"C'est pas grave, l'Inde et le Pakistan, c'est loin"
- Par Thierry LEDRU
- Le 18/05/2022
- 0 commentaire
C'est loin de notre belle France, avec nos rivières, nos fleuves, nos nappes phréatiques, notre climat tempéré, notre réseau d'eau potable qui remplit nos chasse d'eaux.
Mais oui, bien sûr. Tout va bien.
Cédric Rouleau
"Un dôme de chaleur va avoir lieu cette semaine dans le sud de la France, et plus globalement dans le sud de l'Europe.
Nous devrions atteindre 37°C, un record historiquement pour un mois de mai en France. Cela vient s'ajouter à une sécheresse dramatique qui a lieu depuis des mois dans notre pays, avec des agriculteurs et agricultrices à bout de nerfs.
Je me suis fait une frayeur ce midi, j'ai regardé les infos et les chaînes d'info en continu... Devinez quels étaient les sujets ?
- Est-ce que l'Eurovision va faire du bien aux Ukrainiens ?
- La hausse du carburant rend les billets d'avion plus cher, c'est terrible
- Est-ce qu'MBappé part au Réal ?
- Le Festival de Cannes (avec ses stars qui ont une empreinte carbone 100x supérieure à ce qu'il faut qui vont vous expliquer comment respecter la planète).
Je viens également de voir passer 3 pub différentes qui disent "qu'il faut profiter de ce super temps pour voyager en avion, avec un superbe voyage en avion pour Séville à 9€.
Répétons-le à nouveau : les médias ne sont pas au niveau sur les enjeux écologiques. Ils continuent de la jouer #dontlookup alors que nous battons des records de chaleur partout dans le monde et que les catastrophes climatiques s'accumulent.
le GIEC l'a rappelé dans son dernier rapport : les médias mainstream ont un rôle à jouer. Et ils ne l'assurent pas.
Si vous voulez que cela change, soutenez les médias indépendants qui travaillent à alerter sur le sujet tous les jours et oubliez les médias traditionnaux."
Canicules mortelles en Inde et au Pakistan : ce n’est que le début
Mis à jour le 16 mai 2022
Depuis plus d’un mois maintenant, l’Inde et le Pakistan subissent des vagues de chaleur à répétition. L’Inde a enregistré la pire canicule au mois de mars depuis 122 ans, le Pakistan a atteint 51°C le 14 mai, soit la température la plus élevée enregistrée pour l’année 2022.
Alors que plus d’un milliard de personnes sont concernées, cela n’a pas l’air de choquer grand monde en Occident, où la majorité des médias continuent d’adopter une posture Don’t Look up. Comme si le changement climatique ne concernait que ces pays lointains et qu’il n’avait aucune conséquence en France. Pis, lorsque ces canicules sont évoquées, c’est bien souvent avec des images de personnes s’amusant à la mer ou d’enfants courant dans des fontaines, tout sourire. Malheureusement, la réalité est tout autre et les conséquences sont d’ores et déjà catastrophiques.
Canicules en Inde et au Pakistan : que se passe-t-il ?
Qu’il fasse chaud en Inde n’a rien d’extraordinaire. Qu’il fasse très chaud et sur plusieurs semaines est une tout autre histoire. Les très fortes chaleurs ont commencé dès le 11 mars dans la partie nord de l’Inde, en raison de conditions anticycloniques sur les parties occidentales du Rajasthan et en raison de l’absence de pluie. Ce fut non seulement le mois de mars le plus chaud depuis 122 ans (selon l’IMD, le département météorologique indien), mais il fait très chaud depuis maintenant plus d’un mois, quasiment sans aucun répit.
La vague de chaleur s’est prolongée en avril et a même été plus intense en ce début de mois de mai, avec des écarts de 4.5 à 8.5°C au-dessus de la normale. Rappelons que la définition d’une canicule change selon les pays, et les régions. L’IMD considère qu’une zone connaît une vague de chaleur si les températures maximales dépassent 40°C dans les régions de plaine, ou au moins 30°C dans les régions de montagne, pendant au moins deux jours consécutifs.
Pour mieux comprendre l’intensité de cette vague de chaleur, voici les températures moyennes par mois en Inde depuis 1986 :
Température moyenne haute et basse en Inde depuis 1986
Source : WeatherSpark.com
Est-ce significatif ? Sans aucun doute possible. Si cela avait été en Antarctique, 5 ou 7°C de plus est plutôt banal. Mais en Inde, de telles valeurs représentent le premier centile de la distribution. Ces vagues de chaleur sont donc exceptionnelles pour deux raisons : leur intensité, mais aussi et surtout leur durée.
