Sauvetage en mer

Lors du Vendée Globe 2008-2009, au large du cap Horn, le monocoque de Jean Le Cam a chaviré. Enfermé dans son bateau, alors que nul ne sait s'il est vivant, il sera finalement sauvé par Vincent Riou, autre concurrent du tour du monde en solitaire, venu secourir son ami.

 

Cette fois, c'est Jean Le Cam qui sauve Kevin Escoffier. 

 

« Un truc de barjot », raconte Kevin Escoffier (PRB) à propos de son avarie sur le Vendée Globe

Quelques heures après avoir été secouru par Jean Le Cam à un millier de kilomètres du Cap de Bonne-Espérance, alors qu'il avait abandonné son monocoque PRB, Kevin Escoffier a pris un court moment pour raconter son aventure.

 

mis à jour le 1 décembre 2020 à 10h54

 

partager

Kevin Escoffier revient de loin. Le skipper de PRB a été récupéré dans la nuit de lundi à mardi par son concurrent Jean Le Cam, qui avait été dérouté lundi après-midi par la direction du Vendée Globe pour lui porter secours.

Quelques heures après le sauvetage, la direction de la course a mis en ligne une vidéo dans laquelle Escoffier raconte son aventure à Jean-Jacques Laurent, président de son sponsor PRB. Après lui avoir dit qu'il était « désolé pour le bateau » et avoir été rassuré par le dirigeant ( « C'est que du matériel, c'est rien de grave Kevin »), le skipper explique : « J'ai zéro regret, j'ai renforcé le bateau tout ce que j'ai pu... Franchement j'ai zéro regret, j'ai mis 200 kilos de carbone, j'ai tout renforcé partout », commence-t-il.

lire aussiCes marins récupérés par un concurrent sur le Vendée Globe

« En quatre secondes, le bateau il a planté »

« Vous voyez les films sur les naufrages ?, poursuit-il, pour suggérer la violence et la soudaineté de ce qui lui est tombé dessus. C'était pareil en pire. En quatre secondes, le bateau il a planté, l'étrave elle s'est pliée à 90 (degrés), j'ai mis la tête dans le cockpit, y'a eu une vague, j'ai eu le temps d'envoyer un texto, la vague après elle a tout fait shunter l'électronique et tout... Non mais c'est un truc de barjot, plier un bateau en deux. »

Tout sourire, tout de même, Kevin Escoffier semble aller bien. Et raconte également son échange avec Jean Le Cam à son arrivée à bord du bateau du doyen de l'épreuve : « Comme je disais à Jean, "tu fais une course de barjot, je suis désolé de te n... ton truc". Il m'a dit "écoute, la dernière fois c'était l'inverse, c'est PRB qui m'avait récupéré." »

En janvier 2009, Vincent Riou, alors skipper de PRB, avait secouru Jean Le Cam dont le bateau s'était retourné et partiellement rempli d'eau, au large du Cap Horn. Cette année, Le Cam réalise une très belle course et faisait mieux, jusqu'alors, que certains foilers.

lire aussiLe classement

Le marin a donné davantage de détails un peu plus tard, dans un communiqué transmis par son équipe :

« C'est surréaliste ce qui s'est passé. Le bateau s'est replié sur lui-même dans une vague à 27 noeuds. J'ai entendu un crac mais honnêtement, il n'y avait pas besoin du bruit pour comprendre. J'ai regardé l'étrave, elle était à 90°. En quelques secondes, il y avait de l'eau partout. L'arrière du bateau était sous l'eau et l'étrave pointait vers le ciel. Le bateau s'est cassé en deux en avant de la cloison de mât. Il s'est comme replié. Je vous assure, je n'exagère rien... il y avait un angle de 90° entre l'arrière et l'avant du bateau.

Je n'ai rien eu le temps de faire. J'ai juste pu envoyer un message à mon équipe ''Je coule. Ce n'est pas une blague. MAYDAY.''.

Entre le moment où j'étais sur le pont en train de régler les voiles et le moment où je me suis retrouvé en TPS (combinaison qui permet de lutter contre l'hypothermie, ndlr), il s'est passé même pas deux minutes. Ça a été d'une rapidité extrême.

Je suis sorti du bateau, j'ai enfilé comme j'ai pu la TPS. J'ai vu de la fumée, l'électronique qui cramait. Tout s'éteignait. Le seul reflexe que j'ai eu a été d'attraper le téléphone pour envoyer ce message et prendre la TPS que je ne matosse (déplace, ndlr) jamais. J'ai voulu prendre le grab bag (sac de survie) mais je n'ai pas réussi car l'eau montait.

J'ai pris le bib (radeau de survie) à l'arrière. Le bib avant n'était pas accessible, il était déjà trois mètres en dessous de l'eau. L'eau était dans le cockpit jusqu'à la porte.

J'aurais voulu rester un peu plus longtemps à bord mais je voyais bien que tout allait très vite et puis je me suis pris une déferlante et suis parti à l'eau avec le radeau.

A ce moment-là, je n'étais pas du tout rassuré... Tu es dans un radeau avec 35 noeuds de vent. Non, ce n'est pas rassurant. J'ai seulement été rassuré quand j'ai vu Jean. Mais le problème, c'était de savoir comment faire pour monter à bord avec lui.

On s'est dit deux-trois mots. C'était Verdun sur l'eau. Il a été contraint de s'éloigner un peu puis après, j'ai vu qu'il restait sur zone. Je suis resté dans le radeau jusqu'au petit matin.

Je ne savais pas si la météo allait mollir suffisamment pour permettre une manoeuvre. Il était à deux mètres de moi, il m'a envoyé la frite avec un lien mais c'était dur d'arrêter le bateau. Finalement, j'ai réussi à attraper un tube, une barre pour monter à bord. Il y avait encore de la mer, environ 3,5 m. C'est une épreuve dans ces conditions de monter à bord d'un 60', d'autant plus quand tu es contraint dans tes mouvements par la TPS. Sincèrement, heureusement que je suis en forme physique car je vous assure que ce n'est pas simple.

Quand je me suis retrouvé à bord avec Jean, nous sommes tombés dans les bras l'un de l'autre (...) Pour l'instant, je n'ai aucune idée pour la suite. On va voir avec la direction de course. Là, j'ai bien dormi 2 heures, me suis reposé, j'ai mangé. J'ai fait tout ce que j'ai pu pour le bateau. Je l'avais renforcé, j'ai tout fait, je n'ai pas de regret par rapport à ce que j'ai fait. »

 

blog

Ajouter un commentaire