandon de la forêt à la prédation de l’industrie de la cellulose. Le choix est donc entre deux alternatives : changer de modèle de développement ; ou laisser ce lobby, aidé par l’Etat brûler inexorablement et chaque fois davantage, le Portugal, sa forêt, ses terres, ses animaux, ses maisons, ses usines, ses machines et jusqu’à sa population.

[1] Les deux méga-incendies de juin et octobre 2017 ont fait 116 morts, des centaines de blessés, près de 150 000 ha de terre brûlée.

[2] En effet, il a fallu attendre les incendies meurtriers de 2017, pour que le nouveau gouvernement prenne des mesures en matière de renforcement de moyens de combat et de prévention du feu.

[3] Avec pour la période 1996-2000, 20 % à 30 % des incendies provoqués contre 25 % à 29 % en Grèce et 24.69 % en Catalogne (1995-2016).

[4] C’est-à-dire sur lesquels il n’y a pas de prise.

[5] Camargo, J., Pimenta de Castro, P., Portugal em chamas, Como resgatar as florestas, Bertrand Editora, Lisboa, 2018

[6] Cité par J. Camargo e P. Pimenta de Castro, op.cit

[7] Dont celui, emblématique, de Valpaços, où les villageois de sept bourgades, hommes, femmes et enfants, organisés, ont résisté à la police et arraché les 200 hectares d’eucalyptus, fraîchement plantés par une entreprise de cellulose, dans la plus grande quinta (propriété agricole) de la région, là où avant il y avait des oliviers.

https://www.noticiasmagazine.pt/2017/ha-2-28-anos-um-povo-lutou-contra-os-eucaliptos-e-a-terra-nunca-mais-ardeu/

[8] Ce qui, Le Portugal est le pays d’Europe ayant la plus petite surface de forêt publique, ce qui contraste avec la moyenne de l’UE où la forêt publique représente 40 % en moyenne.

[9] Par le décret-loi n° 93/2013 du 19 juillet 2013, plus connu sous le nom de Loi de l’eucalyptus, qui donne un accord tacite à la plantation d’eucalyptus dans les propriétés de moins de 2 hectares, ce qui correspond à 80 % des propriétés forestières du pays.

[10] Soit le gouvernement de droite ayant appliqué le programme dit d’assistance financière au Portugal, sous l’égide de l’UE, du FMI et de BCE et qui a été au pouvoir dans le pays entre 2011 et 2015.

[11] En effet, la législation d’août 2017 (décret-loi n° 77/2017 du 17 août), présentée dans la foulée des incendies de juin, tout en suspendant l’expansion des aires arborisées avec des eucalyptus, permet l’échange de plantations d’eucalyptus non productives, par des plantations dans des aires équivalentes, non encore eucalyptisées, plus productives.

[12] Il est à noter, de ce point de vue (emploi) que l’industrie de la cellulose, qui contribue pour environ 1 % au PIB (0.7 % en 2017 en monnaie courante), n’emploie que 3 000 personnes.

[13] Dissuadant la population de cultiver des eucalyptus pour en faire une source de revenus (par le biais de leur vente aux industriels de la cellulose).

[14] Pour le sociologue portugais Renato do Carmo, s’ « il paraît difficile d’envisager la récupération démographique d’une partie significative des espaces ruraux portugais », il est erroné de concevoir les zones rurales uniquement comme des territoires de fixation, des recherches récentes ayant démontré qu’elles sont de plus en plus des zones de circulation et de mobilité », autrement dit, ces zones « ne vivent pas seulement des personnes qui y habitent, mais aussi des personnes qui y circulent et qui peuvent s’y fixer momentanément » (Cf Carmo, R. População, serviços públicos e propriedade, in Revista Crítica de economia social, Julho, Agosto, Setembro 2017).

[15] Le solde budgétaire devrait être de -0.2 % du PIB en 2019, +0.3 % en 2020 et + 0.7 % en 2023, selon le Plan de Stabilité 2019-2023 présenté par le gouvernement portugais au Parlement en avril dernier.

*Docteur ès Sciences de Gestion par l’Université de Paris I–Sorbonne, a enseigné l’Economie portugaise à l’Université de Paris IV – Sorbonne, est conseillère municipale à Gentilly et membre du Bureau National du Bloco de Esquerda (Gauche radicale portugaise).

 

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