Une situation similaire au Pakistan
Les épisodes caniculaires sont tout aussi extraordinaires au Pakistan. Le mois d’avril a été extrêmement chaud et sec, le plus chaud depuis 61 ans. D’après le Pakistan Meteorological Department, la température moyenne nationale a été de 28,36°C, soit 4,05°C de plus que la norme 1961-1990 (plus de 3°C de plus que la norme 1991-2020). C’est le mois d’avril le plus chaud jamais enregistré, avec une marge énorme : presque 1°C de plus qu’en avril 2010, le deuxième plus chaud.
Les 12, 13 et 14 mai, la température a atteint 50 degrés à Jacobabad et des températures très proches à plusieurs endroits dans le pays. Lorsque l’on sait que dans le nord-ouest de l’Inde comme au Pakistan, la phase humide de la mousson n’arrive généralement pas avant fin juin ou mi-juillet, on ne peut qu’espérer que la température baisse dans les prochains jours…
Source : Scott Duncan
Mais quelles sont exactement les conséquences de telles vagues de chaleur ?
Conséquence 1 : le « thermomètre mouillé » (wet bulb temperature)
Le plus redouté n’est pas la chaleur indiquée, mais la température thermomètre mouillé maximale. Elle combine la chaleur et l’humidité pour indiquer la quantité d’évaporation dans l’air. Lorsque la température au thermomètre mouillé dépasse environ 30°C, nous sommes incapables de réduire notre température par la transpiration et nous souffrons d’un coup de chaleur mortel au bout de quelques heures (généralement entre 4 et 6 heures). Que vous ayez de l’eau avec vous ne changera rien au résultat.
Attention : c’est une notion compliquée, hétérogène, qui n’a pas la même définition selon la région dans laquelle vous l’utilisez. De plus, depuis au moins un mois, le chiffre de 35°C est avancé un peu partout dans la presse française, alors que les dernières études montrent que la létalité adviendrait plutôt autour de 31°C.
Bien sûr, ce qui vient d’être dit est le cas pour les personnes en bonne santé. Vous pouvez avoir de graves problèmes de santé ou mourir avec une température humide moins importante. En effet, 28 degrés peuvent suffire, comme lors des canicules européennes et russes de 2003 et 2010 qui firent des dizaines de milliers de morts.
NB1 : L’humidex est également un calcul intéressant (à ne pas confondre avec le thermomètre humide qui est une mesure via un psychromètre.)
Le rôle de l’humidité sur l’inconfort lié à la chaleur.
L’indice humidex ne prend pas en compte l’exposition de la peau au soleil ni les vents qui pourraient aider à l’évaporation. Attention : c’est un calcul, et non une mesure.
Source : Méteo-Paris.com
NB2 : le GIEC utilise la notion de « Heat Index » (HI). Comme pour les canicules, le Heat Index diffère selon les zones géographiques (donc n’a pas une valeur internationale qui s’appliquerait partout). On retrouve dans le chapitre 12 du dernier rapport du GIEC une illustration des zones à risque, où nous retrouvons l’Inde et le Pakistan :
(a-c) Nombre moyen de jours par an où la température maximale dépasse 35°C ;
(d-f) Nombre moyen de jours par an où l’indice de chaleur NOAA (HI) dépasse 41°C.
Source : Chapitre 12, AR6 WG1
Conséquence 2 : le travail… et la santé
Le marché du travail indien est très loin d’être adapté aux aléas climatiques présents et à venir. Sophie Landrin, correspondante pour le Monde en Inde, apporte quelques précisions sur les travailleurs lors de la canicule :
« Au contraire, les gens continuent de travailler, malgré les conditions extrêmes, car la majorité des travailleurs ne sont pas salariés. Ils appartiennent à ce qu’on appelle le « secteur informel », sans assurance, sans contrat de travail. S’ils ne travaillent pas, ils ne sont pas indemnisés. Lors des première et deuxième vagues de Covid-19, ils avaient dû regagner leur village, malgré l’arrêt des transports, car ils ne pouvaient plus travailler, ni se loger ou se nourrir ».
