Œdipe (2)
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/12/2014
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ŒDIPE 2
Principaux mécanismes d’évolution
L’évolution « normale » des sentiments œdipiens met en œuvre :
*un renoncement aux désirs œdipiens envers le parent de l’autre sexe
*un processus d’identification au parent du même sexe, permettant à l’enfant de résoudre son ambivalence vis-à-vis de ce parent, et de s’engager dans une identification sexuelle positive.
*l’élaboration et l’intériorisation (introjection) des sentiments de culpabilité.
*enfin un développement des capacités d’imagination et de fantasmatisation, permettant à l’enfant de trouver des satisfactions partielles dans les jeux et la rêverie.
Renoncement
En résume, l’enfant parvient peu à peu à se détacher de son amour oedipien qui ne lui apporte pas les satisfactions souhaitées ; il tend à mettre ses parents davantage sur un même plan, à trouver sa place auprès de chacun d’eux et parvient ainsi à préserver sa relation avec le parent du même sexe. L’amour passionné pour le parente de l’autre sexe va laisser place à un sentiment de tendresse plus calme et moins conflictuel, compatible pour l’enfant avec une sensation de sécurité affective.
Identification
La position oedipienne d’amour et d’hostilité envers les parents est sans issue pour l’enfant. Il comprend qu’il ne peut pas triompher de son parent rival, plus fort que lui et qu’il aime. Ses sentiments vont évoluer et il va se rapprocher du parent du même sexe qu’il admire et dont il désire acquérir les qualités.
L’enfant cherche donc à l’imiter en tous points, à partager ses activités. Il recherche et a besoin d’une valorisation, il veut l’aider, il est heureux si on lui confie des responsabilités.
Pour peu que le parent se montre accueillant et compréhensif, l’enfant trouvera une grande satisfaction à faire comme son père ou sa mère. L’enfant n’a pas renoncé à prendre la place de son père ou de sa mère mais cette fois-ci au plan symbolique et non plus dans la réalité.
De plus, le plaisir bien concret de cette relation valorisante et des activités partagées qu’on lui offre, va faire progressivement tomber son hostilité. Par exemple, le père soutient le désir de son fils de s’affirmer et de devenir fort : il le fait participer à ses activités, encourage ses efforts, fait de lui un allié et non plus un rival ; le garçon en retour, se réconcilie avec lui et lui voue un attachement nouveau et fervent. Il va investir de plus en plus les valeurs propres à son sexe, auxquelles il commence à avoir accès grâce à son père.
Dans cette réconciliation heureuse et ces promesses de développement personnel, l’enfant pare son père ou sa mère des vertus que lui-même voudrait acquérir, son admiration est sans bornes. A cet âge, les enfants cherchent même souvent à prouver la supériorité de leurs propres parents à leurs camarades : « Mon papa est le plus fort, ma maman est la plus jolie… »
Ainsi, progressivement, l’enfant peut commencer à se projeter dans son rôle futur d’homme ou de femme. Le futur, même s’il reste abstrait et lointain, n’est plus pour lui seulement une histoire d’adultes, qui ne le concerne pas et auquel il n’a pas accès.
L’enfant devient capable d’investir d’autres adultes amis de la famille, ainsi que des ami(e)s de son âge et de l’autre sexe. Ce sont les « fiançailles » et les « amours » de classe maternelle que l’enfant prend sur le moment très au sérieux et qui sont pour lui un enrichissement de ses possibilités affectives.
Culpabilité
Les sentiments de culpabilité apparaissent le plus souvent lorsque rencontrant de l’opposition de la part de ses parents, l’enfant éprouve des sentiments agressifs à leur égard. En effet, cette agressivité, désir de détruire ou de rejeter ses parents, lui fait ressentir la peur d’une vengeance ou d’une punition de la part des parents, et plus profondément la peur de les perdre, eux et leur affection dont il reste encore très dépendant.
La curiosité sexuelle, l’amour pour le parent œdipien, la rivalité et l’hostilité au parent de même sexe, se heurtent successivement à de multiples limitations et interdictions, réactivant du même coup sentiments de frustration et agressivité.
La nécessité pour parvenir au renoncement oedipien, de l’identification au père ou à la mère, entraîne un travail psychique plus spécifique sur ces sentiments de culpabilité : l’enfant doit pour préserver cette identification intérioriser, c'est-à-dire reprendre à son compte comme s’ils venaient de lui, les interdits et les sentiments qui en découlent. L’intériorisation de ces sentiments de culpabilité est à l’origine de la formation de l’instance « morale » du psychisme, appelée par Freud le « Surmoi ».
L’enfant va devoir établir un équilibre adéquat et souple entre permissions et interdits, entre ses forces instinctuelles et son Surmoi, lui permettant de satisfaire partiellement ses désirs, tout en restant aussi capable de les réprimer.
Faute de cette souplesse minimale, l’enfant sera incapable de contenir ces pulsions et de supporter frustrations et interdits, ce qui peut l’entraîner vers les comportements caractériels et asociaux, soit incapable de satisfaire au moins partiellement les exigences instinctives, ce qui est générateur d’inhibition parfois massive, d’angoisse et /ou de troubles névrotiques.
Si un compromis équilibré a pu être trouvé, permettant à l’enfant un authentique renoncement œdipien, et non une répression massive de ses pulsions, cette période évolutive se révèle un puissant stimulant des activités intellectuelles, cognitives et fantasmagoriques.
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