Les dauphins, les pêcheurs et les consommateurs
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/10/2020
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Je suis né en Bretagne. J'ai été élevé aux poissons et aux fruits de mer. J'ai pêché autant que je pouvais pendant ma jeunesse.
Mon père était boucher et on mangeait de la viande quasiment à tous les repas. Charcuterie à foison. En Bretagne, c'est une tradition.
Il y a huit ans maintenant, j'ai arrêté de manger des animaux. Tous les animaux. ceux de la mer y compris. Et je ne reviendrai jamais sur cette décision.
Parce que je ne veux pas porter la responsabilité, aussi infime soit-elle, de ce massacre. La seule chose qui m'importe, c'est de pouvoir dire : Je n'en fais pas partie.
Hécatombe de dauphins : le gouvernement refuse de suspendre la pêche l’hiver
https://lareleveetlapeste.fr/hecatombe-de-dauphins-le-gouvernement-refuse-de-suspendre-la-peche-lhiver/?
« Il s’agit d’un revirement absolument considérable parce qu’on pensait que la Ministre allait instaurer une fermeture temporaire de la pêche de plus de 15 jours ! Durcir les contrôles n’empêche pas les prises accidentelles ! »
- Thème : effondrement de la société, abordé de manière douce et positive
- Format : 130 pages
- Impression : France
Malgré les recommandations du monde scientifique et une action en justice de la Commission Européenne, la ministre de la Mer Annick Girardin a décrété qu’il n’y aurait aucune suspension de la pêche cet hiver dans le Golfe de Gascogne, même pour une courte durée. Les associations de protection de l’environnement dénoncent une décision scandaleuse qui laisse présager un nouveau désastre cet hiver. En effet, en 30 ans, la pêche a causé la mort de 90 000 dauphins en Atlantique nord-est ! Rien que pour ces deux dernières années, ce sont plus de 18 500 dauphins qui ont été massacrés dans le Golfe de Gascogne.
Une hécatombe à la hausse
Pire que les Iles Féroé, plus dévastateur que la baie de Taiji au Japon, il y a le Golfe de Gascogne, en France, qui est le théâtre d’une hécatombe sanglante année après année. Des milliers de dauphins sont capturés « accidentellement » dans les filets des pêcheurs, petits et gros bateaux, et rejetés morts dans l’océan. Ils viennent ensuite s’échouer sur le littoral français.
Chaque année, le nombre de mammifères marins qui meurent par capture accidentelle augmente. Pendant l’hiver 2019 – 2020, on estime ainsi que ce sont 11 500 dauphins qui ont été tués dans le Golfe de Gascogne !
Les dauphins sont pourtant une espèce protégée. L’affaire est tellement grave qu’elle a attiré l’attention de 1500 scientifiques du Conseil International pour l’Exploration de la Mer (CIEM) qui avaient rendu un avis historique en juin 2020 dans lequel ils expliquaient qu’il est impératif de fermer les zones de pêche du 15 janvier au 15 mars, accompagnées de mesures à plus long terme, pour sauver les dauphins de l’hécatombe.
En juillet, c’est la Commission Européenne qui était montée au créneau pour rappeler la France à l’ordre sur son devoir de protection de l’espèce. Les annonces du Ministère de la Mer étaient donc particulièrement attendues par les associations. Elles sont tombées de haut à l’annonce d’Annick Girardin, la Ministre de la Mer : la France refuse de fermer la pêche temporairement pour sauver l’espèce.
La France dans le viseur de la communauté internationale
Face au tollé provoqué par cette décision en commission de travail, la Ministre de la Mer a expliqué depuis dans différents médias que la France préférait durcir les contrôles sur les prises accidentelles de dauphins, des mesures loin d’être convaincantes pour les ONG.
« Il s’agit d’un revirement absolument considérable parce qu’on pensait que la Ministre allait instaurer une fermeture temporaire de la pêche de plus de 15 jours ! Durcir les contrôles n’empêche pas les prises accidentelles ! Ce dossier existe depuis 30 ans, et les connaissances scientifiques dessus sont déjà très avancées notamment grâce à l’Observatoire Pelagis et l’IFREMER. Malgré l’intensification des mesures préventives, on a multiplié par deux ou trois la mortalité des dauphins entre 2016 et 2020 ! Encore une fois, le socio-économique prime alors qu’on peut tout à fait sauvegarder les intérêts économiques des pêcheurs en respectant les règlements sur les espèces protégées. Cette inertie considérable va coûter la vie de milliers de dauphins pour l’hiver 2020 / 2021, la décision du gouvernement français n’est pas bonne. » explique Dominique Chevillon, naturaliste, Président de Ré Nature Environnement et Vice-Président de la LPO, pour La Relève et La Peste
En effet, sur plus de 500 bateaux de pêche, seulement 55 ont déclaré avoir commis des captures accidentelles. Un chiffre bien faible qui est loin d’indiquer quels sont les techniques de pêche ou bateaux, majoritairement sous pavillon français dans le Golfe de Gascogne, les plus meurtriers.
Parmi les mesures annoncées par la Ministre, le gouvernement français souhaite installer des caméras à bord d’une vingtaine de fileyeurs. Ce dispositif de surveillance sera peut-être une bonne façon de mieux comprendre les captures accidentelles mais n’empêchera en rien la mort de dauphins, ainsi que le précise Hélène Pelletier, biologiste à l’Observatoire Pelagis.
De la même façon, si les pingers eux diminuent bien le taux de capture accidentelle, ils n’en restent pas moins un dispositif intrusif dans les zones de chasse des cétacés et pourraient s’avérer bien plus nuisibles que positifs, ainsi que le dénonce l’association Sea Shepherd France dans leur attaque en justice contre cette béquille technologique.
La France avait jusqu’au 2 octobre pour présenter des mesures concrètes à la Commission Européenne, et fait pour l’instant traîner le dossier. Une fois qu’il sera remis, la Commission Européenne pourrait bien décider de saisir la Cour de Justice Européenne (CJUE) face aux manquements de la France en la matière.
Les 26 ONG qui avaient interpellé la Commission Européenne sur le sujet se sont déclaré prêtes à aider la justice à se saisir du dossier. Si la CJUE s’en mêle, la France pourrait bien être obligée de fermer temporairement la pêche l’hiver et risque des amendes d’un montant pouvant s’élever à plusieurs dizaines de millions d’euros, payés par l’argent des contribuables français.
Les ONG dénoncent également l’hypocrisie du gouvernement français qui enchaîne les effets d’annonce sur la protection de l’environnement tout en dilapidant le droit environnemental et refusant de s’engager avec cohérence sur des mesures de protection efficaces.
« Dans un contexte d’érosion sans précédent de la biodiversité, suite à la publication de la Stratégie de l’Union Européenne en faveur de la biodiversité pour 2030, à la veille de la COP 15 de la Convention pour la biodiversité biologique, de la publication d’une stratégie nationale en faveur des aires protégées pour la décennie 2020-2030, et du Congrès mondial pour la nature dont la France est l’hôte, France Nature Environnement continuera d’alerter le public ainsi que la Commission européenne sur ce massacre, jusqu’à ce que la France se réveille et prenne enfin ses responsabilités. » conclut ainsi l’ONG dans un communiqué
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