Traduisez : travaillez, ou vous n’aurez pas d’argent pour acheter votre nourriture. Travaillez, ou mourrez. Ce sont dans ces conditions que des dizaines de millions d’indiens vont travailler dans les usines, dans le bâtiment, dans les champs, etc. Ils ne peuvent pas non plus compter sur la climatisation : environ 12% de la population a accès à la climatisation, en très grande majorité les plus aisés.
Deux conséquences majeures à cela. La première, c’est que l’Inde perd plus de 100 milliards d’heures de travail par an à cause des vagues de chaleur. C’est de très loin le pays le plus concerné par le sujet, et les chiffres anticipés par un réchauffement de +2°C ou +4°C sont vertigineux.
Les dix pays présentant les pertes de main-d’œuvre les plus importantes au cours de la journée de travail de 12 heures en raison de l’exposition à la chaleur, pondérées par la population en âge de travailler dans les industries de travaux lourds en plein air dans le présent (a moyenne 2001-2020), et avec +1 °C, +2 °C et +4 °C de réchauffement climatique supplémentaire (b-d, ΔT global).
La somme globale de la main-d’œuvre perdue (somme des 163 pays dont les données sont disponibles) est indiquée au-dessus de chaque graphique, les chiffres autour du centre du cercle indiquent les pertes individuelles par pays, et l’épaisseur du cercle augmente à mesure que la somme globale de la main-d’œuvre perdue augmente avec le réchauffement.
Toutes les unités sont exprimées en milliards d’heures/an.
Source : Increased labor losses and decreased adaptation potential in a warmer world
La deuxième conséquence est bien sûr la santé des travailleurs et travailleuses. Quand vous êtes obligé(e) de travailler sous 45°C car vous n’avez pas le choix, cela vient irrémédiablement avec des effets sanitaires immédiats multiples : hyperthermie, coups de chaleur, déshydratation, diminution de la capacité cognitive, accidents, troubles psychiatriques, etc. Pour les personnes qui auront la chance de pouvoir aller à l’hôpital, il faudra ensuite espérer que les hôpitaux puissent anticiper et supporter le recours accru aux soins.
Conséquence 3 : l’agriculture
L’agriculture est l’un des secteurs les plus directement touchés par les canicules et les sécheresses. 39% de la population pakistanaise travaille dans le secteur, pour 18.5% du PIB. En Inde, plus de la moitié de la population y travaille, pour environ 23% du PIB. Outre les conséquences que ces canicules peuvent avoir sur le PIB, ce sont surtout les effets sur les cultures qui sont à craindre, dans une région du monde où beaucoup dépendent de la récolte de blé pour se nourrir. Selon les témoignages, nous trouvons des agriculteurs qui ont perdu entre 10 et 50% de leur récolte à cause de la canicule.
Alors que les autorités indiennes avait déclaré lors du mois d’avril que le pays n’était pas au bord de l’insécurité alimentaire, le discours a totalement changé ce samedi 14 mai : « l’Inde a interdit les exportations de blé sur lesquelles le monde comptait pour atténuer les contraintes d’approvisionnement provoquées par la guerre en Ukraine, affirmant que la sécurité alimentaire du pays est menacée ».
Javier Blas, spécialiste des matières premières chez Bloomberg, anticipe une forte inflation : « avant l’interdiction d’exporter, l’Inde devait figurer parmi les 10 premiers exportateurs de blé pour la saison 2022-23. La suppression de tout (ou partie) des exportations de blé prévues par l’Inde crée un trou massif dans l’offre et la demande mondiales. Les prix du blé vont encore augmenter, et rapidement«
L’Inde figure parmi les 10 plus gros exportateurs de blé au monde pour la saison à venir.
Crédit : Javier Blas
Ces annonces, bien que soumises à conditions, rappellent qu’une décision politique peut mettre un terme à des exportations… et donc des importations d’autres pays. Des décennies de mondialisation n’ont pas préparé les pays à supporter les aléas climatiques et leurs conséquences. Que se passera-t-il si aucune décision n’est prise pour renforcer la sécurité alimentaire des pays et que le monde se réchauffe à +1.5°C, 2°C, voire 3°C ?
Conséquence 4 : relance de la production de charbon ou blackout
L’une des solutions les plus courantes pour supporter la chaleur de la canicule est d’allumer la climatisation. Mais cela n’est pas sans conséquences, surtout dans un pays comme l’Inde. Presque 80% du mix électrique vient d’énergies fossiles, et un peu plus de 70% du charbon. Les autorités n’ayant pas anticipé que les vagues de chaleur allaient durer aussi longtemps, la forte demande d’électricité a épuisé les stocks de charbon et les coupures de courant sont très fréquentes depuis deux mois dans le pays, parfois pour plusieurs heures. Nous ne parlons pas de quelques foyers, mais de deux tiers des foyers, soit des centaines de millions de personnes.
