Le zazen.



"Dix ans d'expérience avec un moine Zen" de Jacques Brosse.



Troisième fois que je relis ce livre et je suis toujours aussi bouleversé. Comme si je n'avais pas besoin de réfléchir à tous ces mots, que c'était une évidence, une vérité en moi, une réalité que je porte, comme cette "intemporalité " qui me saisit de plus en plus souvent...Ce bain d'apesanteur où je sens vibrer des particules qui ne sont pas moi mais des entités venues d'ailleurs.


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Jacques Brosse



"Ce que nous appelons le moi n'a pas d'existence propre, il n'est que réaction à l'autre, aux contraintes que l'autre lui impose, aux circonstances auxquelles il faut qu'il réponde, il n'est en somme qu'adaptation; aussi haut qu'on remonte dans le temps, on ne peut trouver un moi vraiment fondamental, vraiment original, car, de toute manière, il est déjà le produit de quelque chose d'autre, de ce qui précède son existence même et qui en lui se rassemble, l'hérédité.

Mais alors la seule question qui se pose est celle-ci : qui est donc ce Je qui parle en moi ? Qui est ce Je qui me parle de moi ? Et finalement : qui est ce Je qui un jour est devenu moi ?





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Nous ne nous concevons que comme des égo, des moi, et la disparition possible de ce moi est le fondement de notre angoisse, de toutes nos angoisses, aussi nous nous accrochons désespérément à tout ce qui peut nous en faire espérer la continuation, sa survie, nous le voulons immortel, sinon éternel, oubliant que comme le remarque le Bouddhisme et l'énonce clairement la nature elle-même, tout ce qui est né doit mourir. Ce qui peut subsister après la mort ne saurait donc être ce qui est né mais ce qui existait préalablement à cette naissance, le désir d'existence qui s'était matérialisé, incarné dans et par la naissance.

C'est seulement ce désir d'existence qui instatisfait de cette vie qu'il vient de vivre et qui se termine, peut se réincarner.

C'est là le Karma, ce qui à la mort, n'a pas encore été totalement consumé dans et par la vie, le résidu de la vie vécue, qui fournira les matériaux, bons et mauvais, d'une nouvelle existence et ceci jusqu'au moment où il n'en subsistera plus rien, où de ce fait, le désir d'exister, enfin entièrement satisfait, sera définitivement tari.

L'expriration, la fin du souffle marque la fin du Karma car le souffle est lui-même producteur de Karma.Tout est accompli. Le Parinirvâna est le retour à l'origine, restitution intégrale de l'infime parcelle qui avait été provisoirement extraite du Tout, mais non soustraite au Tout, car du Tout on ne peut rien retirer, pour mener ce destin séparé à travers les kalpa et les milliers d'existences conditionnées successives.

L'existence séparée n'était qu'une illusion. Elle s'est dissipée.

Un jeu, une comédie, des rôles pris inconsidérément au sérieux au point que nous avions oublié que c'était sur un théatre que nous jouiions et seulement pour la durée de la représentation."


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"Répondant à une question, le Maître parle du Karma. Il semble identifier Karma et hérédité. Je comprends qu'en effet, ils sont parfaitement distincts, ils se rejoignent en pratique. C'est en fonction du Karma précédemment acquis que le principe vital migrant choisit sa nouvelle incarnation, donc ses géniteurs, et par-delà eux, son hérédité, soit tous ses ancêtres, la collection complète des gènes qu'ils représentent."




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"Quand notre être est parvenu à retrouver tout au centre de lui-même sa source originelle, alors cesse d'exister le problème du moi.

Car désormais il le voit tel qu'il est, avec détachement, avec humour : il ne le prend plus que pour ce qu'il est en effet, la manifestation la plus extérieure de lui-même, le mélange, à sa propre limite, de lui et de l'autre, le produit aléatoire des circonstances.

Dès lors aussi cesse toute lutte, car elle n'a plus d'objet. Ayant trouvé refuge en soi-même, et non en lui, se tenant désormais fixe en sa stabilité primordiale et là, ayant acquis le sens de la relativité de toutes choses, l'être profond peut accepter son moi comme la très imparfaite, illusoire et impermanente expression de soi-même, et il comprend, que soumis à ses lois, il ne pouvait être autre que ce qu'il est.

Alors, il le regarde faire et s'amuse de ses maladresses, de ses forfanteries, de cette comédie qu'il joue, qu'il se joue à lui-même. Et au fond, que lui importe ce personnage qui le représente si peu, si mal et pour si peu de temps ?

Nul mérite d'ailleurs et nulle illusion, car du fait de son détachement, le moi n'est déjà plus le même, il n'est plus celui contre lequel il y avait à combattre."

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