Retour vers le passé.

Je ne pensais pas que le trravail d'archives sur mon blog m'amènerait à de nouvelles réflexions, pas aussi intensément en tout cas.

Mais là, vraiment, je me réjouis d'avoir entamé cette tâche.

C'est édifiant de voir à quel point les sociétés capitalistes enchaînent les "crises" mais plus édifiant encore de constater à quel point, ces crises n'aboutissent à rien de profond.  

Je suis donc tombé sur un texte datant de novembre 2011 et parlant du mouvement des "Indignés".

Qui s'en souvient ?...

Le mouvement des Indignés (Indignados en espagnol) ou Mouvement 15-M1 est un mouvement de manifestations, non violent né sur la Puerta del Sol à Madrid, en Espagne, le 15 mai 2011, rassemblant des centaines de milliers de manifestants dans une centaine de villes2, se prolongeant par divers modes d’action (campements, marches). A suivi une série de manifestations pacifiques, rassemblant jusqu'à plusieurs dizaines de milliers de personnes, organisées sur les réseaux sociaux et des sites web dont ¡Democracia Real Ya!3 (Une vraie démocratie, maintenant), auxquels se sont joints de 2004 à 500 organismes soutenants, parmi lesquels les collectifs ATTACAnonymousNoLesVotes et Juventud Sin Futuro (« Jeunesse sans avenir »)5,1.

Ce mouvement, inédit par son ampleur et ses revendications, se poursuit encore actuellement. Régulièrement, des manifestants ou des organisations se réclament des Indignés. La principale manifestation est la journée mondiale des Indignés, le 15 octobre 2011. Et le 12 mai 2012, des centaines de milliers de manifestants se sont réunis, principalement en Espagne, pour fêter le premier anniversaire du mouvement6. En septembre 2012, la manifestation Rodea el Congreso (es)(« prise du Parlement »), cependant pas directement liée aux initiateurs du mouvement 15M, a rassemblé des dizaines de milliers de manifestants en Espagne.

 

Quelle conclusion en tirer ?

Que le mouvement des "Gilets jaunes" finira de la même façon. 

Jusqu'au prochain mouvement de contestation.

Est-ce que, fondamentalement, ces mouvements ont changé les systèmes concernés ?

Non. 

On peut se réjouir de quelques améliorations. Parfois.

Mais les systèmes sont toujours en place. Les mêmes sont aux commandes. Le jeu des chaises musicales continue. Les noms changent. Les règles perdurent. 

Une crise sanitaire vient par ailleurs renforcer leur pouvoir. Ils pourront bientôt se gausser d'avoir relancé l'économie et le peuple sera content de retrouver un emploi et son rythme de vie. C'est effrayant parce que, fondamentalement, rien n'aura changé. "Métro, boulot, dodo" rengaine bien connue, éculée et indéboulonnable. 

A ceux ou celles qui penseraient que j'exagère lorsque je dis que rien, fondamentalement, ne change au fil des crises, je renvoie aux philosophes des Lumières.

 

KANT ET LA RÉVOLUTION

En toute conscience

 

Kant et la Révolution.

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  •  Le 29/10/2011
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"Les Lumières, c'est la sortie de l'homme hors de l'état de tutelle dont il est lui-même responsable. L'état de tutelle est l'incapacité à se servir de son entendement sans la conduite d'un autre. On est soi-même responsable de cet état de tutelle quand la cause tient non pas à une insuffisance de l'entendement mais à une insuffisance de la résolution et du courage de s'en servir sans la conduite d'un autre...Aie le courage de te servir de ton propre entendement. Voilà la devise des Lumières. Paresse et lâcheté sont les causes qui font qu'un si grand nombre d'hommes, après que la nature les eut affranchis depuis longtemps d'une conduite étrangère, restent cependant volontiers toute leur vie dans un état de tutelle, et qui font qu'il est si facile à d'autres de se poser comme leurs tuteurs. Il est si commode d'être sous tutelle. Si j'ai un livre qui a de l'entendement à ma place, un directeur de conscience qui  a de la conscience  à ma place, un médecin qui juge à ma place de mon régime alimentaire etc, alors je n'ai pas à fournir moi-même d'efforts."

KANT

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La problématique posée par ce texte concerne la situation des hommes lorsque celle-ci ressemble davantage à une soumission passive qu'à une liberté issue de leur entendement. Kant considère en plus que les hommes sont responsables de cette situation et que cette "mise sous tutelle" est la conséquence de leur incapacité à user de leur "entendement" mais plus encore de la conséquence de leur "lâcheté". Il semblerait selon ce texte que les hommes ne sont pas asservis par la force d'une puissance étrangère mais, à l'origine, en raison de leur propre abandon, de leur "paresse."

On peut s'interroger sur cette situation de soumission. Est-elle réelle ? Concerne-t-elle tous les individus ? Existe-t-il une responsabilité de la part des victimes elles-mêmes ?

L'auteur ne laisse aucun doute sur son jugement. Pour lui, il n'y a aucune interrogation mais un état de fait général, universel. Le ton cynique, sarcastique est destiné à montrer de façon crue et détestable cette propension des hommes à se vautrer dans la bassesse. Le fait d'opposer des termes aussi forts que "paresse" et "courage" est révélateur.