A gauche, la production électrique annuelle en Inde (en TWh). A droite, le mix électrique par énergie en %.
Source : OurWorldInData.org
Pour répondre à l’explosion de la demande d’électricité, Coal India a relancé la production à des niveaux records. Si vous avez l’image d’un serpent qui se mort la queue en tête, c’est tout à fait normal. C’est ce qu’il se passe quand on gère en catastrophe et sans planification un système électrique et plus globalement un système énergétique. On prend des décisions en urgence qui peuvent potentiellement venir aggraver le changement climatique et donc amplifier les aléas et les catastrophes climatiques.
Conséquence 5 : les effets combinés
L’un des risques identifié de la poursuite du réchauffement climatique, c’est que chaque région pourrait subir de façon différenciée plus d’évènements climatiques extrêmes, parfois combinés, et avec des conséquences multiples. Cela a plus de chance d’arriver avec un réchauffement à +2°C que 1,5°C (et d’autant plus avec des niveaux de réchauffement supplémentaires). Traduisez « combinés » par ‘plusieurs en même temps’ (canicule, suivi de mégafeux par exemple, comme au Canada en juin 2021).
Il est arrivé plusieurs cas similaires au Pakistan depuis deux mois. Avec la canicule, les glaciers fondent beaucoup plus vite que prévu et peuvent mener à des effets en cascade. C’est ce qu’il s’est passé avec plusieurs ruptures de lacs glaciaires, dont celui qui était sur le glacier Shisper.
C’est une zone surveillée par les scientifiques car ces inondations brutales peuvent non seulement avoir des conséquences économiques et sociales, mais aussi mortelles, avec des milliers de personnes risquant d’être prises dans des crues.
L’une des autres conséquences est l’augmentation du nombre de mégafeux. Selon le Forest Survey of India, les dernières années ont observé une augmentation du nombre de mégafeux, et 2022 ne fera pas exception. Ces feux ont provoqué des dizaines d’incendies agricoles, où les cultures de blé ont été détruites. Une partie des forêts de la fameuse « compensation carbone » sont également parties en fumée dans le nord du pays. Un bon rappel pour les entreprises et Etats qui souhaitent ne rien changer et planter des arbres pour compenser : cela ne suffira pas.
Est-ce que c’est de la faute du changement climatique ?
La question qui revient toujours : est-ce la faute du changement climatique ? En lisant les réactions depuis plus d’un mois, la mauvaise nouvelle c’est qu’il y a des climatosceptiques dans tous les pays qui viennent vous expliquer que cela n’a rien à voir et que des canicules et des sécheresses, il y en a toujours eu.
L’équipe du World Weather Attribution (WWA) devrait rendre son rapport définitif dans les deux semaines pour savoir si les canicules sont bien la conséquence du changement climatique anthropique. Mais que cela soit attribué de façon certaine ou non, nous savons qu’il y a déjà un réchauffement climatique d’origine humaine qui rend les canicules plus fréquentes et plus intenses. Cela ne fait aucun doute, c’est documenté dans plusieurs rapports, dont le dernier rapport du GIEC.
A quel point ces canicules ont été mortelles ?
C’est la question la plus difficile qui soit sur le sujet des canicules : à quel point sont-elles mortelles. Tout d’abord, il est important de se rappeler que la météorologie d’une vague de chaleur ne détermine pas son impact. De nombreux facteurs socio-économiques influenceront les perturbations causées par une canicule, notamment la densité de population, les conditions de logement et les systèmes d’alerte précoce.
A l’instar de la canicule de 2003 en France, cela peut prendre des années avant d’avoir une estimation finale et fiable. C’est d’autant plus le cas pour des pays comme l’Inde et le Pakistan, où nous manquons de chiffres officiels pour évaluer le nombre de morts. Concernant la fiabilité des annonces du gouvernement indien, je n’ai personnellement pas une très grande confiance. Un exemple ? L’Organisation mondiale de la santé estime qu’au moins 4 millions d’Indiens sont morts de la Covid, bien au-delà du chiffre officiel d’un peu moins de 524 000 morts. Sans surprise, le gouvernement de Modi conteste ces chiffres…
Dans le cas des canicules actuelles, il est extrêmement difficile d’obtenir des chiffres fiables. Le gouvernement indien a officiellement reconnu une dizaine de morts, certains journaux indiens des dizaines, la presse internationale entre quelques dizaines et centaines… et parfois sans aucune source !
