L'intention et l'espoir.

 

 

Il a fallu que je sombre totalement dans la douleur physique, dans le délabrement moral pour que le mécanisme de l'espoir vole en éclat. Il a fallu que le goût de la mort devienne l’ultime espoir pour que je prenne conscience du mécanisme.

L’énergie vitale n’a pas besoin d’espoir. Pour elle, c’est un poison. C’est comme si l’individu vénérait une illusion alors que la vie est là. On peut même imaginer que la vie en soit déçue, effroyablement déçue. Au point de se retirer puisque l’illusion a plus d’importance que la vie elle-même. Pourquoi rester là ? Il y a sûrement mieux à faire ailleurs…

 

L’étape la plus difficile, la plus délicate, le travail de sape le plus redoutable à effectuer est de cesser de penser. Il s’agit de vibrer intérieurement alors que la pensée est une projection extérieure. Nous avons appris à penser jusqu’à finir par nous « dé-penser. » Nous sommes sortis de nous-mêmes en nous projetant dans un flot d’abstractions et nos pensées sont devenues des dépenses énergétiques, des dispersions multipliées à l’infini.

 

Je dois aussi à l’effort long d’avoir découvert cet espace « dé-pensé », cette plénitude de la vie étreinte dans le creuset de l’énergie originelle. Lorsqu’il n’y a rien d‘autre que le saisissement  du silence intérieur, le ronflement infime de l’univers qui s’étend.

 Mais je reconnais aujourd’hui que cette épreuve a généré en moi un autre adversaire. Celui du refus de toutes formes de projection, jusqu’à refuser de me mettre dans une situation dont certains paramètres pouvaient m’échapper. Les relations sociales en sont le symbole.

Je refuse d’être dépendant des autres. Je refuse même de leur demander quoique ce soit. Pour ne rien leur devoir. Et ne rien attendre, n’avoir aucun espoir, aucune illusion. Le problème vient de la puissance du fonctionnement. Je me suis vraiment coupé de tous.

Et puis, là, étrangement, la vie s’est chargée de me montrer l’erreur. A travers mes textes. Des gens que je ne connaissais pas et qui s’engagent pour moi, de façon totalement désintéressée, juste parce qu’ils ont été touchés par mes écrits.

Je ne pouvais pas échapper à une introspection supplémentaire.

Françoise, Martine, Max, Estelle, Jean-Michel, Chris, Nathalie, Valérie, Bérénice, Gaëlle, Albert et d’autres encore. Ils se reconnaîtront, je ne les oublie pas. Des témoignages émouvants, bouleversants pour moi. Il y avait quelque chose à comprendre. Cet enfermement dans lequel je m’étais réfugié pouvait également être une geôle. Et dès lors, ce travail d’écriture ne pouvait pas aboutir dans cette intention de partage qui m’importe. A ne vouloir subir aucun espoir, je bridais également ce que le partage pouvait m’apporter. Situation contradictoire étant donné que je remplis ce blog jour après jour.

Il y a donc les actes à mener.

Par ces actes, il peut y avoir une tentative pour aboutir à un objectif.

Dans cet objectif, un espoir peut venir se greffer et alimenter l’énergie nécessaire pour mener les actes à terme.

Alors, pour clarifier la situation et ne pas retomber dans les travers de l’espoir, je parlerai plutôt d’intention.

J’ai une intention mais les actes que j’accomplis me libèrent de l’espoir versatile et des désillusions qu’il fabrique.

J’imagine que la volonté suit le fil de l’intention pour aller vers l’objectif.

L’espoir est beaucoup plus lointain, comme un mirage fabriqué par l’évaporation des pensées incontrôlées.

« Il n’y a pas d’espoir sans crainte, ni de crainte sans espoir, » disait Spinoza.

Voilà ce que je cherche désormais.

Accepter l’intention mais sans jamais sombrer dans l’espoir.          

L'intention est une réalité à vivre dans les actes présents. L'espoir est immatériel tout comme l'est le mirage.

Et j'ai bien l'intention d'y ariver :)

 

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