Kant parle de courage car il est indéniable pour lui que cette situation réclame une prise de position pleine et entière, non seulement une prise de conscience mais un engagement à travers des actes. Puisque l'homme est "responsable" de cette soumission passive, il doit par-delà son entendement initial être responsable de sa révolte. L'entendement n'est pas suffisant. Il n'est qu'une étape intellectuelle. La cause ne vient pas d'une insuffisance de l'entendement mais à une insuffisance de la résolution qui devrait en résulter.

Les hommes délèguent leurs décisions et leurs actes à d'autres hommes qui leur paraissent plus aptes à les guider et à les prendre en charge. Ce raisonnement, car il s'agit bien d'un raisonnement, aussi primaire soit-il,  est à la source de la soumission et du pouvoir.

Même si je ne sais pas soigner une dent cariée et que je me dois m'en remettre au dentiste, je peux assumer l'entretien de mes dents et veiller à la qualité des aliments que je consomme. Le fait de m'en remettre selon les situations à des gens plus performants que moi dans certains domaines ne signifie pas pour autant que ce choix doit s'étendre à l'ensemble de mon existence et surtout pas aux domaines existentiels.

C'est là qu'il faut rester vigilant pour ne pas sombrer dans une complaisance assassine envers cette paresse et cette lâcheté.

Il y a dans "Le Bon, la Brute et le Truand" une réplique culte.

"Le monde se partage en deux catégories. Il y a ceux qui ont une arme et il y a ceux qui creusent. Toi, tu creuses. "

Selon Kant, on peut rajouter que ceux qui possèdent une arme et donc le pouvoir en disposent parce que ceux qui creusent les ont autorisés par leur soumission originelle à user d'une arme.

Si on prolonge la réflexion, les dictateurs ne sont pas des hommes plus puissants mais simplement des hommes qui ont saisi l'opportunité que la masse leur offrait. C'est la masse par son comportement lâche et servile qui donne le pouvoir aux dictateurs. Il n'est pas permis de critiquer les dictateurs avant même d'avoir pris conscience de ce comportement. La seule solution pour s'extraire de ce rapport de faible à fort, est d'avoir le courage de se servir de son propre entendement et non de se contenter d'un entendement servile. Il ne suffit pas d'analyser une situation. Il faut œuvrer à son évolution. 

Ce texte issu de l'époque des Lumières correspond au mouvement actuel des "Indignés". Ce mouvement n'attend pas des gouvernants des solutions miracles. Ils les proposent. Leur entendement et leur analyse de la situation les conduisent à entrer en résistance. Ils agissent. L'asservissement est généré aussi par le silence. Pour combattre, il faut d'abord saisir l'ensemble de ses insuffisances.

Une autre question surgit dès lors. Pourquoi les hommes en sont-ils arrivés là ? Est-ce un état naturel dont se servent les Puissants?  Mais dans ce cas-là, pourquoi les Puissants n'en sont-ils pas eux aussi les victimes ? Comment sont-ils devenus Puissants si cet état de laxisme existentiel est un état naturel ? Les Puissants sont bien pourtant des hommes.

La problématique ainsi posée met en évidence la part sociale de l'homme. Son statut de citoyen, c'est à dire un individu inséré dans un microcosme relationnel. Les Puissants oeuvrent à la pérennité de leur statut. Par héritage bien entendu mais bien plus encore par l'éducation. De la même façon, les asservis sont conditionnés à une existence soumise. Les Puissants se chargeront de les y maintenir par d'habiles subterfuges et en se servant de la paresse et de la lâcheté de la masse.

Il n'y a rien de naturel. Tout est éducatif. Certains vont naître avec une cuillère d'argent dans la bouche mais l'environnement va se charger de leur apprendre à s'en servir. Les asservis se contenteront de les envier et de geindre. 

Les Philosophes des Lumières ont mis en avant le droit des hommes à être responsables lorsque ce droit finissait par apparaître comme insaisissable.

 

Jean Jacques Rousseau disait « qu’on perd dans l’asservissement jusqu’au désir d’en sortir. »

 

Les révolutions arabes viennent de prouver qu’il n’en est rien. L’asservissement corrompt les âmes, contraintes à de multiples compromissions pour subvenir à l’essentiel. Toute l’énergie des individus s’y perd. La peur de la perte des biens vitaux devient générale et les individus en viennent à percevoir la masse environnante comme l’adversaire à combattre. Les Puissants entretiennent cette peur et l’amplifient si nécessaire. Elle sert leurs intérêts.

L’entendement devient dès lors la source des actes. Il faut parvenir à cet état d’observation macroscopique, une élévation au-dessus de la masse pour prendre conscience des entrelacs instaurés par la matrice, cette entité constituée par des individus anonymes, travaillant dans les palais. Une fois cette observation validée, chaque individu ayant effectué sa propre analyse et pris conscience de l’émergence d’une pensée commune, les individus éveillés peuvent entamer une tâche évolutionniste. Il ne s’agit pas de chercher des guides mais de favoriser par un travail intérieur son propre éclairage au risque d’être éblouis et par conséquent manipulés par les tenants des lampions…

Les Philosophes des Lumières prônaient la raison comme étendard. Il faut y adjoindre le courage.

Il reste ensuite à ne pas tomber dans l’euphorie magnifiée par des individus avides qui cherchent à se présenter comme les nouveaux Guides. Combien de Révolutions portées par les peuples et tombées aux mains des Puissants ?

La France en est un "bel" exemple.     

Que reste-t-il de cet héritage ? Une démocratie ? Où ça ?

 

 

 

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