Autre difficulté à prendre compte : l’Inde ne compte parmi les décès dus aux coups de chaleur que les décès médicalement certifiés.
Morts directement causées par une canicule en Inde, de 1970 à 2019
Source : Factly, Envistats 2022
Même si la dernière décennie a enregistré un nombre records de morts à cause des canicules, il y a tout de même une meilleure gestion des canicules depuis 2015 (plus de 2000 morts), ce qui vient atténuer le nombre potentiels de morts. Mais cela ne veut absolument rien dire de l’avenir, et le nombre de morts dépendra grandement des actions prises par le gouvernement indien en termes de prévention et d’adaptation aux canicules.
L’Inde pourra-t-elle toujours s’adapter aux canicules à venir ?
Avant de conclure, il est intéressant de voir ce à quoi l’Inde peut s’attendre, en fonction du réchauffement mondial à venir.
Premièrement, l’Inde n’est qu’à +1 degré de réchauffement aujourd’hui (+1.1°C à l’échelle mondiale, +1.8°C pour la France). Sur la trajectoire actuelle de nos émissions (SSP2-4.5), l’Inde se dirige vers un réchauffement d’environ 3,5°C d’ici la fin du siècle, et environ +2°C d’ici 2040.
Source : BerkeleyEarth.org
Sauf miracle, la Terre va continuer à se réchauffer lors des (au moins) deux prochaines décennies. Dans la mesure où les canicules actuelles testent déjà les limites physiologiques des Indiens et Pakistanais, il sera important de suivre les décisions politiques d’atténuation et d’adaptation aux aléas climatiques. Les décisions prises aujourd’hui par les deux gouvernements ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Il est cependant important de se souvenir que l’Inde et le Pakistan payent les décisions égoïstes des pays du Nord, qui sont historiquement responsables du changement climatique. Le GIEC l’a rappelé dans le 2e volet sur l’adaptation : « Les limites « strictes » de l’adaptation ont été atteintes dans certains écosystèmes (confiance élevée). Avec l’augmentation du réchauffement climatique, les pertes et les dommages vont augmenter et d’autres systèmes humains et naturels atteindront les limites de l’adaptation (confiance élevée)« . En d’autres termes : des populations ne pourront plus s’adapter, et devront migrer, ou mourir.
Carte exprimant les différentes vulnérabilités, basées sur les moyennes nationales. Cette carte ne montre pas les différences à l’échelle locale. C’est pourquoi vous retrouvez sous la carte quelques exemples de populations vulnérables.
Source : Figure TS.7 du 6eme rapport du GIEC, groupe 2
Le mot de la fin
On ne peut être plus clair que Christophe Cassou, auteur principal du dernier rapport du GIEC, lorsqu’il déclare que « nous vivons un avant-goût de notre futur climatique. Pour que l’exceptionnel ne devienne pas la norme, il faut réduire nos émissions de gaz a effet de serre de manière immédiate, soutenue dans le temps et dans tous les secteurs… Pas dans 3 ans, maintenant !«
En plus de la baisse des émissions, l’adaptation jouera un rôle absolument central lors des prochaines années et décennies à venir. Il est trop tard pour penser que l’atténuation des émissions puisse suffire. Mais cela ne doit pas faire oublier le très fort sentiment d’injustice climatique de ce qui arrive actuellement en Inde et au Pakistan. C’est ce que rappelle Chandni Singh , autrice principale du dernier rapport du GIEC : « les émetteurs historiques de gaz à effet de serre doivent redoubler d’efforts car, dans des pays comme l’Inde et le Pakistan, nous atteignons réellement les limites de l’adaptation à la chaleur« . Rappelons que l’Inde représente à peine 3% des émissions historiques, et le Pakistan moins d’1%. Ces pays payent et paieront entre autres les excès des pays du Nord, ainsi que les décisions égoïstes et socialement injustes de leurs dirigeants respectifs.
J’aimerais conclure cet article par une question. Je n’ai pas l’impression qu’une majorité de Françaises et Français se rendent compte que nous sommes en train de rendre des régions du monde d’ores et déjà inhabitables, alors que nous ne sommes qu’à +1.1°C de réchauffement mondial. Voulez-vous vraiment voir à quoi ressemble un monde à +2°C ?
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