"Où va le Brésil ?"

 

Ce titre montre l'état de conscience des individus au regard de la planète. Ce que cette jeune femme défend au Brésil, ne concerne pas que ce pays mais l'ensemble de la planète. En premier point parce que la déforestation considérable que subit la forêt amazonienne a un effet planétaire et deuxièmement parce que ce combat est le même dans bien d'autres lieux du monde (Indonésie, Colombie, Australie, Nouvelle-Zélande, Canada, tous ces états qui ont des surfaces considérables de forêts et qui les exploitent de façon outrancière. 

Donc, ce que dénonce cet article n'est pas qu'un problème du Brésil.

 

Série « Où va le Brésil ? »

Épisode 5/5 : Txaï Surui ou la lutte indigène pour défendre l’environnement

 

 

Vendredi 26 août 2022

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Txaï Surui, militante brésilienne pour l'environnement, devant le Musée de demain, à Rio de Janeiro. ©Radio France - Gilles Gallinaro

Le zoom de la rédaction

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Résumé

Chercheurs d’or, trafiquants de bois, éleveurs de bétails envahissent chaque jour un peu plus les territoires indigènes. Txaï Surui, qui a porté la parole des peuples autochtones lors des discours d’inauguration de la COP 26, est aujourd’hui la cible de menaces et de harcèlement.

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Le 1er novembre 2021, à l’âge de 24 ans, cette étudiante en droit du peuple Surui est la seule à prendre la parole pour le Brésil, lors de la conférence pour le climat de Glasgow. « Mon ami d’enfance a été tué pour protéger la forêt, les indigènes sont sur le front du réchauffement climatique. » La voix tremblante, Txaï Surui témoigne et s’adresse au reste du monde : « Nous avons des idées pour retarder la fin du monde. »

À sa descente de l’estrade, ce jour-là, Txaï Surui comprend que cette nouvelle visibilité l’exposera pour le meilleur et pour le pire : « Un homme est venu me voir, il a tenté de m’intimider en me disant qu’il ne fallait pas que je parle mal du Brésil. On a ensuite découvert que cette personne travaillait au ministère de l’environnement. »

Cette vie sous pression constante, Txaï y est habituée. Son père Almir, chef de la communauté, et sa mère Neidinha militent depuis des décennies pour défendre leur terre. « Quand j’avais 14 ans, 15 ans, on a vécu un an sous protection permanente des forces armées, à cause des menaces qui pesaient sur mes parents et nous. »

Protégée il y a dix ans, aujourd’hui Txaï ne l’est plus. Depuis son discours, elle est même devenue la cible de harcèlement : « Aujourd’hui encore, regardez, sur Instagram, ils publient des fake news sur moi. C’est un compte bolsonariste avec 200 000 abonnés, ils utilisent tout pour décrédibiliser mon discours. Je reçois beaucoup de messages racistes, beaucoup de messages de haine. »

Élevages illégaux

Des menaces virtuelles, tant qu’elle reste loin sa région, le Rondonia. Cet État brésilien est l’une des plaques tournantes de la vente illicite de bœuf. Un trafic que Txaï dénonce : « Rien que sur une petite partie de notre territoire, on a repéré un élevage de 6 000 têtes de bétail, illégal, et vous savez où part toute cette viande ? interroge-t-elle. En France ! Elle est destinée à la chaine de supermarché Casino. »

Depuis deux ans, les associations avec lesquelles elle travaille, multiplient les procédures contre l’entreprise brésilienne JBS, le leader mondial du commerce de viande bovine : « Tous les éleveurs savent comment frauder sur l’origine du bétail et le vendre à JBS. Ils nourrissent les bœufs sur une terre indigène, quand ils veulent vendre les bêtes, ils les transfèrent sur d’autres parcelles pour que la traçabilité de cette viande soit en règle. »

Héritière désignée par son peuple pour défendre la préservation de son territoire, Txaï sait qu’elle se dresse face à système puissant et articulé : « Comment fonctionne la destruction de la forêt ? interpelle-t-elle. D’abord, ils déboisent, ensuite ils brûlent, ils font entrer le bétail et quand la terre devient trop pauvre, ils plantent le soja. »

"Victimes d’une guerre invisible"

Une politique extractiviste et productiviste défendue au Congrès brésilien par le front parlementaire du BBB (Bible, Balle et Bœuf), les élus évangéliques, les mouvements pro-armes et les représentants de l’agro-négoce. Des réseaux d’influence contre lesquels les communautés indigènes sont en guerre : « Nous sommes victimes d’attaques menées par l’agrobusiness, par des gens qui nous envahissent, 20 000 chercheurs d’or dans le nord qui détruisent la forêt, qui violent les femmes et ça n’est pas une guerre ? Des personnes qui meurent, qui disparaissent et ce n’est toujours pas une guerre ? Nous sommes victimes d’une guerre invisible. »

Dans cette guerre invisible, pour mener ses combats, Txaï Surui sait aussi qu’elle doit finir ses études de droit : « Je sais, je sais, sourit-elle. On dirait ma mère ! Il me manque six mois pour finir la fac, mais c’est très important parce que les bolsonaristes présentent des projets de loi qui autorisent l’exploitation des terres indigènes. Aujourd’hui, on voit que le travail des avocats indigènes fait la différence devant la Cour suprême. Notre chemin de lutte passe par la justice donc je vais terminer mes études, mais en ce moment c’est compliqué. »

En cette année électorale, Txaï répond aux sollicitations, enchaîne les conférences. À Rio, où nous la rencontrons, à peine revenue de Suède, elle dit que son peuple lui manque mais avoue qu’elle est aujourd’hui bien plus en sécurité loin de ses terres. Loin des « capangas », les équipes de sécurité privées des éleveurs de bétail.

 

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