Un rejet massif
En rejetant à une très large majorité la réforme Peillon, dite des rythmes scolaires, c'est une véritable claque que le Conseil supérieur de l’Éducation vient d'infliger au gouvernement.
L'ampleur de ce rejet, le vote négatif de la FSU, de FO et de la CGT, l'obligation où se sont trouvées la CFDT et l' UNEF de s'abstenir, tout ceci est l'expression du rejet massif que rencontre cette réforme et de l'isolement du gouvernement ,son incapacité à forger un consensus pour l'application de ses réformes.
Pourtant l'importance de ce rejet tient surtout au fait que cette réforme, dont chacun s'obstine à taire le véritable contenu, est bien plus qu'une réforme des rythmes scolaires, un véritable plan de démantèlement de l'école républicaine.
Beaucoup ont voulu nous faire croire que le débat portait simplement sur l'aménagement des rythmes scolaires, comme si la seule question posée était de savoir si nos enfants allaient travailler ou non le Mercredi ou le Samedi matin.
En réalité, il s'agit selon les propres termes du ministre Peillon de faire évoluer l'école autour d'un projet territorial et derrière cette formule de remettre en cause le caractère national de l'école républicaine.
Rythmes scolaires : à chaque territoire son projet, sa politique éducative
Le ministre Peillon explique ainsi : « la réforme des rythmes scolaires doit agir comme un levier pour faire évoluer l’école autour d’un projet éducatif territorial et doit conduire à (…) coordonner les actions de l’État, des collectivités territoriales et des organismes œuvrant dans le champ éducatif ». Concrètement, l’école ne serait plus de la compétence exclusive de l’État. Trois heures hebdomadaires seraient placées sous la responsabilité des collectivités avec le Projet Éducatif Territorial (PET).
L’enseignement professionnel et l’orientation transférés aux régions
Les régions décideraient de l’ouverture et de la fermeture des filières professionnelles, des BTS… elles contrôleraient le service de l‘orientation « afin de mieux adapter l’offre de formation professionnelle aux besoins des territoires…
A l’heure du TSCG, aucune création réelle de poste pour l’école !
Derrière l’annonce par le gouvernement de 43 000 créations de poste pour la rentrée 2013, la réalité c’est 21 500 départs à la retraire remplacés et 22 000 contractuels embauchés à tiers temps pour plusieurs milliers d’élèves en plus.
Refondation ou liquidation ?
Comme d'habitude on nous prend pour des nigauds et l'on croit que la magie des mots va parvenir à nous tromper sur le contenu réel des réformes annoncées.
Chacun jugera du cynisme qu'il faut pour engager la pire réforme de destruction engagée contre le droit à l'instruction sous le prétexte de la lutte contre l’échec scolaire, comme si l’échec scolaire n'était pas le produit de tous les coups portés contre l'école par les gouvernements successifs de droite ou de gauche.
Le gouvernement a engagé une « refondation de l’école » qui commence par la « réforme des rythmes scolaires ». On vous dit que cette réforme a pour but de « lutter contre l’échec scolaire » des enfants.
Mensonge et tromperie
Il ne s'agit aucunement de rétablir les milliers de fermetures de classes découlant des 17 000 suppressions de postes, dont 16 000 maintenues à la dernière rentrée, afin d’éviter, par exemple, que les classes de maternelles aient 30 élèves, ou de rétablir les classes en milieu rural pour que les enfants ne passent pas des heures dans des cars ? Il ne s'agit pas non plus de rétablir les postes de Rased* pour les enfants en difficulté scolaire.
Au nom des contraintes budgétaires et de l’application du TSCG, ce sont 10 milliards supplémentaires qui doivent être pris sur le budget des services publics.
Le gouvernement a imaginé que pour lutter contre l’échec scolaire il était plus économique… de supprimer une heure d’enseignement par semaine à chaque élève. Les élèves n’auraient plus que 23 heures hebdomadaires de cours, au lieu des 24 actuelles, cette dernière heure n’étant plus une heure d’enseignement.
Xavier Darcos, ministre de Sarkozy, avait déjà supprimé deux heures de cours par semaine en 2008, avec des conséquences catastrophiques sur le niveau des élèves.
Mais ce n’est pas tout !
Le plus odieux dans ce projet n'est-il pas de faire des communes les instruments de la destruction de l'unité de l'école de la République et d'aggraver par la même occasion les inégalités entre les citoyens .
Elles pourraient ainsi décider de l’organisation de la semaine scolaire, des horaires quotidiens et hebdomadaires d’enseignement, de « l’animation », comme elles l’entendent, avec une semaine répartie sur 5 jours, dont le mercredi ou le samedi !
Ainsi, selon la richesse des communes ou l’orientation politique de leur conseil municipal, ces « projets éducatifs locaux » seraient différents selon que vous habitez telle ou telle ville, tel ou tel village.
Dans les faits, ce mélange des responsabilités d’instruction et d’animation aboutirait à une école « territorialisée », aggravant l’inégalité du droit des enfants à l’instruction et amorçant la tutelle des collectivité locales sur l’enseignement et les professeurs.
Nul doute que la résistance contre ce projet ne fait que commencer et qu'elle va trouver un solide point d'appui dans le refus des organisations syndicales d''accompagner' cette réforme dirigée contre les enfants ,les personnels et les communes.
Nul doute qu'aucun enseignant, aucun parent, aucun élu ne pourra se contenter de moins que de l'abandon pur et simple de cette réforme, que le rétablissement de l'école de la République dans ses droits et ses prérogatives bafouées depuis tant d'années par des gouvernants sans conscience.